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04/12/2019 | FRANCE | N°18-10694

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 décembre 2019, 18-10694


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 212-18 du code du travail devenu article L. 1321-2 du code des transports, l'article 5 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction issue du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007, ensemble l'article L. 3121-11 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, pour les salariés des entreprises de transport, par dérogation aux dispositions du code du travail, un décret déter

mine la période de référence servant au décompte des heures supplémentaires, l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 212-18 du code du travail devenu article L. 1321-2 du code des transports, l'article 5 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction issue du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007, ensemble l'article L. 3121-11 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, pour les salariés des entreprises de transport, par dérogation aux dispositions du code du travail, un décret détermine la période de référence servant au décompte des heures supplémentaires, le droit à une compensation obligatoire en repos et ses modalités d'attribution et la durée maximale hebdomadaire moyenne de travail ; que, selon le deuxième de ces textes, pour les personnels roulants marchandises « grands routiers » ou « longue distance », est considérée comme heure supplémentaire toute heure du temps de service effectuée au-delà de 559 heures par trimestre et que les heures supplémentaires ouvrent droit à un repos compensateur trimestriel obligatoire pris par journée ou demi-journée selon leur nombre effectué sur le trimestre de référence ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. M... a été engagé à compter du 2 novembre 2010 en qualité de conducteur routier par la société Dom'Azur transports ; qu'ayant démissionné le 28 octobre 2013, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de diverses sommes au titre des heures supplémentaires et de la contrepartie obligatoire en repos ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une somme au titre de la contrepartie obligatoire en repos, l'arrêt retient que selon l'article L. 3121-11 du code du travail, les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires donnent lieu à l'octroi d'une contrepartie obligatoire en repos, que l'employeur soutient que, dès lors qu'un droit à repos compensateur trimestriel a été reconnu en application de l'article 5 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, les dispositions du code du travail ne s'appliquent pas, que cependant d'une part l'employeur n'invoque l'existence d'aucune disposition spécifique du code des transports régissant la contrepartie obligatoire en repos due en cas de dépassement du contingent annuel de sorte qu'à défaut les dispositions du code du travail ont vocation à s'appliquer, d'autre part la réglementation spécifique des repos compensateurs trimestriels en matière de transport, si elle déroge aux dispositions du code du travail, n'a pour objet que de compenser les dépassements trimestriels du contingent d'heures supplémentaires et ne peut être considérée comme un dispositif suffisant permettant de compenser un dépassement sur l'année ;

Qu'en statuant ainsi, en faisant application des dispositions du code du travail prévoyant une contrepartie obligatoire en repos, alors que l'article L. 212-18 du code du travail devenu article L. 1321-2 du code des transports exclut l'application des dispositions du code du travail relatives à la durée du travail et institue un régime spécifique de repos compensateurs prévu, pour les personnels roulants des entreprises de transport routier de marchandises, par le décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Dom'Azur transports à payer à M. M... la somme de 8 542,46 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos, l'arrêt rendu le 21 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déboute M. M... de sa demande au titre de la contrepartie obligatoire en repos ;

Condamne M. M... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Dom'Azur transports.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé recevables et en partie bien fondées les demandes de Monsieur M..., d'AVOIR condamné la société Dom'Azur à verser à M. M... les sommes de 8.542,46 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos, avec intérêts au taux légal à compter du 20 février 2015, et 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Selon l'article L 3121-11 du Code du travail, les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires donnent lieu à l'octroi d'une contrepartie obligatoire en repos. Les modalités de cette contrepartie doivent être définies par une convention ou un accord collectif. A défaut d'accord collectif, les caractéristiques et conditions de prise de la contrepartie obligatoire en repos sont déterminées par décret. Ainsi le décret du 4 novembre 2008 instaure un régime supplétif obligatoire codifié sous les articles D.3121-7 à 14 du code du travail. L'article D.3121-7 prévoit que les conditions de mise en oeuvre de la contrepartie obligatoire en repos sont applicables aux salariés des entreprises qui ne relèvent pas d'un accord conclu en ce domaine entre des organisations d'employeurs et de salariés représentatives. En application de l'article D3121-14 du code du travail, le salarié dont le contrat de travail prend fin avant qu'il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu'il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos reçoit une indemnité en espèces dont le montant correspond à ses droits acquis. La société soutient en l'occurrence que les dispositions spécifiques de l' article L. 1321- 2 du code des transports emporte une dérogation aux dispositions du code du travail en ce qu'l prévoit qu' " Après consultation des organisations syndicales représentatives au plan national des employeurs et des salariés des entreprises de transport routier ou fluvial, au vu, le cas échéant, des résultats des négociations intervenues entre ces dernières et, par dérogation aux dispositions du code du travail, un décret détermine 1° La période de référence servant au décompte des heures supplémentaires, dans la limite de trois mois ; 2° Le droit à une compensation obligatoire en repos et ses modalités d'attribution ; 3° La durée maximale hebdomadaire moyenne de travail, dans la limite de quarante-six heures par semaine, calculée sur une période de référence de trois mois". La société en déduit que dès lors qu'un droit à repos compensateur trimestriel a été reconnu par les dispositions du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 en son article 5, les dispositions du code du travail ne s'appliquent pas. Mais d'une part, la société n'argue d'aucune disposition spécifique du code des transports régissant la contrepartie obligatoire en repos due en cas de dépassement du contingent annuel, de sorte qu'à défaut les dispositions du code du travail ont vocation à s'appliquer. D'autre part, la réglementation spécifique des repos compensateurs trimestriels en matière de transport, si elle déroge aux dispositions du code du travail, n'a pour objet que de compenser les dépassements trimestriels du contingent d'heures supplémentaires et ne peut être considéré comme un dispositif suffisant permettant de compenser un dépassement sur l'année. L'argumentation de la société ne peut être admise de sorte que M. M... est en droit de solliciter paiement des contreparties obligatoires en repos qui lui sont dues. En l'espèce, le contingent d'heures supplémentaires est de 195 heures par salarié et par an. La société ne conteste pas la réalité du dépassement et n'émet aucune critique sur le montant de la somme réclamée. Réformant le jugement il convient de condamner l'employeur au paiement de la somme de 8.542,46 euros » ;

1) ALORS QU'il résulte des dispositions de l'article L. 1321-2 du code des transports qu'un décret détermine, pour les salariés des entreprises de transports routiers et par dérogation aux dispositions du code du travail, le droit à une compensation obligatoire en repos afférent à l'accomplissement d'heures supplémentaires ainsi que ses modalités d'attribution ; qu'en application de ces dispositions, le décret n°83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, tel que modifié par le décret 2007-13 du 4 janvier 2007, institue un système de repos compensateur trimestriel obligatoire ; qu'ainsi, ce régime de repos compensateur obligatoire, qui déroge au droit commun, n'a pas vocation à se cumuler avec celui issu de l'article L. 3121-11 du code du travail, lequel n'est pas applicable aux salariés des entreprises de transport routier de marchandises ; qu'en allouant à M. M... la somme de 8.542,46 € au titre de la contrepartie obligatoire en repos sur la période 2010-2013 sur le fondement de l'article L. 3121-11 du code du travail, la cour d'appel a violé ce texte dans sa rédaction applicable au litige par fausse application, ainsi que l'article L. 1321-2 du code des transports, et le décret 83-40 du 26 janvier 1983 modifié ;

2) ALORS QUE la contrepartie obligatoire en repos prévue par l'article L. 3121-11 du code du travail et le repos compensateur obligatoire prévu par le décret 83-40 du 26 janvier 1983 modifié ont une identité d'objet qui exclut tout cumul entre eux ; que les modalités de détermination du contingent d'heures supplémentaires au-delà duquel la contrepartie obligatoire en repos ou le repos compensateur obligatoire est acquis par le salarié ne sont que des modalités particulières qui permettent de mettre en oeuvre ces mécanismes et ne sauraient justifier un quelconque cumul ; qu'il en résulte que la circonstance que la contrepartie obligatoire en repos prévue par l'article L. 3121-11 du code du travail est acquise au-delà d'un contingent d'heures supplémentaires exprimé annuellement, tandis que le repos compensateur obligatoire prévu par le décret 83-40 du 26 janvier 1983 modifié est acquis au-delà d'un contingent d'heures supplémentaire exprimé trimestriellement ne peut justifier un cumul entre ces deux mécanismes ; qu'au cas présent, pour condamner la société Dom'Azur Transports à verser à M. M... une somme au titre de la contrepartie obligatoire en repos, et justifier son cumul avec le repos compensateur obligatoire dont avait antérieurement bénéficié M. M..., la cour d'appel a considéré que le repos compensateur obligatoire n'a pour objet que de compenser les dépassements trimestriels du contingent d'heures supplémentaires et ne peut être appréhendé comme un dispositif suffisant permettant de compenser un dépassement sur l'année ; qu'en se déterminant ainsi, cependant que la contrepartie obligatoire en repos et le repos compensateur obligatoire ont une identité d'objet, la cour d'appel a violé les dispositions l'article L. 3121-11 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige par fausse application, ainsi que l'article L. 1321-2 du code des transports, et le décret 83-40 du 26 janvier 1983 modifié.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-10694
Date de la décision : 04/12/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 21 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 déc. 2019, pourvoi n°18-10694


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.10694
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