LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Attendu que le délai prévu à l'article 612 du code de procédure civile n'ayant couru en l'absence de justification au dossier de la Cour d'une notification du jugement attaqué, le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 668 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1454-12 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Evreux tendant à obtenir de son ancien employeur, la société L2P menuiserie, le paiement de diverses sommes ; que, par ordonnance du 25 juillet 2014, le premier président de la cour d'appel a renvoyé l'affaire devant le conseil de prud'hommes de Louviers ; que le greffe de cette juridiction a convoqué les deux parties pour l'audience de conciliation du 25 septembre 2014 ; que le bureau de conciliation a constaté la caducité de la demande et de la citation du fait de l'absence de M. X... ; que ce dernier a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle ; que, par lettre du 6 octobre 2014, le greffe du conseil de prud'hommes a convoqué les deux parties à une audience de conciliation dont la date a été fixée au 6 novembre 2014, date à laquelle le bureau de conciliation, constatant l'absence du salarié, a de nouveau constaté la caducité de la demande et de la citation ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à obtenir la rétractation de cette caducité ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'ordonnance retient qu'il n'est relevé aucun retour de courrier concernant la convocation de M. X... ; que celui-ci a demandé, par courrier du 25 septembre 2014, à réinscrire son affaire, qu'il a été convoqué un mois et demi plus tard, qu'il soutient ne pas avoir reçu de convocation mais souligne qu'il a seulement pris connaissance de la décision de la deuxième caducité après avoir téléphoné plusieurs fois au conseil ; qu'il doit être relevé que ce salarié, en soulignant qu'il avait téléphoné plusieurs fois au conseil, démontre qu'il était en attente d'une décision ; que lui-même ainsi que son défenseur syndical, étant informés de la date d'audience du 6 novembre 2014, savaient parfaitement qu'ils avaient omis de s'y rendre ; que d'ailleurs M. X... n'a pas donné d'explication sur le motif de ses appels au conseil ; qu'en conséquence, le bureau de conciliation refuse sa demande de rétractation de la seconde caducité car il ne démontre pas un cas fortuit ou de force majeure ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que le salarié, qui le contestait, avait reçu la convocation, le conseil de prud'hommes n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, la décision rendue le 18 décembre 2014, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Louviers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite décision et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Rouen ;
Condamne la société L2P menuiserie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société L2P menuiserie et condamne celle-ci à payer à la SCP Lyon-Caen et Thiriez la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la décision cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen fait grief à la décision attaquée d'avoir rejeté la demande de rétractation de la décision de caducité prononcée le 6 novembre 2014 par le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Louviers et, en conséquence, constaté l'extinction de l'instance ;
Aux motifs que le conseil rappelle que la caducité, spécifique à la conciliation prud'homale, a pour conséquence, si le demandeur n'a pas justifié en temps utile de son absence (c'est-à-dire jusqu'à l'heure de la séance de conciliation), d'entraîner la caducité de la demande et de la citation ; que cependant, le troisième alinéa de l'article R. 1454-12 du Code du travail précise que : " la demande ne peut être réitérée qu'une seule fois, à moins que le bureau de conciliation, saisi sans forme, ne constate que le demandeur n'a pu comparaître sur sa deuxième demande par suite d'un cas fortuit " ; qu'en l'espèce, la formulation de l'article R. 1454-12 du Code du travail dit que l'absence du demandeur à l'audience de conciliation, faisant suite à une deuxième demande, est justifiée par un cas fortuit, et que ce manquement ne serait pas pris en compte par le juge prud'homal et une nouvelle audience de conciliation pourrait être envisagée ; que de même, l'article 407 du Code de procédure civile dispose que si une partie qui entend contester une décision de caducité doit, soit saisir le juge qui l'a rendue, soit saisir le bureau de conciliation d'une rétractation de caducité et ce n'est qu'en cas de refus de rétractation que le demandeur pourra saisir la Cour de cassation ; que concernant la convocation, le greffe doit aviser le demandeur du lieu, jour et heure de la séance du bureau de conciliation à laquelle l'affaire sera appelée, soit verbalement lors de la présentation de la demande, soit par lettre simple (C. trav., art. R. 1452-3) ; que conformément aux dispositions de l'article R. 1452-3 du code du travail il ne peut être contesté que Monsieur X... ainsi que la partie défenderesse ont bien été convoqués par lettre simple devant le bureau de conciliation à l'audience de ce jour ; que la défense reconnaît avoir reçu sa convocation ; que le bureau de conciliation ne relève aucun retour de courrier concernant la convocation de Monsieur X... ; que Monsieur X... a demandé par courrier du 25 septembre 2014 à réinscrire son affaire, qu'il était convoqué un mois et demi plus tard. Que ce dernier soutient ne pas avoir reçu de convocation, mais souligne qu'il a seulement pris connaissance de la décision de la deuxième caducité après avoir téléphoné plusieurs fois au conseil ; que le Bureau de conciliation relève que Monsieur X..., en soulignant qu'il avait téléphoné plusieurs fois au conseil, démontre que ce dernier était en attente d'une décision ; que lui-même ainsi que son défenseur syndical étant informé de la date d'audience du 6 novembre 2014 5 savaient parfaitement qu'ils avaient omis de s'y rendre ; que d'ailleurs Monsieur X... devant le bureau conciliation n'a pas donné d'explication sur le motif de ses appels au conseil ; qu'en conséquence, le bureau de conciliation refuse la demande rétractation de la seconde caducité de Monsieur X... car ce dernier ne démontre pas un cas fortuit ou de force majeure ;
Alors que, d'une part, la validité de la convocation en la forme ordinaire par la voie postale ne doit être admise que lorsque cette convocation a abouti à la remise de la lettre à l'intéressé par la poste ; que lorsque le destinataire conteste avoir reçu un pli simple, il appartient à celui qui se prévaut de cette convocation de prouver que ce pli a effectivement atteint le destinataire ; qu'en se bornant à retenir que la lettre simple de convocation à l'audience du 6 novembre 2014 était nécessairement parvenue à Monsieur X... qui contestait l'avoir reçue motif pris de ce que ladite lettre n'a pas été retournée au greffe et que Monsieur X... ne donne pas d'explication sur les motifs des appels téléphoniques au greffe du Conseil de Prud'hommes, le Conseil de Prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 1454-12 du Code du travail, ensemble l'article 668 du Code de procédure civile ;
Alors d'autre part, la validité de la convocation en la forme ordinaire par la voie postale ne doit être admise que lorsque cette convocation a abouti à la remise de la lettre à l'intéressé par la poste ; que lorsque le destinataire conteste avoir reçu un pli simple, il appartient à celui qui se prévaut de cette convocation de prouver que ce pli a effectivement atteint le destinataire ; qu'en se bornant à retenir que la lettre simple de convocation à l'audience du 6 novembre 2014 était nécessairement parvenue à Monsieur X... qui contestait l'avoir reçue motif pris de ce que la Société L2P Menuiserie reconnaît avoir reçu sa convocation, le Conseil de Prud'hommes s'est fondé sur un motif inopérant pour rejeter la demande de rétraction de la caducité et a violé l'article R. 1454-12 du Code du travail, ensemble l'article 668 du Code de procédure civile.