LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 février 2016), que la société Chiron ACVF (la société Chiron), spécialisée dans la transformation de viande de boeuf et la production de steaks hachés surgelés, a conclu, le 21 décembre 2004, un contrat d'approvisionnement avec la société Lucie, centrale de référencement des sociétés du groupe Leclerc ; qu'après avoir procédé, le 24 août 2005, à un retrait préventif des produits de la société Chiron et avoir fait analyser des échantillons de ces produits, la société Lucie, par lettre du 12 septembre 2005, a résilié le contrat en invoquant des réclamations de consommateurs, des défauts graves et des non-conformités aux spécifications contractuelles et réglementaires ; qu'estimant brutale la rupture de leur relation commerciale, la société Chiron et M. X..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, ont assigné la société Sinergy, venue aux droits de la société Lucie, en paiement de dommages-intérêts, sur le fondement des articles L. 442-6, I, 5° du code de commerce et 1382 du code civil ;
Attendu que la société Chiron et M. X..., ès qualités, font grief à l'arrêt du rejet de leur demande alors, selon le moyen, que si l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce institue une responsabilité d'ordre public à laquelle les parties ne peuvent pas renoncer par anticipation, il ne leur interdit pas de convenir des modalités de la rupture de leur relation commerciale ; que lorsqu'il est contractuellement stipulé que la résiliation immédiate ne pourra être prononcée que pour un manquement spécifiquement défini, l'un des cocontractants ne peut rompre la relation commerciale que si ce manquement est caractérisé ; qu'en l'espèce, l'article 13.2 du contrat d'approvisionnement conclu entre les sociétés Chiron et Lucie prévoyait qu'une résiliation immédiate ne pouvait être prononcée qu' « en cas de manquements graves pouvant générer un risque pour la santé et/ou la sécurité des consommateurs » ; qu'en retenant pourtant que « la société Lucie peut faire état des dispositions in fine [de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce] pour prétendre que la gravité des manquements de la société Chiron justifiait qu'elle mette fin immédiatement au contrat », cependant que la société Lucie ne pouvait invoquer que les manquements contractuellement prévus par l'article 13.1 du contrat d'approvisionnement, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce que la gravité du comportement d'une partie à une relation commerciale autorise l'autre partie à y mettre fin sans préavis ; qu'ayant caractérisé la gravité du manquement de la société Chiron à ses obligations contractuelles et réglementaires, la cour d'appel a pu en déduire, peu important les modalités formelles de résiliation contractuelle, que la société Lucie était fondée à rompre sans préavis leur relation commerciale; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses deuxième à huitième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Chiron ACVF aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Synergie et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Chiron ACVF et M. X..., ès qualités.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société Chiron et M. X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de leurs demandes tendant à ce que la société Sinergy soit condamné à lui payer une somme, en principal, de 8 650 000 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur l'existence d'une rupture brutale de la relation commerciale liant les deux sociétés : que la société Chiron fait valoir que le contrat a été abusivement et brutalement rompu, ainsi que l'ont déjà reconnu plusieurs juridictions, en ce que la société Lucie a invoqué les termes de l'article 13.2 du contrat pour cesser immédiatement et définitivement toute activité et collaboration avec elle, faisant état de motifs qui ne correspondaient pas à la condition contractuelle ; qu'elle estime que les réclamations ne sont justifiées, ni qualitativement ni quantitativement, notamment par l'analyse critiquable du laboratoire Histalim ou par l'expertise judiciaire ; qu'elle soutient que la société Lucie n'a procédé à aucun retrait des marchandises et a continué à les vendre, s'affranchissant alors du principe de précaution et du respect de la procédure obligatoire résultant du règlement CE4 n° 178/2002 ; qu'elle estime par conséquent que la résiliation unilatérale du contrat qui n'était justifiée par aucune situation grave et urgente constitue une rupture brutale des relations commerciales engageant la responsabilité de la société Lucy en application de l'article L. 442-6 du code de commerce ; que la société Sinergy qui vient aux droits de la société Union des Coopérateurs Indépendants Lucie, rappelle que les parties ont signé le 21 décembre 2004 un contrat « premier prix », qui prévoyait des spécifications auxquelles les produits devaient répondre, notamment le code des usages pour les viandes hachées et les préparations de viandes hachées préparées à l'avance » et que l'article 2-6 prévoyait la possibilité de retirer de la vente des produits pour leur destruction en cas de défaut ou de non-conformité par rapport aux spécifications, que la société Chiron a commis de nombreux manquements contractuels et réglementaires (non-respect des spécificités, température non conforme), dont elle a été informée et qu'elle a pour certains reconnus (présence de corps étrangers), que ces manquements mettaient en jeu la santé des consommateurs, tout particulièrement les enfants, et justifiaient le retrait des marchandises en vertu du principe de précaution ; que les réclamations ont été multiples depuis février 2005 et persistantes ; que les non conformités sont établies par les analyses histologiques non sérieusement contestables du laboratoire Histamil et du Professeur Y... ; qu'elle relève que les motifs des décisions relatives aux admissions de créance qui ne concernent pas les mêmes parties, ne sont pas transposables ; qu'elle fait valoir que la résiliation du contrat par application de l'article 13.2 du contrat sans préavis était justifiée et que les manquements de Chiron lui interdisent d'invoquer le bénéfice de l'article L 442-6 I 5° du code de commerce ; mais que les parties signaient le 21 décembre 2004 un contrat « premier prix » qui fixait les droits et obligations des parties ; que le contrat contenait un article 2 « qualité » qui renvoyait à une annexe I « fiche de spécification », précisait un programme de collaboration pour la prévention des risques (article 3), la durée et la résiliation du contrat (article 13-1 et 13-2), que le 12 septembre 2010, la société Lucie a résilié le contrat avec cessation immédiate de l'approvisionnement dès réception du courrier par Chiron ; que la société Lucie faisait état de défauts graves et non-conformités aux spécifications contractuelles et à la réglementation en vigueur dont il résultait un « déficit de confiance » pour faire savoir à Chiron qu'elle cessait en application de l'article 13.2 du contrat toute collaboration avec elle et lui indiquait que dès la réception du courrier, elle cesserait tout approvisionnement des centrales Leclerc ; que c'est toutefois en méconnaissance des termes de l'article 13.2 de la convention « premier prix » signé par les parties le 21 décembre 2004 que la société Lucie a procédé de la sorte alors que ce texte prévoyait une cessation immédiate de toute collaboration en cas de « manquement grave pouvant générer un risque pour la santé et/ou la sécurité des consommateurs » que le courrier du 12 septembre 2005 n'évoquait pas et alors qu'aucune allusion à un danger quelconque des produits livrés par Chiron n'avait été faite auparavant ; que toutefois un cocontractant peut mettre fin au contrat de façon unilatérale sans préavis lorsque l'autre cocontractant manque gravement à ses obligations ; que si le principe de responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales de l'article L 442-6I 5° est invoqué par Chiron pour prétendre à une indemnisation, la société Lucie peut faire état des dispositions in fine de ce texte pour prétendre que la gravité des manquements de la société Chiron justifiait qu'elle mette fin immédiatement au contrat ; que selon les pièces versées aux débats : que quarante-cinq consommateurs adressaient des courriers de plaintes à Leclerc, exposant avoir acquis des steaks surgelés Eco + présentant des corps étrangers, morceaux de plastic, fil de fer, et mettaient en cause le goût, la couleur, l'odeur dégagée, la consistance des steaks ; que ces plaintes ont été portées à la connaissance de Chiron, ainsi qu'en attestent les réponses apportées par cette société notamment au problème de présence de corps étranger (os et morceaux de plastic) ; que la société Lucie a procédé à un plan de contrôle par des analyses des produits par le laboratoire Histamil, dont les résultats annexés au courrier du 21 septembre 2005 faisaient état de la présence de tissus lymphoïde, glandes séreuses, os/cartilage, muqueuse ; que l'expert désigné le 14 juin 2006 par le président du tribunal de commerce de Caen a déposé un rapport ; qu'il a analysé des prélèvements sur des échantillons « assez nombreux et étalés dans le temps et dans l'espace pour être représentatifs de la production de steaks Eco + 2005 », qu'il relevait qu'il ne pouvait «attester le respect certain de la norme juridique européenne interdisant l'usage de VMS ( viande séparée mécaniquement) pour la viande hachée », que « la présence de viandes mal parées (présence de glande salivaire) et de VSM probable conforte l'hypothèse de non-conformité aux normes règlementaires françaises sur ces divers points », que 50 des 86 échantillons n'étaient pas «conformes à la norme histologique fixée dans le code des usages» et que « les défauts de parage ou la présence éventuelle de VSM ne sont pas conformes aux normes générales sur l'origine de viandes hachées énoncées dans le code des usages » ; que l'expert concluait : « la question du risque sanitaire de telles denrées existe bien », et que « l'ensemble du lot doit être écarté de la consommation humaine » ; que les conclusions du rapport de l'expert sont bien postérieures à la rupture mais elles confortent amplement les griefs détaillés par courrier du 12 septembre 2005 et traduisent les manquements déjà constatés tout particulièrement par la présence de corps étrangers dans les steaks et d''éléments révélés par l'analyse histologique du laboratoire Histalim, interdits par les règlements et qui étaient d'une nature autre que ce que la convention des parties avait prévu : «100 %pure viande de boeuf, 15 % de matière grasse, collagènes / protéines de viande 15 %, épaule, capa, collier, basse côte » ; que tous ces différents éléments traduisent à l'évidence la violation par la société Chiron de ses obligations contractuelles et règlementaires ; que la société Chiron soutiendra vainement que les expertises ne peuvent être retenues alors qu'elles ont été réalisées avec sérieux et compétence par des laboratoires reconnus au plan national pour les travaux d'histologie qu'ils exécutent, peu important qu'ils aient été ou non certifiés, étant précisé que les deux laboratoires ont obtenu des résultats du même ordre ou encore que la société Leclerc n' a pas appliqué le principe de précaution alors qu'elle suspectait un quelconque danger pour la santé, puisque c'est en raison des manquements graves de la société Chiron qu'elle a résilié le contrat ; qu'elle soutiendra vainement encore que par une attitude contradictoire avec ses propos et ses décisions, la société Lucie n'a pas rappelé immédiatement les lots dont elle l'avait approvisionné, ne respectant pas elle-même ses propres obligations, tout particulièrement le principe de précaution, ces circonstances n'étant pas de nature à supprimer ses propres fautes contractuelles ; qu'elle soutiendra également vainement qu'il s'agit d'une réplique à sa demande de discussion sur les prix, ce qu'aucune pièce ne justifie ; qu'il s'agit en effet ici pour la société Lucie d'avoir constaté des manquements graves qui rendent fondée la cessation immédiate des relations commerciales, sans le moindre préavis, qu'elle n'a commis aucune faute et aucun abus » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « le contrat premier prix signé entre l'Union des Coopérateurs indépendants européens Lucie et la société Chiron le 21 décembre 2004 (sic) ; que les contrats font la loi des parties ; que l'article 2 du contrat qui prévoit que le fabricant garantit les spécifications annexées au présent contrat (annexe 1), ainsi qu'aux exigences réglementaires en vigueur, notamment en matière de sécurité, santé et protection du consommateur ; que l'article 13 qui concerne les conditions de résiliation et en particulier le dernier paragraphe qui permet de résilier immédiatement en cas de manquements graves pouvant générer un risque pour la santé et/ou la sécurité des consommateurs, la résiliation interviendra de plein droit immédiatement et sans mise en demeure, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (sic) ; que la fiche technique du steak haché 100 % pure viande de boeuf 10 X 100 g ECO +, dont la composition est ainsi décrite : 100 % pure viande de boeuf… Epaule, capa, collier, basse côte (sic) ; que la fiche de spécifications produit agro-alimentaire premier prix qui prévoit que le produit doit être conforme à la réglementation en vigueur et/ou a code des usages pour la viande hachée et les préparations des viandes hachées préparées à l'avance (sic) ; que l'art. 10 qui concerne le tarif indique « le prix unitaire des produits pourra être révisé pendant la durée du contrat. Le cas échéant, le Fabricant devra notifier les propositions de nouveaux prix dans un délai de 8 semaines avant la date prévue d'entrée en vigueur. Lucie se réserve le droit de demander au Fabricant de justifier ce nouveau prix » ; qu'un mail de demande de rendez-vous a été adressé à Lucie début août et qu'un mail de confirmation du prix demandé s'en est suivi avec application d'un nouveau prix pour le 4ème trimestre 2005 ; que la société Chiron dit que c'est suite à cette demande que la société Lucie a enclenché un processus de rupture du contrat ; qu'aucune élément dans le dossier permet de confirmer cette hypothèse, même si on peut regretter que le contrat signé en décembre 2004 n'ait pas prévu une clause obligatoire de révision du prix dès un certain pourcentage de hausse de la matière première, sachant que le prix de la viande représente un pourcentage très fort du prix de vente du steak haché ; qu'il convient d'examiner su les défauts constatés par la société Lucie dans la composition des steaks hachés surgelés premier prix Eco + livrés par la société Chiron permettaient à la société Lucie de mettre en oeuvre la résiliation immédiate prévue par l'article 13 du contrat signé le 21.12.2004 ; […] ; sur le respect de la fiche technique et de la composition des steaks : que les steaks hachés devaient contenir les morceaux de boeuf précisés dans la fiche technique, donc de l'épaule, du capa, du collier ou des basses côte donc 100 % de muscle de viande de boeuf ; que les réclamations de consommateurs ont sans doute mis un doute sur la composition des steaks chez la société Lucie et que celle-ci a fait procéder à des analyses histologiques, analyses qui permettent de différencier les morceaux de boeufs qui composent les stocks ; que ces analyses ont été réalisées par un laboratoire dont il n'y a pas de raison de douter du sérieux et de la compétence étant une émanation de l'école vétérinaire de Maison Alfort et en rappelant que ce sont les services vétérinaires qui contrôlent les abattoirs et les fabricants de produits à base de viande ; que le laboratoire Histalim s'annonce comme le premier laboratoire indépendant entièrement dédié à l'histologie alimentaire qui par examen microscopique permet de lister les ingrédients et de vérifier la conformité de la composition par rapport à la réglementation et notamment dans le parage avec pour référentiel le cahier des charges, la règlementation, et les codes des usages ; que les contrôles effectués par le laboratoire Histalim dès le début septembre, font apparaître un taux de non-conforme de 61 % sur les 21 échantillons analysés ; que l'analyse histologique des steaks révèle la présence de tissus lymphoïdes, de tissu conjonctif constitutif, d'esquilles d'os et fragments de tissus cartilagineux, des glandes séreuses et muqueuses, dans des proportions qui les rendent non conformes au code des usages et qui peuvent faire penser qu'il a été utilisé de la VSM qui est interdite car pouvant présenter un risque de santé pour la consommation humaine ; que le rapport de l'expert judiciaire, M. Luc Z... qui a également fait procéder à 65 analyses histologiques par un autre laboratoire, confirme les résultats du premier laboratoire dans de proportions de non conformes très proches puisque le professeur Y..., docteur vétérinaire, conclut que 37 échantillons examinés sur les 65 présentent des éléments qui doivent faire conduire à une non-conformité au regard des critères retenus par le code des usages pour les viandes hachés pur boeuf ; que le rapport judiciaire, particulièrement bien expliqué sur les méthodes employées, leur sérieux, et la confiance que l'on peut accorder aux résultats montre que les 86 analyses histologiques, 58 % sont non conformes ; que le code des usages précise que pour les steaks hachés 100 % viande de boeuf ne doit comprendre que de la viande issue de muscle et en aucun cas des viandes issues de la tête ou de viandes séparées mécaniquement (VSM) (sic) ; que la fiche technique de Lucie prévoyait bien exclusivement les morceaux de boeuf autorisés pour la fabrication ; que la proportion de non conforme indique que la société Chiron n'a pas respecté les termes qualités du contrat ni l'obligation prévue par le code des usages et la règlementation ; sur la possibilité de mettre en oeuvre l'article 13 du contrat : que lors de l'envoi du courrier le 12 septembre 2005, la société Lucie était en possession des premières analyses histologiques du laboratoire Histalim ; que les steaks étaient vendus à marque distributeur et par conséquent les magasins Leclerc pouvaient aussi avoir des craintes pour leur image de marque et leur responsabilité pénale, surtout si des associations de consommateurs faisaient des analyses et trouvaient les mêmes résultats que le laboratoire Histalim ; que la viande hachée est beaucoup consommée par les enfants (sic) qui sont beaucoup plus sensibles au risque de la maladie de Creutzfeld Jacob et que c'est suite à la maladie ESB des bovins que certaines parties du boeuf ont été éliminées de la consommation humaine par le législateur ; qu'un distributeur doit aussi assurer la sécurité alimentaire des produits qu'il vend et donc appliquer le principe de précaution quand des doutes sérieux existent sur la qualité du produit mus en rayon ; que c'est à juste titre que les magasins Leclerc ont appliqué le principe de précaution et suspendu la vente des steaks hachés ECO + fournis par la société Chiron, car présentant des doutes pour la santé des consommateurs et en particulier les enfants, en appliquant les recommandations prévues par le règlement 178/2002 ; que la quantité de non conforme s'est avérée importante, 58 % du total analysé, même si le 12 septembre, au moment de la rédaction du courrier, le nombre d'analyses n'étaient pas le même, mais la société Lucie avait déjà l'information lui indiquant la non-conformité des premières analyses avec une possibilité que cela provienne de VSM, interdite pour la consommation humaine ; que même si le nombre d'analyses n'était pas important, la présence de tissus non autorisés et donc non conformes au contrat, au code des usages et à la règlementation était révélée et que de plus la société Chiron n'avait pas respecté son contrat et ses spécifications, ces deux causes permettaient de mettre en oeuvre la résiliation prévue à l'article 13 puisque celui-ci prévoit en cas de manquements graves pouvant générer un risque pour la santé, la résiliation interviendra de plein droit immédiatement et sans mise en demeure (sic) ; que la société SAS Chiron ACVF et Maître X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan, seront déboutés de toutes leurs demandes, fins et conclusions » ;
ALORS 1/ QUE si l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce institue une responsabilité d'ordre public à laquelle les parties ne peuvent pas renoncer par anticipation, il ne leur interdit pas de convenir des modalités de la rupture de leur relation commerciale ; que lorsqu'il est contractuellement stipulé que la résiliation immédiate ne pourra être prononcée que pour un manquement spécifiquement défini, l'un des cocontractants ne peut rompre la relation commerciale que si ce manquement est caractérisé ; qu'en l'espèce, l'article 13.2 du contrat d'approvisionnement conclu entre les sociétés Chiron et Lucie prévoyait qu'une résiliation immédiate ne pouvaient être prononcée qu' « en cas de manquements graves pouvant générer un risque pour la santé et/ou la sécurité des consommateurs » ; qu'en retenant pourtant que « la société Lucie peut faire état des dispositions in fine [de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce] pour prétendre que la gravité des manquements de la société Chiron justifiait qu'elle mette fin immédiatement au contrat » (arrêt, p. 6, alinéa 2), cependant que la société Lucie ne pouvait invoquer que les manquements contractuellement prévus par l'article 13.1 du contrat d'approvisionnement, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil ;
ALORS 2/ EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE seuls des manquements d'une particulière gravité justifient, à raison du péril urgent qu'ils génèrent, la rupture immédiate d'une relation commerciale établie ; qu'en l'espèce, la société Chiron faisait valoir dans ses conclusions que si les prétendues non-conformités des viandes livrées avaient été constitutives de manquements graves, la société Lucie aurait immédiatement mis en oeuvre la procédure de retrait de marchandises, ce qu'elle n'avait pas fait ; qu'elle soulignait que les magasins Leclerc avaient même continué à écouler leurs stocks après la rupture des relations commerciales (conclusions, p. 17 à 21) ; qu'elle en déduisait que la prétendue non-conformité des marchandises constituait un motif fallacieux de rupture qui ne présentait pas une gravité telle qu'elle justifiait une rupture immédiate des relations commerciales ; qu'en retenant pourtant qu'il était vainement soutenu par l'exposante que la société Lucie n'avait pas immédiatement rappelé les lots « ces circonstances n'étant pas de nature à supprimer ses propres fautes contractuelles » (arrêt, p. 7, alinéa 2), sans rechercher si elles n'établissaient pas l'absence de gravité des manquements allégués, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ;
ALORS 3/ EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE la société Chiron, invoquant les arrêts de la cour d'appel de Caen du 25 mars 2010, soutenait dans ses écritures que les conclusions du rapport d'expertise judiciaire étaient purement hypothétiques puisque elles reposaient sur des probabilités dont l'expert « n'affirme pas qu'elles sont vraisemblables mais qu'elles ne sont pas invraisemblables » (conclusions, p. 24, antépénultième alinéa) ; que pour retenir l'existence de prétendus manquements de la société Chiron, la cour d'appel s'est appuyée sur les conclusions de ce rapport judiciaire en retenant que l'expertise aurait été réalisée « avec sérieux et compétence » par un laboratoire « reconnu au plan national » (arrêt, p. 6, dernier alinéa) ; qu'en adoptant ainsi les conclusions d'un rapport, sans aucunement répondre au moyen déterminant pris de leur caractère hypothétique, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 4/ EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE la société Chiron soutenait dans ses écritures qu'elle n'avait pas été mise en mesure de discuter utilement les conclusions du rapport privé du laboratoire Histamil dans la mesure où celui-ci « a procédé à des prélèvements et des analyses sans respecter la moindre procédure contradictoire ni révéler les protocoles qu'il aurait adoptés » (conclusions, p. 17, alinéa 3) ; que pour retenir l'existence de prétendus manquements de la société Chiron, la cour d'appel s'est appuyée sur les conclusions de ce rapport amiable en retenant que l'expertise aurait été réalisée « avec sérieux et compétence » par un laboratoire « reconnu au plan national » (arrêt, p. 6, dernier alinéa) ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen déterminant des écritures pris d'un défaut de respect du principe du contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 5/ EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE la société Chiron soutenait dans ses écritures que les 45 réclamations de consommateurs, outre leur caractère marginal au regard de la quantité totale vendue, ne pouvaient établir les manquements reprochés dans la mesure où « la preuve de la réalité des réclamations ne sera jamais établie, ni l'identité des clients prétendus, connue » (conclusions, p. 15) ; que pour retenir l'existence de prétendus manquements de la société Chiron, la cour d'appel s'est pourtant appuyée sur ses éléments ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen déterminant des écritures pris d'un défaut de respect du principe du contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 6/ EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE le contractant qui prononce la résiliation unilatérale d'un contrat ne peut se prévaloir de motifs qu'il n'a aucunement invoqués dans la lettre de rupture ; qu'en l'espèce, la société Chiron soutenait expressément que « la lettre de dénonciation du 12 septembre 2005 ne portait aucune mention d'un risque pour la santé ou la sécurité des consommateurs, ce qui de toute évidence la plaçait en dehors du champ d'application de l'alinéa 2 de l'article 13.2 visant une procédure de résiliation immédiate par LRAR sans mise en demeure pour des manquements graves de nature à générer un risque pour la santé et/ou la sécurité des consommateurs » (conclusions, p. 20, alinéa 1er) ; que le tribunal a pourtant considéré que la société Lucie était en droit d'invoquer l'article 13 du contrat « puisque celui-ci prévoit qu'en cas de manquements graves pouvant générer un risque pour la santé, la résiliation interviendra de plein droit immédiatement et sans mise en demeure » (jugement, p. 10, alinéa 1er) ; qu'en statuant de la sorte, à supposer ce motif adopté des premiers juges, sans rechercher si l'existence d'un prétendu risque pour la santé avait été invoquée par la lettre de dénonciation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
ALORS 7/ EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE pour établir que la rupture du contrat d'approvisionnement avait été décidée pour un motif fallacieux, la résiliation constituant en réalité une mesure de rétorsion de la société Lucie en réponse à la demande la société Chiron d'augmentation des prix, l'exposante produisait régulièrement aux débats des courriels des 4 janvier, 5 août et 22 août 2005, précédant immédiatement la rupture, par lesquels les représentants de la société Chiron avaient sollicité une négociation commerciale (pièces n° 25 à 27 selon bordereau de communication de pièces) ; qu'en retenant pourtant que la société Chiron soutient vainement que la rupture des relations commerciales était une réplique à sa demande de discussion sur les prix « ce qu'aucune pièce ne justifie » (arrêt, p. 7, alinéa 3), sans examiner, ni analyser, serait-ce sommairement, les pièces régulièrement versées aux débats par l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 8/ EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE lorsqu'un exploitant du secteur alimentaire considère ou à des raisons de penser qu'une denrée alimentaire qu'il a distribuée ne répond pas aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires, il doit non seulement suspendre la commercialisation de cette denrée, mais également prévenir les autorités administratives compétentes et les consommateurs et, le cas échéant, rappeler les produits déjà achetés ; que le tribunal a retenu que la société Lucie aurait, « à juste titre » suspendu la distribution des steaks vendus par l'exposante « en appliquant les recommandations prévues par le règlement 178/2002 » (jugement, p. 9, pénultième alinéa) ; qu'en statuant ainsi, à supposer ce motif adopté, sans aucunement rechercher, comme elle était invité à le faire (conclusions, p. 19), si la société Lucie avait mis en oeuvre l'intégralité de la procédure de retrait préventif des marchandises, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 19 du règlement (CE) 178/2002 du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires.