LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles 1315 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par lettre du 9 décembre 2009, Mme X... a sollicité l'Etablissement français du sang (EFS) pour bénéficier d'une formation en technique de laboratoire pour effectuer des remplacements ; qu'elle a intégré l'EFS le 11 janvier 2010 ; qu'un contrat de travail à durée déterminée de quinze jours lui a été proposé au mois d'avril 2010 ; que Mme X... a refusé de le signer ; que l'EFS a été établi un bulletin de salaire pour la période du 6 au 16 avril 2010 ; que Mme X... a saisi la juridiction prud'homale afin de voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail et obtenir paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de ce contrat ;
Attendu que pour débouter Mme X... de ses demandes, la cour d'appel retient que celle-ci reconnaît avoir intégré la structure de l'EFS dès le 11 janvier 2010 à la suite d'une demande écrite en date du 9 décembre 2009 sollicitant une formation en technique en laboratoire, qu'elle admet ne jamais avoir été payée, qu'elle n'a, avant avril 2010 et la proposition d'un contrat à durée déterminée, émis aucune réclamation de ce chef alors que le salaire ayant un caractère alimentaire est la contrepartie nécessaire de tout travail, que les attestations de M. Y..., chef d'équipe, de Mme Z..., assistante achat, de Mme A..., assistante de gestion, de Mme B..., assistante de direction, mentionnent toutes que Mme X... était intégrée dans l'équipe en tant que stagiaire désireuse de perfectionner ses compétences, que par ailleurs, si un bulletin de paie a été émis pour le mois d'avril, Mme X... a toujours refusé de signer le contrat qui lui était proposé pour la période allant du 6 avril au 16 avril, qu'il n'y avait donc jamais eu accord de volontés pour la signature d'un contrat de travail, qu'en l'absence de preuve d'une rémunération et d'un lien de subordination dès le 11 janvier 2010, il convient de constater qu'aucun contrat de travail ne liait les parties à cette date et que Mme X... exerçait ses activités en tant que stagiaire non rémunérée ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'elle constatait, en l'absence de convention de stage, que Mme X... avait produit divers documents parmi lesquels un bulletin de paie, un planning précisant ses activités successives établi par l'EFS , la cour d'appel, en faisant supporter à celle-ci la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne l'Etablissement français du sang aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'Etablissement français du sang à payer à la SCP Waquet, Farge et Hazan la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté que l'existence d'un contrat de travail liant les parties n'est pas établie, et débouté Mme X... de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... reconnaît avoir intégré la structure de l'ESF dès le 11 janvier 2010 à la suite d'une demande écrite en date du 9 décembre 2009 sollicitant « une formation en technique en laboratoire » ; qu'elle admet ne jamais avoir été payée ; qu'or force est de constater que, de manière surprenante pour une personne se prétendant salariée, elle n'a, avant avril 2010 et la proposition d'un contrat à durée déterminée, émis aucune réclamation de ce chef alors que le salaire ayant un caractère alimentaire, est la contrepartie nécessaire de tout travail ; que les attestations de M. Y..., chef d'équipe, de Mme Z..., assistante achat, de Mme A..., assistante de gestion, de Mme B..., assistante de direction, mentionnent toutes que Mme X... était intégrée dans l'équipe en tant que stagiaire désireuse de perfectionner ses compétences ; que par ailleurs, si un bulletin de paie a été émis pour le mois d'avril, Mme X... a toujours refusé de signer le contrat qui lui était proposé pour la période allant du 6 avril au 16 avril ; qu'il n'y a donc jamais eu accord de volontés pour la signature d'un contrat de travail ; qu'en l'absence de preuve d'une rémunération et d'un lien de subordination dès le 11 janvier 2010, il convient de constater qu'aucun contrat de travail ne liait les parties à cette date et que Mme X... exerçait ses activités en tant que stagiaire non rémunérée ; que l'existence d'un contrat de travail n'ayant pas été établie, les demandes de Mme X... ne peuvent prospérer ;
1. ALORS QU'en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ; que l'arrêt attaqué constate que l'Etablissement Français du Sang a délivré un bulletin de paie à Mme X... pour la période du 6 au 30 avril 2010 et qu'il lui a payé les salaires correspondants, ce dont il résulte l'apparence d'un contrat de travail; qu'en faisant néanmoins peser sur Mme X... la charge de la preuve de l'existence d'un contrat de travail et d'un lien de subordination avec l'Etablissement Français du Sang, y compris à compter du 6 avril 2010, quand il incombait à ce dernier de démontrer le caractère fictif du contrat de travail apparent résultant de la délivrance d'un bulletin de paie et du paiement des salaires correspondants, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L.1221-1 du code du travail ;
2. ALORS QUE Mme X... a versé aux débats un planning, établi par l'EFS, précisant ses affectations successives au sein de l'établissement du 11 janvier 2010 au 2 avril 2010, ce dont il résultait l'existence d'un contrat de travail apparent avec l'EFS dès le 11 janvier 2010 (conclusions d'appel de Mme X..., p.5 et 6); qu'en ne s'expliquant pas sur cet élément, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ;
3. ALORS QUE ne constitue pas un stage mais une prestation de travail relevant du salariat et ouvrant droit à rémunération la prestation exécutée en dehors de tout cursus pédagogique; qu'en jugeant que Mme X... avait exercé ses activités au sein de l'EFS de janvier à avril 2010 en tant que stagiaire non rémunérée, sans constater que ce prétendu stage s'inscrivait dans le cadre de ses études, ni qu'il avait donné lieu à la conclusion d'une convention de stage avec un établissement d'enseignement, la cour d'appel a violé l'article 9 de la loi n°2006-396 du 31 mars 2006 applicable au litige.