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14/03/2018 | FRANCE | N°16-22409

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 mars 2018, 16-22409


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 juin 2016), que M. Y... a été engagé le 21 mars 2011 par la société Dupont restauration en qualité de chef de cuisine ; qu'à compter du 16 avril 2012, son contrat a été transféré à la société de Restauration collective Casino (R2C) au sein du service de restauration de la Grande Loge de France ; qu'à compter du 1er janvier 2014, il a été mis fin au contrat liant la Grande Loge de France à R2C, au profit de la société Dupont restauration ; que, le 2 janvier 2

014, le salarié s'est vainement présenté à son poste de travail ;

Sur le pr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 juin 2016), que M. Y... a été engagé le 21 mars 2011 par la société Dupont restauration en qualité de chef de cuisine ; qu'à compter du 16 avril 2012, son contrat a été transféré à la société de Restauration collective Casino (R2C) au sein du service de restauration de la Grande Loge de France ; qu'à compter du 1er janvier 2014, il a été mis fin au contrat liant la Grande Loge de France à R2C, au profit de la société Dupont restauration ; que, le 2 janvier 2014, le salarié s'est vainement présenté à son poste de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société R2C fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il dit qu'elle est demeurée l'employeur de M. Y..., en ce qu'il reçoit la CGT Casino restauration en son intervention volontaire et en ce qu'il prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Y... aux torts de la société R2C sauf à en fixer la date au 28 mai 2015, date du jugement du conseil de prud'hommes, statuant à nouveau dit que la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Y... avait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, de la condamner en conséquence à lui payer diverses sommes à titre d'indemnité de préavis plus pour congés payés afférents, à titre d'indemnité de licenciement, au titre des salaires de janvier 2014 jusqu'à la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dire que la somme réglée par elle au salarié viendrait en déduction du montant des condamnations restant dues, d'ordonner le remboursement par la société R2C aux organismes intéressés, des indemnités de chômage éventuellement payées au salarié suite à son licenciement dans la limite de six mois, de rejeter ses demandes à l'encontre de la société Dupont restauration, de la condamner à payer à la CGT Casino restauration une somme à titre de dommages-intérêts, de la condamner aux entiers dépens et à payer diverses sommes en application de l'article 700 du code de procédure civile alors, selon le moyen :

1°/ que l'article L. 1224-1 du code du travail s'applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et poursuit son activité et s'impose aux parties ; que le transfert d'une telle entité s'opère si l'activité est restée la même, qu'elle est servie par des éléments incorporels significatifs tel que la clientèle et qu'elle s'exerce sur le même site ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que la société Dupont restauration avait repris l'activité de restauration du Cercle écossais, auparavant exploitée par la société R2C, dans les mêmes locaux, avec le même « petit matériel » et que cette activité visait la même clientèle, les clients du restaurant ; que pour écarter le transfert, la cour d'appel a retenu que le mode d'exploitation avait été modifié puisqu'il n'y avait plus de production culinaire pour la prestation du midi mais remise à température des plats préalablement confectionnés le soir, et que certains moyens d'exploitation avaient été modifiés puisque le nouveau prestataire était venu avec son propre matériel de cuisine et informatique, que le personnel n'était pas uniquement dédié au Cercle écossais et que tout était géré par une direction régionale ; qu'en statuant par des motifs impropres à écarter le transfert d'un entité économique autonome ayant conservé son identité, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

2°/ que les juges ne peuvent pas dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, aucune des parties n'invoquait le fait que le personnel n'était pas exclusivement dédié au Cercle écossais ; que la société Dupont restauration se contentait d'affirmer que l'entité économique n'avait pas conservé son identité en ce que l'organisation mise en place était différente, la prestation de restauration avait changé, le nouveau prestataire utilisait son propre matériel et le site n'avait plus aucune autonomie en matière de gestion administrative et de ressources humaines ; que le salarié et la société R2C affirmaient, quant à eux, que l'identité de l'activité de restauration du Cercle écossais, qui s'était poursuivie dans les mêmes locaux au profit de la même clientèle, s'était maintenue ; qu'en se fondant pourtant sur l'affectation du personnel pour exclure l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités prévoit que lorsque, dans le délai d'un mois et au plus tard quinze jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, le cédant n'est pas en mesure d'affecter son salarié, ayant le statut d'agent de maîtrise ou de cadre, sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, ce dernier, s'il en exprime la volonté de manière explicite, est transféré chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer ; qu'il en résulte qu'aucun accord entre le salarié et les prestataires successifs n'est imposé ; qu'en affirmant qu'aucun accord écrit de transfert de son contrat de travail n'était intervenu entre le salarié et les sociétés R2C et Dupont restauration pour écarter le transfert conventionnel de son contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

4°/ que les juges ne peuvent pas dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, aucune des parties ne remettait en cause l'expression de volonté du salarié d'être transféré au sein de la société Dupont restauration au jour de la reprise du marché de restauration ; que tant le salarié que la société R2C affirmaient que le salarié avait souhaité être transféré au sein de la société Dupont restauration ; que la société Dupont restauration prétendait uniquement que la seule volonté du salarié ne suffisait pas à emporter le transfert de son contrat de travail en l'absence d'accord tripartite ; qu'en affirmant que la volonté exprimée par le salarié le 5 décembre 2013 n'avait pas de portée juridique au regard notamment des termes du courrier postérieur du salarié, en date du 2 janvier suivant, aux termes duquel il sollicitait des directives de la société R2C dont il estimait qu'à défaut d'accord tripartite, elle demeurait son employeur, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

5°/ que, selon l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités, les conditions du transfert du contrat de travail du salarié s'apprécient dans le délai d'un mois et au plus tard quinze jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le salarié avait, le 5 décembre 2013, indiqué vouloir être transféré au sein de la société Dupont restauration à compter du 1er janvier 2014, date du transfert de l'activité de restauration du Cercle écossais ; qu'en se fondant sur un courrier du 2 janvier 2014, postérieur à la reprise de l'activité par la société Dupont restauration, pour écarter toute portée juridique à la volonté exprimée le 5 décembre précédent, la cour d'appel a violé l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

6°/ que l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités prévoit que lorsque, dans le délai d'un mois et au plus tard quinze jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, le cédant n'est pas en mesure d'affecter son salarié, ayant le statut d'agent de maîtrise ou de cadre, sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, ce dernier, s'il en exprime la volonté de manière explicite, est transféré chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer ; qu'en l'espèce, étaient versées aux débats la déclaration de main courante du 6 janvier 2014 effectuée par le salarié qui avait dénoncé le fait de ne pas pouvoir accéder à son lieu de travail, le restaurant du Cercle écossais, ainsi que les conclusions de première instance devant le juge des référés aux termes desquelles le salarié sollicitait que son contrat de travail soit transféré et poursuivi au sein de la société Dupont restauration ; que la cour d'appel a constaté que le salarié, informé de la perte du marché, avait, le 5 décembre 2013, indiqué vouloir être transféré chez le successeur à compter du 1er janvier 2014 ; qu'en écartant toute portée juridique à la volonté exprimée par le salarié le 5 décembre 2013 au regard notamment des termes de son courrier du 2 janvier 2014 selon lequel le salarié avait indiqué qu'il s'était présenté sur son lieu de travail au restaurant du Cercle écossais et que, faute d'accord entre les parties, il restait salarié de la société R2C, sans s'expliquer sur les différentes manifestations de volonté du salarié traduisant son souhait d'être transféré au sein de la société Dupont restauration et de continuer à travailler dans le restaurant du Cercle écossais, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

7°/ que, selon l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités, l'existence d'un poste disponible équivalent à celui occupé par le salarié s'apprécie dans le délai d'un mois et au plus tard quinze jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur ; qu'en l'espèce, il était constant que les deux offres d'emploi au poste de chef de cuisine en Ile-de-France étaient disponibles à compter des mois de mars et avril 2014, soit postérieurement à la reprise effective de l'activité de restauration par la société Dupont restauration le 1er janvier 2014 ; que la société R2C soutenait et offrait de prouver qu'elle n'était pas en mesure de proposer à M. Y... un poste équivalent à celui qu'il occupait n'entraînant pas de modification de son contrat de travail ou de dépassement du temps de travail initial dont l'importance induirait un déménagement, et avait versé aux débats les registres uniques du personnel de chacun de ses établissement au 31 décembre 2013, ainsi que le registre du personnel centralisé ; qu'en affirmant que la réalité de l'impossibilité de reclasser le salarié à un poste équivalent n'était pas établie, sans constater qu'il existait un poste disponible pouvant être proposé au salarié dans le délai d'un mois et au plus tard quinze jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par la société Dupont restauration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

8°/ qu'il appartient à celui qui l'invoque, et au juge de le caractériser, de démontrer que l'entreprise cédante fait partie d'un groupe ; qu'en l'espèce, la société cessionnaire affirmait péremptoirement que la société R2C faisait partie du groupe Casino, ce que cette dernière contestait, produisant exclusivement les registres d'entrées et de sorties du personnel de ses différents établissements ; qu'en reprochant à la société R2C de ne pas établir son impossibilité de reclasser le salarié au sein du groupe auquel elle appartient, sans autrement justifier de cette appartenance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

9°/ en tout état de cause que l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités prévoit que lorsque, dans le délai d'un mois et au plus tard quinze jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, le cédant n'est pas en mesure d'affecter son salarié, ayant le statut d'agent de maîtrise ou de cadre, sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, ce dernier, s'il en exprime la volonté de manière explicite, est transféré chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer ; que cet article n'impose, à aucun moment, une recherche de poste disponible équivalent à celui occupé antérieurement au sein d'un groupe auquel appartiendrait le cédant ; qu'en l'espèce, l'employeur contestait le périmètre de la recherche de « reclassement » du salarié qui ne s'étendait pas au groupe ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir établi son impossibilité de reclasser son salarié à un poste équivalent au regard notamment de l'importance du groupe auquel il appartient, la cour d'appel a violé l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté, d'une part, qu'il ne résultait pas des pièces versées aux débats et notamment de l'appel d'offre qu'en dehors du « petit matériel » et des locaux, la société Dupont restauration ait exercé et organisé sa prestation dans les mêmes conditions et avec un matériel significatif dépendant du marché, que le mode d'exploitation mis en place par la société entrante différait de celui du marché auquel elle avait succédé et que, selon l'appel d'offre, l'entrant devait notamment fournir un système informatique d'encaissement de son choix, ce dont il résultait qu'il n'y avait pas eu transfert d'une entité économique autonome et, d'autre part, que ni les tableaux ni les registres du personnel produits par la société R2C n'établissaient la réalité de l'impossibilité de reclasser le salarié sur un poste équivalent ; que le moyen, inopérant en ses troisième à septième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société R2C fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a reçu la CGT Casino restauration en son intervention volontaire et a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié aux torts de la société R2C, sauf à en fixer la date au 28 mai 2015, date du jugement du conseil de prud'hommes, de condamner la société R2C à payer à la CGT Casino restauration une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que l'action en justice des syndicats professionnels est limitée aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; que la méconnaissance par l'employeur des dispositions conventionnelles encadrant le transfert des contrats de travail en cas de changement de prestataire de service suite à la perte d'un marché, si elle porte atteinte à l'intérêt individuel du salarié, ne porte pas d'atteinte aux intérêts collectifs de la profession ; qu'en décidant du contraire pour allouer des dommages-intérêts à l'union locale CGT Casino restauration, la cour d'appel a violé l'article L. 2132-3 du code du travail ;

2°/ en tout état de cause que la cassation à intervenir de l'arrêt ayant dit que l'employeur de M. Y... était demeuré la société R2C (critiqué au premier moyen) entraînera l'annulation du chef de l'arrêt ayant reçu l'intervention volontaire du syndicat CGT Casino restauration intervenue dans le cadre d'un conflit relatif à l'application des dispositions d'une convention collective, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a exactement décidé que la non-application, par la société R2C, d'une convention collective portait un préjudice direct à l'intérêt collectif de la profession justifiant l'octroi de dommages-intérêts au profit du syndicat CGT Casino restauration ; que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société R2C Restauration collective Casino aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. Y... et au syndicat CGT Casino restauration la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société R2C Restauration collective Casino

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que l'employeur de M. Y... était demeuré salarié de la société R2C, en ce qu'il a reçu la CGT Casino Restauration en son intervention volontaire et en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Y... aux torts de la société R2C sauf à en fixer la date au 28 mai 2015, date du jugement du conseil de prud'hommes, d'AVOIR statuant à nouveau dit que la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Y... avait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR en conséquence condamné la société R2C à lui payer les sommes de 5 142,12 euros à titre d'indemnité de préavis plus 514,21 euros pour congés payés afférents, de 2 519,64 euros à titre d'indemnité de licenciement, de 43 708,02 euros brute au titre des salaires de janvier 2014 jusqu'à la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail, de 50 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR dit que la somme de 36 758,04 euros réglée par la société R2C au salarié viendrait en déduction du montant des condamnations restant dues, d'AVOIR ordonné le remboursement par la société R2C aux organismes intéressés, des indemnités de chômage éventuellement payées au salarié suite à son licenciement dans la limite de six mois, d'AVOIR rejeté les demandes de la société R2C à l'encontre de la société Dupont Restauration, d'AVOIR condamné la société R2C à payer à la CGT Casino Restauration la somme de 1 000 euros de dommages et intérêts, d'AVOIR condamné la société R2C aux entiers dépens et à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile les sommes de 2 000 euros à M. Y..., de 1 000 euros à la CGT Casino Restauration et 1 500 euros à la société Dupont Restauration ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre.
L'article 1224-1 du code du travail dispose que « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise » ; la Cour de Cassation juge que ces dispositions s'appliquent « à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ;
L'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective applicable stipule « a) qu'une entreprise entrant dans le champ de l'avenant qui se voit attribuer un marché précédemment confié à une autre entreprise entrant également dans le même champ d'application est tenue de poursuivre les contrats de travail des salariés de niveau I-II-III-IV A à l'exception du personnel de statut agent de maîtrise employé par le prédécesseur pour l'exécution exclusive du marché concerné (
) c) Les contrats de travail des salariés de statut agent de maîtrise et cadre sont maintenus chez l'employeur cédant sauf si un accord écrit entre le salarié, le cédant et le successeur prévoit la poursuite du contrat de travail chez le successeur. SI et seulement si, le cédant n'est pas en mesure, dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, de les affecter sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, les salariés de statut agent de maîtrise et cadre, qui en exprimeront la volonté de manière explicite, seront transférés chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer » ;
Constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique ; ni la perte d'un marché de services au profit d'un concurrent, ni la poursuite par l'entreprise entrante d'une activité de restauration même avec une partie du personnel affecté à ce marché ne caractérisent à eux seuls le transfert d'une entité économique autonome dont l'identité est maintenue ;
En l'espèce, si l'activité de restauration s'est maintenue dans les mêmes locaux, il ne résulte pas des pièces versées aux débats et notamment de l'appel d'offre lancée par le CERP, cercle écossais, gestionnaire délégué de la Grande Loge de France qu'en dehors du « petit matériel » et des locaux, la SAS Dupont Restauration ait exercé et organisé sa prestation dans les mêmes conditions et avec un matériel significatif dépendant du marché puisqu'au contraire selon l'appel d'offre, l'entrant doit par exemple fournir un système informatique d'encaissement de son choix ;
En outre, il est établi par la SAS Dupont Restauration qui verse en ce sens des attestations régulières en la forme de Messieurs A... Gérard et B... Joël, respectivement assistant technique et Maître d'hôtel et sans que l'appelante justifie du moindre élément de contradiction que le mode d'exploitation mis en place par la SAS Dupont Restauration diffère de celui du marché auquel elle a succédé qu'ainsi la prestation du midi est effectuée par le commis de cuisine qui remet seulement en température des plats préalablement confectionnés, sans aucune production culinaire contrairement à ce qui avait été organisé par la société R2C ; le maître d'hôtel témoigne encore de ce que la SAS Dupont Restauration est venue avec son propre matériel de cuisine et informatique y compris pour le pointage du personnel et de ce que tout est géré par une direction régionale (comptabilité, achats, recrutements, gestion du personnel
)
Qu'enfin le personnel n'est pas uniquement dédié au Cercle Ecossais ;
La cour considère en conséquence qu'il y a manifestement eu une modification des moyens d'exploitation du marché repris par la SAS Dupont Restauration de sorte que l'identité économique n'a pas été maintenue ce qui empêche la société R2C de se prévaloir des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail et du transfert automatique du contrat de travail de M. El Mahdi Y... ;
M. El Mahdi Y... était chef de cuisine, agent de maîtrise ; aucun accord écrit de transfert de son contrat de travail n'est intervenu entre lui, la société de Restauration collective Casino (SAS R2C) et la SAS Dupont Restauration ; le seul fait que dans un courrier du 5 décembre 2013 le salarié, informé de la perte du marché par la société R2C, ait indiqué désirer être transféré chez Dupont Restauration à compter du 1er janvier 2014 est sans portée juridique quant aux conditions légales ou conventionnelles de transfert de son contrat de travail eu égard notamment aux termes de son courrier du 2 janvier 2014 précité ;
Au regard des dispositions de la convention collective rappelées ci-avant, la société R2C est donc demeurée l'employeur de M. Y..., en effet, elle ne justifie pas avoir été dans l'impossibilité d'affecter et même d'avoir recherché et proposé à son salarié un poste équivalent dans les conditions telles que stipulées par l'article 3 de la dite convention collective ; ni les tableaux ni les registres du personnel arrêtés à décembre 2013 tels que produits par la société R2C n'établissent la réalité de l'impossibilité de reclasser le salarié sur un poste équivalent et alors même qu'il est justifié d'annonces internet pour le recrutement à Paris de chef de cuisine H/F et notamment au regard de l'importance du groupe auquel elle appartient et du nombre de salariés qu'elle emploie (1200 salariés pour R2C et une trentaine d'établissements en Ile de France) plus de 300 000 salariés sur le groupe ;
Il s'ensuit que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu que la société de Restauration collective Casino (SAS R2C) ne pouvait pas juridiquement invoquer le transfert du contrat de travail de M. El Mahdi Y... à la SAS Dupont Restauration ;
La SAS Restauration Collective Casino n'ayant plus fourni de travail à M. El Mahdi Y... et ayant cessé de lui payer un salaire depuis le mois de mars 2014, il y a lieu de confirmer la résiliation du contrat de travail à ses torts exclusifs mais d'en fixer la date à celle du jugement du conseil des prud'hommes soit le 28 mai 2015 et de dire qu'elle a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
En conséquence, eu égard au montant du salaire mensuel de référence qu'il convient de fixer à la somme de 2 571,06 Euros, incluant le 13ème mois, à l'ancienneté du salarié, il y a lieu de condamner la société R2C à lui payer les sommes de 5 142,12 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus 514,21 euros pour congés payés afférents et 2 519,64 euros à titre d'indemnité de licenciement ;
Il convient également de faire droit à la demande de rappel de salaire à hauteur de la somme de 43 708,02 euros brute correspondant à la période de janvier 2014 jusqu'au jour de la résiliation judiciaire le 28 mai 2015 ;
La situation vécue par M. Y... qui est demeuré sans salaire pendant de nombreux mois à l'exception de la somme de 5 853,46 euros qui lui a été versée au cours du 1er trimestre 2014 et qui est demeuré dans l'incertitude de sa situation juridique justifie que lui soit allouée la somme de 50 000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Il y a lieu par ailleurs d'ordonner la remise des bulletins de salaire conformes sans qu'il y ait lieu à astreinte et de condamner la société Restauration collective Casino à payer à M. El Mahdi Y... la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Il y a lieu de rejeter les demandes de la société R2C en restitution de l'intégralité des sommes qu'elle a déjà réglées à M. El Mahdi Y... suite au jugement du conseil des prud'hommes soit la somme de 36 758,04 euros mais de dire que cette somme viendra en déduction du montant des condamnations prononcées ;
En application de l'article L. 1235-4 du code du travail et tant que de besoin il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société de Restauration collective Casino (SAS R2C), aux organismes intéressés, des indemnités de chômage éventuellement payés à M. El Mahdi Y... dans la limite de six mois.
Les demandes de dommages et intérêts formulées par la société Restauration collective Casino (SAS R2C) à l'encontre de la SAS Dupont Restauration sur le fondement des dispositions des articles 1382 du code civil et 41 de la loi du 29 juillet 1881 doivent être rejetées comme non fondées ; en effet ni les arguments ni les moyens développés par cette dernière dans ses conclusions et dans le cadre du débat judiciaire ne sont susceptibles de revêtir un caractère injurieux, diffamatoire ou de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la dignité professionnelle de la société de Restauration collective Casino et il n'est pas établi à l'encontre de la SAS Dupont Restauration une quelconque volonté malveillante dans son commentaire des pièces adverses produites ;
La SAS Dupont Restauration a été contrainte d'exposer des frais irrépétibles, la société Restauration collective Casino (SAS R2C) sera condamnée à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
L'intervention de la CGT Casino Restauration est recevable au regard de l'article L. 2132-3 du code du travail dans la mesure où elle est intervenue dans le cadre d'un conflit relatif à l'application des dispositions d'une convention collective et pour la défense de faits de nature à porter préjudice à l'intérêt collectif de la profession, il y a lieu de condamner la société R2C à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « L'article 3 de la convention collective de référence est un accord étendu, il est ainsi rédigé
« a) Une entreprise entrant dans le champ d'application du présent avenant qui se voit attribuer un marché précédemment confié à une autre entreprise entrant également dans le champ d'application du présent avenant est tenue de poursuivre les contrats de travail des salariés de niveau I, II, III, IV et V, employés par le prédécesseur pour l'exécution exclusive du marché concerné, dans les mêmes conditions fondamentales d'exploitation.
b) Les salariés concernés, titulaires d'un contrat à durée déterminée conforme à la réglementation, seront repris par le nouvel employeur jusqu'au terme de leur contrat.
c) Les contrats de travail des salariés de statut agent de maîtrise et cadre sont maintenus chez l'employeur cédant sauf si un accord écrit entre le salarié, le cédant et le successeur prévoit la poursuite du contrat de travail chez le successeur.
Si, et seulement si, le cédant n'est pas en mesure, dans le délai de 1 mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, de les affecter sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, les salariés de statut agent de maîtrise et cadre, qui en exprimeront la volonté de manière explicite, seront transférés chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer.
Les éventuelles clauses de non-concurrence faisant obstacle à ce transfert deviennent par la volonté des parties expressément caduques.
La société R2C ne démontre pas « avoir dans le délai de 1 mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur », été dans l'impossibilité « d'affecter sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement » M. Y....
La société R2C ne justifie d'aucun accord intervenu entre elle-même la société Dupont Restauration et M. Y... visant à ce que le contrat de travail soit effectivement transféré vers la société Dupont Restaurations.
En conséquence, la rupture du contrat de travail est imputable à la société R2C.
Le conseil au regard des manquements graves commis par la société R2C prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts et griefs exclusifs de la société R2C.
Les conséquences de cette imputabilité et de cette résiliation sont les suivantes :
Paiement des salaires depuis la perte du marché, dans la limite des sommes réclamées et des sommes accordées et payées par la société R2C, à la suite de l'ordonnance de référé du 30 juin 2014.
• Soit une somme de 28 228,48 euros au titre des salaries et 2 822 euros au titre des congés afférents,
• Un préavis de 4 760 euros et 476 de congés afférents,
• Une indemnité de licenciement à hauteur de 1 904 euros,
• Le licenciement n'étant fondé sur aucune cause réelle ni sérieuse il sera fait droit à la demande indemnitaire dans la limite de 19 000 euros.
M. Y..., ayant dû engagé des frais afin d'assurer la défense de ses intérêts, il lui est alloué la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur les demandes du syndicat CGT :
L'intervention du syndicat est en application de l'article L. 2132-3 du code du travail.
Les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice.
Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.
Si la procédure devant le Conseil des prud'hommes est une procédure individuelle, elle peut pour autant porter et remettre en cause les intérêts collectifs, tel que le non-respect d'accord et ou de convention.
En l'espèce, c'est l'application d'un accord collectif qui devait recevoir ou non application dans le cadre du dossier de M. Y....
Dès lors, le syndicat est recevable dans son intervention, peu important que le non-respect de la disposition collective ne concerne qu'un seul salarié, dès lors qu'elle a vocation à concerner tous les cadres et agents de maîtrise de la convention collective.
En l'espèce, il sera fait application des dispositions de l'article L. 2132-3 du code du travail dans la limite de 500 euros.
Le syndicat ayant dû engagé des frais afin d'assurer la défense de ses intérêts il lui est alloué la somme de 200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile » ;

1°) ALORS QUE l'article L. 1224-1 du code du travail s'applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et poursuit son activité et s'impose aux parties ; que le transfert d'une telle entité s'opère si l'activité est restée la même, qu'elle est servie par des éléments incorporels significatifs tel que la clientèle et qu'elle s'exerce sur le même site ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que la société Dupont restauration avait repris l'activité de restauration du Cercle écossais, auparavant exploitée par la société R2C, dans les mêmes locaux, avec le même « petit matériel » et que cette activité visait la même clientèle, les clients du restaurant ; que pour écarter le transfert, la cour d'appel a retenu que le mode d'exploitation avait été modifié puisqu'il n'y avait plus de production culinaire pour la prestation du midi mais remise à température des plats préalablement confectionnés le soir, et que certains moyens d'exploitation avaient été modifiés puisque le nouveau prestataire était venu avec son propre matériel de cuisine et informatique, que le personnel n'était pas uniquement dédié au cercle écossais et que tout était géré par une direction régionale ; qu'en statuant par des motifs impropres à écarter le transfert d'un entité économique autonome ayant conservé son identité, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

2°) ALORS QUE les juges ne peuvent pas dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, aucune des parties n'invoquait le fait que le personnel n'était pas exclusivement dédié au cercle écossais ; que la société Dupont restauration se contentait d'affirmer que l'entité économique n'avait pas conservé son identité en ce que l'organisation mise en place était différente, la prestation de restauration avait changé, le nouveau prestataire utilisait son propre matériel et le site n'avait plus aucune autonomie en matière de gestion administrative et de ressources humaines (conclusions d'appel p. 16) ; que le salarié et la société R2C affirmaient, quant à eux, que l'identité de l'activité de restauration du Cercle écossais qui s'était poursuivie dans les mêmes locaux au profit de la même clientèle s'était maintenue (conclusions d'appel de l'exposante p. 4 à 9 et conclusions d'appel du salarié p. 7 à 9) ; qu'en se fondant pourtant sur l'affectation du personnel pour exclure l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités prévoit que lorsque dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, le cédant n'est pas en mesure d'affecter son salarié, ayant le statut d'agent de maîtrise ou de cadre, sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, ce dernier, s'il en exprime la volonté de manière explicite, est transféré chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer ; qu'il en résulte qu'aucun accord entre le salarié et les prestataires successifs n'est imposé ; qu'en affirmant qu'aucun accord écrit de transfert de son contrat de travail n'était intervenu entre le salarié et les sociétés R2C et Dupont restauration, pour écarter le transfert conventionnel de son contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

4°) ALORS QUE les juges ne peuvent pas dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, aucune des parties ne remettait en cause l'expression de volonté du salarié d'être transféré au sein de la société Dupont Restauration au jour de la reprise du marché de restauration ; que tant le salarié que la société R2C affirmait que le salarié avait souhaité être transféré au sein de la société Dupont restauration (conclusions d'appel de l'exposante p. 3 et p. 10 et conclusions d'appel du salarié p. 3) ; que la société Dupont restauration prétendait uniquement que la seule volonté du salarié ne suffisait pas à emporter le transfert de son contrat de travail en l'absence d'accord tripartite (conclusions d'appel p. 10 § 5 à 7) ; qu'en affirmant que la volonté exprimée par le salarié le 5 décembre 2013 n'avait pas de portée juridique au regard notamment des termes du courrier postérieur du salarié, en date du 2 janvier suivant, aux termes duquel il sollicitait des directives de la société R2C dont il estimait qu'à défaut d'accord tripartite, elle demeurait son employeur, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE selon l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités, les conditions du transfert du contrat de travail du salarié s'apprécient dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le salarié avait le 5 décembre 2013 indiqué vouloir être transféré au sein de la société Dupont restauration à compter du 1er janvier 2014, date du transfert de l'activité de restauration du Cercle écossais ; qu'en se fondant sur un courrier du 2 janvier 2014, postérieur à la reprise de l'activité par la société Dupont restauration, pour écarter toute portée juridique à la volonté exprimée le 5 décembre précédent, la cour d'appel a violé l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

6°) ALORS QUE l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités prévoit que lorsque dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, le cédant n'est pas en mesure d'affecter son salarié, ayant le statut d'agent de maîtrise ou de cadre, sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, ce dernier, s'il en exprime la volonté de manière explicite, est transféré chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer ; qu'en l'espèce, étaient versées aux débats, la déclaration de main courante du 6 janvier 2014 effectuée par le salarié qui avait dénoncé le fait de ne pas pouvoir accéder à son lieu de travail, le restaurant du Cercle écossais (pièce du salarié n° 8) ainsi que les conclusions de première instance devant le juge des référés aux termes desquelles le salarié sollicitait que son contrat de travail soit transféré et poursuivi au sein de la société Dupont restauration (conclusions d'appel p. 10 pièce n° 26) ; que la cour d'appel a constaté que le salarié, informé de la perte du marché, avait le 5 décembre 2013 indiqué vouloir être transféré chez le successeur à compter du 1er janvier 2014 ; qu'en écartant toute portée juridique à la volonté exprimée par le salarié le 5 décembre 2013 au regard notamment des termes de son courrier du 2 janvier 2014 selon lequel le salarié avait indiqué qu'il s'était présenté sur son lieu de travail au restaurant du Cercle écossais et que faute d'accord entre les parties, il restait salarié de la société R2C, sans s'expliquer sur les différentes manifestations de volonté du salarié traduisant son souhait d'être transféré au sein de la société Dupont restauration et de continuer à travailler dans le restaurant du Cercle écossais, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

7°) ALORS QUE selon l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités, l'existence d'un poste disponible équivalent à celui occupé par le salarié s'apprécie dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur ; qu'en l'espèce, il était constant que les deux offres d'emploi au poste de chef de cuisine en Ile de France étaient disponibles à compter des mois de mars et avril 2014 (conclusions d'appel de l'exposante p. 11 et conclusions d'appel de la société Dupont restauration p. 11), soit postérieurement à la reprise effective de l'activité de restauration par la société Dupont restauration le 1er janvier 2014 ; que la société R2C soutenait et offrait de prouver qu'elle n'était pas en mesure de proposer à M. Y... un poste équivalent à celui qu'il occupait n'entraînant pas de modification de son contrat de travail ou de dépassement du temps de travail initial dont l'importance induirait un déménagement (conclusions d'appel de l'exposante p. 10), et avait versé aux débats les registres uniques du personnel de chacun de ses établissement au 31 décembre 2013, ainsi que le registre du personnel centralisé (productions n° 8 à 10) ; qu'en affirmant que la réalité de l'impossibilité de reclasser le salarié à un poste équivalent n'était pas établie, sans constater qu'il existait un poste disponible pouvant être proposé au salarié dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par la société Dupont restauration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

8°) ALORS QU'il appartient à celui qui l'invoque, et au juge de le caractériser, de démontrer que l'entreprise cédante fait partie d'un groupe ; qu'en l'espèce, la société cessionnaire affirmait péremptoirement que la société R2C faisait partie du groupe Casino, ce que cette dernière contestait, produisant exclusivement les registres d'entrées et de sorties du personnel de ses différents établissements (v. concl. p. 10 § 4 et note 6) ; qu'en reprochant à la société R2C de ne pas établir son impossibilité de reclasser le salarié au sein du groupe auquel elle appartient, sans autrement justifier de cette appartenance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités ;

9°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités prévoit que lorsque dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, le cédant n'est pas en mesure d'affecter son salarié, ayant le statut d'agent de maîtrise ou de cadre, sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement du temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, ce dernier, s'il en exprime la volonté de manière explicite, est transféré chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer ; que cet article n'impose, à aucun moment, une recherche de poste disponible équivalent à celui occupé antérieurement au sein d'un groupe auquel appartiendrait le cédant ; qu'en l'espèce, l'employeur contestait le périmètre de la recherche de « reclassement » du salarié qui ne s'étendait pas au groupe (v. concl. p. 10 § 6 et note 6) ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir établi son impossibilité de reclasser son salarié à un poste équivalent au regard notamment de l'importance du groupe auquel il appartient, la cour d'appel a violé l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration des collectivités.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a reçu la CGT Casino Restauration en son intervention volontaire et a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Y... aux torts de la société R2C sauf à en fixer la date au 28 mai 2015, date du jugement du conseil de prud'hommes, d'AVOIR condamné la société R2C à payer à la CGT Casino Restauration la somme de 1 000 euros de dommages et intérêts, d'AVOIR condamné la société R2C aux entiers dépens et à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 1 000 euros à la CGT Casino Restauration ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « L'intervention de la CGT Casino Restauration est recevable au regard de l'article L. 2132-3 du code du travail dans la mesure où elle est intervenue dans le cadre d'un conflit relatif à l'application des dispositions d'une convention collective et pour la défense de faits de nature à porter préjudice à l'intérêt collectif de la profession, il y a lieu de condamner la société R2C à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur les demandes du syndicat CGT :
L'intervention du syndicat est en application de l'article L. 2132-3 du code du travail.
Les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice.
Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.
Si la procédure devant le Conseil des prud'hommes est une procédure individuelle, elle peut pour autant porter et remettre en cause les intérêts collectifs, tel que le non-respect d'accord et ou de convention.
En l'espèce, c'est l'application d'un accord collectif qui devait recevoir ou non application dans le cadre du dossier de M. Y....
Dès lors, le syndicat est recevable dans son intervention, peu important que le non-respect de la disposition collective ne concerne qu'un seul salarié, dès lors qu'elle a vocation à concerner tous les cadres et agents de maîtrise de la convention collective.
En l'espèce, il sera fait application des dispositions de l'article L. 2132-3 du code du travail dans la limite de 500 euros.
Le syndicat ayant du engagé des frais afin d'assurer la défense de ses intérêts il lui est alloué la somme de 200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile » ;

1°) ALORS QUE l'action en justice des syndicats professionnels est limitée aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; que la méconnaissance par l'employeur des dispositions conventionnelles encadrant le transfert des contrats de travail en cas de changement de prestataire de service suite à la perte d'un marché, si elle porte atteinte à l'intérêt individuel du salarié, ne porte pas d'atteinte aux intérêts collectifs de la profession ; qu'en décidant du contraire pour allouer des dommages et intérêts à l'union locale CGT Casino Restauration, la cour d'appel a violé l'article L. 2132-3 du code du travail ;

2°) ALORS en tout état de cause QUE la cassation à intervenir de l'arrêt ayant dit que l'employeur de M. Y... était demeuré la société R2C (critiqué au premier moyen) entraînera l'annulation du chef de l'arrêt ayant reçu l'intervention volontaire du syndicat CGT Casino Restauration intervenue dans le cadre d'un conflit relatif à l'application des dispositions d'une convention collective, en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-22409
Date de la décision : 14/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 mar. 2018, pourvoi n°16-22409


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22409
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