LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 mars 2018), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 22 septembre 2015, pourvoi n° 14-11.382), que Mme C..., engagée à compter du 24 mars 2003 par la société Nike France en qualité de responsable des relations presse, a été licenciée pour insuffisance professionnelle par lettre du 11 février 2008 ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société, qui est préalable :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen ci-après annexé, qui n'est pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur les troisième et quatrième moyens du pourvoi principal de la salariée :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens ci-après annexés, qui ne sont pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de la salariée :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas lieu de la réintégrer dans l'entreprise, alors, selon le moyen, que le salarié dont le licenciement est nul a droit à sa réintégration dans son emploi, ou à défaut, dans un emploi équivalent ; que ni la suppression du poste qu'il occupait avant son licenciement ni l'absence de poste équivalent disponible au sein d'une société prospère ne rendent impossible sa réintégration dans l'entreprise ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter Mme C... de sa demande en réintégration, d'une part, que « le poste précédemment occupé par Mme C... de responsable relations presse femme, mode, sport et culture n'existe plus au sein de la société » à la suite d'un plan de réorganisation, d'autre part, que « le service Communication de la société est aujourd'hui composé de trois postes pouvant être considérés comme équivalents qui sont tous pourvus », enfin, qu'« il existe un poste de responsable relations presse dans le département communication de Converse France, dont l'activité est rattachée à la société Nike, mais que ce poste est occupé », la cour d'appel s'est déterminée par des motifs ne caractérisant pas une impossibilité, pour l'employeur, de réintégrer la salariée dans son emploi ou un emploi équivalent ; qu'elle a ainsi violé les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a pu décider que la réintégration de la salariée dans l'entreprise était impossible ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le rejet du premier moyen du pourvoi de la salariée rend sans portée le deuxième moyen qui sollicite une cassation par voie de conséquence ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme C...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'il n'y avait pas lieu de réintégrer Madame C... dans l'entreprise ;
Aux motifs que lorsqu'un licenciement est nul, le salarié a droit à sa réintégration dans son emploi, ou à défaut, dans un emploi équivalent ; qu'il en résulte qu'en cas de licenciement nul, la réintégration du salarié doit être ordonnée si celui-ci le demande et l'employeur est tenu de faire droit dès lors qu'il n'est constaté aucune impossibilité de procéder à cette réintégration ; que Madame C... expose qu'après plus de 9 années de procédure, elle demande aujourd'hui sa réintégration dans l'entreprise en indiquant qu'il s'agit pour elle d'une nécessité, alors même qu'elle a exercé une activité professionnelle et perçu des salaires chez plusieurs employeurs pendant la période considérée ; qu'elle fait valoir que la société NIKE dispose d'une excellente santé financière et a la capacité de mettre en place les moyens nécessaires pour la réintégrer ; qu'elle ajoute notamment que cette demande ne présente aucun caractère opportuniste, et que, compte tenu de sa situation précaire et de l'état actuel du marché du travail en France pour les travailleurs seniors, elle est légitime à exercer son droit à réintégration ; qu'en l'espèce, il est observé que Madame C... n'a pas demandé sa réintégration dans l'entreprise lorsqu'elle a saisi le conseil de prud'hommes en septembre 2008 et ce n'est qu'à partir de l'année 2013, soit plus de 5 ans après son licenciement, qu'elle a fini par solliciter une réintégration dans son emploi ; qu'il s'agit là de l'exercice d'un droit et que c'est en vain que la société NIKE invoque en l'espèce le fait que l'employeur ne peut être tenu d'assumer les conséquences des souhaits fluctuants de la salariée au gré de ses opportunités professionnelles ; que cependant, au vu de l'ensemble des éléments versés aux débats, le poste précédemment occupé par Madame C... de Responsable Relations Presse Femmes, Mode, Sport et Culture n'existe plus au sein de la société ; qu'en effet, un plan de réorganisation a conduit à des suppressions de postes au cours de l'année 2012 visant à sauvegarder la compétitivité de la société en France ; qu'ainsi 7 postes ont été supprimés dans le Département dont faisait partie Madame C... et 31 au niveau de l'ensemble de la société ; que de plus, tous les postes équivalents en termes de rémunération, qualification et perspectives de carrière sont aujourd'hui pourvus ; qu'ainsi le service Communication de la société est aujourd'hui composé de 3 postes pouvant être considérés comme équivalents qui sont tous pourvus : un poste de Responsable Relations Presse Football occupé par Madame D..., un poste de Responsable Relations Presse Running occupé par Madame H..., un poste de Relations Presse Sportwear occupé par Madame S... ; qu'en outre, il existe un poste de Responsable Relations Presse dans le Département Communication de Converse France, dont l'activité est rattachée à la société NIKE, mais que ce poste est occupé par Madame G... ; qu'ainsi, sur la base du registre du personnel, tous les postes équivalents au poste qu'occupait Madame C... antérieurement sont pourvus ; que de son côté, Madame C... n'apporte pas d'éléments précis de nature à remettre en cause les obstacles allégués et justifiés par l'employeur à sa réintégration ; qu'il s'en déduit que la réintégration de Madame C... au sein de la société NIKE s'avère aujourd'hui matériellement impossible, de telle sorte qu'il n'y a pas lieu de l'ordonner ;
ALORS QUE le salarié dont le licenciement est nul a droit à sa réintégration dans son emploi, ou à défaut, dans un emploi équivalent ; que ni la suppression du poste qu'il occupait avant son licenciement ni l'absence de poste équivalent disponible au sein d'une société prospère ne rendent impossible sa réintégration dans l'entreprise ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter Madame C... de sa demande en réintégration, d'une part, que « le poste précédemment occupé par Madame C... de Responsable Relations Presse Femme, Mode, Sport et Culture n'existe plus au sein de la société » à la suite d'un plan de réorganisation, d'autre part, que « le service Communication de la société est aujourd'hui composé de 3 postes pouvant être considérés comme équivalents qui sont tous pourvus », enfin, qu'« il existe un poste de Responsable Relations Presse dans le Département Communication de Converse France, dont l'activité est rattachée à la société NIKE, mais que ce poste est occupé », la Cour d'appel s'est déterminée par des motifs ne caractérisant pas une impossibilité, pour l'employeur, de réintégrer la salariée dans son emploi ou un emploi équivalent ; qu'elle a ainsi violé les articles L 1152-2 et L 1152-3 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la seule somme de 210.000 € l'indemnité pour licenciement nul ;
Aux motifs que Madame C... sollicite la somme de 514 895,36 € à titre d'indemnité pour licenciement nul en procédant à une estimation des salaires dont elle a été privée, compte tenu du fait qu'elle indique avoir perçu sur la période considérée entre son licenciement en 2008 et l'année 2017 la somme totale de 462 859 € ; que la société NIKE conteste le salaire de référence pris en compte dans le calcul en invoquant un salaire de référence de 5 077 € ; que l'application d'un taux d'augmentation du salaire de base à hauteur de 2,46 % est également contestée ainsi que la prise en compte d'une prime de performance, de la participation, de l'intéressement et la valorisation de la voiture de fonction mise à disposition quelque mois avant le licenciement ; que la société NIKE explique que le montant de la cotisation patronale pour la mutuelle retenu par la salariée est inexact ; qu'au vu de l'ensemble des éléments versés aux débats, après analyse des documents produits et notamment des déclarations d'impôts de Madame C... sur les revenus mentionnant rémunérations, et sans qu'il y ait lieu de recourir à une expertise, la somme due à la salariée à titre d'indemnité consécutive à son licenciement nul est évaluée par la Cour à la somme globale de 210 000 € ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le deuxième moyen, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame C... de sa demande à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral distinct ;
Aux motifs que Madame C... ne rapporte pas la preuve de préjudices justifiant qu'il lui soit alloué des sommes spécifiques distinctes à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral, d'un préjudice de retraite, et d'un préjudice matériel en sus de la somme visée ci-dessus ;
ALORS QUE l'exposante avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que le fait d'« être privé pendant près de 10 années de toute situation pérenne d'emploi après avoir été congédiée abusivement et frauduleusement et subir aléatoirement des périodes d'inactivité et de prestations de travail précaires, cause un préjudice moral et psychologique important pour le salarié » (page 51) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que Madame C... avait subi un préjudice moral distinct de celui résultant du caractère illicite de son licenciement, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame C... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
Aux motifs que Madame C... indique avoir relaté à son employeur en juillet 2007 des faits de harcèlement moral, mais que cette affirmation est démentie par l'employeur et n'est pas établie par les pièces versées aux débats ; que l'intéressée invoque des conditions de travail malsaines du fait de sa supérieure hiérarchique Z... F... ; que cependant, à cet égard, Madame C... n'apporte pas d'éléments précis sur un comportement qui pourrait caractériser une situation de harcèlement ; que le fait qu'une collègue, Madame Q..., ait démissionné de l'entreprise le 16 mars 2006 après avoir évoqué des conditions « malsaines et impropres au développement et à l'équilibre personnel » sans faire état de fait précis n'apporte aucun élément sur une situation dont Madame C... aurait pu être victime ; qu'il résulte d'ailleurs des pièces versées aux débats que Madame C... n'a pas fait l'objet d'une attitude hostile et que les pièces du dossier ne révèlent pas de propos agressifs, blessants, méprisants ou humiliants tenus à l'encontre de l'intéressée ; que par ailleurs, la teneur de certains messages adressés par Madame C... était assez critique envers des collègues ; que les rares messages de Madame F... exprimant un mécontentement envers Madame C... ne correspondent pas à un comportement harcelant et qu'il n'est pas établi que Madame F... ait cherché à discréditer l'intéressée ; que Madame C... fait aussi état d'une absence de soutien et d'aide l'amenant à réaliser des tâches subalternes mais que cette accusation imprécise n'est pas étayée par des éléments sérieux ; qu'il en est de même de ce que Madame C... qualifie de manque de moyens pour mener à bien ses missions, mais aussi de la prétendue rétention d'informations et de la mise à l'écart de certaines réunions ou d'un retrait de responsabilités et de management ; qu'à cet égard, l'arrivée de Monsieur N... n'a pas modifié les attributions de Madame C... qui restait en charge des initiatives presse Women, Sport, Culture et Edge, avec Madame L... ; que les éléments versés aux débats n'établissent nullement une diminution de responsabilités de l'intéressée qui souhaitait, aux termes du projet de réorganisation de sa structure qu'elle a adressé à Madame F... le 13 avril 2007, que Madame L... devienne Attachée de presse Women et Sport Culture pour qu'elle puisse elle-même s'impliquer davantage sur les autres domaines ; qu'il n'est pas établi que Madame C... ait été déchargée contre son gré de responsabilités de management ; qu'en revanche, l'intéressée a effectivement fait l'objet d'un contrôle accru, ce qui était justifié notamment par les problèmes qu'elle rencontrait pour inscrire son action dans une démarche collective et compte tenu d'une tendance à ne pas assister à certaines réunions programmées et à adresser à sa supérieure hiérarchique des plannings et rapports d'activité incomplets ; qu'il ne s'agit cependant pas là d'une situation de harcèlement ; que s'agissant de son état de santé, Madame C... produit un arrêt de travail délivré par son médecin traitant, le Docteur M..., pour la période du 6 au 10 août 2007, mentionnant « surmenage / harcèlement professionnel » ainsi qu'un autre arrêt émanant du même médecin survenant six mois plus tard, du 8 février au 15 février 2008, portant la mention « anxiété / harcèlement moral et professionnel » ; qu'enfin, près de 10 mois après le licenciement, le même médecin délivrait le 29 décembre 2008 un certificat indiquant que Madame C... était traitée pour un syndrome anxio-dépressif secondaire à un harcèlement moral professionnel ; que Madame C... produit à nouveau un certificat de son médecin daté du 4 mars 2016 (soit 8 années après le licenciement litigieux) qui note un syndrome anxio-dépressif secondaire à un harcèlement moral professionnel sans aucune précision ; que par ailleurs, le Docteur T..., psychiatre, indique avoir suivi l'intéressée de juillet 2012 à début 2013, mais qu'aucune précision n'est apportée quant au motif du suivi de l'intéressée ; qu'au vu de ces documents, s'il est exact que Madame C... a été arrêtée en maladie une première fois pendant cinq jours, puis quelques mois plus tard pendant huit jours, les documents d'ordre médical versés au débat n'établissent pas que Madame C... a été victime d'une situation de harcèlement moral ; qu'en effet, s'il est vrai que Madame C... a ressenti un malaise d'origine professionnel, aucun des documents médicaux n'apporte d'éléments sur des faits que la salariée aurait pu décrire et attribuer à une situation de harcèlement moral ; qu'ainsi en l'espèce, l'ensemble des éléments versés aux débats montre une difficulté relationnelle avec sa supérieure hiérarchique, Madame F..., Directrice de la Communication ; qu'à cet égard, le malaise de Madame C... est perceptible dès l'année 2007 ; que cependant Madame C... n'établit pas des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'il s'ensuit que Madame C... sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du Code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en affirmant, pour débouter Madame C... de sa demande au titre du harcèlement moral, que « Madame C... fait aussi état d'une absence de soutien et d'aide l'amenant à réaliser des tâches subalternes mais cette accusation imprécise n'est pas étayée par des éléments sérieux [et] qu'il en est de même (
) de la mise à l'écart de certaines réunions ou d'un retrait de responsabilités et de management », sans cependant examiner l'intégralité des éléments produits par la salariée afin de démontrer, par les nombreux mails de Monsieur K..., de Madame E... et l'attestation de Madame L..., la pression injustifiée exercée par Madame F... pour l'empêcher de participer à des réunions de travail obligatoires au sein d'autres services, la Cour d'appel a violé les articles L 1152-1 et L 1154-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la charge de la preuve d'un harcèlement moral ne pèse pas sur le salarié ; qu'en affirmant, pour débouter Madame C... de sa demande au titre du harcèlement moral, d'une part, que « s'il est exact que Madame C... a été arrêtée en maladie une première fois pendant cinq jours, puis quelques mois plus tard, pendant huit jours, les documents d'ordre médical versés aux débats n'établissent pas que Madame a été victime d'une situation de harcèlement moral » et, d'autre part, que « s'il est vrai que Madame C... a ressenti un malaise d'origine professionnelle, aucun des documents médicaux n'apporte d'élément sur des faits que la salariée aurait pu décrire et attribuer à une situation de harcèlement moral », la Cour d'appel a fait peser exclusivement sur la salariée la charge de la preuve des agissements de harcèlement moral commis par son employeur ; qu'en statuant ainsi, en méconnaissance du régime probatoire spécifique lui imposant d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la Cour d'appel a violé les articles L1154-1 et L 1152-1 du Code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant, pour rejeter la demande de Madame C... au titre du harcèlement moral, que « l'intéressée a effectivement fait l'objet d'un contrôle accru, ce qui était justifié notamment par les problèmes qu'elle rencontrait pour inscrire son action dans une démarche collective et compte tenu d'une tendance à ne pas assister à certaines réunions programmées et à adresser à sa supérieure hiérarchique des plannings et rapports d'activités incomplets », quand elle avait préalablement constaté, à propos du grief de licenciement tiré de l'insuffisance professionnelle reprochée à l'exposante, que « les pièces versées aux débats établissent que les qualités professionnelles ont été appréciées au long de son parcours, puisqu'il est produit un certain nombre de messages de félicitations à son endroit concernant le travail accompli, son implication et les bons résultats obtenus », la Cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile. Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils pour la société Nike France
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Mme C... est nul et d'AVOIR condamné la société Nike France à verser à Mme C... la somme de 210.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul ;
AUX MOTIFS QUE « Principe de droit applicable ; Il résulte des articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail, aucun salarié ne peut être licencié pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés et il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis. Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces dispositions est nulle. Application du droit à l'espèce ; En l'espèce, le licenciement est présenté dans la lettre de licenciement comme étant motivé par une insuffisance professionnelle. Néanmoins, tant les termes de la lettre de licenciement que l'économie générale de cette lettre, mais aussi l'ensemble des éléments versés au débat démontrent que la dénonciation par Madame C... d'une situation de harcèlement adressée à un représentant du personnel a été finalement déterminante dans la décision prise par l'employeur de se séparer de la salariée. La dénonciation de harcèlement moral est présentée dans la lettre de licenciement comme une "stratégie" de "toute dernière heure". Le positionnement même du paragraphe concerné dans le texte de la lettre, juste avant l'indication de la décision de rompre le contrat de travail, montre l'importance de ce grief aux yeux de l'employeur. S'agissant des griefs relevant de l'insuffisance professionnelle, il est d'ailleurs observé que Madame C... avait près de cinq ans d'ancienneté à la date du licenciement et n'avait pas fait l'objet d'une sanction préalable tel qu'un avertissement sur sa manière de servir. Les pièces versées au dossier établissent que les qualités professionnelles ont été appréciées au long de son parcours, puisqu'il est produit un certain nombre de messages de félicitations à son endroit concernant le travail accompli, son implication et les bons résultats obtenus émanant notamment du Directeur Marketing de NIKE France, Monsieur B..., qui écrivait à Madame C... le 28 octobre 2005 : "un grand bravo à toi en particulier, car je sais le travail fourni. Pour la seconde fois, les outils mis en place (système samples, équipe, Studio Barbier
) prouvent leur justesse et leur efficacité. Well done
", du Responsable Presse Sport Culture de NIKE Europe, du Directeur Général NIKE France, Monsieur O... le 12 mai 2006 (... "Super boulot. Merci ..."), de la Responsable Presse Femme de NIKE Europe le 16 janvier 2007. Les notes d'évaluation de la salariée étaient par ailleurs satisfaisantes tout au long de la relation contractuelle, même si la salariée a parfois contesté sa notation en estimant qu'elle était sous-évaluée. Le fait que la salariée ait finalement dénoncé une situation de harcèlement qu'elle estimait subir depuis des mois après avoir été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement ne caractérise pas la mauvaise foi de l'intéressée qui avait plusieurs mois auparavant fait part à son médecin qu'elle ressentait une situation de harcèlement moral. C'est donc à tort que l'employeur a expressément reproché à la salariée dans la lettre de licenciement qu'elle se livrait ainsi à une stratégie, quand bien même la situation de harcèlement moral telle que ressentie et ainsi dénoncée ne serait pas établie. Il s'ensuit que le licenciement de Madame C... tiré au moins en partie de la relation d'agissements de harcèlement moral par la salariée, dont la mauvaise foi n'est pas établie, conduit à déclarer le licenciement nul sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs formulés à l'encontre de la salariée au motif d'une insuffisance professionnelle » ;
1. ALORS QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce, après avoir relaté différents faits caractérisant, de la part de Mme C..., des problèmes relationnels, des difficultés de communication avec sa hiérarchie et son entourage et la prise de décisions excédant ses pouvoirs, la lettre de licenciement indiquait « il est manifeste que votre attention a été régulièrement attirée sur ces manquements dans le but de vous permettre de redresser la barre. Malheureusement vous n'avez pas souhaité vous adapter, vous intégrer au sein de NIKE France » et que « devant un tel constat nous vous notifions notre décision de vous licencier pour : insuffisance professionnelle et inadéquation aux exigences de votre poste de responsable de relations presse, dans toute sa dimension managériale et relationnelle interne » ; qu'il était ajouté ensuite « que penser de la stratégie que vous ébauchez en toute dernière heure ? » consistant à dénoncer auprès d'un représentant du personnel de prétendus faits de harcèlement moral la veille de l'entretien préalable au licenciement ; qu'en affirmant cependant, pour retenir que la dénonciation de faits de harcèlement moral a joué un rôle déterminant dans la décision prise par l'employeur de se séparer de la salariée, que « le positionnement même du paragraphe concerné dans le texte de la lettre, juste avant l'indication de la décision de rompre le contrat de travail, montre l'importance de ce grief aux yeux de l'employeur », cependant que ce paragraphe était positionné après l'annonce de la décision de licencier, elle-même précédée des motifs qui motivaient cette décision, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette lettre, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;
2. ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE si un salarié ne peut être licencié pour avoir dénoncé des faits de harcèlement moral, c'est à la condition que cette dénonciation soit faite de bonne foi ; que dès lors que le salarié a connaissance, au moment de la dénonciation, du caractère mensonger des accusations qu'il porte contre l'employeur ou un autre salarié et que cette dénonciation intervient pour la première fois au cours de la procédure de licenciement engagée à son encontre, sa mauvaise foi est caractérisée ; qu'en l'espèce, Mme C..., qui avait été reçue deux semaines plus tôt par le Directeur des Ressources Humaines et ne lui avait fait part d'aucune difficulté, a dénoncé pour la première fois des agissements de harcèlement moral auprès d'un représentant du personnel après avoir été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que, non seulement la salariée n'établissait pas qu'elle aurait préalablement dénoncé des faits de harcèlement moral auprès de son employeur avant l'engagement de la procédure de licenciement, mais aussi qu'elle n'établissait aucun fait précis susceptible de laisser présumer un harcèlement moral ; qu'au surplus, la cour d'appel a relevé que Mme C... faisait preuve elle-même de propos critiques à l'égard de ses collègues, refusait de se soumettre à l'autorité de ses supérieurs hiérarchiques et à inscrire son travail dans une démarche collective ; qu'en se bornant cependant à relever, pour exclure toute mauvaise foi de la part de l'intéressée, qu'elle avait fait part à son médecin traitant plusieurs mois auparavant d'une situation de harcèlement moral en vue d'obtenir un arrêt de travail de cinq jours, cependant qu'une telle constatation était impropre à écarter toute dénonciation mensongère d'une situation de harcèlement moral la veille de l'entretien préalable au licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail.