LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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M. [U] [M],
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLÉANS, chambre correctionnelle, en date du 10 novembre 2015, qui, pour dénonciation calomnieuse, l'a condamné à 3 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 28 février 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller RICARD, les observations de la société civile professionnelle BOULLOCHE, de la société civile professionnelle DELVOLVÉ et TRICHET, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. [U] [M], président de la société BPBM, a adressé au procureur de la République une plainte à l'encontre de M. [L] [R], huissier de justice et de la société civile professionnelle (SCP) [R], des chefs de faux et abus de pouvoir, contestant la véracité des termes d'une signification d'injonction de payer à la société BPBM, prise en la qualité de son représentant légal, à laquelle il avait été procédée le 16 mai 2012 à [Localité 1] (Loiret) ; que cette plainte a fait l'objet d'une décision de classement sans suite ; que M. [R] et la SCP [R] ont fait citer M. [M] et la société BPBM devant le tribunal correctionnel des chefs de dénonciation calomnieuse, subornation de témoin et usage de faux ; que le tribunal, ayant rejeté l'exception de nullité visant cette citation, a renvoyé M. [M] des fins de la poursuite des chefs de subornation de témoin et usage de faux, a relaxé la société BPBM, a déclaré M. [M] coupable de dénonciation calomnieuse et l'a condamné à verser 1 000 euros à M. [R] à titre de dommages-intérêts ; que le prévenu, ainsi que le procureur de la République, ont relevé appel de cette décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 388, 555, 802, 591, 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité et confirmé le jugement sur la déclaration de culpabilité ;
"aux motifs que la citation délivrée le 10 avril 2014 à la requête de M. [L] [R] et de la SCP [R] non seulement comporte l'ensemble des mentions exigées par l'article 551 précité, que la cour a scrupuleusement vérifiées, sans qu'il soit utile de les reprendre en détail, mais en outre, instruit parfaitement sur les faits reprochés au prévenu longuement exposés en fait et qualifiés en droit, et les textes de loi qui les répriment ; que cette citation n'installant aucun doute sur la nature exacte des faits reprochés à M. [M] et la qualité en laquelle il est poursuivi, c‘est à bon droit que les premiers juges, par des motifs pertinents que la cour adopte, ont écarté le moyen de nullité soulevé, relevant en outre que la production par l'avocat du prévenu d'une solide argumentation de fond achève de démontrer l'inexistence d'un quelconque grief qui les auraient privés de leurs droits ; que c'est tout aussi vainement que la cour, saisie par voie de conclusions du même moyen, cherche quel grief aurait subi M. [M], au sens de l'article 802 du code de procédure pénale, alors qu'il est fait état par la partie civile de faits précis, tombant sous le coup d'une qualification pénale clairement énoncée, que les pièces dont il est fait mention dans cette citation ont été jointes à l'acte de poursuite et que dans ces conditions, le prévenu a été amplement instruit des raisons du procès et a disposé dès la saisine de la juridiction répressive de l'ensemble des éléments nécessaires à la préparation de sa défense, auxquels il n'a rien été ajouté ni retranché ;
"et aux motifs, adoptés du jugement, que la citation délivrée par la partie civile aux deux prévenus est suffisamment développée en droit et en fait et est correctement libellée quant aux textes répressifs pour permettre à la défense l'exercice de la plénitude de ses droits ; que le contenu de la citation est par ailleurs univoque et clair pour délimiter les infractions que les parties civiles imputent à chacun des deux prévenus ;
"alors que dans ses conclusions d'appel, M. [M] faisait valoir que la citation directe délivrée par M. [R] et la SCP [R] était imprécise, dès lors qu'elle ne désignait pas en quelle qualité il était poursuivi, soit en son nom personnel, soit en sa qualité de dirigeant de la SAS BPBM ; qu'en se bornant, pour écarter l'exception de nullité de la citation, à affirmer péremptoirement que la citation n'installait aucun doute sur la nature exacte des faits reprochés à M. [M] et la qualité en laquelle il était poursuivi, sans répondre de manière plus explicite aux conclusions d'appel du prévenu, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la citation tirée de l'absence de précision de l'identité de la personne citée devant la juridiction de jugement, l'arrêt retient que ladite citation, comporte l'ensemble des mentions exigées par la loi, expose les faits reprochés et les qualifie en droit, de sorte qu'elle n'installe aucun doute sur la nature exacte des faits imputés au prévenu et la qualité en laquelle il a été poursuivi ; que les juges ajoutent que le prévenu a été amplement instruit des raisons du procès et a disposé, dès la saisine de la juridiction répressive, de la totalité des éléments nécessaires à la préparation de sa défense, notamment par la précision, figurant à la citation, de la liste des pièces que la partie civile a entendu produire ; qu'ils relèvent que M. [M] ne fait état d'aucun grief subi de par l'imprécision alléguée de cette citation ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors qu'il ne résulte
des mentions de la citation aucune ambiguïté sur l'identité de la personne
physique citée devant le tribunal correctionnel, la cour d'appel a justifié sa
décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 226-10, 441-1 du code pénal, 1315, 1351 du code civil, 654, 655, 656, 658 du code de procédure civile, 591, 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe selon lequel « nul ne peut se constituer de preuve à soi-même » ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. [M] coupable de dénonciation calomnieuse, l'a condamné à une amende de 3 000 euros et a prononcé sur les intérêts civils ;
"aux motifs qu'en matière de dénonciation calomnieuse, lorsque les faits dénoncés n'ont donné lieu à aucune poursuite, c'est à la partie poursuivante qu'incombe la charge de la preuve de la fausseté des faits dénoncés et non au prévenu à faire la preuve de la pertinence de ce qu'il a spontanément dénoncé ; qu'il est constant par conséquent que le classement sans suite de la plainte déposée le 21 mars 2013 par M. [M] entre les mains du procureur de la République d'[Localité 2] n'est pas propre à établir la fausseté des faits dénoncés et qu'il appartient donc à la juridiction saisie d'apprécier la pertinence des accusations portées par la personne à qui la dénonciation calomnieuse est reprochée ; qu'en l'espèce, la plainte adressée par M. [M] le 21 mars 2013 au parquet d'[Localité 2] accusait M. [R] de faux et abus de pouvoir et visait à contester les mentions portées dans un procès-verbal de signification d'injonction de payer daté du 16 mai 2012, le prévenu certifiant que ce jour-là, l'huissier serait reparti sans lui laisser le moindre document ; qu'à cette plainte était jointe une attestation de Mme [C] ainsi libellée : « étant présente au bureau qui est également l'accueil situé au [Adresse 1] à [Localité 1], j'ai reçu le 16 mai 2012 une personne de l'étude de Maître [R]. Les documents à déposer étaient destinés à la SAS BPBM et n'ayant aucun pouvoir au sein de celle-ci, je suis allée chercher M. [M]. Après avoir présenté sa carte professionnelle à M. [M], il a pris bonne note du fait que le siège social de la SAS BPBM était sur [Localité 3] et est reparti sans rien remettre à M. [M]. Il m'est facile de me souvenir de cette situation car j'ai déjà reçu un huissier pour l'entreprise [M] et il laisse toujours un document » ; que s'il est exact que M. [M] a été relaxé du chef d'usage de faux, cette relaxe est sans incidence sur l'analyse des éléments constitutifs du délit de dénonciation calomnieuse dont la cour est saisie, Mme [C] n'ayant effectivement constaté que des faits auxquels elle avait personnellement assisté, à savoir la venue le 16 mai 2012 d'un clerc de l'étude de M. [R] sur le site de [Localité 1] et le fait que ce dernier serait reparti sans laisser de document ; que les mentions figurant dans l'acte de signification du 16 mai 2012 remis par le clerc de l'étude [R] font toutefois apparaître que ce dernier a instruit M. [M] de la raison de sa venue, à savoir la signification à la SAS BPBM Battitek 3000 domiciliée [Adresse 2] à [Localité 3], d'une ordonnance d'injonction de payer, portée à la connaissance de M. [M] au [Adresse 1] à [Localité 1] (« en son établissement où exerce son président »), que cette signification a été faite à personne morale, à M. [M], « gérant rencontré à [Localité 1] », et qu'en marge de la feuille de signification figure la mention « après avoir présenté ma carte professionnelle, M. [M] ainsi déclaré, m'a confirmé être le représentant légal de la société destinataire de l'acte » ; que M. [M] a ensuite été destinataire de l'avis de signification par lettre simple, ce qu'il conteste tout autant ; que force est de constater cependant que les énonciations figurant dans l'acte de signification du 16 mai 2012 n'ont donné lieu à aucune procédure d'inscription de faux ; qu'en outre, la plainte adressée au procureur de la République mentionnait que M. [M] n'avait jamais rencontré M. [R] au cours de l'année 2012, avant d'indiquer qu'une personne de l'étude de M. [R] s'était présentée « un soir du mois de mai 2012 » au [Adresse 1] à [Localité 1] et qu'après présentation de sa carte professionnelle, elle l'aurait informé avoir des éléments à lui remettre concernant la SAS BPBM, avant de repartir après avoir appris que le siège social de cette société était situé à [Localité 3] ; qu'il ressort cependant des pièces annexées à la citation que c'est sur la foi d'informations recueillies par Me [T], huissier de justice à Paris - qui, le 19 et le 22 mars 2012, avait tenté de signifier à SAS BPBM, domiciliée au [Adresse 2] à [Localité 3], l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 27 février 2012 par le tribunal correctionnel de Paris, avant de dresser un procès-verbal de perquisition le 13 avril 2012 ; que l'étude de Me [R], en la personne de M. [E], premier clerc, s'est déplacée au [Adresse 1] à [Localité 1] pour procéder à la signification, le 16 mai 2012, de la même ordonnance, de sorte qu'il est peu crédible de prétendre que le clerc d'huissier, déjà instruit des renseignements émanant de son confrère parisien, serait reparti après avoir pris acte de ce que le siège de la société BPBM était situé au [Adresse 2] à [Localité 3] où devait être effectuée cette signification (diligence qui avait déjà été effectuée) ; que plusieurs documents établis à l'en-tête de la SAS BPBM mais également l'extrait Kbis de cette société daté du 22 avril 2014, donc postérieur à la signification querellée, font mention de l'adresse de [Localité 1] sans aucune référence à l'adresse parisienne, où cette société était d'ailleurs inconnue ; qu'il ressort encore des pièces du dossier que par acte du 28 septembre 2012, la SAS BPBM, exerçant sous l'enseigne Battitek 3000, a saisi le juge de l'exécution de [Localité 3] afin de contester la procédure de saisie attribution dirigée à son encontre par l'étude [R] suivant acte du 24 août 2012, dénoncé le 30 août 2012, et qu'elle visait à cette occasion la signification que M. [M] affirmait ne pas avoir reçue, alors qu'à ce stade de la procédure, si tel avait été le cas, la SAS BPBM et a fortiori son représentant légal, auraient dû en ignorer l'existence ; qu'enfin, la signification effectuée le 19 juillet 2012 ne constitue par une nouvelle signification venant pallier la carence de celle délivrée le 16 mai 2012, et accréditer le fait que l'étude [R] elle-même aurait douté de la validité de l'acte de signification du 16 mai 2012, mais l'acte de signification de l'ordonnance d'injonction de payer exécutoire et commandement de payer aux fins de saisie vente qui ne constitue en aucun cas une nouvelle signification ; que la signification faite le 16 mai 2012 au gérant de la SAS BPBM à [Localité 1] était en effet une signification à personne et le clerc assermenté de l'étude a porté sur cet acte toutes les mentions nécessaires, figurant également sur la copie nécessairement remise à M. [M] ; qu'il est ainsi démontré que M. [M], recherché en sa qualité de représentant légal de la SAS BPBM , avait parfaitement connaissance de l'acte de signification du 16 mai 2012 qui constituait une signification à personne, qu'il a usé de tous les artifices pour laisser accroire que l'étude [R] s'était rendue coupable ni plus ni moins d'un faux dans un acte authentique tombant sous le coup des dispositions de l'article 441-4 du code pénal, à seule fin d'échapper à ses responsabilités alors que la SAS BPBM dont il est le représentant légal, était recherchée en tant que débitrice en vertu d'une ordonnance d'injonction de payer exécutoire ; qu'il a ensuite déposé plainte entre les mains du procureur de la République d'Orléans, le 21 mars 2013, contre l'étude [R] pour « faux dans l'exercice de sa fonction, abus de pouvoir étant donné l'absence de signification des pièces qui ont été déposées, par contre, à mon insu, auprès du tribunal de commerce dans l'affaire pendante » ; que ces faits, d'une particulière gravité, recèlent l'imputation de faits précis ; qu'ils ont été dénoncés à une autorité qui avait le pouvoir d'y donner des suites pénales et M. [R] a du reste été contraint de s'en expliquer en détail auprès du procureur de la République d'[Localité 2] dans un courrier daté du 26 mars 2013 ; que bien plus, M. [M] a fait état de cette plainte devant le tribunal de commerce d'Orléans, conduisant cette juridiction à s'interroger sur la validité de l'acte de signification de l'ordonnance d'injonction de payer, la décision rendue le 14 juin 2013 par la juridiction consulaire faisant en outre clairement état de la plainte pour faux déposée contre M. [R] ; que toutefois, le délit de dénonciation calomnieuse constituant une infraction instantanée, consommée au jour de la dénonciation, il y a lieu, lorsque la preuve de la fausseté des faits dénoncés est établie, de rechercher si l'auteur des faits dénoncés en connaissait la fausseté au moment de la dénonciation et s'il a agi de mauvaise foi, laquelle se distingue de l'intention de nuire, étant observé que la personne recherchée pour dénonciation calomnieuse n'a pas à faire la preuve de sa bonne foi ; qu'en l'espèce, M. [M] savait pertinemment que les faits qu'il dénonçait étaient faux ainsi que le démontre la chronologie de la présente affaire ci-dessus exposée, et notamment le contenu de l'assignation devant le juge de l'exécution du 28 septembre 2012, et il ne pouvait ignorer qu'en dénonçant de tels faits au procureur de la République, il susciterait une enquête ou à tout le moins des vérifications concernant la probité de l'étude [R] à l'occasion de son exercice professionnel ; que ces éléments signent l'intention coupable de M. [M] ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges, dont la décision doit être confirmée, ont déclaré M. [M] coupable de dénonciation calomnieuse ;
"1°) alors que c'est à la partie poursuivante des faits de dénonciation calomnieuse qu'incombe la charge de la preuve de la fausseté des faits dénoncés ; qu'en l'occurrence, il appartenait donc à l'huissier de démontrer qu'il avait effectivement effectué une signification à personne, savoir qu'il avait remis en mains propres le 16 mai 2012 à M. [M], représentant légal de la SAS BPBM, copie de l'injonction de payer ; que sauf à permettre au débiteur de se constituer une preuve à soi même, la preuve de la remise de l'acte, qui ne portait aucune signature de son destinataire, ne pouvait résulter des seules affirmations de l'huissier contenues dans cet acte, d'autant qu'celle étaient contredites par des témoignages affirmant qu'aucune remise n'était intervenue ; qu'en estimant cependant, pour déclarer M. [M] coupable de dénonciation calomnieuse, que la signification faite le 16 mai 2012 au gérant de la SAS BPBM à [Localité 1] était une signification à personne, dès lors que le clerc assermenté de l'étude avait porté sur cet acte toutes les mentions nécessaires, figurant également sur la copie nécessairement remise à M. [M], la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés ;
"2°) alors que le juge ne peut statuer par des motifs hypothétiques ; que pour retenir la culpabilité de M. [M] du chef de dénonciation calomnieuse, la cour a retenu, d'une part, qu'il était peu crédible de prétendre que le clerc d'huissier, déjà instruit des renseignements émanant de son confrère parisien, serait reparti, après avoir pris acte de ce que le siège de la société BPBM était situé au [Adresse 2] à [Localité 3] où devait être effectuée cette signification, et, d'autre part, qu'une copie de la signification faite le 16 mai 2012 au gérant de la société BPBM à [Localité 1] avait nécessairement été remise à M. [M] ; qu'en statuant ainsi par des motifs hypothétiques, la cour d'appel a violé les textes cités au moyen ;
"3°) alors que M. [M] avait dénoncé comme faux le fait que la SCP [R] ait délivré le 16 mai 2012, à personne, l'acte portant injonction de payer, et avait produit l'attestation de son assistante indiquant que le 16 mai 2012, l'huissier de la SCP [R] qui s'était présenté à [Localité 1] n'avait remis aucun document ; qu'en refusant de prendre en compte cette attestation aux motifs que s'il était exact que M. [M] avait été relaxé du chef d'usage de faux, cette relaxe était sans incidence sur l'analyse des éléments constitutifs du délit de dénonciation calomnieuse dont la cour est saisie, Mme [C] n'ayant effectivement constaté que des faits auxquels elle avait personnellement assisté, à savoir la venue le 16 mai 2012 d'un clerc de l'étude de M. [R] sur le site de [Localité 1] et le fait que ce dernier serait reparti sans laisser de document, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et violé les textes susvisés ;
"4°) alors que M. [M] a été définitivement relaxé des chefs de subornation de témoins, en ce qu'il aurait incité sa collaboratrice à faire une attestation mensongère quant à l'absence de délivrance de tout acte par la SCP [R] le 16 mai 2012, et d'usage de faux, en ce qu'il aurait utilisé cette fausse attestation ; que doit donc être tenue pour exacte l'attestation de Mme [C] selon laquelle un clerc de la SCP [R] s'était déplacé le 16 mai 2012 sur le site de [Localité 1] et était reparti sans laisser de document ; qu'en refusant de prendre en considération l'attestation de Mme [C] et en décidant que l'huissier de justice qui s'était déplacé sur le site de [Localité 1] le 16 mai 2012 avait nécessairement remis à la personne de M. [M] l'acte de signification, la cour d'appel a méconnu le principe de l'autorité de la chose jugée et violé les textes visés au moyen ;
"5°) alors qu'en toute hypothèse, en admettant que les faits relatés par Mme [C] ne pouvaient être tenus pour inexacts, d'où il suivait que l'huissier n'avait pas remis d'acte le 16 mai 2012 à M. [M], et en considérant cependant que ce dernier s'était rendu coupable de dénonciation calomnieuse en dénonçant les mêmes faits, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé les textes susvisés" ;
Attendu que, pour déclarer M. [M] coupable de dénonciation calomnieuse, l'arrêt retient notamment que, si la plainte déposée par celui-ci a eu pour objet de nier toute véracité aux mentions portées à la feuille de signification d'injonction de payer en cause, le prévenu n'a pas usé de la procédure de l'inscription de faux à son encontre, seule voie ouverte afin de contester la sincérité des mentions relatant l'accomplissement des actes relevant du ministère de cet officier ministériel ; que les juges ajoutent que de précédents déplacements infructueux effectués par un huissier, afin de signifier cette même ordonnance au siège de la société BPBM à [Localité 3] s'opposent à l'allégation du prévenu de ce qu'il se serait borné à inviter le représentant de l'étude d'huissiers rencontré le 16 mai 2012 à [Localité 1] (Loiret) à présenter ladite signification au siège parisien de cette société ; que l'arrêt relève que la relaxe dont a bénéficié M. [M], lui-même, du chef d'usage de faux, de même que les déclarations de son assistante, ayant constaté la venue, le 16 mai 2012, d'un clerc de l'étude de M. [R] à l'établissement de [Localité 1] ainsi que le départ de ce dernier sans laisser de document, sont dépourvues de portée quant à la fausseté des faits dénoncés à l'encontre de l'huissier ; que les juges en déduisent qu'en portant plainte contre l'étude [R] pour faux dans l'exercice de sa fonction et abus de pouvoir, après avoir eu connaissance des mentions portées à l'acte de signification du 16 mai 2012, M. [M] a dénoncé à une autorité, qui avait le pouvoir d'y donner des suites pénales, des faits dont il avait connaissance de la fausseté ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel qui a, d'une part, caractérisé, la fausseté des faits dénoncés en ce qu'ils ne pouvaient revêtir la qualification pénale alléguée dans la plainte, d'autre part, apprécié souverainement, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, la mauvaise foi chez le dénonciateur, a justifié sa décision ;
D'ou il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2, 515, 591, 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué, après avoir déclaré M. [M] coupable de dénonciation calomnieuse, l'a condamné à payer à M. [R] une somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts ;
"aux motifs que les faits dont M. [M] est déclaré coupable engagent sa responsabilité civile et l'obligent à en réparer les conséquences dommageables, par application de l'article 1382 du code civil ; qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable la constitution de partie civile de M. [R], huissier de justice, a déclaré M. [M] entièrement responsable de son préjudice et l'a condamné à lui payer la somme de 500 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'il a lieu en revanche de l'infirmer en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts qui ne tiennent pas suffisamment compte du préjudice conséquent subi par M. [R], huissier de justice à [Localité 2], dont les compétences professionnelles, l'honnêteté et la probité ont été bafouées par la plainte de M. [M], dénonçant des faits graves, pénalement répréhensibles ; qu'en conséquence, M. [M] sera condamné à payer à M. [R] la somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice moral ; qu'il y a lieu de faire application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale au profit de la partie civile, contrainte de se défendre devant la cour sur l'appel interjeté par le prévenu ;
"alors que la cour d'appel qui n'est pas saisie d'un appel de la partie civile ne peut aggraver le sort du prévenu sur les intérêts civils ; que M. [R] n'a pas interjeté appel du jugement qui avait prononcé à son bénéfice une condamnation au paiement de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts ; qu'en infirmant le jugement et en condamnant M. [M] à payer à M. [R] des dommages-intérêts d'un montant de 2 500 euros, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés" ;
Vu l'article 515 du code de procédure pénale ;
Attendu que les juges du second degré, saisis des seuls appels
du ministère public et du prévenu, ne peuvent réformer au profit de la partie
civile, non appelante et intimée, un jugement auquel elle a tacitement acquiescé ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, déclaré coupable de dénonciation calomnieuse, M. [M] a été condamné à payer à M. [R] la somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que la partie civile n'était pas appelante des dispositions du jugement condamnant le prévenu
à lui payer la somme de 1 000 euros en réparation de ce préjudice, la cour
d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé, de la cour d'appel d'Orléans, en date du 10 novembre 2015, en ses seules dispositions ayant condamné M. [M] à payer à M. [R] la somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT que M. [M] devra payer à M. [R] la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Fixe à 1 500 euros la somme globale que M. [M] devra payer aux parties représentées par la société civile professionnelle Delvolvé - Trichet, avocat à la Cour, au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Orléans et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq avril deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.