LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X...
Z... a été engagée le 1er février 2005 par l'association Vivre chez soi en qualité d'auxiliaire de vie, et affectée aux structures Habitat +, lesquelles ont fait l'objet d'un nouvel appel d'offre que la société Vivre et domicile a remporté, le transfert des contrats de travail des salariés de l'association étant fixé au 1er février 2012 ; que la salariée, soutenant que le nouvel employeur avait modifié son contrat de travail, a pris acte de sa rupture par lettre du 15 février 2012 et saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1224-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt retient que si la perte de la majoration du samedi et la diminution de la prise en charge des frais de transport constituent des modifications d'éléments contractuels de rémunération qui ne peuvent être modifiées qu'avec son accord, celles-ci sont compensées par l'octroi d'autres avantages telles que l'augmentation des dimanches travaillés et la mise en place d'une prime qualitative trimestrielle, en sorte que ces manquements de l'employeur ne sont pas d'une gravité telle qu'ils empêchent la poursuite de la relation salariale ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que le contrat de travail de la salariée avait été transféré à la société Vivre et domicile par application de l'article L. 1224-1 du code du travail en sorte que le cessionnaire était tenu à l'égard de la salariée des obligations qui incombaient à l'ancien employeur, relatives au paiement du salaire tel qu'il était fixé par le contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen emporte la cassation, par voie de conséquence en application de l'article 624 du code de procédure civile, du chef de l'arrêt qui condamne la salariée au paiement à l'employeur d'une somme au titre du préavis non effectué ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il met l'AGS-CGEA hors de cause, l'arrêt rendu le 9 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Vivre et domicile aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Vivre et domicile à payer à Mme X...
Z... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Z....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Martine X...
Z... de ses demandes tendant au paiement d ‘ une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'une indemnité de licenciement et de dommages-intérêts en réparation de la rupture du contrat de travail.
AUX MOTIFS QUE Mme Martine X...
Z... a pris acte de la rupture de son contrat par courrier du 15 février 2012, en raison des modifications de son contrat de travail, imposées par le cessionnaire ; que la cour rappelle que pour qu'une prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les manquements reprochés par le salarié à son employeur doivent être de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail de la salariée ; que Mme Martine X...
Z... reproche à la société Vivre et Domicile d'avoir modifié, sans son accord, son contrat de la manière suivante :- perte de la majoration de salaire du samedi,- réduction à 50 % au lieu de 100 % de la prise en charge des frais de transport,- modification de la durée du travail de 150 heures à 151 heures 67, correspondant au passage d'un temps partiel à un temps complet ; que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges l'effet de ces modifications n'était pas différé à trois mois, ce délai ne concernait que la mise en cause de la convention collective ; qu'en ce qui concerne la perte de la majoration du samedi et la diminution de la prise en charge des frais de transport, celles-ci relevaient selon la société Vivre et Domicile d'un usage, qu'elle a dénoncé alors que la salariée soutient qu'il s'agissait d'éléments contractuels qui ne pouvaient être modifiés qu'avec son accord ; que le contrat de travail intervenu le 1er juillet 2005 entre l'association Vivre chez Soi et Mme Martine X...
Z... stipule au paragraphe « rémunération du salarié : salaire brut horaire semaine 8, 58 €.. week-end... 10, 74 € (...) avantages sociaux : frais de transport abonnement TCL » ; que le contrat ne fait pas référence à un usage sur ces deux points ; que dans ces conditions, la cour constate qu'il ne s'agit pas d'un usage qui pouvait être dénoncé par la société cessionnaire mais bien d'éléments contractuels de rémunération qui ne pouvaient être modifiés qu'avec l'accord de la salariée ; que cependant la cour observe que la perte de ces avantages était compensée par l'octroi d'autres avantages, comme l'augmentation du taux de la rémunération des dimanches travaillés ainsi que la mise en place à partir du 1er avril d'une prime qualitative trimestrielle de 5 % ; qu'à propos de la modification de la durée du travail de 150 heures à 151 heures 67 proposée à la salariée, la cour relève que celle-ci ne pouvait intervenir qu'avec son accord puisque le contrat à temps partiel devenait ainsi à temps complet ; que cependant, la salariée indique que l'employeur ayant annoncé une modification du contrat de travail, elle a réclamé par courrier du 27 janvier 2012, un avenant écrit audit contrat, sans l'obtenir ; que dans ces conditions, lorsqu'elle a pris acte de la rupture le 15 février 2012, il n'était pas établi que son contrat de travail à temps partiel avait été transformé en contrat à temps plein, le planning qui lui avait été communiqué pour la période 1er au 29 février 2012 et qu'elle verse aux débats mentionnant de surcroît en ce qui la concerne un nombre d'heures de travail inférieur à 151 heures 67 ; que le fait que son bulletin de salaire du mois de février 2012, indique que son salaire de base brut mensuel était calculé sur 151 heures 67, ne saurait suffire à établir à lui seul qu'une telle modification était déjà intervenue lorsqu'elle a quitté l'entreprise, puisqu'il n'a été établi qu'après son départ ; que dans ces conditions, la cour retient que le contrat à temps partiel de 150 heures était toujours en cours d'application lorsque la salariée a quitté l'entreprise le 15 février 2012 ; que la salariée se plaint également d'une modification de ses horaires de travail par la production du planning qui lui a été remis pour le mois de février 2012 ; que celui-ci définit les plages horaires suivantes : matin de 7 heures à 14 heures, après-midi de 14 heures à 21 heures, nocturne de 21 heures à 7 heures, alors que le contrat de travail la liant à l'association cédante stipulait selon planning les plages d'interventions suivantes : matin de 8 heures à 14 heures, après-midi de 14 heures à 18 heures, nuit de 20 heures à 8 heures ; qu'elle soutient que ces modifications n'étant pas prévues dans son contrat à temps partiel, son accord était requis pour y procéder ; que la cour relève que l'article L. 3123-141° du code du travail, prévoit une exception, dont se prévaut à juste titre la société Vivre et Domicile et sur laquelle ne s'explique pas la salariée, pour les contrats de travail conclus comme en l'espèce avec les associations et entreprises d'aide à domicile, s'agissant de l'obligation d'indiquer dans le contrat la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'il suffit pour que le contrat à temps partiel soit régulièrement conclu que comme en l'espèce la salariée soit prévenue en début de mois de ses horaires de travail par la remise d'un planning, la durée de travail devant être accomplie dans le mois étant stipulée au contrat ; que dans ces conditions, la salariée n'est pas fondée à se plaindre d'une modification de ses horaires de travail, les plages horaires figurant au contrat n'ayant qu'une valeur indicative et non contractuelle et leur modification relevant du pouvoir de direction de l'employeur ; que dès lors, la cour, si elle reconnaît que la société Vivre et Domicile a commis certains manquements, relève qu'à la date où la salariée a pris acte de la rupture de son contrat aux torts de l'employeur, ceux-ci n'étaient pas d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation salariale ; qu'en conséquence, la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission ; que la salariée en démissionnant aurait dû respecter un préavis d'une durée de deux mois et la société Vivre et Domicile est en conséquence bien fondée à solliciter la condamnation de Mme Martine X...
Z... à lui régler une somme de 4. 126, 50 € brut au titre de l'indemnité de compensatrice du préavis non effectué.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il impute à son employeur, cette rupture produit des effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient, soit dans le cas contraire, d'une démission ; que les faits qui pourraient justifier une rupture du contrat requalifiée au tort de l'employeur, doivent représenter un manquement grave de l'employeur face à ces obligations, en matière de fourniture de travail, de règlement des salaires, de formation professionnelle, et de sécurité en matière de santé ; que l'association Vivre à domicile a dénoncé certains usages, comme la majoration des heures de travail du samedi, sans obligation légale ou conventionnelle, et l'attribution d'une prime de transport, même lors de l'utilisation d'un véhicule personnel ; qu'en contrepartie, l'association Vivre à domicile a compensé partiellement la perte de la majoration du samedi par une augmentation de la majoration du dimanche, dans un souci d'homogénéité avec ses autres salariés ; que le remboursement sur justificatif de 50 % des frais de transport, ceci sur justificatif, ne fait que respecter les dispositions légales ; que le fait de modifier l'horaire du temps de travail de 150 heures mensualisés à 151 h 67, horaire légal du temps plein, entraînant ipso facto une augmentation du salaire, n'est pas de nature à justifier une rupture du contrat, attendu au demeurant, que Mme X...
Z... a effectué des heures supplémentaires au cours des mois précédent ; que si les décalages de prise de poste pouvaient modifier l'organisation de Mme X...
Z..., notamment pour effectuer des nuits de garde dans un autre établissement, il ne s'en trouve pas moins que l'association Vivre à domicile était l'employeur principal et que Mme X...
Z... pouvait se trouver en dépassement des horaires maximum par jour ou par semaine, ceci en toute illégalité ; que voir la dénomination de son poste évoluer d'auxiliaire à domicile ne représente pas un manquement grave de l'employeur à ces obligations ; que Mme X...
Z... aurait travaillé le mercredi 1 février en matinée et le jeudi 2 février en après-midi, qu'elle a pris des congés du samedi 04 février au dimanche 12 février, qu'elle n'était pas inscrite sur le planning pour les 13, 14 et 15 février, et qu'elle a établi sa lettre de rupture le 15 février, que de ce fait, il y a eu effectivement que deux jours de présence avant la lettre de rupture ; mais que Mme X...
Z... a poursuivi ses missions de nuit le 04 février, ceci pendant ses congés payés, le 11 février, ceci pendant ses congés payés, et du 13 février au 04 mars, position incompatible avec son emploi principal, même sur la base de 150 heures mensualisés ; que l'association Vivre à domicile, lors de la réunion de présentation du 24 janvier, dans son courrier du 03 février et dans son courrier du 13 février, a bien porté à la connaissance de Mme X...
Z... comme quoi il y avait une période de 3 mois, pouvant être prorogée de 12 mois, avant l'application des modifications envisagées, permettant de ce fait aux deux parties d'engager un dialogue ; qu'en conséquence, le conseil des prud'hommes considère que Mme X...
Z... a agi d'une manière précipitée, et que les modifications dans le quotidien ne présentent pas un caractère de gravité suffisant, justifiant de perdre son emploi principal par la lettre de rupture, et ces modifications peuvent paraître nécessaires, aux vues du bilan et des résultats de l'association Vivre chez soi ; qu'en conséquence, Mme X...
Z... sera déboutée de la totalité de ses demandes.
ALORS QUE constitue un manquement de l'employeur de nature à lui imputer la rupture du contrat de travail la méconnaissance par le cessionnaire des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du contrat de travail qui l'obligent à maintenir les contrats de travail des salariés concernés par le transfert sans pouvoir y apporter de modifications autres que celles librement acceptées par les salariés ; qu'en déboutant Mme Martine X...
Z... de sa demande tendant à voir dire la rupture de son contrat de travail imputable à la société Vivre et domicile après avoir constaté que cette dernière lui avait imposé, dans le cadre du transfert, la modification de sa rémunération et de ses remboursements de frais tels que contractuellement fixés, la cour d'appel a violé les articles L. 1224-1 du code du travail et 1134 du code civil.
ALORS surtout QUE constitue viole l'article L. 1224-1 l'employeur qui conditionne la reprise d'un salarié à la signature d'un avenant à son contrat de travail ; qu'en opposant à la salariée le contrat signé à l'occasion de la reprise, la Cour d'appel a encore violé lesdites dispositions
ALORS en tout cas QUE les modifications unilatérales des clauses contractuelles relatives à la rémunération du salarié et au remboursement des frais exposés par lui pour le besoin de son travail, imposées au salarié qui les refuse, constituent des manquements de l'employeur à ses obligations contractuelles suffisamment graves pour lui rendre imputable la rupture du contrat de travail dont le salarié a été contraint de prendre l'initiative ; qu'en retenant que ces manquements ne seraient pas d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation salariale, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
ET ALORS QU'en retenant, pour écarter la gravité du manquement de l'employeur, que la suppression de la majoration du travail des samedis et dimanches et de la prise en charge de l'intégralité des frais de transport aurait été compensée par l'octroi d'autres avantages, quand cette circonstance, fût-elle avérée, n'était pas de nature à atténuer la gravité du manquement de l'employeur, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
ALORS en toute hypothèse QU'en retenant, pour écarter la gravité du manquement de l'employeur, que la suppression de la majoration du travail des samedis et dimanches et de la prise en charge de l'intégralité des frais de transport aurait été compensée par l'octroi d'autres avantages, la cour d'appel qui n'a pas chiffré les sommes dues à la salariée au titre des avantages perdus et celles résultant des avantages nouveaux et n'a dès lors pas caractérisé une compensation effective, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du code civil.
ALORS de plus QUE Mme Martine X...
Z... faisait valoir que, titulaire d'un contrat de travail lui garantissant un temps partiel à hauteur de 150 heures mensuelles, elle s'était vue imposer, dès le transfert de son contrat de travail, un planning ne prévoyant que 131 heures de travail pour le mois de février 2012 et 140 heures pour le mois de mars 2012 ; qu'en s'abstenant de rechercher si ce manquement de la société cessionnaire à son obligation de fournir le travail convenu et la rémunération correspondante ne justifiait pas que lui soit imputée la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
ALORS encore QUE les parties au contrat de travail avaient convenu d'une répartition des horaires de travail ; qu'en jugeant l'employeur autorisé à modifier unilatéralement la répartition convenue, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
ET ALORS en tout cas QU'en se bornant à retenir que la salariée ne pouvait se plaindre d'une modification de ses horaires dès lors qu'elle était prévenue de ses horaires en début de mois par la remise d'un planning, sans répondre aux conclusions de Mme Martine X...
Z... qui faisait valoir que la société Vivre et domicile lui imposait des changements d'horaires la veille pour le lendemain, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Mme Martine X...
Z... au paiement de la somme de 4 126, 50 euros au titre du préavis non effectué.
AUX MOTIFS QUE la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission ; que la salariée en démissionnant aurait dû respecter un préavis d'une durée de deux mois et la société Vivre et Domicile est en conséquence bien fondée à solliciter la condamnation de Mme Martine X...
Z... à lui régler une somme de 4. 126, 50 € brut au titre de l'indemnité de compensatrice du préavis non effectué.
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif critiqué par le présent moyen en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile.
ET ALORS en toute hypothèse QU'en cas de démission, l'existence et la durée du préavis sont fixés par la loi, ou par convention ou accord collectif de travail et, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et dans la profession ; qu'en affirmant que « la salariée en démissionnait aurait dû respecter un délai de deux mois » sans préciser l'origine de ce préavis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 12237-1 du code du travail.