LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° Y 16-19.405 et D 16-19.479 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 27 avril 2016), que Mme Y..., engagée en novembre 2002 par l'association l'Ancre, en qualité de moniteur éducateur, est devenue chef de service à compter du 1er octobre 2007 ; qu'elle a, le 18 mai 2012, saisi la juridiction prud'homale en résiliation judiciaire de son contrat de travail au titre d'un harcèlement moral ; qu'après une suspension de son contrat de travail pour cause de maladie, elle a, le 19 juin 2012, été déclarée par le médecin du travail inapte à tout poste dans l'entreprise, avec mention d'un danger immédiat ; qu'elle a, le 19 décembre 2014, été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur la déchéance du pourvoi n° D 16-19.479 de l'employeur, relevée d'office, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 978 du code de procédure civile ;
Attendu que l'employeur, qui s'est pourvu en cassation contre l'arrêt le 24 juin 2016, n'a pas remis au greffe de la Cour de cassation de mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée ; que la déchéance du pourvoi est encourue ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° Y 16-19.405 de la salariée :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement et violation de l'obligation de sécurité de résultat par l'employeur alors, selon le moyen :
1°/ que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que, dans l'affirmative, il doit apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ; qu'en se bornant à énoncer sans aucune précision que la matérialité des faits pouvant faire présumer un harcèlement était caractérisée, sans dire lesquels, de sorte qu'elle n'a pas pu non plus se prononcer utilement sur l'existence d'une preuve contraire apportée par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-12 et L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ qu'elle se fondait essentiellement, pour caractériser le harcèlement qu'elle avait subi, sur un défaut de communication systématique qui l'avait empêchée d'exercer normalement ses fonctions et l'avait régulièrement placée dans des situations gênantes à l'égard de tiers ou de ses subordonnés ; qu'en se bornant à l'énonciation de quelques généralités ou remarques sans rapport avec ce défaut de communication, la cour d'appel, qui n'a pas montré en quoi l'employeur établissait l'absence de harcèlement, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-12 et L. 1154-1 du code du travail ;
Mais attendu que sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve, dont elle a, exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail et sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, déduit à la fois l'existence de faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral et l'existence de justifications par l'employeur d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen du même pourvoi, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
Constate la déchéance du pourvoi n° D 16-19.479 ;
Rejette le pourvoi n° Y 16-19.405 ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me B..., avocat aux Conseils, pour Mme Y... (demanderesse au pourvoi n° Y 16-19.405).
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement et violation de l'obligation de sécurité de résultat de l'association l'Ancre ;
AUX MOTIFS QUE s'agissant du harcèlement, et défaut de prévention de celui-ci, Mme Y... fait état de mise à l'écart, privation de moyen de travailler, de climat difficile ayant dégradé sa santé, tout en relevant qu'elle ne sollicite pas la résiliation avec les effets d'un licenciement nul mais seulement sans cause réelle et sérieuse ; il peut être admis dès lors que lorsque l'association l'Ancre considère que Mme Y... analyse de manière erronée l'exercice de son pouvoir de direction, que la matérialité des faits pouvant dans l'ensemble faire présumer d'un harcèlement se trouve suffisamment caractérisée ; en revanche l'association l'Ancre fait suffisamment ressortir que l' ensemble des faits s' avère étranger à une situation de harcèlement et donc à un défaut de prévention de celui-ci ; cela résulte des témoignages réguliers, non argués de faux et circonstanciés des autres salariés ; les comptes rendus de réunion où était présente l'appelante corrobore cette appréciation ; la non information ponctuelle d'une visite préfectorale est étrangère à du harcèlement ; l'association l'Ancre fait bien ressortir que des différends sur la politique et l'orientation d' activité ont pu naître avec Mme Y..., et qu'elle a sans abus exercé son pouvoir de direction, ayant par ailleurs fait appel à un psychologue pour soutenir les équipes éducatives ; il n'y a jamais eu de propos discourtois ou dégradants à destination de la salariée le médecin du travail sur les dires de Mme Y... a retenu que celle-ci ne pouvait plus oeuvrer dans son environnement professionnel mais sans constat d'une imputabilité à l'employeur et le dossier médical ne relève rien de tel ; le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Mme Y... de ses demandes de ces chefs ;
1°) - ALORS QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que, dans l'affirmative, il doit apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ; qu'en se bornant à énoncer sans aucune précision que la matérialité des faits pouvant faire présumer un harcèlement était caractérisée, sans dire lesquels, de sorte qu'elle n'a pas pu non plus se prononcer utilement sur l'existence d'une preuve contraire apportée par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1152-12 et L 1154-1 d code du travail ;
2°) - ALORS QUE Mme Y... se fondait essentiellement, pour caractériser le harcèlement qu'elle avait subi, sur un défaut de communication systématique qui l'avait empêché d'exercer normalement ses fonctions et l'avait régulièrement placée dans des situations gênantes à l'égard de tiers ou de ses subordonnés ; qu'en se bornant à l'énonciation de quelques généralités ou remarques sans rapport avec ce défaut de communication, la cour d'appel, qui n'a pas montré en quoi l'employeur établissait l'absence de harcèlement, a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1152-12 et L 1154-1 d code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts violation de l'obligation de sécurité de résultat de l'association l'Ancre ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE s'agissant du harcèlement, et défaut de prévention de celui-ci, Mme Y... fait état de mise à l'écart, privation de moyen de travailler, de climat difficile ayant dégradé sa santé, tout en relevant qu'elle ne sollicite pas la résiliation avec les effets d'un licenciement nul mais seulement sans cause réelle et sérieuse ; il peut être admis dès lors que lorsque l'association l'Ancre considère que Mme Y... analyse de manière erronée l'exercice de son pouvoir de direction, que la matérialité des faits pouvant dans l'ensemble faire présumer d'un harcèlement se trouve suffisamment caractérisée ; en revanche l'association l'Ancre fait suffisamment ressortir que l' ensemble des faits s' avère étranger à une situation de harcèlement et donc à un défaut de prévention de celui-ci ; cela résulte des témoignages réguliers, non argués de faux et circonstanciés des autres salariés ; les comptes rendus de réunion où était présente l'appelante corrobore cette appréciation ; la non information ponctuelle d'une visite préfectorale est étrangère à du harcèlement ; l'association l'Ancre fait bien ressortir que des différends sur la politique et l'orientation d' activité ont pu naître avec Mme Y..., et qu'elle a sans abus exercé son pouvoir de direction, ayant par ailleurs fait appel à un psychologue pour soutenir les équipes éducatives ; il n'y a jamais eu de propos discourtois ou dégradants à destination de la salariée le médecin du travail sur les dires de Mme Y... a retenu que celle-ci ne pouvait plus oeuvrer dans son environnement professionnel mais sans constat d'une imputabilité à l'employeur et le dossier médical ne relève rien de tel ; le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Mme Y... de ses demandes de ces chefs ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE pour toutes ces raisons on ne voit pas en quoi on peut déceler dans le comportement des agissements de harcèlement moral en particulier de la part de M. C..., et ce sur quoi Mme Y... vouait étayer la demande de résiliation de son contrat de travail ; non seulement cette demande de résiliation est infondée, mais corrélativement les demandes de dommages-intérêts sollicitées au titre d'une violation en fait non établie des dispositions des articles L 1152-1 et L 4121-1 du code du travail ;
ALORS QUE même en l'absence de harcèlement moral, la responsabilité de l'employeur peut être engagée pour violation de son obligation de sécurité de résultat en cas de souffrance au travail ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si Mme Y... n'avait pas été reconnue inapte à son poste pour cause de danger immédiat, ce qui était nécessairement imputable à ses conditions de travail et à la souffrance qu'elle subissait, et montrait donc le manquement de l'association l'Ancre à son obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 4121-1 du code du travail.