LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 mai 2020
Rejet
Mme BATUT, président
Arrêt n° 296 F-D
Pourvoi n° Q 19-11.290
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 MAI 2020
Mme C... O..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° Q 19-11.290 contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2018 par la cour d'appel de Nîmes (3e chambre famille), dans le litige l'opposant à M. U... M..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de Mme O..., de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. M..., après débats en l'audience publique du 3 mars 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 14 novembre 2018), un arrêt du 20 mars 2013 a prononcé le divorce de M. M... et de Mme O..., mariés sous le régime de la séparation de biens. Des difficultés sont survenues au cours de la procédure de partage judiciaire de leurs intérêts patrimoniaux.
Examen des moyens
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. Mme O... fait grief à l'arrêt de fixer une créance au profit de M. M..., relativement au paiement des mensualités du prêt BNP après l'ordonnance de non-conciliation, à la somme de 45 736 euros, alors :
« 1°/ que l'aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son représentant spécialement mandaté ; qu'il fait foi contre celui qui l'a fait ; qu'en affirmant, pour fixer la créance au profit de M. M... relativement au paiement des mensualités du prêt BNP après l'ordonnance de non-conciliation à la somme de 45 736 euros, qu'il ne pouvait être utilement reproché à M. M... d'avoir inscrit la mention « non » à la rubrique afférente à la récompense due par la communauté ou le conjoint sur l'attestation su l'honneur prévue par l'article 272 du code civil, dès lors que les époux n'étaient pas soumis à un régime communautaire et en ajoutant que s'agissant d'une créance afférente au remboursement de l'emprunt commun effectué après la dissolution du régime matrimonial, dont Mme O... était nécessairement informée, il ne pouvait être reproché à M. M... d'avoir volontairement omis d'en faire état ; quand la mention « non » portée par M. M... sur la déclaration sur l'honneur constituait un aveu judiciaire, qui faisait foi contre celui qui l'avait fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1356, devenu 1383-2 du code civil ;
2°/ que l'aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son représentant spécialement mandaté ; qu'il fait foi contre celui qui l'a fait ; qu'en affirmant encore que les parties avaient discuté lors de l'instance en divorce et en fixation de la prestation compensatoire de la répartition du solde du produit de la vente de l'appartement d'[...], séquestré à hauteur de 129 979,57 euros entre les mains du notaire, et en ajoutant qu'il était inexact de prétendre que cet élément n'avait pas été porté à la connaissance du juge du divorce lorsqu'il avait statué sur le principe et le montant de la prestation compensatoire, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 1356, devenu 1383-2 du code civil. »
Réponse de la Cour
4. La cour d'appel a constaté que M. M... avait rempli, au cours de la procédure de divorce, une déclaration sur l'honneur où il avait inscrit la mention ''non'' dans la rubrique afférente à une éventuelle récompense due par la communauté ou le conjoint, alors que les époux n'étaient pas soumis à un régime communautaire.
5. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments qui lui étaient soumis qu'elle en a déduit que cette mention, renseignant une question relative à un régime matrimonial dont ne relevaient pas les époux, ne pouvait être tenue pour un aveu judiciaire faisant foi contre son auteur.
6. Le moyen, inopérant en sa seconde branche, qui critique un motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme O... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme O... et la condamne à payer à M. M... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, signé par Mme Auroy, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour Mme O...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé la créance au profit de M. M... relativement au paiement des mensualités du prêt BNP après l'ordonnance de non-conciliation à la somme de 45.736 € ;
AUX MOTIFS QUE Sur la demande de M. M... au titre du remboursement du prêt commun ayant financé l'achat de l'appartement indivis sis à [...] ; qu'il n'est pas contesté que M. M... a réglé postérieurement au 2 mars 2007 une somme totale de 91.472,27 € au titre de ce prêt ; qu'il invoque en conséquence une créance de 45.736 € ; que Mme O... fait valoir que M. M... ne peut se prévaloir d'une telle créance dans la mesure où il ne l'a pas mentionnée dans la déclaration sur l'honneur rédigée le 2 février 2011 ; qu'il ne saurait utilement être reproché à M. M... d'avoir inscrit la mention « non » à la rubrique afférente à la récompense due par la communauté ou le conjoint ; que les époux n'étant pas soumis à un régime communautaire ; que s'agissant d'une créance afférente au remboursement de l'emprunt commun effectué après la dissolution du régime matrimonial, dont Mme O... était nécessairement informée, il ne peut être reproché à M. M... d'avoir volontairement omis d'en faire état ; que par ailleurs, les parties ont discuté lors de l'instance en divorce et en fixation de la prestation compensatoire de la répartition du solde du produit de la vente de l'appartement d'[...], séquestré à hauteur de 129.979,57 € entre les mains du notaire ; qu'il est donc totalement inexact de prétendre que cet élément n'a pas été porté à la connaissance du juge du divorce lorsqu'il a statué sur le principe et le montant de la prestation compensatoire ; qu'en conséquence, les moyens tirés d'un prétendu aveu judiciaire et subsidiairement d'une dissimulation fautive de l'époux ayant induit le juge en erreur sont infondés ; que dès lors, M. M... peut se prévaloir d'une créance de 45.736 € du chef du remboursement de l'emprunt commun ayant financé l'appartement indivis, dont la vente est intervenue le 31 juillet 2010 ; que le jugement sera infirmé de ce chef et Mme O... sera déboutée de sa demande subsidiaire en paiement de dommages-intérêts (arrêt p. 5 et 6) ;
1°) ALORS QUE l'aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son représentant spécialement mandaté ; qu'il fait foi contre celui qui l'a fait ; qu'en affirmant, pour fixer la créance au profit de M. M... relativement au paiement des mensualités du prêt BNP après l'ordonnance de non-conciliation à la somme de 45.736 € , qu'il ne pouvait être utilement reproché à M. M... d'avoir inscrit la mention « non » à la rubrique afférente à la récompense due par la communauté ou le conjoint sur l'attestation su l'honneur prévue par l'article 272 du code civil, dès lors que les époux n'étaient pas soumis à un régime communautaire et en ajoutant que s'agissant d'une créance afférente au remboursement de l'emprunt commun effectué après la dissolution du régime matrimonial, dont Mme O... était nécessairement informée, il ne pouvait être reproché à M. M... d'avoir volontairement omis d'en faire état ; quand la mention « non » portée par M. M... sur la déclaration sur l'honneur constituait un aveu judiciaire, qui faisait foi contre celui qui l'avait fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1356, devenu 1383-2 du code civil ;
2°) ALORS QUE l'aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son représentant spécialement mandaté ; qu'il fait foi contre celui qui l'a fait ; qu'en affirmant encore que les parties avaient discuté lors de l'instance en divorce et en fixation de la prestation compensatoire de la répartition du solde du produit de la vente de l'appartement d'[...], séquestré à hauteur de 129.979,57 € entre les mains du notaire, et en ajoutant qu'il était inexact de prétendre que cet élément n'avait pas été porté à la connaissance du juge du divorce lorsqu'il avait statué sur le principe et le montant de la prestation compensatoire, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 1356, devenu 1383-2 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme O... de sa demande de condamnation de M. M... en paiement d'une somme de 3442,40 € au titre de la compensation des intérêts du prêt directement liés à la rétention de la part de celui-ci sur le fruit de la vente du véhicule Sharan ;
AUX MOTIFS QUE Sur la vente du véhicule de marque Volkswagen modèle Sharan : qu'il est constant que les deux époux avaient acquis indivisément un véhicule Volkswagen (Sharan) le 23 octobre 2003 au prix de 30.000 € ; que M. M... reconnaît qu'il a vendu seul ce bien en 2007 ou 2008 et ne fournit aucun justificatif du prix retiré, indiquant que la valeur de cette voiture était quasiment nulle ; que l'ordonnance de non-concliation du 2 mars 2007 a attribué la jouissance du véhicule Suzuki Vitara à Mme O... et dit que M. M... versera à son épouse la moitié du prix de cession du véhicule n° [...] lors de la réception du règlement par la compagnie d'assurance ; que dans la mesure où il n'est pas fait référence au véhicule Volskwagen Sharan immatriculé [...] , il y a lieu de considérer que M. M... a vendu ce véhicule avant le 2 mars 2007 ; que selon les sites spécialisés en matière automobile, une voiture perd la moitié de sa valeur au cours de la quatrième année ; qu'en conséquence, il y a lieu d'estimer à 15.000 € le prix de vente retiré par M. M... ; que la créance de Mme O... sera fixée à 7.500 €, laquelle est soumise au droit commun des créances entre époux, et donc à l'article 1479 du code civil alinéa 1er, aux termes duquel les créances ne portent intérêts que du jour de la sommation ; que Mme O... ne saurait valablement réclamer les intérêts légaux à compter de l'aliénation présumée puisqu'elle ne revendique pas une créance valorisée à hauteur de la plus-value ; que la créance de 7500 € produira intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 12 mai 2017 ; que le jugement sera réformé au titre du quantum de la créance relative au solde du prix de vente du véhicule ; que Mme O... ne justifie d'aucun préjudice en lien direct de causalité avec la rétention par M. M... de sa quote-part du prix de vente du véhicule Volkswagen, étant observé au surplus qu'elle n'en a fait état que dans le cadre des opérations de liquidation du régime matrimonial et que lors de l'ordonnance de non-conciliation, aucune référence à ce bien n'a été faite, M. M... s'étant engagé à régler la moitié d'une indemnité d'assurance concernant un autre véhicule ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme O... de ce chef de demande ; (arrêt, p. 7)
ALORS QUE les juges du fond ne peuvent relever d'office un moyen, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en affirmant, pour débouter Mme O... de sa demande de condamnation de M. M... en paiement d'une somme de 3442,40 € au titre de la compensation des intérêts du prêt directement liés à la rétention de la part de celui-ci sur le fruit de la vente du véhicule Sharan, que Mme O... ne justifiait d'aucun préjudice en lien direct de causalité avec la rétention par M. M... de sa quote-part du prix de vente du véhicule, la cour d'appel, qui a relevé d'office un moyen, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme O... de sa demande de condamnation de M. M... en paiement d'une somme de 14.830 € au titre des intérêts et frais liés au paiement tardif des échéances du prêt ayant financé le bien situé à [...];
AUX MOTIFS QUE le fait que M. M... ait acquitté les échéances du prêt ayant financé l'acquisition du bien situé à [...], propriété indivise des deux époux, à partir du 31 janvier 2008, à hauteur de la fraction lui incombant ne saurait caractériser une quelconque faute, s'agissant d'une application conforme aux règles de l'indivision ; qu'il appartenait à Mme O..., coindivisaire, de rembourser la fraction des échéances du prêt correspondant à ses droits, étant observé qu'elle a perçu un capital de 200.000 € en juillet 2007 suite à la vente de l'ancien domicile conjugal et pouvait donc assumer ses obligations de coemprunteur ; qu'il ne saurait par ailleurs être reproché sérieusement à M. M... de ne pas avoir sollicité auprès du banquier prêteur l'affectation prioritaire des versements sur le capital alors qu'en sa qualité de coemprunteur, Mme O... pouvait faire une telle démarche et qu'en tout état de cause, elle ne produit pas la convention de prêt immobilier prévoyant une telle faculté (arrêt p. 9) ;
ALORS QUE les juges du fond ne peuvent relever d'office un moyen, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en affirmant, pour débouter Mme O... de sa demande de condamnation de M. M... en paiement d'une somme de 14.830 € au titre des intérêts et frais liés au paiement tardif des échéances du prêt ayant financé le bien situé à [...], que Mme O..., en qualité de co-emprunteur, aurait pu elle-même demander l'affectation prioritaire des versements sur le capital et qu'elle ne produisait pas devant la cour la convention de prêt immobilier prévoyant cette faculté, la cour d'appel, qui a relevé d'office un moyen, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile.