LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Max X...,
-
M. Francis Z...,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la HAUTE-LOIRE, en date du 15 octobre 2016, qui, pour vols en bande organisée avec arme et tentative de vol en bande organisée, en récidive, les a condamnés à quinze ans de réclusion criminelle et cinq ans d'interdiction de porter une arme ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 novembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Y..., conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Y..., les observations de la société civile professionnelle ORTSCHEIDT et de Me BROUCHOT, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par la SCP Ortscheidt pour M. X..., pris de la violation des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, 348, et 351 du code de procédure pénale, ensemble violation des principes de l'oralité et du contradictoire ainsi que des droits de la défense ;
en ce qu'il ressort du procès-verbal des débats, qu'après la clôture des débats, le président a donné lecture des questions auxquelles la cour et le jury auront à répondre, posées dans les termes de l'arrêt de mise en accusation pour ce qui concerne X...et des questions subsidiaires auxquelles la cour et le jury auraient à répondre ;
alors que selon les dispositions combinées des articles 348 et 351 du code de procédure pénale, le président de la cour d'assises, qui a décidé de modifier l'accusation, en ajoutant une ou plusieurs questions subsidiaires ou spéciales, doit en donner lecture au plus tard avant le réquisitoire et les plaidoiries pour permettre à l'accusé ou à son avocat de faire valoir toutes observations utiles à sa défense ; qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats que ce n'est qu'après la clôture des débats que le président de la cour d'assises a, pour ce qui concerne M. X..., lu les questions posées dans les termes de l'arrêt de mise en accusation et les questions subsidiaires auxquelles la Cour et le jury auraient à répondre ; qu'en procédant ainsi, le président a méconnu les textes et les principes visés au moyen ;
Attendu qu'il résulte de la feuille de questions que celles auxquelles la cour et le jury ont eu à répondre ont été posées dans les termes de l'arrêt de mise en accusation ;
Que dès lors, la seconde mention du procès-verbal des débats relative aux questions, selon laquelle, contrairement à la précédente, le président a donné lecture de questions subsidiaires, résulte d'une erreur matérielle ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la SCP Ortscheidt pour M. X..., pris de la violation de l'article 366 du code de procédure pénale ;
en ce qu'il ne résulte pas du procès-verbal des débats que lorsqu'il a donné lecture des réponses faites aux questions et a prononcé l'arrêt portant condamnation, le président de la cour d'assises a informé M. X... de ce que la cour d'assises avait retenu contre lui l'état de récidive légale ;
alors que lorsque la cour d'assises retient l'état de récidive, le président doit en informer l'accusé non seulement lorsqu'il donne lecture des réponses faites aux questions, mais aussi lorsqu'il prononce l'arrêt portant condamnation ; qu'il résulte des mentions de la feuille de questions que la cour et le jury, avant de prononcer la peine, ont constaté l'état de récidive légale à l'encontre de M. X... ; que, toutefois, il ne résulte pas du procès-verbal des débats que, lorsqu'il a donné lecture des réponses faites aux questions et a prononcé l'arrêt portant condamnation, le président de la cour d'assises a informé M. X... de ce que la cour d'assises avait retenu contre lui l'état de récidive légale ; qu'ainsi, le président de la cour d'assises a méconnu le texte susvisé ;
Attendu qu'il résulte, d'une part, des mentions de la feuille de questions, que la cour et le jury, avant de prononcer la peine, ont constaté l'état de récidive de M. X..., d'autre part, de celles du procès-verbal des débats, que le président, lors du prononcé de l'arrêt, s'est conformé aux prescriptions de l'article 366 du code de procédure pénale qui lui font obligation de donner lecture des réponses faites aux questions ;
Qu'il se déduit de ces mentions que le président a informé l'accusé de ce que la cour d'assises avait retenu l'état de récidive ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par la SCP Ortscheidt pour M. X..., pris de la violation des articles 329 et 331 du code de procédure pénale ;
en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que M. F... , témoin, co-accusé ayant bénéficié d'un acquittement en première instance, a été entendu en sa déposition sans avoir prêté le serment prévu par l'article 331 du code de procédure pénale ;
alors que tout témoin cité et dénoncé est acquis aux débats et doit, à peine de nullité, prêter le serment prescrit par l'article 331 du code de procédure pénale ; qu'il ne peut être entendu sans prestation de serment, en vertu du pouvoir discrétionnaire du président que s'il se trouve dans l'un des cas d'empêchement ou d'incapacité prévus par la loi, ou si le ministère public et l'accusé ont renoncé à son audition ; que le co-accusé, initialement compris dans la poursuite, qui a bénéficié d'un acquittement en première instance doit, sauf autre motif d'empêchement, être entendu sous serment ; qu'en procédant à l'audition de M. F... , témoin, co-accusé ayant bénéficié en d'un acquittement première instance sans lui avoir fait prêter le serment prévu par l'article 331 du code de procédure pénale, le président de la cour d'assises a entaché l'arrêt attaqué de nullité ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats que M. G... , co-accusé, ayant fait l'objet d'une décision définitive d'acquittement en première instance, a été entendu sur les faits à titre de simple renseignement, sans prestation de serment ;
Qu'en procédant ainsi, le président s'est conformé aux prescriptions de l'article 335, 8°, du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Brouchot pour M. Z... , pris de la violation des articles 316, 346, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation des droits de la défense ;
"en ce qu'il ressort du procès-verbal des débats que, lors de l'audience du mardi 11 octobre 2016, des conclusions d'incident ont été déposées, d'une part, par l'avocat de M. A... Claude-Loïc, autre accusé, et, d'autre part, par l'avocat de M. X... , également accusé ; qu'après avoir entendu l'avocat général, les avocats de parties civiles, Maître Jean-François B..., avocat de M. A..., Maître Laure C... et Maître Jean-Louis D..., avocats de M. X..., ainsi que MM. A... et X..., accusés, sur ces conclusions d'incident (procès-verbal des débats p. 21), la cour a statué sur ces demandes par arrêt incident le jeudi 13 octobre 2016 (procès-verbal des débats p. 32, 33 et 34) ;
" alors qu'en matière d'incidents contentieux, la cour ne peut statuer que toutes les parties entendues et en particulier la défense, qui doit avoir la parole en dernier ; qu'en l'espèce, il résulte d'aucune mention de cet arrêt incident que M. Z..., accusé, ou son avocat aient été entendus, d'où la méconnaissance des exigences de la défense" ;
Vu l'article 316 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'aux termes du premier alinéa de ce texte, tous incidents contentieux sont réglés par la cour, le ministère public, les parties ou leurs avocats entendus ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats que, saisie de conclusions déposées par les avocats de MM. A... et X..., accusés, tendant à ce que soient accomplis plusieurs actes d'instruction, la cour, par arrêts incidents, a rejeté lesdites conclusions ;
Mais attendu que les mentions du procès-verbal des débats ne mettent pas la Cour de cassation en mesure de s'assurer que M. Z..., ou son avocat, a été entendu sur ces incidents contentieux ;
Qu'ainsi, le texte de loi précité ayant été méconnu, la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen proposé :
I - Sur le pourvoi de M. X... :
Le REJETTE ;
II - Sur le pourvoi de M. Z... :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'assises de la Haute-Loire, en date du 15 octobre 2016, ensemble la déclaration de la cour et du jury et les débats qui l'ont précédée, en leurs seules dispositions relatives à M. Z... , toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises de l'Allier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises de la Haute-Loire et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix janvier deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.