La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/01/2021 | FRANCE | N°19-11277

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 janvier 2021, 19-11277


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 janvier 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 16 F-D

Pourvoi n° A 19-11.277

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JANVIER 2021

1°/ M. F... A...,

2°/ Mme K... O..., épouse A...,
<

br>domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° A 19-11.277 contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2018 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 janvier 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 16 F-D

Pourvoi n° A 19-11.277

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JANVIER 2021

1°/ M. F... A...,

2°/ Mme K... O..., épouse A...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° A 19-11.277 contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2018 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige les opposant :

1°/ à M. E... J..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Sungold,

2°/ à la société BNP Paribas Personal Finance, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Sygma banque,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de M. et Mme A..., de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de la société BNP Paribas Personal Finance, après débats en l'audience publique du 10 novembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 14 novembre 2018), le 6 mars 2014, à la suite d'un démarchage à domicile, M. et Mme A... (les acquéreurs) ont acquis de la société Sungold (le vendeur) une installation photovoltaïque financée par un crédit souscrit auprès de la société Sygma banque, aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas Personal Finance (la banque).

2. Soutenant que des irrégularités affectaient le bon de commande, les acquéreurs ont assigné le vendeur et la banque en nullité des contrats principal et de crédit affecté et en privation de la créance de restitution du capital prêté. Le vendeur a été placé en liquidation judiciaire et M. J... désigné en qualité de liquidateur.

3. La nullité du contrat de vente pour non-respect des dispositions légales régissant la vente par démarchage, et celle du contrat de crédit affecté, ont été prononcées.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

4. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de les condamner à rembourser à la banque le montant du crédit affecté, déduction faite des échéances déjà remboursées, alors « que commet une faute, la banque qui s'abstient, avant de verser les fonds empruntés, de vérifier la régularité du contrat de vente au regard des dispositions du code de la consommation en vertu duquel l'emprunt a été souscrit ; que la cour d'appel a constaté que le contrat de vente était nul pour non-respect de l'article L. 121-23 du code de la consommation ; qu'en retenant que la banque n'avait pas commis de faute de nature à la priver de son droit à restitution des fonds, sans rechercher si la banque n'avait pas commis une telle faute en s'abstenant de vérifier la régularité du contrat principal de vente avant de verser les fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-23 et L. 311-31 du code de la consommation dans leur version alors applicable et l'article 1147 du code civil dans sa version applicable, 1231-1 du code civil issu de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. La banque conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est nouveau et mélangé de fait.

6. Cependant, le moyen n'est pas nouveau, dès lors que les acquéreurs ont invoqué en cause d'appel une faute de la banque pour s'être abstenue de vérifier la régularité du contrat principal de vente avant le déblocage des fonds.

7. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, L. 121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 et L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

8. Pour condamner les emprunteurs à restituer le capital prêté, l'arrêt se borne à écarter l'existence d'une faute de la banque lors de la délivrance des fonds au vu du certificat de livraison.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la banque n'avait pas commis une faute en s'étant abstenue de vérifier, avant de verser les fonds, la régularité du contrat principal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

Et sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. Les acquéreurs font le même grief à l'arrêt, alors « que commet une faute qui la prive de son droit d'obtenir la restitution du capital prêté, la banque qui libère les fonds sans constater la fourniture complète de la prestation financée par le crédit ; qu'en énonçant que la banque n'avait pas commis de faute en s'abstenant de vérifier la réalisation complète de l'opération et la mise en route de l'installation avant le déblocage des fonds, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 et l'article 1147 du code civil dans sa version applicable, devenu 1231-1 du code civil depuis l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

11. Il résulte de ces textes que la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté, mais que le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

12. Pour condamner les emprunteurs à restituer le capital emprunté, l'arrêt retient que, M. A..., qui reconnaît avoir signé le bon de commande de livraison des panneaux le 13 mars 2014 et qui a accepté par le même document contractuel le déblocage des fonds au profit du vendeur, ne peut pas imputer une faute à la banque, par la remise des fonds à ce dernier à réception du certificat de livraison, conformément à son obligation légale.

13. En se déterminant ainsi, sans constater que la banque s'était assurée de la complète exécution du contrat conclu entre le vendeur et les acquéreurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. et Mme A... à rembourser à la société BNP Paribas Personal Finance le montant du crédit affecté, déduction faite des échéances déjà remboursées et dit que la société Sungold représentée par M. J..., ès qualités, doit garantir M. et Mme A... du montant du remboursement du prêt, l'arrêt rendu le 14 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. et Mme A....

Il est fait grief à la cour d'appel :

D'AVOIR condamné M. F... A... et Mme K... O... épouse A... à rembourser à la Sa Bnp Personal Finance venant aux droits de la Sa Sygma Banque le montant du crédit affecté, déduction faite des échéances déjà remboursées ;

AUX MOTIFS QUE « sur le contrat de vente : le contrat de vente dont s'agit est soumis aux dispositions de l'article L 121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 mars 2014, qui prévoit que les opérations de vente par démarchage doivent faire l'objet d'un contrat comportant à peine de nullité, notamment les modalités et le délai de livraison des biens ou de l'exécution de la prestation de services ; qu'or, le bon de commande en date du 6 mars 2014, versé aux débats ne comporte aucune date de livraison, et cette date ne figure pas non plus sur le contrat de crédit ni sur les pièces annexes, la société Sungold n'évoquant pas ce point dans ses conclusions ; que pour ce seul motif, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres causes de nullité soulevées par M. A... et Mme O... et retenues par le premier juge, le contrat qu'ils ont souscrit avec la société Sungold doit être annulé, en conséquence de quoi ils doivent restituer le matériel à la société Sungold ;

Sur le contrat de crédit : en application de l'article L 311-32 du code de la consommation le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. En vertu de l'article L 311 -31 du code de la consommation les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; que dès lors, M. A... qui reconnaît avoir signé le bon de commande de livraison des panneaux le 13 mars 2014 et qui a accepté par le même document contractuel le déblocage des fonds au profit de la SARL Sungold ne peut pas imputer une faute à la Sygma Banque, par la remise des fonds à cette dernière à réception du dit certificat de livraison, puisque précisément, il s'agissait de son obligation légale, aucune disposition légale ne lui imposant d'attendre la mise en route de l'installation, ni non plus l'expiration du délai de rétractation, sauf à ajouter à la loi ; que l'appréciation du premier juge qui a retenu à tort que la SA Sygma Banque avait commis une faute en s'abstenant de vérifier la réalisation complète de l'opération et la mise en route de l'installation avant le déblocage des fonds, et a dispensé M. A... et Mme O... de rembourser le crédit, doit être infirmée, et ils devront restituer à la SA Sygma Banque la somme qu'ils ont reçue au titre du prix de vente, déduction faite des échéances déjà remboursées ; qu'en application de l'article L 311-33 du code de la consommation applicable à l'espèce, l'annulation du contrat principal étant survenue du fait du vendeur, celui-ci devra garantir l'emprunteur du remboursement du prêt » ;

1°/ ALORS QUE commet une faute qui la prive de son droit d'obtenir la restitution du capital prêté, la banque qui libère les fonds sans constater la fourniture complète de la prestation financée par le crédit ; qu'en énonçant que la banque n'avait pas commis de faute en s'abstenant de vérifier la réalisation complète de l'opération et la mise en route de l'installation avant le déblocage des fonds, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 et l'article 1147 du code civil dans sa version applicable, devenu 1231-1 du code civil depuis l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ET ALORS QUE commet une faute, la banque qui s'abstient, avant de verser les fonds empruntés, de vérifier la régularité du contrat de vente au regard des dispositions du code de la consommation en vertu duquel l'emprunt a été souscrit ; que la cour d'appel a constaté que le contrat de vente était nul pour non-respect de l'article L. 121-23 du code de la consommation ; qu'en retenant que la banque n'avait pas commis de faute de nature à la priver de son droit à restitution des fonds, sans rechercher si la banque n'avait pas commis une telle faute en s'abstenant de vérifier la régularité du contrat principal de vente avant de verser les fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-23 et L. 311-31 du code de la consommation dans leur version alors applicable et l'article 1147 du code civil dans sa version applicable, 1231-1 du code civil issu de l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-11277
Date de la décision : 06/01/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 14 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 jan. 2021, pourvoi n°19-11277


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Delvolvé et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.11277
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award