LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 14 décembre 2017), que M. et Mme N..., propriétaires de parcelles, les ont vendues à M. W..., leur petit-fils ; que M. V..., se prévalant à titre personnel d'un bail rural consenti en 2002 sur les terres qu'il a mises à la disposition d'un GAEC et dont il a poursuivi l'exploitation après la dissolution de ce groupement en 2013, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en restitution d'une somme qu'il a versée à l'entrée dans les lieux ;
Attendu que M. V... fait grief à l'arrêt d'ordonner son expulsion comme occupant sans droit ni titre ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le bail avait été consenti en 2002 au GAEC V... père et fils et avait pris fin lors de la dissolution de cette société, la cour d'appel, qui a analysé la valeur et la portée des éléments produits et qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle décidait d'écarter, a, souverainement et sans dénaturation, retenu que M. V... ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de l'existence d'un bail verbal lui conférant la qualité de preneur en place et a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. V... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour M. V...
M. V... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné son expulsion comme occupant sans droit ni titre des parcelles sises sur la commune de Feignies cadastrées sections [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...] et [...] ;
AUX MOTIFS QUE M. N... et, son épouse, Mme B... Y..., étaient propriétaires de parcelles situées sur la commune de Feignies et cadastrées sous les numéros [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...] et [...] pour un total de 11 ha 86 a 10 ca qu'ils ont cédées à leur petit-fils M. W... selon acte de vente reçu en la forme authentique les 6 et 9 novembre 2015 par Me R..., notaire à Maubeuge ; que se prévalant d'un bail rural sur ces parcelles consenti par M. N... et Mme Y..., M. V... a attrait M. N... aux fins de répétition d'un indu fondée sur l'article L. 411-74 du code rural et de la pêche maritime devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Maubeuge, devant lequel M. W... est intervenu volontairement ; que le jugement entrepris, auquel il convient de se référer pour le rappel de la procédure antérieure, a reçu l'intervention volontaire de M. W..., déclaré irrecevable l'action de M. V..., l'a débouté en conséquence de ses demandes, ordonné l'expulsion de M. V... des parcelles litigieuses dans un délai d'un mois de la notification de la décision, condamné M. V... à payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile de 1.000 euros, condamné M. V... aux dépens et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ; que le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a reçu l'intervention volontaire de M. W..., qu'il sera confirmé de ce chef ; qu'il n'y a pas lieu de dire la décision opposable à M. W..., celui-ci étant partie à la procédure ; [...] que M. V... allègue avoir pris à bail en 2002 les parcelles litigieuses, les avoir mises à disposition du Gaec V... père et fils jusqu'à sa dissolution et avoir, ensuite, continué à les exploiter personnellement ; qu'en application de l'article 1315 du code civil sus-visé, il appartient à M. V... d'établir l'existence du bail dénié par MM. N... et W..., lesquels soutiennent qu'en 2002, le bail a été accordé au Gaec V... père et fils et que le bail a pris fin du fait de la dissolution du Gaec ; que d'une part, M. V... ne justifie pas des fermages qu'il aurait payés à l'exclusion du Gaec V... Père et fils antérieurement à la dissolution du Gaec, décidée le 31 mars 2013 avec radiation au registre du commerce et des sociétés du 16 juillet 2014 ; que par ailleurs, M. V... ne produit qu'un relevé d'exploitation selon situation cadastrale au 27 novembre 2015 émis par la MSA du Nord Pas de Calais sans produire les relevés d'exploitation pour la période antérieure à la dissolution du Gaec ; qu'au contraire, une attestation dactylographiée du 10 décembre 2002 signée par M. N... et la copie d'une attestation manuscrite produite par M. N... et M. W... corroborent l'allégation de ces derniers selon laquelle, en 2002, les parcelles litigieuses ont été données à bail directement au Gaec V... Père et fils lequel était tenu d'un « pas-de-porte » de 34.666,99 euros, peu important que cette somme ait été personnellement réglée par M. V... ; qu'ainsi, il n'est pas démontré que M. N... et Mme Y... ont, en 2002, accepté de mettre à disposition de M. V..., à titre onéreux, aux fins d'exploitation, les parcelles litigieuses ; que d'autre part, M. V... produit une copie d'une « attestation de bail verbal » datée du 2 avril 2013, dont la sincérité et la validité sont contestées par MM. N... et W..., et selon laquelle M. N... et Mme Y... ont donné à bail à M. V... les parcelles litigieuses à compter du 1er avril 2013, soit dès la dissolution du Gaec décidée le 31 mars 2013 ; que cette attestation, à la supposer sincère, n'est signée que par Mme Y..., alors que les parcelles litigieuses, selon l'acte de vente des 6 et 9 novembre 2015, ont été acquises au cours de leur mariage par M. N... et Mme Y..., lesquels sont, selon ce même acte, mariés sous le régime de la communauté de meubles et acquêts ; qu'en conséquence, alors que M. N... conteste tout bail au bénéfice de M. V..., Mme Y... ne pouvait seule valablement concéder un bail rural sur ces parcelles en application de l'article 1425 du code civil ; que M. V... ne peut pas plus invoquer que Mme Y... était propriétaire apparente du bien sans caractériser sa croyance légitime en la qualité de seule propriétaire de Mme Y..., dès lors que les attestations des 10 décembre et 10 novembre 2002 sont rédigées par M. N... seul et que le paiement antérieur de 34.666,99 euros a été réalisé par un chèque au bénéfice de M. N... et non Mme Y... ; que, de plus, indépendamment du dol allégué par MM. N... et W..., les deux paiements par chèques tirés sur le compte de M. V..., correspondant, aux dires des parties, aux fermages pour les années 2013 et 2014, soit postérieurement à la dissolution du Gaec, et que M. N... reconnaît avoir reçus, sont insuffisants à établir l'accord de M. N... ainsi que celui de son épouse pour mettre à disposition de M. V... les parcelles litigieuses à titre onéreux ; qu'il n'est, en effet, pas justifié d'une information donnée, par lettre recommandée avec avis de réception conformément à l'article L. 411-37 alinéa 2 du code rural et de la pêche maritime sus-visé, à M. N... et Mme Y... sur la dissolution du Gaec alors que M. N... conteste avoir été informé de la dissolution du Gaec ; que le bail verbal allégué ne résulte pas plus de la copie du courrier informel du 27 juillet 2015 adressé par M. N... et Mme Y... informant M. V... de ce que M. W... commencera l'exploitation des terres après les récoltes 2015 ; que les termes de la correspondance évoquent une tolérance de M. N... et Mme Y... quant à l'exploitation par M. V... des parcelles litigieuses postérieurement à la dissolution du Gaec V... Père et fils jusque cette date ; que le bail verbal allégué par M. V... n'est donc pas démontré ; qu'en conséquence c'est exactement que les premiers juges ont décidé qu'il était occupant sans droit ni titre et ordonné son expulsion des parcelles litigieuses dont M. W... est désormais propriétaire ;
1°) ALORS QUE la preuve de l'existence d'un bail rural verbal est libre et peut être rapportée par tous moyens, y compris par une attestation établie par l'un des bailleurs et, ce, même si l'autre bailleur ne l'a pas signée ; que la cour d'appel, en énonçant, pour dire que le bail verbal invoqué par M. V... n'était pas démontré et ordonner, en conséquence, son expulsion comme occupant sans droit ni titre des parcelles litigieuses, que l'attestation de bail verbal du 2 avril 2013, versée aux débats par l'exposant, selon laquelle M. N... et Mme Y... avaient donné à bail à M. V... les parcelles litigieuses appartenant aux deux époux mariés sous le régime de la communauté de meubles et acquêts, à compter du 1er avril 2013, n'était signée que par Mme Y... qui ne pouvait seule valablement concéder un bail rural sur ces parcelles, a violé l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige ;
2°) ALORS QUE par son courrier du 27 juillet 2015, M. N... a informé M. V... de ce que son petit fils, M. W..., qui venait de faire la demande pour l'obtention d'un numéro d'exploitant agricole pour débuter son activité en septembre 2015, était en train d'acquérir la propriété des parcelles et qu'il commencerait l'exploitation des terres après les récoltes 2015 ; qu'en énonçant néanmoins, pour dire que le bail verbal invoqué par M. V... n'était pas démontré et ordonner, en conséquence, son expulsion comme occupant sans droit ni titre des parcelles litigieuses, que les termes de cette correspondance évoquaient une tolérance de M. N... et Mme Y... quant à l'exploitation par M. V... des parcelles litigieuses postérieurement à la dissolution du Gaec V... Père et fils jusqu'aux récoltes 2015, la cour d'appel a ainsi dénaturé les termes clairs et précis du courrier précité et, partant, a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige ;
3°) ALORS QUE les juges du fond doivent procéder à une appréciation d'ensemble des éléments de fait et de preuve qui leur sont soumis ; qu'en se bornant, pour dire que le bail verbal invoqué par M. V... n'était pas démontré et ordonner, en conséquence, son expulsion comme occupant sans droit ni titre des parcelles litigieuses, à examiner séparément l'attestation de bail verbal du 2 avril 2013, le relevé d'exploitation MSA, les deux paiements par chèque des fermages 2013 et 2014, le paiement du pas-de-porte lors de l'entrée dans les lieux et le courrier de M. N... du 27 juillet 2015 ayant pour objet la reprise des terres par son petit-fils, qui étaient versés aux débats par M. V..., sans rechercher si le rapprochement de ces éléments de preuve n'établissait pas la mise à disposition des terres au profit de l'exposant par les époux N... moyennant contrepartie onéreuse et, partant, l'existence d'un bail rural entre ces derniers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime.