LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. U... N... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société SAFER ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que A... I..., est décédée le [...] en laissant pour lui succéder M. G... N..., son époux, commun en biens et usufruitier du quart des biens de la succession, et ses enfants, U..., B..., X... , C... , F... Q... et S... P... ; que des difficultés se sont élevées lors des opérations de comptes, liquidation et partage ;
Attendu qu'après avoir ordonné une expertise, l'arrêt dit réserver les droits des parties concernant l'attribution préférentielle, les droits à récompense et les rapports à l'indivision, et n'y avoir lieu à renvoi à la mise en état, la juridiction n'étant saisie de nouveau que sur initiative du notaire et en cas de désaccord des copartageants sur son projet d'état liquidatif ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui était tenue de trancher les contestations qui lui étaient soumises, a méconnu son office et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il réserve les droits des parties concernant l'attribution préférentielle, les droits à récompense et les rapports à l'indivision, et dit n'y avoir lieu à renvoi à la mise en état, la juridiction n'étant saisie de nouveau que sur initiative du notaire et en cas de désaccord des copartageants sur son projet d'état liquidatif, l'arrêt rendu le 26 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, autrement composée ;
Condamne M. F... Q... N... et Mmes B... et S... P... N... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, signé par Mme Auroy, conseiller doyen ayant assisté au prononcé de l'arrêt, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour M. U... N...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir, après avoir ordonné une expertise, réservé les droits des parties concernant l'attribution préférentielle, les droits à récompense et les rapports à l'indivision et dit n'y avoir lieu à renvoi à la mise en état, la juridiction n'étant saisie de nouveau que sur initiative du notaire et en cas de désaccord des copartageants sur son projet d'état liquidatif ;
AUX MOTIFS QUE « SUR LES MODALITÉS DU PARTAGE 1 - la désignation d'un notaire : que l'article 1364 du Code civil prévoit en son alinéa 1er que, 'si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations'; qu'en l'espèce, aucune des parties ne vient contester la désignation d'un notaire en vue de préparer un projet d'état liquidatif, ce chef du jugement devant donc être confirmé; que toutefois, il existe une contradiction, dans le dispositif du jugement, à désigner un notaire à cette fin et à renvoyer l'affaire à la mise en état tout en liquidant les dépens; qu'il convient en effet de rappeler que le projet d'état liquidatif du notaire est adressé au juge en vue de trancher les contestations subsistantes en application des dispositions de l'article 1373; que le Tribunal se trouve donc dessaisi par l'effet de sa décision et ne sera donc de nouveau saisi par le notaire qu'en cas de désaccord sur l'état liquidatif; 2 - la désignation d'un expert : que là encore, aucune des parties n'a entendu contester la nécessité de désigner un expert; que toutefois, les appelants voudraient voir ajouter aux chefs de mission les points suivants : - visiter, décrire et estimer les immeubles dépendant de l'indivision et rechercher s'ils sont ou non commodément partageables en nature eu égard aux droits respectifs des parties et chiffrer toutes indemnités d'occupation à devoir, - dans l'affirmative, composer, en vue du tirage au sort entre les indivisaires ou ayants droit, autant de lots que nécessaire de valeur égale ou sensiblement égale pouvant être compensée par des soultes en argent aussi réduites que possible, - dans la négative, proposer des lotissements et mises à prix les plus avantageuses en vue d'une licitation, - fixer la valeur de l'exploitation agricole familiale exercée sur les parcelles indivises [...] et [...], - déterminer le montant des revenus de l'exploitation agricole familiale ainsi que les bénéfices de cette exploitation perçus par Monsieur U... N... seul depuis 1993, - fixer la valeur locative des immeubles indivis; que les trois premiers chefs supplémentaires proposés par les appelants sont utiles à la solution du litige; qu'en effet, il convient de rappeler que les modalités du partage seront déterminées par le projet d'état liquidatif en lecture du rapport d'expertise, la licitation n'étant ordonnée que si les biens ne peuvent pas être partagés ou attribués, conformément aux dispositions de l'article 1377 du Code de procédure civile; que de même, la fixation de la valeur locative est importante pour liquider les comptes de l'indivision puisque Monsieur U... N... a installé son habitation principale et occupe seul la propriété indivise depuis 1993; qu'or, aux termes de l'article 815-9 du Code civil, 'l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité'; que concernant l'exploitation agricole, les premiers juges ont réglé la question en interrogeant l'expert de la façon suivante : 'donner son avis sur les éventuelles créances entre les co indivisaires et leur montant, notamment au titre des revenus de l'exploitation agricole familiale depuis le 4 février 2009 et de la rémunération due pour la gestion de l'indivision successorale'; que c'est à juste titre que les premiers juges se sont fondés sur les dispositions de l'article 815-10 du Code civil aux termes desquelles 'les fruits et les revenus des biens indivis accroissent à l'indivision, à défaut de partage provisionnel ou de tout autre accord établissant la jouissance divise. Aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera, toutefois, recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l'être'; qu'en l'espèce, Monsieur F... N..., Madame S... N... et Madame B... N... ayant saisi le Tribunal par acte d'huissier du 3 février 2014, la mission de l'expert a été à bon droit limitée à la période quinquennale précédant cette saisine concernant les revenus de l'exploitation agricole; que la mission de l'expert est large et lui permettra donc de vérifier quelles améliorations Monsieur U... N..., qui a construit une maison et exploité la surface agricole, a pu apporter au fonds indivis, conformément aux dispositions de l'article 815-13 alinéa 1er du Code civil; 3 - l'attribution préférentielle : que l'article 831 du Code civil dispose que 'tout héritier copropriétaire peut demander l'attribution préférentielle par voie de partage, à charge de soulte s'il y a lieu, de toute entreprise, ou partie d'entreprise agricole, commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ou quote part indivise d'une telle entreprise, même formée pour une part de biens dont il était déjà propriétaire ou copropriétaire avant le décès, à l'exploitation de laquelle il participe ou a participé effectivement'; que l'article 832 précise que 'l'attribution préférentielle visée à l'article 831 est de droit pour toute exploitation agricole qui ne dépasse pas les limites de superficie fixées par décret en Conseil d'Etat, si le maintien dans l'indivision n'a pas été ordonné'; que l'expertise sera l'occasion de vérifier si la situation du bien indivis répond aux critères de l'attribution préférentielle de droit et si Monsieur U... N... a les moyens de désintéresser les autres indivisaires par le paiement d'une soulte; que ce chef de demande sera donc réservé; 4 - les droits à récompense et les rapports à l'indivision : que l'expertise puis le projet d'état liquidatif étant l'occasion de permettre un compte sur les créances réciproques entre l'indivision et Monsieur U... N..., les droits des parties seront réservés sur ces points » ;
ALORS QU' il appartient au juge de trancher lui-même la contestation dont il est saisi, sans pouvoir se dessaisir et déléguer ses pouvoir au notaire liquidateur ; qu'en estimant, après avoir ordonné une expertise et réservé les droits des parties concernant l'attribution préférentielle, les droits à récompense et les rapports à l'indivision, qu'il n'y a pas lieu à renvoi à la mise en état, la juridiction n'étant saisie de nouveau que sur initiative du notaire et en cas de désaccord des copartageants sur son projet d'état liquidatif, quand elle était tenue de trancher elle-même les contestations soumises par les parties et notamment relatives à l'attribution préférentielle des biens indivis et aux récompenses dues à M. U... N..., la cour d'appel a méconnu son office en violation de l'article 4 du code civil.