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23/09/2020 | FRANCE | N°15-28898

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 septembre 2020, 15-28898


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 septembre 2020

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 461 F-D

Pourvoi n° W 15-28.898

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020


1°/ la société SPM Express, société anonyme, dont le siège est [...] , armateur du navire Atlantic Jet,

2°/ M. T... W..., domicilié [...] , a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 septembre 2020

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 461 F-D

Pourvoi n° W 15-28.898

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020

1°/ la société SPM Express, société anonyme, dont le siège est [...] , armateur du navire Atlantic Jet,

2°/ M. T... W..., domicilié [...] , agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société SPM Express,

ont formé le pourvoi n° W 15-28.898 contre l'arrêt rendu le 3 juillet 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige les opposant :

1°/ à la société MTU France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société MTU Friedrichshafen Gmbh, dont le siège est [...] ),

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société SPM Express et de M. W..., ès qualités, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat des sociétés MTU France et MTU Friedrichshafen Gmbh, après débats en l'audience publique du 16 juin 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 juillet 2015), la société SPM Express a fait construire en 2004 un catamaran de transport de passagers en vue d'assurer, dans le cadre d'une délégation de service public obtenue le 20 juin 2003, la desserte des îles de l'archipel de Saint Pierre et Miquelon. Ce bateau était équipé de deux moteurs, fabriqués et vendus par la société de droit allemand MTU Friedrichshafen (la société MTU Allemagne). La société MTU France était chargée de leur maintenance. Les injecteurs de ces moteurs ont été fournis par la société de droit allemand V... M....

2. En mars et en avril 2009, les injecteurs d'origine ont été remplacés par des injecteurs neufs.

3. Le 27 juin 2009, les deux moteurs, tribord puis bâbord, ont présenté des dysfonctionnements, auxquels il n'a pas été possible de remédier et qui ont été imputés par un expert judiciaire à la livraison d'un mauvais lot d'injecteurs.

4. La société SPM Express a assigné les sociétés MTU France et MTU Allemagne en garantie des vices cachés et indemnisation de son préjudice. L'instance a été reprise par M. W..., en qualité de liquidateur de la société SPM Express, mise en liquidation judiciaire simplifiée par un jugement du 10 avril 2019.
Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. M. W..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de condamner solidairement les sociétés MTU France et MTU Allemagne à lui payer la seule somme de 1 227 119,74 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation de première instance et de la débouter du surplus de ses demandes, alors « que l'acheteur, bénéficiaire de la garantie des vices cachés, n'est pas tenu de réparer le bien affecté d'un vice dans l'intérêt du vendeur ; qu'en limitant l'indemnisation de l'immobilisation du navire à une période de cent cinquante six jours aux motifs qu'il "appartenait à la société SPM Express d'entreprendre les réparations de son bateau dans le délai le plus bref possible", quand la société SPM Express n'était pas tenue de procéder à la réparation des moteurs viciés garantis par les sociétés MTU, la cour d'appel a violé les articles 1641 et 1645 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1641 et 1645 du code civil et le principe de la réparation intégrale du préjudice :

6. Il résulte de ces textes et principe que l'acheteur peut exercer à l'encontre du vendeur professionnel une action indemnitaire autonome à raison des vices cachés de la chose vendue et que l'auteur d'un dommage doit en réparer toutes les conséquences, la victime n'étant pas tenue de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable.

7. Pour limiter à la période du 27 juin au 30 novembre 2009 la durée de l'indemnisation du préjudice subi du fait de l'immobilisation du navire, l'arrêt relève que la délégation de service public de la société SPM Express devait prendre fin le 30 novembre 2009. Puis il retient qu'il appartenait à celle-ci d'entreprendre les réparations dans le délai le plus bref possible pour pouvoir reprendre ses activités et qu'elle ne justifie pas que cette immobilisation lui ait été imposée par des tiers pendant vingt-huit mois.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel qui, dans l'intérêt du responsable du dommage, a imposé à la SPM Express de faire réparer son navire et d'effectuer ces réparations dans les meilleurs délais, a violé les textes et principe susvisés.

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche

9. M. W..., ès qualités, fait le même grief à l'arrêt, alors « que la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'en jugeant d'une part que la société SPM Express ne "justifi[ait] pas d'une immobilisation imposée par des tiers pendant vingt-huit mois et uniquement pour la réparation de l'avarie, puisqu'elle pouvait faire exécuter la décision du tribunal assortie de l'exécution provisoire" ce dont il résultait que la durée d'immobilisation imputable à l'avarie s'achevait au jour du jugement rendu le 27 octobre 2011 et, d'autre part, que « la société SPM Express a[vait] ainsi perdu une chance de pouvoir le louer [le navire] pendant cent cinquante six jours" correspondant à la période du 27 juin 2009 au 30 novembre 2009, la cour d'appel s'est contredite et ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

10. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

11. Pour limiter le préjudice résultant de l'immobilisation du navire à la somme de 280 000 euros pour la période du 27 juin au 30 novembre 2009, l'arrêt retient qu'il appartenait à la société SPM Express d'entreprendre les réparations dans le délai le plus bref possible pour pouvoir reprendre ses activités, qu'elle ne justifie pas que cette immobilisation lui ait été imposée par des tiers pendant vingt-huit mois à compter de la date de l'avarie et qu'elle pouvait faire exécuter le jugement, assorti de l'exécution provisoire, qui condamnait la société MTU France à lui payer certaines sommes.

12. En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants dès lors que ce jugement a été rendu le 27 octobre 2011, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de ce texte.

Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche

13. M. W..., ès qualités, fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en toute hypothèse, la société SPM Express faisait valoir, dans ses conclusions, que "le Conseil territorial de la collectivité locale de Saint-Pierre-et-Miquelon a[vait] tiré prétexte de l'immobilisation de l'Atlantic Jet pour acheter un nouveau navire et prétendre assurer la continuité du service public" ; qu'en limitant la période d'indemnisation du préjudice consécutif à l'immobilisation du navire au motif "qu'il n'[était] pas contesté que la délégation de service public de la société SPM Express devait prendre fin le 30 novembre 2009", sans répondre à ce moyen déterminant tiré de ce que l'immobilisation du navire était à l'origine de la reprise en régie de la desserte maritime, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

14. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

15. Pour limiter le préjudice résultant de l'immobilisation du navire à la somme de 280 000 euros pour la période du 27 juin au 30 novembre 2009, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté que la délégation de service public devait prendre fin le 30 novembre 2009 et qu'elle n'a plus jamais été octroyée à la société SPM Express, puisque la collectivité territoriale a repris la régie de la desserte maritime et acquis un bateau.

16. En se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions par lesquelles la société SPM Express faisait valoir que l'exploitation de la desserte des îles avait ainsi été reprise par le Conseil territorial en raison de l'immobilisation de son navire, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement, il condamne solidairement les sociétés MTU France et MTU Friedrichshafen Gmbh à verser à la société SPM Express la somme globale de 1 227 119,74 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation et dit que la capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1154 du code civil, l'arrêt rendu le 3 juillet 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne les sociétés MTU France et MTU Friedrichshafen Gmbh aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés MTU France et MTU Friedrichshafen Gmbh et les condamne à payer à la société SPM Express la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société SPM express et M. W..., ès qualités.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné solidairement les sociétés MTU France et MTU Friedrichshafen à verser à la société SPM Express la seule somme de 1.227.119,74 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation de première instance et d'AVOIR débouté la société SPM Express du surplus de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE sur le préjudice, la société SPM Express sollicite l'indemnisation des préjudices suivants : - le coût des réparations et des frais générés par le bris moteurs : 1.401.902,67 euros ; - le dommage résultant de l'immobilisation du bateau pendant 28 mois : pour l'année 2009 : 654.500 €, pour l'année 2010 : 1.277.500 €, pour l'année 2011 : 1.015.000 € ; - la perte sur la valeur du bateau : 1.000.000 € ; les frais financier : 168.000 € ; que les sociétés MTU opposent d'abord une clause limitative de responsabilité ; qu'elles versent aux débats un devis comportant 12 pages correspondant à la commande DDP M. U... du 5 mars 2009 adressée à la société SPM Express sur laquelle il est précisé en première page « nous vous remercions de votre demande et avons le plaisir de vous soumettre l'offre suivante sur la base de nos conditions générales de maintenance, de réparation, autres services et pièces de rechange dont la copie est ci-jointe » ; que de même, pour la commande du 23 mars 2009, il est fait référence en page 12 aux Conditions générales de vente et de facturation auxquelles sont soumises toutes les ventes ; que si dans les documents précités les sociétés MTU évoquent effectivement leurs conditions générales de vente ou s'y réfèrent, elles ne justifient par aucune pièce les avoir réellement adressées à leur cliente comme le démontre la numérotation des pièces ; qu'ainsi pour la première facture, les pièces sont numérotées de 1 à 12 et ne comprennent pas les Conditions générales de vente lesquelles ne figurent qu'en annexe sans numérotation de page ; qu'il en est de même pour toutes les autres factures produites ; que dans ces conditions, les sociétés MTU, sur lesquelles pèse la charge de cette preuve, ne justifient pas avoir informé de la teneur de ses conditions générales de vente la société SPM Express qui conteste expressément avoir reçu notification, de sorte que les sociétés MTU ne sauraient se prévaloir de la clause limitative de responsabilité ; que pour le coût de réparation du navire, il ressort du rapport de l'expert, que la remise en état du moteur bâbord s'élève à la somme de 218.350 € HT et celle du moteur tribord à la somme de 405.300 HT, après s'être référé aux devis et pièces de la société MTU, de sorte que cette demande n'est pas contestable ; qu'il en est de même du coût du transport du bateau évalué par l'expert à la somme de 15.000 € ; que les autres frais, à savoir la somme de 1.401.902,67 € dont à déduire la somme de susmentionnée de 623.650 € sont pour l'essentiel des frais engagés pour « assumer les procédures judiciaires en cours, pièces n°24 et 47 à 55 », selon la société SPM Express ; qu'or, les frais relatifs à d'autres procédures ne sauraient être réglés que dans le cadre desdites procédures et non dans la présente instance (référé, arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 27 juillet 2010, arbitrage en Norvège), les frais d'avocat et de traduction seront compris dans la demande en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ; que les frais d'expertise et d'assignation seront inclus dans les dépens de la présente instance ; qu'en revanche, les frais de maintenance du bateau, de nettoyage de la coque, de réaménagement ou d'amélioration des équipements du bateau, de factures EDF, repas de mécaniciens, les frais de secrétariat, les salaires des employés et autres frais, qui auraient dû en tout état de cause être assumés par la société SPM Express, si aucune avarie n'étaient survenue, ne peuvent être pris en compte ; qu'il en est de même de toutes les pièces non traduites en langues étrangères, qui ne sauraient être pris en considération ; que le coût du passage du navire aux contrôles pour avoir l'autorisation de naviguer est estimé par M. K... à la somme de 351.536,49 €, au vu de la propre évaluation de la société SPM Express ; que toutefois, il convient d'observer, à l'instar des sociétés MTU, que la somme de 43.066,75 € doit être déduite de ce montant car elle correspond pas à la procédure d'homologation nécessaire (pièce n°24 de l'intimée), qui ne peut comprendre que la cale sèche à Saint Jean de Terre (110.291,97 €), le remorquage du bateau (149.635,03 €), l'hébergement à [...] (22.980,19 €), deux visites de classification du bureau Veritas pour 12.234,50 € (la facture invoquée par les société MTU sera écartée comme datant de 2008), la visite pour le permis de navigation du CSN Le Havre (9.996,09 €), enfin la visite Code ISPS de P. Ouzou du Havre (3.332,03 €) ; que les sociétés MTU ne versent aucun autre document contraire pour légitimer leur contestation ; que la somme de 308.469,74 € devra en conséquence être payée par la société MTU ; que pour l'immobilisation du bateau depuis le 27 juin 2009, il n'est pas contesté que la délégation de service public de la société SPM Express devait prendre fin le 30 novembre 2009 et qu'elle ne lui sera plus octroyée, puisque le Conseil territorial de Saint-Pierre-et-Miquelon a repris la régie de la desserte maritime en passagers (comprenant d'ailleurs l'obligation de reprendre les salariés précédemment employés) et acquis un nouveau bateau ; qu'il appartenait à la société SPM Express d'entreprendre les réparations de son bateau dans le délai le plus bref possible pour pourvoi reprendre ses activités ; que l'expert ayant évalué la durée de l'immobilisation à deux mois, la société SPM ne justifie pas d'une immobilisation imposée par des tiers pendant 28 mois et uniquement pour la réparation de l'avarie, puisqu'elle pouvait faire exécuter la décision du tribunal assortie de l'exécution provisoire ; que si le préjudice d'immobilisation d'un moyen de transport s'apprécie au regard d'un loyer de location et non de la rentabilité du navire, la société SPM Express a ainsi perdu la chance de pouvoir louer pendant 156 jours, car il n'est pas sûr qu'elle aurait trouvé un locataire pour tous les jours de cette période ; qu'au vu de ces éléments, la Cour estime le préjudice subi par cette dernière à la somme de 280.000 € ; que les intérêts au taux légal courront sur ces sommes à compter de l'assignation en première instance valant mise en demeure ; que la capitalisation desdits intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ; que la perte de valeur du bateau n'est pas établie, ainsi que l'ont retenu à juste titre les premiers juges ; qu'en effet, la perte de la valeur vénale correspondant à l'ancienneté aurait existé en l'absence de toute avarie ; qu'en conséquence, l'organisation d'une mesure d'expertise est inopportune ; qu'enfin, la société SPM Express sollicite le paiement de frais financiers à hauteur de la somme de 168.000 € sans aucunement expliciter ce chef de demande et sans verser la moindre pièce pour l'étayer ; que cette réclamation ne saurait prospérer ; que l'équité commande d'allouer à la société SPM Express une indemnité de 35.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'il n'y a pas lieu de prononcer d'autres condamnations pour des frais d'exécution forcée hypothétiques et dont le montant n'est pas connu ;

1° ALORS QUE le préjudice certain doit être intégralement réparé ; qu'en limitant à une perte de chance l'indemnisation du préjudice subi par la société SPM Express, du fait du vice affectant les moteurs du navire, pendant la période du 27 juin 2009 au 30 novembre 2009, cependant qu'elle constatait elle-même que la délégation de service public dont elle était bénéficiaire ne devait prendre fin que le 30 novembre 2009 (arrêt, p. 9, al. 3) de sorte que jusqu'à cette date, le préjudice subi par la société du fait l'immobilisation du navire était certain, la Cour d'appel n'a pas tiré pas les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1645 du Code civil ;

2° ALORS QU'en toute hypothèse, la société SPM Express soutenait, dans ses conclusions qu'elle avait subi un préjudice lié à l'impossibilité d'exploiter le navire qui devait être évalué « par référence avec le coût de la location de l'engin de substitution » (conclusions, p. 31, al. 3 à al. 5 et al. 14) ; qu'en jugeant que la société SPM Express avait « perdu une chance de pouvoir le louer [le navire] pendant 156 jours, car il n'[était] pas absolument sûr qu'elle aurait trouvé un locataire pour tous les jours de cette période », la Cour d'appel a opéré une confusion entre le préjudice allégué par la société SPM Express résultant de l'impossibilité d'exploiter et la méthode de calcul proposée par cette dernière reposant sur la valeur locative du bien immobilisé et a ainsi dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;

3° ALORS QUE l'acheteur, bénéficiaire de la garantie des vices cachés, n'est pas tenu de réparer le bien affecté d'un vice dans l'intérêt du vendeur ; qu'en limitant l'indemnisation de l'immobilisation du navire à une période de 156 jours aux motifs qu'il « appartenait à la société SPM Express d'entreprendre les réparations de son bateau dans le délai le plus bref possible » (arrêt, p. 9, al. 3), quand la société SPM Express n'était pas tenue de procéder à la réparation des moteurs viciés garantis par les sociétés MTU, la Cour d'appel a violé les articles 1641 et 1645 du Code civil ;

4° ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'en jugeant d'une part que la société SPM Express ne « justifi[ait] pas d'une immobilisation imposée par des tiers pendant 28 mois et uniquement pour la réparation de l'avarie, puisqu'elle pouvait faire exécuter la décision du tribunal assortie de l'exécution provisoire » (arrêt, p. 9, al. 3) ce dont il résultait que la durée d'immobilisation imputable à l'avarie s'achevait au jour du jugement rendu le 27 octobre 2011 et, d'autre part, que « la société SPM Express a[vait] ainsi perdu une chance de pouvoir le louer [le navire] pendant 156 jours » correspondant à la période du 27 juin 2009 au 30 novembre 2009, la Cour d'appel s'est contredite et ainsi violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

5° ALORS QU'en toute hypothèse, la société SPM Express faisait valoir, dans ses conclusions, que « le Conseil territorial de la collectivité locale de Saint-Pierre-et-Miquelon a[vait] tiré prétexte de l'immobilisation de l'Atlantic Jet pour acheter un nouveau navire et prétendre assurer la continuité du service public » (conclusions, p. 31, al. 10) ; qu'en limitant la période d'indemnisation du préjudice consécutif à l'immobilisation du navire au motif « qu'il n'[était] pas contesté que la délégation de service public de la société SPM Express devait prendre fin le 30 novembre 2009 » (arrêt, p. 9, al. 3), sans répondre à ce moyen déterminant tiré de ce que l'immobilisation du navire était à l'origine de la reprise en régie de la desserte maritime, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a derechef violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-28898
Date de la décision : 23/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 juillet 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 sep. 2020, pourvoi n°15-28898


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:15.28898
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