LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble les articles L. 442-5, R. 914-32, R. 914-49 et R. 914-77 du code de l'éducation applicables au litige ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 15 juin 2009, M. Z... a été admis au concours de recrutement des professeurs des écoles des établissements sous contrat privé d'association avec l'Etat ; que le 19 juin 2009, la commission académique de l'accord collégial, chargée de donner, pour les établissements catholiques, l'accord du chef d'établissement au maître prévu par les dispositions du code de l'éducation nationale propres aux personnels des établissements d'enseignement privé, lui a notifié que l'agrément pour enseigner dans l'enseignement catholique lui était refusé, ce qui lui interdisait de postuler sur un emploi au sein de l'enseignement catholique et d'intégrer la seconde année de formation professionnelle ; que cette décision a été confirmée par la commission d'appel ; que M. Z..., le syndicat de l'enseignement privé du Rhône (SEPR) CFDT et la fédération Formation et enseignement privés (FEP) CFDT ont saisi la juridiction prud'homale de demandes dirigées contre M. A..., pris en sa qualité de directeur du centre de l'Oratoire, le Syndicat national des chefs d'établissement d'enseignement libre (SNCEEL), le Syndicat national des directeurs d'écoles primaires et maternelles privées (Synadec), le Syndicat national des directeurs d'établissement du second degré (Synadic), l'Union nationale de l'enseignement technique privé (UNETP) et la commission académique de l'accord collégial, tendant à ce que le refus d'accord collégial opposé à M. Z... soit jugé inexistant et à défaut nul et ses auteurs condamnés au paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que pour se déclarer incompétente et renvoyer les parties à mieux se pourvoir, la cour d'appel retient que selon l'article L. 442-5 du code de l'éducation, modifié par l'ordonnance n° 2008-1304 du 11 décembre 2008, les maîtres des établissements de l'enseignement privé liés à l'Etat par contrat ont la qualité d'agents publics et ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'Etat, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié, que le refus d'agrément intervenu en application de l'article R. 914-77 du code de l'éducation, qui subordonne l'affectation d'un candidat à un service vacant dans un établissement d'enseignement privé sous contrat d'association à l'accord du directeur de ce dernier, est soumis à l'appréciation de l'inspection académique qui, en cas de refus sans motif légitime, ne peut procéder à la nomination de maîtres délégués dans la discipline concernée au sein de l'établissement, que l'agrément délivré par la commission académique de l'accord collégial n'est pas un acte détachable de la procédure de recrutement d'un agent contractuel de droit public qui, en cas d'issue favorable, ne sera lié à l'établissement au sein duquel il enseignera par aucun contrat de travail susceptible de fonder la compétence du conseil de prud'hommes et qu'en conséquence, la juridiction administrative est seule compétente pour connaître du litige ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les demandes de M. Z... et des organisations syndicales étaient dirigées contre une personne physique et des personnes morales de droit privé, et tendaient à la reconnaissance de l'inexistence ou de la nullité de la décision de refus d'accord collégial opposé à M. Z... par la commission académique de l'accord collégial, acte de droit privé détachable de la procédure de recrutement d'un agent contractuel de droit public, ainsi qu'à la condamnation des auteurs de ce refus à des dommages-intérêts, et relevaient donc des seules juridictions de l'ordre judiciaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 février 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne solidairement M. A..., les syndicats SNCEEL, Synadec, Synadic, l'union UNETP et, la Commission académique de l'accord collégial aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne solidairement M. A..., les syndicats SNCEEL, Synadec, Synadic, l'union UNETP et, la Commission académique de l'accord collégial, à payer à M. Z..., au syndicat de l'enseignement privé du Rhône CFDT et à la fédération formation et enseignement privés CFDT, la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. Z..., le syndicat de l'enseignement privé du Rhône CFDT et la fédération Formation et enseignement privés - CFDT.
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué de s'être déclaré incompétent au profit du tribunal administratif pour statuer sur la demande tendant à voir dire inexistant l'accord collégial opposé à Monsieur Z... pour son recrutement dans l'enseignement privé catholique, à défaut de le voir dire nul, à ce qu'il soit constaté qu'il pouvait postuler à tout emploi au sein de l'enseignement catholique sous contrat d'association sans avoir à se soumettre à la procédure d'accord collégial, et à la condamnation des défendeurs à lui verser des dommages et intérêts et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile
AUX MOTIFS PROPRES QUE selon l'article 1er de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 relative à la situation des maîtres des établissement d'enseignements privés sous contrat, codifié sous l'article L 442-5 du code de l'éducation, modifié par l'ordonnance n° 2008-1304 du 11 décembre 2008, les établissements d'enseignement privés du premier et du second degré peuvent demander à passer avec l'Etat un contrat d'association à l'enseignement public, s'ils répondent à un besoin scolaire reconnu qui doit être apprécié en fonction des principes énoncés aux articles L. 141-2, L. 151-1 et L. 442-1 ; que dans les classes faisant l'objet du contrat d'association, l'enseignement est dispensé selon les règles et programmes de l'enseignement public et confié, en accord avec la direction de l'établissement, soit à des maîtres de l'enseignement public, soit à des maîtres liés à l'Etat par contrat ; que ces derniers, en leur qualité d'agent public, ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'Etat, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié, dans le cadre de l'organisation arrêtée par le chef d'établissement, dans le respect du caractère propre de l'établissement et de la liberté de conscience des maîtres ; que le refus d'agrément intervenu en application de l'article R 914-77 du code de l'éducation, qui subordonne l'affectation d'un candidat à un service vacant dans un établissement d'enseignement privé sous contrat d'association à l'accord du directeur de ce dernier, est soumis à l'appréciation de l'autorité académique qui, en cas de refus sans motif légitime, ne peut procéder à la nomination de maîtres délégués dans la discipline concernée au sein de l'établissement ; que l'agrément délivré par la Commission académique de l'accord collégial n'est pas un acte détachable de la procédure de recrutement d'un agent contractuel de droit public qui, en cas d'issue favorable, ne sera lié à l'établissement au sein duquel il enseignera par aucun contrat de travail susceptible de fonder la compétence du conseil de prud'hommes ; qu'en conséquence, la juridiction administrative est seule compétente pour connaître du présent litige ; que le jugement entrepris sera donc confirmé ;
ALORS QUE si l'autorité académique n'a pas le pouvoir d'imposer la candidature d'un maître à un chef d'établissement privé sous contrat, l'agrément d'un maitre est un acte d'une personne de droit privé ; que le litige portant sur le refus d'accepter la candidature à tout poste de l'enseignement privé constitue un acte relevant d'une personne morale de droit privé dont la régularité ne peut être appréciée que par une juridiction judiciaire ; qu'en statuant autrement, la cour d'appel a violé les articles L.442-5, R.914-32, R.914-49 et R.914-77 et du code de l'éducation, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III,
et ALORS en tout cas QUE le recrutement des maitres de l'enseignement privé est soumis au seul accord du chef d'établissement, à l'exclusion de celui de tout autre organisme de droit privé ; que les procédures internes à l'enseignement catholique, antérieures à l'accord du chef d'établissement constituent des actes purement privés, extérieurs à la procédure prévue par le code de l'éducation, et ressortissant comme tels à la seule compétence du juge judiciaire ; qu'en disant le contraire, la cour d'appel a encore violé les articles L.442-5, R.914-32, R.914-49 et R.914-77 du code de l'éducation ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE le statut de Monsieur Y... Z... le fait bénéficier des dispositions de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 dite loi Debré et des dispositions spéciales propres aux maîtres contractuels visés par la loi dite Censi du 5 janvier 2005 et la Jurisprudence du Conseil d'Etat qui donne au juge administratif l'exclusivité de la compétence ; que trois conditions doivent être réunies pour que le Conseil de Prud'hommes se déclare matériellement compétent : le litige doit être individuel, un contrat de travail doit exister et le litige doit être né à l'occasion du contrat de travail ; que le contrat de travail est caractérisé par trois éléments : fourniture d'un travail, versement d'une rémunération et existence d'un lien de subordination; que Monsieur Y... Z... est inspecté, noté et rémunéré par l'Etat ; que les syndicats SNCEEL, SYNADEC, SYNADIC, UNETP, la Commission Académique de l'accord collégial et Monsieur Thierry A... n'ont jamais été l'employeur ou même seulement les employeurs potentiels de Monsieur Y... Z...; que l'employeur doit disposer à l'égard du salarié d'un pouvoir de direction de surveillance, d'instruction et de commandement ; qu'en l'espèce le lien de subordination n'est pas établi ; que le Conseil de Prud'hommes n'a pas les attributions textuelles et la compétence pour constater que l'accord collégial est inexistant et pour dire que Monsieur Y... Z... doit être admis à postuler à tout emploi au sein de l'enseignement privé catholique sous contrat d'association sans avoir à passer à nouveau par la procédure d'accord collégial ; que le Conseil de Prud'hommes n'a pas les attributions textuelles et la compétence pour dire que le refus de l'accord collégial est nul et que les auteurs du refus collégial ont violé les règles applicables à tout recrutement ;
ALORS QUE ne justifie pas une décision d'incompétence au profit de la juridiction administrative la seule constatation de l'absence de contrat de travail de droit privé ou la seule incompétence de la juridiction prud'homale; qu'en statuant ainsi par un motif inopérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III
ALORS QUE s'agissant de statuer sur un recrutement la juridiction prud'homale ne saurait décliner sa compétence sans violer l'article L.511-1 du code du travail
ET ALORS QUE même sans texte, la cour d'appel a compétence pour statuer, au besoin par évocation, sur la validité d'un acte de droit privé faisant grief ; qu'en déclinant sa compétence, la cour d'appel a encore violé l'article 79 du code de procédure civile.