LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IK
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 8 juillet 2020
Rejet
Mme BATUT, président
Arrêt n° 415 F-D
Pourvoi n° P 19-12.485
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 JUILLET 2020
1°/ M. Z... K..., domicilié [...] ,
2°/ Mme A... F..., épouse K..., domiciliée [...] ,
3°/ M. S... K..., domicilié [...] ,
4°/ Mme X... K..., épouse B..., domiciliée [...] ,
5°/ M. O... K..., domicilié [...] ,
6°/ Mme V... K..., domiciliée [...] ,
ont formé le pourvoi n° P 19-12.485 contre l'arrêt rendu le 23 octobre 2018 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige les opposant à Mme U... K..., épouse C..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Auroy, conseiller doyen, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de MM. W... N..., S... et O... K..., et Mmes F..., B... et V... K..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme C..., après débats en l'audience publique du 26 mai 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Auroy, conseiller doyen rapporteur, M. Acquaviva, conseiller, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 23 octobre 2018), G... K... est décédé le 30 décembre 2006, laissant pour lui succéder son épouse, R... L..., et leurs cinq enfants, W... N..., E..., U..., P... et S.... E... est décédé le 12 décembre 2007, laissant pour lui succéder son épouse, Mme F..., et leurs trois enfants, X..., O... et V.... R... L... est décédée le 31 juillet 2008, laissant pour lui succéder ses quatre enfants survivants et ses trois petits-enfants venant en représentation de leur père E.... P... est décédé le 18 décembre 2008, laissant pour lui succéder ses frères et soeur survivants, ainsi que ses neveux venant en représentation de leur père prédécédé. Des difficultés sont survenues au cours des opérations de partage de leurs successions.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches, ci-après annexé
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur la première branche du moyen
Enoncé du moyen
3. MM. W... N..., S... et O... K..., et Mmes F..., X... K..., épouse B..., et V... K... font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la valeur du bien parcelle [...] , devenue parcelles [...] et [...], à la somme de 98 145 euros et de valoriser à la somme de 154 000 euros ce bien donné par les époux K... L... à M. Z... K... le 23 avril 1993 devant être rapporté à la succession, alors « que le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation ; qu'au cas présent, pour fixer à la somme de 154 000 euros la valeur des parcelles cadastrées section [...] et [...], la cour d'appel s'est fondée exclusivement sur le projet de partage rédigé en 2012 par M. M..., notaire, et non signé par les parties ; qu'en statuant ainsi, au regard d'une pièce établie plus de six ans auparavant, de sorte que la valeur retenue ne pouvait être celle la plus proche de la date du partage, la cour d'appel a violé l'article 860 du code civil. »
Réponse de la Cour
4. Aux termes de l'article 860 du code civil, le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation. Lorsque le partage n'a pas encore eu lieu, il incombe aux juges du fond de statuer à la date la plus proche de celui-ci, soit celle à laquelle ils se prononcent.
5. Ayant relevé qu'il n'existait aucun élément de nature à diminuer la somme fixée par le notaire et, ainsi, caractérisé l'actualité de celle-ci, la cour d'appel, qui a fait l'exacte application du texte précité, a souverainement fixé à la somme de 154 000 euros le rapport dû par M. Z... K....
6. Le moyen ne peut donc être accueilli.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. W... N..., S... et O... K..., et Mmes F..., B... et V... K... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. W... N..., S... et O... K..., et Mmes F..., B... et V... K... et les condamne in solidum à payer à Mme C... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour MM. W... N..., S... et O... K..., et Mmes F..., B... et V... K...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, D'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la valeur du bien parcelle [...] , devenue parcelles [...] et [...], à la somme de 98.145 € et d'avoir valorisé à la somme de 154.000 € ce bien donné par les époux K... L... à Monsieur Z... K... le 23 avril 1993 devant être rapporté à la succession ;
AUX MOTIFS QUE sur la valeur du terrain, considérant que les consorts K... soutiennent que le juge a statué ultra petita alors qu'aucune des parties ne lui demandait de valoriser, au surplus à l'issue d'un calcul erroné et après avoir écarté l'estimation de Maître M..., le terrain donné, qu'il n'a pas recueilli les observations des parties dans un débat contradictoire, qu'il n'a pas respecté les termes de l'article 829 du code civil, que par ailleurs le notaire dispose des pouvoirs de l'article 1364 du code de procédure civile ;qu'ils rappellent que la parcelle [...] est une parcelle de grande superficie ; qu'elle a été divisée en deux parcelles ; que la parcelle [...] a été vendue le 23 juin 2005 pour la somme de 54.000 €, que la parcelle [...] , non desservie, n'est pas constructible ; qu'il appartiendra au notaire commis de préciser la valeur de cette parcelle ; considérant que Madame C... fait valoir que T... K... a modifié le terrain en le divisant et en procédant à l'enclavement de la parcelle [...] , de sorte qu'il a dévalorisé l'immeuble qui lui a été donné, que l'évaluation du notaire est justifiée ; qu'il apparaît à la lecture du jugement que Madame C... avait demandé au tribunal d'homologuer le projet de partage établi par Maître M... dans lequel se trouvait notamment la réintégration dans l'actif successoral du bien donné en 1993 par les époux K... L... à leur fils T... et évalué par le notaire à 154.000 € et que Monsieur T... K... et les autres héritiers de la succession demandaient que le bien donné soit « retiré » de la succession et très subsidiairement, qu'il « reviendra au notaire d'estimer le bien en cause » ; qu'il n'était pas demandé au juge de statuer sur la valeur du bien ; qu'en statuant comme il l'a fait, le premier juge a statué ultra petita ; que toutefois l'annulation du jugement n'est pas demandée ; que la demande que forme Madame C... devant la cour tendant à voir fixer la valeur du bien immobilier donné en 1993 à W... K..., qui est le prolongement de sa demande initiale tendant à l'homologation du partage de Maître M... qui évaluait le bien rapporté à la somme de 154.000 € doit être accueillie ; qu'il n'existe aucun élément de nature à diminuer la somme fixée par le notaire, notamment au regard des documents produits par les consorts K... qui ne fournissent aucun avis estimatif sur les parcelles en cause (arrêt attaqué, p. 6-7) ;
1°) ALORS, d'une part, QUE le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation ; qu'au cas présent, pour fixer à la somme de 154.000 € la valeur des parcelles cadastrées section [...] et [...], la cour d'appel s'est fondée exclusivement sur le projet de partage rédigé en 2012 par Me M..., notaire, et non signé par les parties (arrêt attaqué, p. 7 § 1) ; qu'en statuant ainsi au regard d'une pièce établie plus de 6 ans auparavant, de sorte que la valeur retenue ne pouvait être celle la plus proche de la date du partage, la cour d'appel a violé l'article 860 du code civil ;
2°) ALORS, d'autre part, QUE la dénaturation par omission entraîne la censure de la décision qui en est entachée ; qu'au cas présent, il ressortait clairement des motifs du jugement entrepris (p. 7 avant dernier §, prod.) que la parcelle cadastrée section [...] , d'une contenance de 4000 m2, avait été cédée au prix de 54.000 € et non de 64.000 €, tel que l'avait retenu à tort le notaire Me M..., faussant par là son évaluation de la somme totale de 154.000 € (90.000 + 64.000) ; qu'en jugeant néanmoins qu'il n'existait aucun élément de nature à diminuer la somme fixée par le notaire, la cour d'appel a dénaturé par omission le jugement entrepris, méconnaissant, par là, l'article 4 du code de procédure civile ;
3°) ALORS, enfin, QU'il appartient aux juges d'analyser l'ensemble des pièces soumises à leur examen ; qu'au cas présent, pour démontrer que la valeur de la parcelle cadastrée section [...] , d'une contenance de 3270 m2, était nécessairement inférieure à la somme de 90.000 € fixée par le notaire Me M..., de même qu'à la somme de 44.145 € retenue par le jugement entrepris, les consorts K... ont produit à l'appui de leurs écritures une attestation du Maire de [...] (pièce n° 17, prod.), un extrait du POS (pièce n° 18, prod.), et un certificat d'urbanisme (pièce n° 23, prod.) dont il ressortait que la parcelle [...] était enclavée et non constructible ; que les exposants ont également soumis à la cour notamment une fiche d'information (pièce n° 24, prod.), un extrait d'acte de Me M... (pièce n° 25, prod.) ainsi qu'un acte de donation entre vifs du 27 juillet 2004 (pièce n° 26, prod.) dont il s'évinçait que la parcelle située également à [...], cadastrée section [...] , d'une superficie de 3.040 m2 avait été valorisée par le même notaire à la somme de 170 € ; qu'en retenant néanmoins la valeur de 90.000 € pour la parcelle [...] n° 252 afin de fixer à 154.000 € la valeur du bien rapporté, au motif inopérant que les consorts [...] n'avaient fourni aucun avis estimatif sur les parcelles en cause, sans examiner ni viser les pièces n° 17, 18, 23, 24, 25 et 26 qui lui avaient été régulièrement soumises, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.