LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme [L] a été engagée par la société Mer et terroir à compter du 14 avril 2008 en qualité de commerciale export statut cadre ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 25 octobre 2010 ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que pour écarter la qualification de faute grave et condamner l'employeur à verser à la salariée diverses sommes au titre de la rupture, l'arrêt retient que les deux fautes établies à l'encontre de la salariée justifient la rupture du contrat de travail et que l'employeur n'ayant diligenté une procédure de licenciement que le 6 octobre 2010 alors que les insultes ont été proférées le 8 septembre 2010, et ce sans procéder à une mise à pied conservatoire, il s'en déduit que les fautes reprochées ne présentaient pas à ses yeux un caractère de gravité justifiant une rupture immédiate du contrat de travail, que le licenciement sera donc requalifié en licenciement pour "faute" réelle et sérieuse ;
Attendu, cependant, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve contraire ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la salariée ait soutenu devant les juges du fond que l'employeur n'avait pas mis en oeuvre la procédure de licenciement dans un délai restreint après qu'il avait eu connaissance des faits invoqués, la cour d'appel, qui a relevé d'office ce moyen, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Mer et terroir à payer à Mme [L] les sommes de 9 000 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 900 euros de congés payés, 1 500 euros d'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 23 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne Mme [L] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Mer et terroir
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a condamné la société MER et TERROIR à verser à Mme [L] une indemnité de 22.886,44 euros au titre d'un rappel de salaires pour heures supplémentaires, ainsi qu'une indemnité de 2.288,64 euros au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE « s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que Mme [L] produit un tableau retraçant jour par jour ses horaires de travail et deux attestations ; que la première émane de Mme [L] [B], épouse du gérant (en instance de divorce au moment de son attestation) et salariée de l'entreprise ; qu'elle écrit que, de juin 2008 à février 2010, Mme [L] effectuait l'ouverture de l'entreprise à 7h30 et sa fermeture à 17h avec une pause d'une heure pour déjeuner et qu'elle effectuait la permanence du samedi matin de 8h à 11h ; qu'elle précise qu'à compter de mars 2010, son mari a confié la responsabilité de l'entreprise à Mme [L] car elle en avait tout à fait les compétences ; que Mme [G], alors salariée de l'entreprise atteste qu'elle n'a jamais vu Mme [L] quitter l'entreprise sans avoir fun son travail ; qu'elle a aussi évoqué de manière vague un possible travail de Mme [L] le dimanche puis s'est rétractée sur ce point dans une seconde attestation ; qu'en toute hypothèse, Mme [L] ne réclame que très ponctuellement (pour les périodes de fin d'année) un rappel de salaire pour des heures effectuées le dimanche ; que ce tableau et l'attestation de Mme [B] étayent la demande ; que la SARL Mer et Terroirs ne fournit aucun élément de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par la salariée alors même qu'un système de badgeage existait au moins en 2010 dans l'entreprise mais elle s'attache à démontrer le manque de crédibilité du tableau établi par Mme [L] ; qu'elle fait valoir qu' à plusieurs reprises, Mme [L] a noté des heures de travail alors qu'elle était en arrêt maladie ou en congés ; que les erreurs notées sont pour partie exactes ; qu'ainsi Mme [L] était effectivement en congés le 17/3/2010 et du 2 au 11/8/2010 alors qu'elle a noté ces jours-là des heures de travail ; qu'en revanche, elle a bien mentionné son absence du 25 au 30/5/2008 contrairement à ce qu'indique la SARL Mer et Terroirs et si elle a inexactement mentionné des heures de travail du 7 au 12/9/2009 alors qu'elle se trouvait en congés elle a en revanche noté une absence pour congés la semaine suivante du 14 au 19/9/2009 - alors qu'elle travaillait - ce qui établit une interversion de dates ; que les autres discordances vantées par la SARL Mer et Terroirs ne sont pas probantes ; qu'ainsi, le fait que Mme [L] ait noté "neige" les 6, 9 et 13/1/2010 sur un tableau de suivi des produits cuits ne démontre pas qu'elle aurait été absente ces jours-là ; que la SARL Mer et Terroirs conteste également le fait que Mme [L] ait pu travailler le samedi matin et indique que trois personnes se relayaient pour assurer cette permanence : Mme [C], Mme [P] et Mme [X] ; qu'elle produit l'attestation de Mme [C] qui écrit qu'elle même était "souvent présente le samedi matin à l'expédition" et atteste que "Mme [P] et [X] effectuaient régulièrement la permanence du samedi matin, en sachant qu'une seule personne suffit dans les bureaux" sans pour autant indiquer que Mme [L] n'effectuait pas de permanences ; que Mme [P], écrit, quant à elle, qu'un roulement s'effectuait pour ces permanences entre Mme [L], Mme [X] et elle-même ; que le tableau censé constituer un relevé des heures de Mme [P] produit par la SARL Mer et Terroirs mentionne toutefois des heures de travail un samedi sur deux ce qui ne correspond pas à l'attestation de cette dernière ; qu'enfin, Mme [X] indique qu'elle effectue "seule le travail administratif du samedi matin depuis le..." - la date a été laissée en blanc par l'attestante -, ce qui ne permet pas de retenir que tel aurait été le cas pendant la période d'activité de Mme [L], ce que d'ailleurs ne corrobore aucune des attestations versées ; que la SARL Mer et Terroirs produit des attestations indiquant qu'il arrivait à Mme [L] de s'absenter pendant ses heures de travail pour vaquer à des occupations personnelles ; que Mme [X] indique que Mme [L] avait l'habitude de partir vers 15h30/16h et sortait régulièrement déjeuner entre 12h et 14h ; que M. [E] et Mme [P] écrivent avoir rarement vu Mme [L] finir après 16h, lors de sa dernière année dans l'entreprise précise M. [E], c'est alors Mme [X] qui restait jusqu'à 17h ; que celle-ci confirme qu'elle effectuait la fermeture de l'entreprise mais a laissé en blanc la date à compter de laquelle cette tâche lui a incombé ; que ces critiques ne permettent pas de retenir toutes les heures indiquées par Mme [L] ; qu'ainsi en ce qui concerne les heures majorées à 50 % essentiellement générées - sauf en fin d'année - à raison d'un travail le samedi matin, doivent être réduites des deux tiers - hormis pour la période de fin d'année - car la salariée s'avère n'avoir assuré une permanence qu'un samedi sur trois ; qu'il convient également, compte tenu des attestations concordantes de M. [E] et Mme [P], de retenir que Mme [L] n'a, en 2010, travaillé généralement que jusqu'à 16h ce qui conduit à diminuer son horaire hebdomadaire de 5h ; que les périodes d'absence oubliées par Mme [L] dans son tableaux seront en outre déduites ; que compte tenu de ces éléments il sera retenu l'exécution : - en 2008, de 243,5 h majorées à 25 % et 149,5 h majorées à 50 % générant un rappel de 9.380,52 € (et non 10.884,93 €) compte tenu du taux horaire de 17,749 € alors applicable, - en 2009, de 351 h (et non 353 h) majorées à 25 % et 135 h majorées à 50 % soit 11.379,35 € (et non 14.654,22 €) compte tenu du taux horaire de 17,749 € alors applicable, - en 2010, de 91,5 h majorées à 25 % soit 2.126,57 € (et non 6.890,20 €) compte tenu du taux horaire de 18,593 € alors applicable, soit un total de 22.886,44 € auxquels s'ajoutent 2288,64 € au titre des congés payés afférents » (arrêt, p. 2-4) ;
ALORS QUE, premièrement, la qualification d'heure supplémentaire suppose que le salarié occupe effectivement la totalité de ses heures de travail à son activité professionnelle ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont eux-mêmes constaté que Mme [L] occupait une partie importante de son temps de travail à consulter des sites Internet sans relation avec son activité professionnelle ; qu'en s'abstenant néanmoins de tenir compte de ces heures de connexion dans le calcul du nombre d'heures effectivement travaillées et de celles entrant dans le compte des heures supplémentaires, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 3121-1 du code du travail ;
ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, la société MER et TERROIR faisait valoir que Mme [L], non seulement quittait son travail à 15 ou 16 heures au lieu de 17 heures, mais occupait également une partie de ses heures de travail à des occupations personnelles en consultant des sites Internet sans rapport avec son activité professionnelle ou en discutant au moyen de logiciels messageries instantanées (conclusions du 2 juillet 2015, p. 16, al. 3) ; qu'en se bornant à retenir, pour fixer le nombre d'heures travaillées par Mme [L], que celle-ci ne travaillait en effet que jusqu'à 16 heures, sans vérifier, comme il lui était demandé, si elle n'occupait pas une partie des précédentes heures de sa journée à vaquer à des occupations personnelles sur Internet ou sur des messageries instantanées, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-1 du code du travail.
ET ALORS QUE, troisièmement, les juges du fond ont eux-mêmes observé que la société MER et TERROIR produisait des attestations indiquant qu'il arrivait à Mme [L] de s'absenter pendant ses heures de travail pour vaquer à des occupations personnelles (arrêt, p. 4, al. 2) ; qu'en s'abstenant néanmoins de s'expliquer sur cette circonstance, quand celle-ci était elle aussi de nature à modifier le décompte des heures effectivement travaillées par Mme [L] et celui de ses heures supplémentaires, la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-1 du code du travail.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a condamné la société MER et TERROIR à verser à Mme [L] une indemnité de 18.000 euros pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS D'ABORD QUE « s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que Mme [L] produit un tableau retraçant jour par jour ses horaires de travail et deux attestations ; que la première émane de Mme [L] [B], épouse du gérant (en instance de divorce au moment de son attestation) et salariée de l'entreprise ; qu'elle écrit que, de juin 2008 à février 2010, Mme [L] effectuait l'ouverture de l'entreprise à 7h30 et sa fermeture à 17h avec une pause d'une heure pour déjeuner et qu'elle effectuait la permanence du samedi matin de 8h à 11h ; qu'elle précise qu'à compter de mars 2010, son mari a confié la responsabilité de l'entreprise à Mme [L] car elle en avait tout à fait les compétences ; que Mme [G], alors salariée de l'entreprise atteste qu'elle n'a jamais vu Mme [L] quitter l'entreprise sans avoir fun son travail ; qu'elle a aussi évoqué de manière vague un possible travail de Mme [L] le dimanche puis s'est rétractée sur ce point dans une seconde attestation ; qu'en toute hypothèse, Mme [L] ne réclame que très ponctuellement (pour les périodes de fin d'année) un rappel de salaire pour des heures effectuées le dimanche ; que ce tableau et l'attestation de Mme [B] étayent la demande ; que la SARL Mer et Terroirs ne fournit aucun élément de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par la salariée alors même qu'un système de badgeage existait au moins en 2010 dans l'entreprise mais elle s'attache à démontrer le manque de crédibilité du tableau établi par Mme [L] ; qu'elle fait valoir qu'à plusieurs reprises, Mme [L] a noté des heures de travail alors qu'elle était en arrêt maladie ou en congés ; que les erreurs notées sont pour partie exactes ; qu'ainsi Mme [L] était effectivement en congés le 17/3/2010 et du 2 au 11/8/2010 alors qu'elle a noté ces jours-là des heures de travail ; qu'en revanche, elle a bien mentionné son absence du 25 au 30/5/2008 contrairement à ce qu'indique la SARL Mer et Terroirs et si elle a inexactement mentionné des heures de travail du 7 au 12/9/2009 alors qu'elle se trouvait en congés elle a en revanche noté une absence pour congés la semaine suivante du 14 au 19/9/2009 - alors qu'elle travaillait - ce qui établit une interversion de dates ; que les autres discordances vantées par la SARL Mer et Terroirs ne sont pas probantes ; qu'ainsi, le fait que Mme [L] ait noté "neige" les 6, 9 et 13/1/2010 sur un tableau de suivi des produits cuits ne démontre pas qu'elle aurait été absente ces jours-là ; que la SARL Mer et Terroirs conteste également le fait que Mme [L] ait pu travailler le samedi matin et indique que trois personnes se relayaient pour assurer cette permanence : Mme [C], Mme [P] et Mme [X] ; qu'elle produit l'attestation de Mme [C] qui écrit qu'elle même était "souvent présente le samedi matin à l'expédition" et atteste que "Mme [P] et [X] effectuaient régulièrement la permanence du samedi matin, en sachant qu'une seule personne suffit dans les bureaux" sans pour autant indiquer que Mme [L] n'effectuait pas de permanences ; que Mme [P], écrit, quant à elle, qu'un roulement s'effectuait pour ces permanences entre Mme [L], Mme [X] et elle-même ; que le tableau censé constituer un relevé des heures de Mme [P] produit par la SARL Mer et Terroirs mentionne toutefois des heures de travail un samedi sur deux ce qui ne correspond pas à l'attestation de cette dernière ; qu'enfin, Mme [X] indique qu'elle effectue "seule le travail administratif du samedi matin depuis le..." - la date a été laissée en blanc par l'attestante -, ce qui ne permet pas de retenir que tel aurait été le cas pendant la période d'activité de Mme [L], ce que d'ailleurs ne corrobore aucune des attestations versées ; que la SARL Mer et Terroirs produit des attestations indiquant qu'il arrivait à Mme [L] de s'absenter pendant ses heures de travail pour vaquer à des occupations personnelles ; que Mme [X] indique que Mme [L] avait l'habitude de partir vers 15h30/16h et sortait régulièrement déjeuner entre 12h et 14h ; que M. [E] et Mme [P] écrivent avoir rarement vu Mme [L] finir après 16h, lors de sa dernière année dans l'entreprise précise M. [E], c'est alors Mme [X] qui restait jusqu'à 17h ; que celle-ci confirme qu'elle effectuait la fermeture de l'entreprise mais a laissé en blanc la date à compter de laquelle cette tâche lui a incombé ; que ces critiques ne permettent pas de retenir toutes les heures indiquées par Mme [L] ; qu'ainsi en ce qui concerne les heures majorées à 50 % essentiellement générées - sauf en fin d'année - à raison d'un travail le samedi matin, doivent être réduites des deux tiers - hormis pour la période de fin d'année - car la salariée s'avère n'avoir assuré une permanence qu'un samedi sur trois ; qu'il convient également, compte tenu des attestations concordantes de M. [E] et Mme [P], de retenir que Mme [L] n'a, en 2010, travaillé généralement que jusqu'à 16h ce qui conduit à diminuer son horaire hebdomadaire de 5h ; que les périodes d'absence oubliées par Mme [L] dans son tableaux seront en outre déduites ; que compte tenu de ces éléments il sera retenu l'exécution : - en 2008, de 243,5 h majorées à 25 % et 149,5 h majorées à 50 % générant un rappel de 9.380,52 € (et non 10.884,93 €) compte tenu du taux horaire de 17,749 € alors applicable, - en 2009, de 351 h (et non 353 h) majorées à 25 % et 135 h majorées à 50 % soit 11.379,35 € (et non 14.654,22 €) compte tenu du taux horaire de 17,749 € alors applicable, - en 2010, de 91,5 h majorées à 25 % soit 2.126,57 € (et non 6.890,20 €) compte tenu du taux horaire de 18,593 € alors applicable, soit un total de 22.886,44 € auxquels s'ajoutent 2.288,64 € au titre des congés payés afférents » (arrêt, p. 2-4) ;
ET AUX MOTIFS ENSUITE QUE « compte tenu du nombre d'heures supplémentaires accomplies, ces heures n'ont pu être travaillées qu'au su de l'employeur qui, selon Mme [B], avait d'ailleurs confié la responsabilité de l'entreprise à Mme [L], ce que la SARL Mer et Terroirs ne conteste pas ; qu'à ce titre, la SARL Mer et Terroirs sera donc condamnée à lui verser une indemnité égale à six mois de salaire soit la somme non contestée par la SARL Mer et Terroirs de 18.000 € » (arrêt, p. 6) ;
ALORS QUE, premièrement, le fait de ne pas déclarer ou de ne pas mentionner sur les bulletins de paie la totalité des heures travaillées par un salarié ne suffit pas à établir l'existence d'un travail dissimulé en l'absence d'intention de l'employeur de dissimuler ces heures supplémentaires ; qu'en se bornant à relever en l'espèce que l'employeur avait connaissance des heures travaillées par Mme [L], sans s'assurer que celui-ci avait manqué à ses obligations de déclaration et que ce manquement résultait d'un comportement intentionnel de sa part, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-1 et L. 8221-5 du code du travail ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, le fait pour le salarié de ne pas travailler la totalité de ses heures déclarées est de nature à exclure tout travail dissimulé à raison de l'absence de déclaration ou de mention sur ses bulletins de paie des heures supplémentaires réalisées par ailleurs ; qu'en l'espèce, la société MER et TERROIR soulignait que Mme [L] avait pris l'habitude de vaquer librement à ses occupations personnelles ou à la consultation de sites étrangers à son activité professionnelle pendant ses heures de travail (conclusions du 2 juillet 2015, p. 15 et 16) ; qu'il en résultait que l'absence de déclaration des heures de travail accomplies par Mme [L] au-delà de celles mentionnées sur son bulletin de paie était susceptible de s'expliquer par une compensation opérée par l'employeur entre ces heures supplémentaires et celles déclarées mais non travaillées par Mme [L] ; qu'en s'abstenant de vérifier, comme il lui était demandé, si cette circonstance n'était pas de nature à exclure tout travail dissimulé, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-1 et L. 8221-5 du code du travail.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a requalifié le licenciement pour faute grave de Mme [L] en licenciement pour faute réelle et sérieuse, et a condamné la société MER et TERROIR à lui verser à cet titre une indemnité de licenciement de 1.500 euros, ainsi qu'une indemnité compensatrice de préavis de 9.000 euros, outre 900 euros au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE « Mme [L] a été licenciée pour avoir insulté le gérant, M. [B], sur le parking de l'usine, dénigré l'entreprise sur Facebook, dénigré le travail de Mme [P], la comptable auprès de la direction et de plusieurs membres de l'entreprise, pour avoir qualifié l'entreprise de "boîte de cons" lors d'un coup de téléphone donné à Mme [C], pour avoir passé la plupart de son temps de travail sur des sites Internet non professionnels, pour s'être déchargée de son travail sur sa collègue et avoir commis des erreurs professionnelles importantes ; qu'en ce qui concerne ce dernier grief, à le supposer établi, il ne serait pas constitutif d'une faute disciplinaire et ne sera donc pas examiné le licenciement ayant été prononcé pour faute grave ; que la SARL Mer et Terroirs n'apporte aucun élément établissant l'existence des propos que Mme [L] aurait tenus téléphoniquement à Mme [C] ; que la réalité de ce grief n'est donc pas établie ; que Mme [L] reconnaît avoir insulté M. [B] sur le parking de l'usine tout en contestant les propos précis cités dans la lettre de licenciement ("gros con, enculé, tu as les deux genoux à terre tu vas bientôt crever avec ton usine") que deux salariés attestent avoir entendu des insultes et injures sans autres précisions ; que Mme [L] indique qu'elle entretenait des relations sexuelles avec M. [B] et que ces insultes ont été proférées à raison de leur rupture, dans un contexte privé, de surcroît sur le parking de l'entreprise ; que M. [B] conteste l'existence d'une telle relation ; que toutefois, les éléments produits par Mme [L] sont suffisants pour en attester (notamment messages SMS) ; que la SARL Mer et Terroirs évoque certes la possibilité d'un montage mais n'apporte aucun élément en ce sens ; qu'en outre, la SARL Mer et Terroirs a fait effectuer un constat visant à constater la présence sur le téléphone portable de M. [B] de 20 messages SMS émis par Mme [L] entre le 22/6 et le 3/9/2010 ; que ces messages, dont rien n'établit qu'ils aient été les seuls envoyés par cette dernière, ne contiennent pas de propos ouvertement sexuels mais témoignent à tout le moins d'une grande intimité entre le gérant et la salariée et confortent la thèse de Mme [L] ; que dès lors, si Mme [L] a commis une faute en injuriant son employeur, de surcroît dans un lieu où elle a été entendue par d'autres salariés, cette faute doit être appréciée en tenant compte de l'intimité existant entre les parties ; que Mme [L] a effectivement dénigré l'entreprise sur Facebook en l'accusant de la pousser à bout, de la manipuler, d'être une "boîte de ploucs" ; que toutefois, le nom de l'entreprise n'a jamais été cité et au vu des mentions figurant sur l'impression de page produite, ces propos ont été tenus lors de "discussions instantanées" c'est-à-dire dans un cadre privé et non par affichage sur le "mur" plus largement accessible ; qu'en conséquence, Mme [L] a usé de sa liberté d'expression hors de l'entreprise dans un contexte privé et les propos qu'elle a tenus, de surcroît sans citer l'entreprise, ne sauraient constituer une faute ; que la SARL Mer et Terroirs n'établit pas que Mme [L] aurait dénigré Mme [P] auprès de la direction ; qu'en revanche, un salarié, M. [E] atteste que Mme [L] "est venue (l') interpeller à plusieurs reprises (lui) relatant des propos diffamatoires à l'encontre de M. Le directeur ainsi que le travail mal exécuté de Mlle [J] [P]" ; que cette attestation unique et non circonstanciée ne permet pas de retenir l'existence d'une faute d'autant que les propos litigieux ont été tenus à un seul salarié qui n'était pas censé les répercuter à l'intéressée ou à la direction ; qu'il est constant que Mme [L] s'est connectée sur divers sites Internet notamment de voyages et de rencontres pendant son temps de travail à partir de l'ordinateur mis à sa disposition ; que rien n'établit qu'elle se serait connectée notamment sur des sites de rencontre en compagnie de M. [B] ou à sa demande, comme elle le soutient ; que le constat d'huissier dressé à la demande de la SARL Mer et Terroirs, s'il établit plusieurs connexions quotidiennes sur la période du 14/8 au 13/9/2010, ne permet pas de connaître le temps passé lors de chaque connexion et donc de considérer que ce temps aurait significativement amputé le temps de travail de Mme [L] ; que néanmoins, à raison de leur fréquence, ces connexions excédent l'usage privé de l'ordinateur professionnel qu'un employeur peut tolérer ; que cette faute est donc établie ; que Mme [X] se plaint de ce que Mme [L] lui déléguait de plus en plus de tâches ; que toutefois, cette attestation ne permet pas d'établir que Mme [L] se serait, pour autant, déchargée de tâches qui lui incombaient spécifiquement ; que de surcroît, Mme [L] ayant exécuté des heures supplémentaires qui n'ont pas été payées, il s'en déduit que Mme [L] a, en toute hypothèse, conservé des tâches au-delà de sa charge contractuelle de travail ; que les deux fautes établies à l'encontre de Mme [L] justifient la rupture du contrat de travail ; que l'employeur n'ayant diligenté une procédure de licenciement que le 6/10 alors que les insultes ont été proférées le 8/9 et ce sans procéder à une mise à pied conservatoire, il s'en déduit que les fautes reprochées ne présentaient pas à ses yeux un caractère de gravité justifiant une rupture immédiate du contrat de travail ; que le licenciement sera donc requalifié en licenciement pour faute réelle et sérieuse ; que Mme [L] peut donc prétendre aux indemnités de rupture ; que les montants réclamés n'étant pas contestés même à titre subsidiaire par la SARL Mer et Terroirs seront retenus » (arrêt, p. 4-6) ;
ALORS QUE, premièrement, les juges sont tenus de faire respecter et de respecter eux-mêmes le principe de la contradiction ; que dès lors que les juges indiquent que les parties ont soutenu oralement leurs écritures, elles sont réputées s'en être tenues aux demandes et aux moyens figurant dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni des dernières conclusions de Mme [L], ni de celles de la société MER et TERROIR, que la question du délai écoulé entre la découverte des faits reprochés à Mme [L] et l'introduction de la procédure de licenciement ait été débattue devant les juges du fond ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que l'écoulement d'un délai de quatre semaines entre ces deux événements suffisait à exclure tout caractère de gravité quant aux fautes reprochées à Mme [L], sans inviter au préalable les parties à formuler leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, deuxièmement, la société MER et TERROIR soulignait qu'elle n'avait pris connaissance des connexions Internet de Mme [L] qu'au début du mois d'octobre, soit quelques jours avant l'envoi de la lettre de licenciement datée du 6 octobre 2010 (conclusions du 2 juillet 2015, p. 3) ; qu'en se bornant à faire état du délai de quatre semaines séparant la profération des insultes de l'introduction de la procédure de licenciement, sans vérifier si le peu de jours écoulés depuis la découverte des connexions Internet de Mme [L] n'était pas de nature à établir que le cumul de ces deux fautes revêtait bien une gravité suffisante aux yeux de l'employeur, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
ET ALORS QUE, troisièmement, si l'importance du délai écoulé entre la connaissance par l'employeur des fautes reprochées au salarié et l'introduction de la procédure de licenciement permet d'exclure la qualification de faute grave, ce n'est que pour autant que cette circonstance établit que ces fautes n'ont pas rendu impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il en va différemment lorsque le salarié a bénéficié dans cet intervalle d'un arrêt-maladie et ne se présentait donc déjà plus à son travail ; qu'en l'espèce, la société MER et TERROIR rappelait que Mme [L] était en arrêt-maladie depuis le 13 septembre 2010 (conclusions du 2 juillet 2015, p. 3, al. 3) ; qu'en se fondant néanmoins sur le délai de quatre semaines écoulé entre le 8 septembre 2010 et le 6 octobre 2010 pour en déduire que, la convocation à l'entretien préalable n'ayant été adressée qu'à cette dernière date, les fautes invoquées par la société MER et TERROIR ne présentaient pas une gravité suffisante à ses propres yeux, les juges du fond ont encore privé leur décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.