LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions (Poitiers, 13 mars 2018) que, par acte du 30 janvier 2007, M. et Mme H... ont acquis un bien immobilier ; que par ce même acte, la caisse régionale de Crédit Agricole mutuel Charente-Maritime Deux-Sèvres (la banque) a accordé aux acquéreurs deux prêts, l'un de 300 000 euros, l'autre de 150 000 euros, destinés à financer cette acquisition ; que le second de ces prêts était garanti par une hypothèque prise sur un autre bien appartenant à M. et Mme H..., situé dans la commune de La Jarrie, qui avait fait l'objet d'une déclaration d'insaisissabilité en 2005 ; que la banque ayant engagé une procédure de saisie immobilière à l'encontre de M. et Mme H..., portant sur ce bien, sur le fondement de l'acte du 30 janvier 2007, ceux-ci ont, à l'audience d'orientation, soutenu que l'acte ne comportait renonciation à la déclaration d'insaisissabilité qu'en ce qui concernait le prêt de 150 000 euros ;
Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches, tel que reproduit en annexe :
Attendu que M. et Mme H... font grief à l'arrêt d'ordonner la vente forcée d'une maison d'habitation sise à la Jarrie, [...] , cadastrée section [...] pour une contenance de 11 a 71 ca et de la moitié indivise d'une parcelle de terrain à usage exclusif de passage, sise [...] cadastrée section [...] , pour une contenance de 4 a 84 ca leur appartenant sur la mise à prix de 220 000 euros ;
Mais attendu que c'est sans dénaturer l'acte du 30 janvier 2007, dont les termes ambigus nécessitaient une interprétation, que la cour d'appel a retenu que la renonciation à la déclaration d'insaisissabilité s'appliquait aux deux prêts consentis par la banque dans cet acte, qui était relatif à une opération immobilière unique ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen annexé, pris en ses deuxième et quatrième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. et Mme H... font grief à l'arrêt de mentionner la créance de la banque en principal, intérêts et frais à la somme de 815 658,35 euros, alors, selon le moyen, que pour fixer le montant de la créance du poursuivant, le juge de l'exécution est tenu de vérifier que celui-ci est conforme aux énonciations du titre exécutoire fondant les poursuites que le débiteur conteste ou non ce montant ; que la cour d'appel qui s'est bornée à énoncer que la banque justifiait sa créance au titre des deux prêts litigieux par deux décomptes, sans vérifier si ces comptes établis par la banque étaient conformes aux énonciations du titre exécutoire, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir rappelé que les appelants ne pouvaient pas se prévaloir d'une levée seulement partielle d'insaisissabilité, a indiqué que la banque justifiait sa créance au titre des deux prêts, dont elle a rappelé les montants, par deux décomptes dont elle a précisé, pour chacun, le détail, distinguant, d'une part, la somme due au titre du principal et intérêts de retard majorés, d'autre part, celle due au titre de l'indemnité contractuelle de 7 % ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme H... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne, in solidum, à payer à la caisse régionale de Crédit Agricole mutuel Charente-Maritime Deux-Sèvres la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme H...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné la vente forcée d'une maison d'habitation sise à la Jarrie, [...] , cadastrée section [...] pour une contenance de 11 a 71 ca et de la moitié indivise d'une parcelle de terrain à usage exclusif de passage, sise [...] cadastrée section [...] , pour une contenance de 4 a 84 ca appartenant aux époux H... J... sur la mise à prix de 220.000€
Aux motifs propres que sur le jeu de la clause d'insaisissabilité : les époux H... font valoir que la clause d'insaisissabilité n'avait pas été levée pour l'intégralité des emprunts souscrits par l'acte notarié du 30 juin 2007, mais uniquement pour la somme de 150.000€ ; certes une déclaration d'insaisissabilité de la maison des époux H... à la Jarrie a été actée par Maître N..., notaire, le 23 décembre 2005 ; pour autant, l'acte notarié en date du 30 janvier 2007 portant à la fois vente d'une parcelle de terrain située à Saint Jean de Liversay ( 17) et prêt à hauteur de 300.000et 150.000 € par le Crédit Agricole, stipule en sa page 17 : l'emprunteur (les épouxH... en l'occurrence) déclare expressément sous sa seule responsabilité que ladite déclaration d'insaisissabilité n'est pas opposable au prêteur (
) » ; il n'apparaît nullement que la clause d'insaisissabilité de 2005 n'aurait été levée que de façon partielle à hauteur de 150.000€ ; les époux H... seront déboutés de cette prétention ;
Et aux motifs adoptés qu'il résulte de l'acte notarié du 30 janvier 2007 contenant notamment la souscription de deux prêts immobiliers par les époux H... J... d'un montant respectivement de 300.000€ et de 150.000€ consentis par la Caisse Régionale de Crédit Agricole mutuel de Charente Maritime Deux Sèvres, que les emprunteurs ont expressément renoncé à la déclaration d'insaisissabilité du 23 décembre 2005, laquelle n'est donc pas opposable à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente Maritime Deux Sèvres pour les deux prêts de 300.000€ et de 150.000€ ; dès lors, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente Maritime Deux Sèvres, en sa qualité de créancier hypothécaire auquel la déclaration d'insaisissabilité est inopposable, est fondée à agir directement à l'encontre des époux H... J... en leurs qualité d'emprunteurs défaillants, par la délivrance d'un commandement aux fins de saisie immobilière ;
1° Alors que les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents versés aux débats ; qu'il résulte de l'acte notarié du 30 janvier 2007 que 1°) le prêt Habitat de 300.000€ a été garanti par un privilège du prêteur à hauteur de 105.000 en premier rang sur le bien « objet des présentes » soit le bien acquis au moyen du prêt (qui n'est pas la maison d'habitation des époux H...) et par une hypothèque conventionnelle à hauteur de 195.000€ en premier rang p 13 et 14 ) ; que 2°) le prêt Investissement immobilier de 150.000€ a été garanti par une hypothèque conventionnelle à hauteur de 150.000€ en second rang sur la maison d'habitation des époux H... lequel a fait l'objet d'une déclaration d'insaisissabilité ( pages 15, 16 17) et pour lequel monsieur H... a déclaré que la déclaration d'insaisissabilité « n'était pas opposable au prêteur ; le prêt résultant des présentes n'ayant aucun caractère professionnel (
) » ; que la cour d'appel qui s'est bornée à reproduire un extrait de l'acte et de la clause litigieuse pour en déduire qu'il n'apparaissait pas que la clause d'insaisissabilité n'aurait été levée que partiellement à hauteur de 150.000€ a dénaturé les contrat et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2° Alors que seuls les créanciers non professionnels peuvent faire procéder à la vente sur saisie de l'immeuble ayant fait l'objet d'une déclaration d'insaisissabilité ; que les prêt consentis pour les besoins de l'activité professionnelle de l'emprunteur sont professionnels nonobstant les mentions du prêt ; qu'en décidant qu'il résultait de la mention selon laquelle « l'emprunteur déclare expressément sous sa seule responsabilité que ladite déclaration d'insaisissabilité n'est pas opposable au prêteur » que les emprunteurs avaient levé la déclaration d'insaisissabilité en leur intégralité, sans rechercher si nonobstant la clause en son entier ( p 17 –déclaration d'insaisissabilité / inscriptions 3° 2ème §) mentionnant : « l'emprunteur déclare expressément sous sa seule responsabilité que ladite déclaration d'insaisissabilité n'est pas opposable au prêteur ci-dessus dénommé ; le prêt objet des présentes n'a aucun caractère professionnel et que la créance résultant des présentes n'est pas née à l'occasion de son activité professionnelle et n'est pas et ne sera pas liée à sa profession, le prêteur est donc un créancier non professionnel de l'emprunteur » le prêt n'avait pas un caractère professionnel et si en conséquence la clause n'était pas dénuée de portée, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 526-1 du code de commerce en sa rédaction issue de la loi n° 2003 721 du 1er août 2003.
3° Alors qu'en toute hypothèse les juges du fond qui font abstraction d'une partie d'une clause claire et précise dénaturent cette clause ; que la cour d'appel qui a énoncé que l'acte notarié stipulait en page 17 que « l'emprunteur déclare expressément sous sa seule responsabilité que ladite déclaration d'insaisissabilité n'est pas opposable au prêteur » pour en déduire que la clause d'insaisissabilité avait été levée pour la totalité des emprunts, alors que la clause litigieuse est ainsi rédigée : « l'emprunteur déclare expressément sous sa seule responsabilité que ladite déclaration d'insaisissabilité n'est pas opposable au prêteur ci-dessus dénommé ; le prêt objet des présentes n'a aucun caractère professionnel et que la créance résultant des présentes n'est pas né à l'occasion de son activité professionnelle et n'est pas et ne sera pas liée à sa profession, le prêteur est donc un créancier non professionnel de l'emprunteur » ; a dénaturé les termes clairs et précis de cette clause mentionnant que l'insaisissabilité n'était pas opposable au prêteur sous le prétexte du caractère non professionnel du prêt, et a violé l'article 4 du code de procédure civile
4° Et alors que de plus la renonciation a un droit doit être claire et non équivoque ; qu'à supposer que les motifs des premiers juges aient été adoptés, en se bornant à affirmer qu'il résultait de l'acte notarié du 30 janvier 2007 que les emprunteurs avaient expressément renoncé à la déclaration d'insaisissabilité du 23 décembre 2005, les juges du fond n'ont pas caractérisé le caractère clair et non équivoque de cette renonciation et ont privé leur décision de toute base légale au regard de l'article L 526-1 du code de commerce en sa rédaction issue de la loi n° 2003 721 du 1er août 2003 et de l'article 1134 du code civil en sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir mentionné la créance de la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente Maritime Deux Sèvres en principal, intérêts et frais à la somme de 815.658,35€
Aux motifs que les époux font valoir que la créance de la banque ne pourra pas être fixée à une somme supérieure à 231.039,03€ à savoir des deux montants suivants : -81039,03€ au titre de la condamnation de Madame H... par arrêt de la Cour d'appel de Poitiers en date du 10 novembre 2015 ; -150.000€ au titre des contrats de prêt du 30 janvier 2007, compte tenu de la levée partielle d'insaisissabilité alléguée ; les époux H... reconnaissent la dette de 81.039,03€ au titre de la condamnation judiciaire ; s'agissant des prêts de 3000.000€ et de 150.000€ la cour a constaté que les appelants ne pouvaient pas se prévaloir de la prétendue levée partielle d'insaisissabilité ; la banque justifie sa créance au titre des deux prêts litigieux par les deux décomptes suivants ; -en ce qui concerne le prêt de 300.000€ un récapitulatif arrêté au 5 octobre 2016 pour un total de 502.951,16€ ainsi composé : -470.047,82 € au titre du capital et intérêts de retard majorés ;-32.903,34€ au titre de l'indemnité contractuelle de 7% ;-en ce qui concerne le prêt de 150.000€ un récapitulatif arrêté au 5 octobre 2016 pour un total de 231.668,16€ ainsi composé : -216.512,30€ au titre du capital et intérêts de retard majorés ; - 15155,86€ au titre de l'indemnité contractuelle de 7% ; les montants réclamés par la banque n'ont pas été discutés davantage que par la clause d'insaisissabilité partielle, moyen qui s'est avéré inefficace ; la cour de pourra que fixer la créance de la banque à la somme de 816.497,49€ sera réformé sur ce point ;
Alors que pour fixer le montant de la créance du poursuivant, le juge de l'exécution est tenu de vérifier que celui-ci est conforme aux énonciations du titre exécutoire fondant les poursuites que le débiteur conteste ou non ce montant ; que la Cour d'appel qui s'est bornée à énoncer que la banque justifiait sa créance au titre des deux prêts litigieux par deux décomptes, sans vérifier si ces comptes établis par la banque étaient conformes aux énonciations du titre exécutoire, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article R 322-18 du code des procédures civiles d'exécution