LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 septembre 2020
Cassation
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 820 F-D
Pourvoi n° A 19-17.625
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 SEPTEMBRE 2020
La caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° A 19-17.625 contre l'arrêt rendu le 4 avril 2019 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Endel, dont le siège est [...] ,
2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Gauthier, conseiller référendaire, les observations de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Endel, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 juin 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Gauthier, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 4 avril 2019, RG 16/02488), M. A..., salarié de la société Endel (l'employeur), a été victime le 30 août 2011 d'un accident qui a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan (la caisse) au titre de la législation professionnelle et indemnisé jusqu'à la consolidation fixée au 11 novembre 2012.
2. Contestant la durée des arrêts de travail prescrits, l'employeur a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen relevé d'office
3. Conformément aux articles 620, alinéa 2, et 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties.
Vu l'article 1353 du code civil et l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale :
4. Il résulté de ces textes que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.
5. Pour déclarer inopposables à l'employeur la prise en charge des soins et les arrêts de travail litigieux, l'arrêt retient que la preuve de la continuité de symptômes et de soins est à la charge de la partie qui se prévaut de la présomption d'imputabilité et, qu'en l'espèce, la caisse se contente de verser une attestation de paiement des indemnités journalières sur la période du 30 août 2011 au 11 novembre 2012 mais ne produit pas les certificats médicaux d'arrêt de travail postérieurs au certificat médical initial du 30 août 2011, qui a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 30 novembre inclus.
6. Il ajoute que la caisse ne met ainsi pas la cour d'appel en mesure de vérifier qu'il existe bien une continuité des soins et des symptômes depuis la fin de cet arrêt de travail jusqu'à la consolidation, ni d'apprécier le lien de causalité pouvant exister entre l'accident et les lésions ayant pu justifier les arrêts de travail postérieurs.
7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la caisse avait versé des indemnités journalières jusqu'au 11 novembre 2012, date de la consolidation, ce dont il résultait que la présomption d'imputabilité prévue par l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale continuait à s'appliquer jusqu'à cette date, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Endel aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan.
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué
D'AVOIR déclaré inopposable à la société Endel la prise en charge des soins et arrêts de travail au titre de l'accident survenu à Monsieur A... le 30 août 2011, prescrits à compter du 1er décembre 2011
AUX MOTIFS QUE la présomption d'imputabilité des lésions apparues à la suite d'un accident du travail s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant la guérison complète ou la consolidation de l'état de la victime ; que la preuve de la continuité de symptômes et de soins est à la charge de la partie qui se prévaut de la présomption d'imputabilité ; que dans le cas d'espèce, la Caisse se contente de verser une attestation de paiement des indemnités journalières sur la période du 30 août 2011 au 11 novembre 2012, mais ne produit pas les certificats médicaux d'arrêt de travail postérieurs au certificat médical initial du 30 août 2011, qui a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 30 novembre 2011inclus ; que la Caisse primaire d'assurance maladie ne met ainsi pas la Cour d'appel en mesure de vérifier qu'il existe bien une continuité des soins et des symptômes depuis la fin de cet arrêt de travail jusqu'à la consolidation, ni d'apprécier le lien de causalité pouvant exister entre l'accident et les lésions ayant pu justifier les arrêts de travail postérieurs ; que la Cour d'appel note que la durée, même apparamment longue des arrêts de travail, ne permettait pas à l'employeur de présumer que ceux-ci n'étaient pas la conséquence de l'accident du travail ; qu'il convient de faire droit à la demande d'inopposabilité des arrêts de travail postérieurs au 1er décembre 2011, sans qu'il soit pertinent de recourir à une expertise médicale ;
1) ALORS QUE la question de savoir s'il existe ou non une continuité de symptômes et de soins et s'il existe un lien de causalité entre un accident du travail et les lésions ayant justifié des arrêts de travail postérieurs à la fin de l'arrêt de travai prescrit par le certificat médical initial, est une question d'ordre médical ; que la Cour d'appel était dès lors obligée d'ordonner l'expertise médicale obligatoire prescrite par l'article L 141-1 du code de la sécurité sociale ; que la Cour d'appel a donc violé l'article L 141-1 du code de la sécurité sociale ;
2) ALORS QUE la Caisse primaire d'assurance maladie n'avait pas à communiquer à l'employeur ou au juge les éléments du dossier de l'assuré couverts par le secret médical, ces éléments ne devant être éventuellement communiqués que dans le cadre de l'expertise médicale obligatoire prévue par l'article L 141-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sous prétexte que la Caisse ne poduisait pas les certificats médicaux postérieurs au certificat initial, la Cour d'appel a violé les articles L 411-1 et R 411-1 du code de la sécurité sociale.