LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 27 février 2020
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 238 F-P+B+I
Pourvoi n° R 19-10.233
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 FÉVRIER 2020
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard, dont le siège est [...] , représenté par son syndic, la société Agence Alpine Orpi, société à responsabilité limitée, dont le siège est 188 avenue général de Gaulle, 38250 Villard-de-Lans, a formé le pourvoi n° R 19-10.233 contre l'arrêt rendu le 12 juin 2018 par la cour d'appel de Grenoble (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la Société financière Vendôme, Sprl de droit belge, dont le siège est 160 avenue Jules Bordet, 1140 Evère (Belgique), défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la Société financière Vendôme, et l'avis de M. Girard, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre.
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 12 juin 2018), le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard (le syndicat des copropriétaires) a relevé appel du jugement d'un tribunal de grande instance qui, saisi par la Société financière Vendôme, avait prononcé la nullité d'une assemblée générale de la copropriété et rejeté une demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires.
2. La cour d'appel, par un arrêt du 14 juin 2016 mentionnant être rendu par défaut, a infirmé ce jugement, rejeté la demande de nullité de l'assemblée générale et condamné la Société financière Vendôme à payer au syndicat des copropriétaires une certaine somme au titre de charges de copropriété.
3. La Société financière Vendôme a formé une opposition contre cet arrêt.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
5. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'opposition formée par la Société financière Vendôme à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 14 juin 2016 et, en conséquence, de prononcer la nullité de l'assemblée générale des copropriétaires du syndicat des copropriétaires réunie le 7 avril 2012 et de rejeter ses demandes reconventionnelles tendant à la condamnation de la Société financière Vendôme à lui payer diverses sommes à titre de charges de copropriété, alors « que sur opposition, l'affaire est instruite et jugée selon les règles applicables devant la juridiction qui a rendu la décision frappée d'opposition et c'est l'instance même qui a abouti à la décision frappée d'opposition qui recommence et qui se poursuit ; qu'il en résulte que, lorsqu'une partie forme une opposition à un arrêt d'une cour d'appel rendu dans une matière régie par la procédure avec représentation obligatoire, les dispositions de l'article 908 du code de procédure civile sont applicables ; qu'en retenant, dès lors, que les dispositions de l'article 908 du code de procédure civile ne trouvaient pas à s'appliquer, quand la décision frappée d'opposition était un arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 14 juin 2016 rendu dans une matière régie par la procédure avec représentation obligatoire, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 576, 577 et 908 du code de procédure civile ».
Réponse de la Cour
6. L'opposition formée contre l'arrêt d'une cour d'appel rendu suivant une procédure avec représentation obligatoire, qui reprend l'instance ayant abouti à cet arrêt, n'introduit pas un appel, de sorte que l'article 908 du code de procédure civile n'est pas applicable à l'opposant, qui n'a pas la qualité d'appelant.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée parle syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard et le condamne à payer à la Société financière Vendôme une somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré recevable l'opposition formée par la société Financière Vendôme à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 14 juin 2016 et D'AVOIR, en conséquence, prononcé la nullité de l'assemblée générale des copropriétaires du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard réunie le 7 avril 2012 et rejeté les demandes reconventionnelles du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard tendant à la condamnation de la société Financière Vendôme à lui payer diverses sommes à titre de charges de copropriété ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la recevabilité de l'opposition. / Pour formaliser son opposition à l'encontre d'un arrêt rendu contre elle par défaut et signifié le 20 juin 2016, la Sprl Financière Vendôme a adressé au greffe de la cour d'appel de Grenoble un document intitulé "opposition à arrêt ". Le logiciel de traitement des actes de procédure de la cour d'appel (Rpva) ne comporte pas de rubrique dénommé "opposition". / Dès lors, la prise en compte de l'opposition à arrêt a été effectuée une première fois le 18 juillet 2016 sous la rubrique "appel" avec le document d'opposition à arrêt en pièce jointe, puis une seconde fois (le lendemain 19 juillet 2016) sous la rubrique "déclaration de saisine" avec la mention spécifique "opposition à arrêt" et le document d'opposition en pièce jointe également. / Ainsi, il ressort de l'ensemble de ces éléments que la Sprl Financière Vendôme a entendu former opposition à l'arrêt rendu le 14 juin 2016 par la 2e chambre de la cour d'appel de Grenoble, cette opposition étant clairement exprimée dans l'intitulé du document remis et dans l'intitulé détaillé de l'acte de saisine. Il n'existe donc aucune ambiguïté sur les intentions de la Sprl Financière Vendôme quant à la voie de recours choisie. / Le délai légal d'opposition d'un mois a également été respecté et le recours était motivé par le document joint à la déclaration. / Concernant la demande tendant à voir constater la caducité de la déclaration, les dispositions invoquées par le syndicat des copropriétaires ne peuvent trouver à s'appliquer (article 908 du code de procédure civile) en ce que ce texte est exclusivement réservé à la procédure d'appel et ne concerne donc pas l'opposition à arrêt. / L'opposition sera donc déclarée recevable. / Sur le non-respect du délai de convocation. / La Sprl Financière Vendôme demande que l'assemblée générale des copropriétaires du 7 avril 2012 soit déclarée nulle pour non-respect du délai de convocation de 21 jours. / L'article 9 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 dispose dans son alinéa 2 : " [
] Sauf urgence, cette convocation est notifiée au moins vingt et un jours avant la date de la réunion, à moins que le règlement de copropriété n'ait prévu un délai plus long [
] ". / L'article 64 du même décret précise dans son alinéa 1er : "Toutes les notifications et mises en demeure prévues par la loi du 10 juillet 1965 susvisée et le présent décret sont valablement faites par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Le délai qu'elles font, le cas échéant, courir a pour point de départ le lendemain du jour de la première présentation de la lettre recommandée au domicile du destinataire". / L'examen de la pièce n° 10 du syndicat des copropriétaires permet de constater les étapes postales suivantes sur le document des services postaux : - la lettre recommandée 2C05915155074 a été déposée dans l'Isère le vendredi 16 mars 2012 ; - elle est arrivée à Paris le samedi 17 mars 2012 ; - elle a été mise en distribution le lundi 19 mars à 9 h 28 ; - la première présentation a eu lieu le lundi 19 mars à 9 h 56. / Le décompte du délai de convocation doit donc être fait à partir du lendemain de la première présentation du courrier recommandé, soit à partir du mardi 20 mars 2012, ce jour étant inclus dans le délai. / Un décompte de 21 jours à partir de cette date (20 mars) aboutit à une date minimum de tenue de l'assemblée générale au lundi 9 avril 2012, date repoussée au mardi 10 avril 2012 en raison de la qualité de jour férié du lundi de Pâques (le 9 avril 2012). / En toute hypothèse, la tenue d'une assemblée générale le samedi 7 avril 2012 n'a pas respecté le délai minimal de 21 jours exigé par le décret. / Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen relatif à l'absence de production de l'accusé de réception du courrier en cause, l'assemblée générale des copropriétaires de la copropriété "Le Balcon de Villard" à Villard-de-Lans réunie le 7 avril 2012 sera annulée. / Le jugement du tribunal de grande instance de Grenoble du 6 mars 2014 sera donc confirmé de ce chef. / Sur la demande reconventionnelle. / Le syndicat des copropriétaires de la copropriété "Le Balcon de Villard" à Villard-de-Lans sollicite reconventionnellement la condamnation de la Sprl Financière Vendôme au paiement de la somme de 420 396,54 € correspondant aux charges de copropriété dues au syndicat des copropriétaires arrêtée au 1er juillet 2016 avec intérêts au taux légal à compter du : - 26 juin 2009 sur la somme de 275 584 € (période du 01.07.2009 au 31.03.2013) ; - 6 mars 2014 sur la somme de 150 881,75 € (période du 01.04.2013 au 06.03.2014) ; - à compter de l'arrêt à intervenir pour le reste. / Il ressort des éléments produits aux débats que : - la somme de 150 881,75 € provient d'une décision du tribunal de grande instance de Grenoble du 19 janvier 2010 ayant condamné la Snc Groupe Financière Vendôme à verser ce montant au syndicat des copropriétaires de la copropriété "Le Balcon de Villard" à Villard-de-Lans ; - le certificat de non-appel concernant cette décision a été établi au nom de la société en commandite simple et à capital variable "Groupe Financière Vendôme", inscrite au registre du commerce et des sociétés de Paris ; - la Sprl Financière Vendôme (opposante dans la présente procédure) est une société de droit belge ayant son siège social à Berchem-Sainte-Agathe (Belgique) ; - les appels de fonds versés à la procédure par le syndicat sont tous adressés à "Financière Vendôme H." à Paris. / Dès lors, ces éléments ne permettent pas d'établir l'existence d'une créance certaine à l'encontre de la société de droit belge dénommée Sprl Financière Vendôme. / Le syndicat des copropriétaires de la copropriété "Le Balcon de Villard" à Villard-de-Lans sera débouté de sa demande reconventionnelle. / Le jugement sera confirmé de ce chef » (cf., arrêt attaqué, p. 6 et 7) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « sur la régularité de la convocation à l'assemblée générale du 7 avril 2012. / La Sprl Financière Vendôme affirme que la convocation à l'assemblée générale du 7 avril 2012 ne lui a pas été notifiée régulièrement à son siège en Belgique. / Il résulte de l'article 64 du décret du 17 mars 1967 que la notification de la convocation aux assemblées générales doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception. L'article 65 du même décret énonce qu'il appartient à chaque copropriétaire de notifier au syndic son domicile réel ou élu et que les notifications sont valablement faites au dernier domicile notifié au syndic. / La preuve de la régularité de la convocation incombe au syndic. / En l'espèce, force est de constater que le syndicat des copropriétaires de la copropriété Le Balcon de Villard à Villard-de-Lans ne produit aucune copie d'une quelconque convocation de la demanderesse à l'assemblée générale du 7 avril 2012 que ce soit à Paris ou en Belgique ni aucun élément sur son éventuelle notification et sa forme. / La convocation de tous les copropriétaires composant l'assemblée générale constitue une formalité substantielle dont l'inobservation entraîne la nullité de l'assemblée. / Elle sera donc prononcée. / Sur la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires de la copropriété Le Balcon de Villard à Villard-de-Lans. / Le syndicat des copropriétaires de la copropriété Le Balcon de Villard à Villard-de-Lans sollicite reconventionnellement "la condamnation de la Financière Vendôme au paiement de la somme de 124 702,31 €", celle-ci étant redevable d'un montant total de 275 584,06 € comprenant le montant d'une condamnation à hauteur de 150 881,75 € par jugement définitif du 19 janvier 2010. / Elle produit pour établir sa créance des appels de fonds : - le premier en date du 17 septembre 2012 pour la période du 01/10/2012 au 21/12/2012, adressé à Financière Vendôme H, 34 av des Champs-Élysées, 75008 Paris ; - le second pour des travaux trappes, désenfumage du 21 septembre 2012 adressé à la même entité à la même adresse que le premier ; - le troisième en date du 11 décembre 2012 pour la période du 01/01/2013 au 31/03/2013 adressé à Financière Vendôme, Chausse de Gand, 1154 C11, 1082 Berchem Sainte Agathe, Belgique. / Ces éléments ne permettent pas d'établir l'existence d'une créance à l'encontre de la Sprl Financière Vendôme, demanderesse, qui en outre souligne à raison le fait qu'elle n'est pas partie au jugement définitif auquel se réfère le syndicat des copropriétaires de la copropriété Le Balcon de Villard à Villard-de-Lans puisque, selon son dispositif, c'est la Snc Groupe Financière Vendôme qui a été condamnée. / Dès lors la demande du syndicat des copropriétaires de la copropriété Le Balcon de Villard à Villard-de-Lans sera rejetée » (cf., jugement entrepris, p. 3 et 4) ;
ALORS QUE, de première part, l'opposition tend à faire rétracter un jugement rendu par défaut et n'est ouverte qu'au défaillant ; qu'en déclarant recevable l'opposition formée par la société Financière Vendôme à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 14 juin 2016 et, par suite, en prononçant la nullité de l'assemblée générale des copropriétaires du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard réunie le 7 avril 2012 et en rejetant les demandes reconventionnelle du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard tendant à la condamnation de la société Financière Vendôme à lui payer diverses sommes à titre de charges de copropriété, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard, si les circonstances dans lesquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Balcon de Villard avait attrait la société Financière Vendôme à la procédure d'appel ayant abouti à l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 14 juin 2016 n'étaient pas telles que cet arrêt ne pouvait être qualifié d'arrêt par défaut, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 571 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, de seconde part, sur opposition, l'affaire est instruite et jugée selon les règles applicables devant la juridiction qui a rendu la décision frappée d'opposition et c'est l'instance même qui a abouti à la décision frappée d'opposition qui recommence et qui se poursuit ; qu'il en résulte que, lorsqu'une partie forme une opposition à un arrêt d'une cour d'appel rendu dans une matière régie par la procédure avec représentation obligatoire, les dispositions de l'article 908 du code de procédure civile sont applicables ; qu'en retenant, dès lors, que les dispositions de l'article 908 du code de procédure civile ne trouvaient pas à s'appliquer, quand la décision frappée d'opposition était un arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 14 juin 2016 rendu dans une matière régie par la procédure avec représentation obligatoire, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 576, 577 et 908 du code de procédure civile.