LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° U 15-28. 298 et V 15-28. 299 ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1233-3, L. 1233-28 et L. 1233-61 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige ;
Attendu qu'en vertu du dernier de ces textes, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, les employeurs qui projettent d'effectuer un licenciement pour motif économique sont tenus, lorsque le nombre de licenciements envisagés est au moins égal à dix dans une même période de trente jours, non seulement de réunir et de consulter le comité d'entreprise, mais d'établir et mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre ; qu'en outre, en vertu de l'alinéa 2 de l'article L. 1233-3 du même code, ces dispositions sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant d'une cause économique ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que MM. X...et Y..., salariés de la société Socorail, ont été informés par celle-ci, par lettre du 25 mars 2010 les conviant à un entretien notamment en vue de leur proposer des postes de reclassement, qu'il avait été mis fin au contrat de prestation sur le site de Berre, sur lequel ils étaient affectés ; qu'ils ont, l'un et l'autre, donné leur démission à compter du 30 avril 2010 ;
Attendu que pour rejeter la demande des salariés en requalification de la rupture de leur contrat de travail en licenciements nuls en l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi et de leurs demandes consécutives en condamnation de l'employeur au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts, les arrêts retiennent que si l'employeur a l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi pour toute rupture du contrat de travail pour motif économique dès lors que le nombre de salariés concernés est au moins égal à dix salariés sur trente jours, tel n'était pas le cas en l'espèce dès lors que la condition d'effectif n'était pas remplie, sur les seize salariés pouvant être éventuellement concernés par l'annonce faite au personnel, neuf salariés restant seulement concernés au stade des licenciements définitivement envisagés, avant même les propositions de l'employeur en interne ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les salariés faisaient valoir que, le 16 mars 2010, l'employeur avait informé et consulté le comité d'établissement sur un projet de licenciement économique des seize salariés affectés sur le site de Berre et que c'est au moment où la procédure de licenciement collectif est engagée que s'apprécient les conditions déterminant la consultation des instances représentatives du personnel et l'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, les arrêts rendus le 9 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Socorail aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Socorail à payer à MM. X... et Y... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi n° U 15-28. 298 par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à annuler la démission de Monsieur André X... en date du 2 avril 2010, débouté Monsieur X... de sa demande tendant à voir juger que la rupture de son contrat de travail s'analysait en un licenciement nul en l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi et de ses demandes consécutives en condamnation de la Société Socorail au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS propres QUE " les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance ; qu'en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte application des faits de la cause et du droit des parties ; que le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en toutes ses dispositions ; qu'il doit être ajouté que le salarié ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que sa démission aurait été viciée ni que les propositions faites par l'employeur auraient été fantaisistes ;
QUE d'autre part, il convient de rappeler que l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi concerne toute rupture du contrat de travail pour motif économique dès lors que le nombre de salariés concernés est au moins égal à 10 salariés sur trente jours ; que toutefois, il s'avère :
- d'une part que l'expression toute rupture devant être prise en compte pour le calcul du nombre de licenciements projetés afin de déterminer si la mise en oeuvre d'un plan est ou non obligatoire concerne notamment les ruptures amiables, conventionnelles homologuées, départ volontaire à la retraite ou mise à la retraite dès lors qu'elles résultent d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification refusée par le salarié d'un élément essentiel du contrat de travail consécutives à un motif économique mais ne vise nullement les démissions de salariés,
- d'autre part que la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde pour l'emploi dépend du nombre de salariés ayant refusé la modification de leur contrat proposée par l'employeur, de sorte qu'en l'espèce, l'employeur n'avait pas obligation d'élaborer un plan de sauvegarde pour l'emploi, au stade des licenciements définitivement envisagés, la condition d'effectif n'était pas remplie, sur les 16 salariés pouvant être éventuellement concernés par l'annonce faite au personnel, 9 salariés restaient seulement concernés avant même les propositions de l'employeur en interne (…) " (arrêt p. 5 in fine, p. 6 alinéa 1er) ;
ET AUX MOTIFS adoptés QUE " Il est de jurisprudence constante que la démission ne peut résulter que d'une manifestation claire et non équivoque de la volonté de rompre le contrat de travail ; que la démission peut être annulée et produire les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsque le salarié invoque un vice du consentement et plus particulièrement lorsqu'il apparaît que la démission a été donnée dans les circonstances suivantes :
- dans un état psychologiquement anormal,
- sous la pression de l'employeur,
- suite à une faute ou des manoeuvres de l'employeur (…) ;
QU'il n'est pas contesté que, par courrier du 17 février 2010, la Société Lyondell-Basell a informé la Société Socorail de la fin du contrat de prestations du site CPB Berre, sur lequel était affecté Monsieur X... ainsi que 15 autres salariés ; qu'il ressort du compte rendu de la réunion du comité d'établissement Sud du 23 février 2010 que suite à la perte de ce contrat " Socorail va mettre en place un plan de reclassement avec, pour objectif, le maintien des emplois " ; qu'il n'est donc nullement question, à cette date, de projet de licenciement économique mais au contraire de rechercher au préalable le reclassement de salariés, préalable nécessaire et obligatoire qui s'impose à l'employeur, avant de mettre en oeuvre une procédure de licenciement pour motif économique, qu'ils soient individuels ou collectifs ; qu'il apparaît que la Société Socorail, dans ce contexte, va se rapprocher de diverses entreprises, notamment les Sociétés Ortec et Delta Route, qui prenaient sa suite sur le site Lyondell-Basell à Berre ; que dans ces conditions, il est justifié que :
- par courriel du 23 février 2010, il est prévu que " voici les dates de RDV pour le reclassement des Socorail à CPB Berre, le 26 février 2010 avec Delta Route et le 2 mars 2010 avec Ortec,
- deux salariés ont été embauchés en vertu d'un contrat signé le 26 mars 2010 dans le cadre d'une mutation concertée par la Société Ortec,
- quatre promesses d'embauche ont été signées le 25 mars 2010 entre la Société Delta Route et les salariés de Socorail dont Monsieur X …, lesquelles prévoient expressément que ces salariés conservent l'ancienneté acquise au cours du précédent emploi,
- ces embauches sont confirmées à la Société Socorail par courriel du 26 mars 2010, où il est précisé que les salariés concernés doivent présenter " leur démission à Socorail pour le 31 mars 2010 afin d'être libres de tout engagement pour intégrer Delta Route le 3 mai 2010 " ;
QUE par conséquent, avant même de proposer ces postes de reclassement le 1er avril 2010, deux salariés étaient mutés chez Ortec et cinq autres avaient signé une promesse d'embauche auprès de Delta Route ; que la Société Socorail n'a donc pas pu envisager de licencier plus de dix salariés sur une période de trente jours et n'avait donc pas à mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi ;
QU'au regard des développements qui précèdent, le salarié ne rapporte pas la preuve de l'existence de manoeuvres de la part de son employeur qui l'auraient poussé à démissionner ; qu'il apparaît au contraire que la démission du salarié a bien été librement consentie, celui-ci indiquant clairement dans son courrier avoir signé une promesse d'embauche à des conditions avantageuses puisqu'il convient d'observer que son ancienneté chez Socorail était reprise et qu'il ne souhaitait pas la laisser passer ; qu'il ne peut soutenir que les propositions de reclassement faites le 1er avril 2010 étaient fantaisistes, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas au regard des pièces produites par l'employeur, étant relevé que cela faisait plus d'une semaine qu'il avait signé une promesse d'embauche chez Delta Route ; que dans ces conditions, sa démission ne peut être annulée et le salarié doit donc être débouté de toutes ses demandes à ce titre (…) " ;
1°) ALORS QUE l'obligation, pour l'employeur, d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi existe dès lors qu'il envisage la rupture de plus de dix contrats de travail pour motif économique ; que l'existence de cette obligation s'apprécie au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif par convocation du comité d'entreprise pour mise en oeuvre de la procédure d'information consultation ; qu'en l'espèce, Monsieur X... avait fait valoir dans ses écritures, et démontré par la production du compte rendu de la réunion du comité d'établissement Sud du 16 mars 2010, dont il ressortait qu'avait été exposé au comité d'établissement " le projet de licenciement économique du site de C. P. B. Berre, suite à la perte du contrat, 16 salariés [étant] concernés par ce projet " (production n° 2), et du document préparatoire annexé à la convocation, intitulé " information et consultation du C. E. Sud sur le projet de licenciement économique du personnel de CPB Berre – réunion du 16 mars 2010 " (production n° 3), qu'à la date de cette réunion d'information consultation du comité d'établissement, c'est bien un licenciement économique de 16 salariés qui était envisagé, de sorte que la Société Socorail était tenue, à cette date, d'élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en retenant que " … la Société Socorail n'a donc pas pu envisager de licencier plus de dix salariés sur une période de trente jours et n'avait donc pas à mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi ", la Cour d'appel a dénaturé par omission le document préparatoire et le compte rendu de réunion du comité d'établissement du 16 mars 2010, méconnaissant ainsi l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
2°) ALORS QUE l'obligation, pour l'employeur, d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi existe dès lors qu'il envisage la rupture de plus de dix contrats de travail pour motif économique ; que cette obligation s'apprécie au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif par convocation du comité d'entreprise pour mise en oeuvre de la procédure d'information consultation ; qu'en l'espèce, c'est à la date du 16 mars 2010, date de la réunion d'information consultation du comité d'établissement, que devait s'apprécier l'obligation de l'employeur ; qu'à cette date, le licenciement économique de seize salariés était envisagé, de sorte que la Société Socorail était obligée de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en décidant le contraire aux termes de motifs inopérants, propres ou adoptés, déduits de ce que des promesses d'embauche avec des entreprises extérieures avaient été signées les 25 et 26 mars 2010, de ce " qu'avant même de proposer ces postes de reclassement, le 1er avril 2010, deux salariés étaient mutés chez Ortec et cinq autres avaient signé une promesse d'embauche auprès de Delta Route " (jugement p. 7 in fine), ou de ce que " au stade des licenciements définitivement envisagés, la condition d'effectif n'était pas remplie [dès lors que] sur les 16 salariés pouvant être éventuellement concernés par l'annonce faite au personnel, 9 salariés seulement restaient concernés avant même les propositions faites par l'employeur en interne " (arrêt p. 6), la Cour d'appel, qui n'a pas apprécié les conditions de mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, a violé les articles L. 1233-3, L. 1233-28 et L. 1233-61 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE l'obligation, pour l'employeur, d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi existe dès lors qu'il envisage la rupture de plus de dix contrats de travail pour motif économique ; que cette obligation s'apprécie au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif par convocation du comité d'entreprise pour mise en oeuvre de la procédure d'information consultation ; qu'en l'espèce, c'est à la date du 16 mars 2010, date de la première réunion d'information consultation du comité d'établissement, que devait s'apprécier l'obligation de l'employeur ; qu'à cette date, le licenciement économique de seize salariés était envisagé, de sorte que la Société Socorail était obligée de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en retenant que l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi n'existait pas lorsque les ruptures finalement intervenues étaient des démissions, quand il était établi par les documents de la procédure de licenciement collectif que les ruptures envisagées, au moment de l'engagement de cette procédure étaient des licenciements, la Cour d'appel a méconnu derechef les textes susvisés ;
4°) ALORS en outre QU'en retenant, pour exonérer Socorail de l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi, que " la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi dépend du nombre de salariés ayant refusé la modification de leur contrat proposée par l'employeur pour motif économique de sorte qu'en l'espèce, l'employeur n'avait pas obligation d'élaborer un plan de sauvegarde pour l'emploi, au stade des licenciements définitivement envisagés, la condition d'effectif n'était pas remplie, sur les 16 salariés pouvant être éventuellement concernés par l'annonce faite au personnel, 9 salariés restaient seulement concernés avant même les propositions de l'employeur en interne (…) ", quand il ressortait de ses propres constatations qu'aucune modification pour motif économique de leur contrat de travail n'avait été proposée aux salariés qui, par lettre du 25 mars 2010, avaient uniquement été convoqués à un entretien pour le 1er avril suivant, aux fins de se voir " proposer des postes de reclassement et … informer sur le congé de reclassement " la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1222-6 et L. 1233-28 du Code du travail ;
5°) ALORS enfin QUE la démission d'un salarié concerné par un projet de licenciement collectif, dont l'emploi est supprimé, et qui quitte l'entreprise en l'état de la carence de l'employeur dans l'exécution de son obligation légale de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, produit les effets d'un licenciement nul ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande tendant à voir constater la nullité de sa démission aux motifs erronés que l'employeur n'avait pas eu l'obligation d'élaborer un tel plan, de sorte qu'aucune manoeuvre ayant provoqué la démission du salarié ne pouvait lui être reprochée, la Cour d'appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble l'article L. 1231-1 du Code du travail.
Moyen produit au pourvoi n° V 15-28. 299 par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à annuler la démission de Monsieur Saad Y... en date du 31 mars 2010, débouté Monsieur Y... de sa demande tendant à voir juger que la rupture de son contrat de travail s'analysait en un licenciement nul en l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi et de ses demandes consécutives en condamnation de la Société Socorail au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS propres QUE " les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance ; qu'en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte application des faits de la cause et du droit des parties ; que le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en toutes ses dispositions ; qu'il doit être ajouté que le salarié ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que sa démission aurait été viciée ni que les propositions faites par l'employeur auraient été fantaisistes ;
QUE d'autre part, il convient de rappeler que l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi concerne toute rupture du contrat de travail pour motif économique dès lors que le nombre de salariés concernés est au moins égal à 10 salariés sur trente jours ; que toutefois, il s'avère :
- d'une part que l'expression toute rupture devant être prise en compte pour le calcul du nombre de licenciements projetés afin de déterminer si la mise en oeuvre d'un plan est ou non obligatoire concerne notamment les ruptures amiables, conventionnelles homologuées, départ volontaire à la retraite ou mise à la retraite dès lors qu'elles résultent d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification refusée par le salarié d'un élément essentiel du contrat de travail consécutives à un motif économique mais ne vise nullement les démissions de salariés,
- d'autre part que la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde pour l'emploi dépend du nombre de salariés ayant refusé la modification de leur contrat proposée par l'employeur, de sorte qu'en l'espèce, l'employeur n'avait pas obligation d'élaborer un plan de sauvegarde pour l'emploi, au stade des licenciements définitivement envisagés, la condition d'effectif n'était pas remplie, sur les 16 salariés pouvant être éventuellement concernés par l'annonce faite au personnel, 9 salariés restaient seulement concernés avant même les propositions de l'employeur en interne (…) " (arrêt p. 5 in fine, p. 6 alinéa 1er) ;
ET AUX MOTIFS adoptés QUE " Il est de jurisprudence constante que la démission ne peut résulter que d'une manifestation claire et non équivoque de la volonté de rompre le contrat de travail ; que la démission peut être annulée et produire les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsque le salarié invoque un vice du consentement et plus particulièrement lorsqu'il apparaît que la démission a été donnée dans les circonstances suivantes :
- dans un état psychologiquement anormal,
- sous la pression de l'employeur,
- suite à une faute ou des manoeuvres de l'employeur (…) ;
QU'il n'est pas contesté que, par courrier du 17 février 2010, la Société Lyondell-Basell a informé la Société Socorail de la fin du contrat de prestations du site CPB Berre, sur lequel était affecté Monsieur Y... ainsi que 15 autres salariés ; qu'il ressort du compte rendu de la réunion du comité d'établissement Sud du 23 février 2010 que suite à la perte de ce contrat " Socorail va mettre en place un plan de reclassement avec, pour objectif, le maintien des emplois " ; qu'il n'est donc nullement question, à cette date, de projet de licenciement économique mais au contraire de rechercher au préalable le reclassement de salariés, préalable nécessaire et obligatoire qui s'impose à l'employeur, avant de mettre en oeuvre une procédure de licenciement pour motif économique, qu'ils soient individuels ou collectifs ; qu'il apparaît que la Société Socorail, dans ce contexte, va se rapprocher de diverses entreprises, notamment les Sociétés Ortec et Delta Route, qui prenaient sa suite sur le site Lyondell-Basell à Berre ; que dans ces conditions, il est justifié que :
- par courriel du 23 février 2010, il est prévu que " voici les dates de RDV pour le reclassement des Socorail à CPB Berre, le 26 février 2010 avec Delta Route et le 2 mars 2010 avec Ortec,
- deus salariés ont été embauchés en vertu d'un contrat signé le 26 mars 2010 dans le cadre d'une mutation concertée par la Société Ortec,
- quatre promesses d'embauche ont été signées le 25 mars 2010 entre la Société Delta Route et les salariés de Socorail dont Monsieur X …, lesquelles prévoient expressément que ces salariés conservent l'ancienneté acquise au cours du précédent emploi,
- ces embauches sont confirmées à la Société Socorail par courriel du 26 mars 2010, où il est précisé que les salariés concernés doivent présenter " leur démission à Socorail pour le 31 mars 2010 afin d'être libres de tout engagement pour intégrer Delta Route le 3 mai 2010 " ;
QUE par conséquent, avant même de proposer ces postes de reclassement le 1er avril 2010, deux salariés étaient mutés chez Ortec et cinq autres avaient signé une promesse d'embauche auprès de Delta Route ; que la Société Socorail n'a donc pas pu envisager de licencier plus de dix salariés sur une période de trente jours et n'avait donc pas à mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi ;
QU'au regard des développements qui précèdent, le salarié ne rapporte pas la preuve de l'existence de manoeuvres de la part de son employeur qui l'auraient poussé à démissionner ; qu'il apparaît au contraire que la démission du salarié a bien été librement consentie, celui-ci indiquant clairement dans son courrier avoir signé une promesse d'embauche à des conditions avantageuses puisqu'il convient d'observer que son ancienneté chez Socorail était reprise et qu'il ne souhaitait pas la laisser passer ; qu'il ne peut soutenir que les propositions de reclassement faites le 1er avril 2010 étaient fantaisistes, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas au regard des pièces produites par l'employeur, étant relevé que cela faisait plus d'une semaine qu'il avait signé une promesse d'embauche chez Delta Route ; que dans ces conditions, sa démission ne peut être annulée et le salarié doit donc être débouté de toutes ses demandes à ce titre (…) " ;
1°) ALORS QUE l'obligation, pour l'employeur, d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi existe dès lors qu'il envisage la rupture de plus de dix contrats de travail pour motif économique ; que l'existence de cette obligation s'apprécie au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif par convocation du comité d'entreprise pour mise en oeuvre de la procédure d'information consultation ; qu'en l'espèce, Monsieur Y... avait fait valoir dans ses écritures, et démontré par la production du compte rendu de la réunion du comité d'établissement Sud du 16 mars 2010, dont il ressortait qu'avait été exposé au comité d'établissement " le projet de licenciement économique du site de C. P. B. Berre, suite à la perte du contrat, 16 salariés [étant] concernés par ce projet " (production n° 2), et du document préparatoire annexé à la convocation, intitulé " information et consultation du C. E. Sud sur le projet de licenciement économique du personnel de CPB Berre – réunion du 16 mars 2010 " (production n° 3), qu'à la date de cette réunion d'information consultation du comité d'établissement, c'est bien un licenciement économique de 16 salariés qui était envisagé, de sorte que la Société Socorail était tenue, à cette date, d'élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en retenant que " … la Société Socorail n'a donc pas pu envisager de licencier plus de dix salariés sur une période de trente jours et n'avait donc pas à mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi ", la Cour d'appel a dénaturé par omission le document préparatoire et le compte rendu de réunion du comité d'établissement du 16 mars 2010, méconnaissant ainsi l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
2°) ALORS QUE l'obligation, pour l'employeur, d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi existe dès lors qu'il envisage la rupture de plus de dix contrats de travail pour motif économique ; que cette obligation s'apprécie au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif par convocation du comité d'entreprise pour mise en oeuvre de la procédure d'information consultation ; qu'en l'espèce, c'est à la date du 16 mars 2010, date de la réunion d'information consultation du comité d'établissement, que devait s'apprécier l'obligation de l'employeur ; qu'à cette date, le licenciement économique de seize salariés était envisagé, de sorte que la Société Socorail était obligée de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en décidant le contraire aux termes de motifs inopérants, propres ou adoptés, déduits de ce que des promesses d'embauche avec des entreprises extérieures avaient été signées les 25 et 26 mars 2010, de ce " qu'avant même de proposer ces postes de reclassement, le 1er avril 2010, deux salariés étaient mutés chez Ortec et cinq autres avaient signé une promesse d'embauche auprès de Delta Route " (jugement p. 7 in fine), ou de ce que " au stade des licenciements définitivement envisagés, la condition d'effectif n'était pas remplie [dès lors que] sur les 16 salariés pouvant être éventuellement concernés par l'annonce faite au personnel, 9 salariés seulement restaient concernés avant même les propositions faites par l'employeur en interne " (arrêt p. 6), la Cour d'appel, qui n'a pas apprécié les conditions de mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, a violé les articles L. 1233-3, L. 1233-28 et L. 1233-61 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE l'obligation, pour l'employeur, d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi existe dès lors qu'il envisage la rupture de plus de dix contrats de travail pour motif économique ; que cette obligation s'apprécie au jour de l'engagement de la procédure de licenciement collectif par convocation du comité d'entreprise pour mise en oeuvre de la procédure d'information consultation ; qu'en l'espèce, c'est à la date du 16 mars 2010, date de la première réunion d'information consultation du comité d'établissement, que devait s'apprécier l'obligation de l'employeur ; qu'à cette date, le licenciement économique de seize salariés était envisagé, de sorte que la Société Socorail était obligée de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en retenant que l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi n'existait pas lorsque les ruptures finalement intervenues étaient des démissions, quand il était établi par les documents de la procédure de licenciement collectif que les ruptures envisagées, au moment de l'engagement de cette procédure étaient des licenciements, la Cour d'appel a méconnu derechef les textes susvisés ;
4°) ALORS en outre QU'en retenant, pour exonérer Socorail de l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi, que " la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi dépend du nombre de salariés ayant refusé la modification de leur contrat proposée par l'employeur pour motif économique de sorte qu'en l'espèce, l'employeur n'avait pas obligation d'élaborer un plan de sauvegarde pour l'emploi, au stade des licenciements définitivement envisagés, la condition d'effectif n'était pas remplie, sur les 16 salariés pouvant être éventuellement concernés par l'annonce faite au personnel, 9 salariés restaient seulement concernés avant même les propositions de l'employeur en interne (…) ", quand il ressortait de ses propres constatations qu'aucune modification pour motif économique de leur contrat de travail n'avait été proposée aux salariés qui, par lettre du 25 mars 2010, avaient uniquement été convoqués à un entretien pour le 1er avril suivant, aux fins de se voir " proposer des postes de reclassement et … informer sur le congé de reclassement " la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1222-6 et L. 1233-28 du Code du travail ;
5°) ALORS enfin QUE la démission d'un salarié concerné par un projet de licenciement collectif, dont l'emploi est supprimé, et qui quitte l'entreprise en l'état de la carence de l'employeur dans l'exécution de son obligation légale de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, produit les effets d'un licenciement nul ; qu'en déboutant Monsieur Y... de sa demande tendant à voir constater la nullité de sa démission aux motifs erronés que l'employeur n'avait pas eu l'obligation d'élaborer un tel plan, de sorte qu'aucune manoeuvre ayant provoqué la démission du salarié ne pouvait lui être reprochée, la Cour d'appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble l'article L. 1231-1 du Code du travail.