LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° G 19-81.319 F-D
N° 00014
CK
6 JANVIER 2021
DÉCHÉANCE
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 6 JANVIER 2021
M. P... I... et Mme G... U... ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 5-13, en date du 17 janvier 2019, qui a condamné, le premier, pour complicité d'escroquerie à trois ans d'emprisonnement avec sursis et 3 000 d'amende, la seconde, pour complicité d'escroquerie, à trois ans d'emprisonnement, 3 000 euros d'amende et à cinq ans d'interdiction d'exercice professionnel et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ont été produits.
Sur le rapport de Mme Zerbib, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de Mme G... U..., les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'Etat français, et de la direction départementale des finances publiques du Val-de-Marne, parties civiles et les conclusions de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 novembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Mme U... a été poursuivie pour avoir, entre 2006 et 2007, sur le territoire national et au Luxembourg, les faits étant indivisibles de ceux commis en France, au préjudice de l'État, été complice du délit d'escroquerie à la TVA, commis par Mme V... au sein de la structure INC en établissant des factures TTC mentionnant la TVA Luxembourgeoise adressées au « client français », acquéreur d'automobiles et destinataire de quitus fiscaux délivrés par l'administration au vu de ces pièces, opacifiant ainsi le rôle de la société ACD, vendeur des véhicules acquis par ceux-ci et dispensée en conséquence de cette fraude du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée.
3. Déclarée coupable de ce délit par le tribunal correctionnel, Mme U... a interjeté appel de cette décision de même que le ministère public.
Déchéance du pourvoi formé par M. P... I...
4. M. P... I... n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
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Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen est pris de la violation des articles 6, 8, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale.
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a constaté que les faits de complicité d'escroquerie reprochés à Mme U... n'étaient pas prescrits, alors « que le juge correctionnel, pour apprécier l'existence d'une prescription, ne peut se fonder que sur des faits compris dans la prévention ; qu'il ressortait des pièces de la procédure que le dernier règlement en provenance d'un client français a été reçu par la société INC au plus tard le 26 janvier 2007, les deux règlements du 23 mai 2007, étant en provenance d'une société espagnole, de sorte qu'en se fondant sur ces derniers règlements, pour dire que n'était pas prescrite l'infraction poursuivie contre Mme U..., qui consistait en la réalisation de factures TTC reprenant la TVA luxembourgeoise, que la société INC adressait directement « au client français », permettant à ces derniers d'obtenir les quitus fiscaux et opacifiant ainsi le rôle de la société ACD Automobiles dans ces transactions, pour laquelle le premier acte interruptif de prescription était intervenu le 7 avril 2010, c'est-à-dire plus de trois ans après le dernier règlement d'un « client français », la cour d'appel, qui a pris en compte des faits non visés par la prévention, a méconnu les textes susvisés. »
Réponse de la cour
7. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception de prescription de l'action publique soulevée par Mme U... et fondée sur le fait que la société INC n'exerçait plus aucune activité dès octobre 2006, Mme U... n'étant pas impliquée dans la société Luxpol ayant succédé à la société INC et sur le fait que l'existence des deux derniers encaissements du 23 mai 2017 dont fait état l'administration fiscale n'est pas matériellement établie, l'arrêt énonce notamment, par motifs propres et adoptés, qu'il résulte des relevés bancaires contradictoirement débattus que le dernier encaissement sur le compte bancaire d'INC du prix de vente d'un véhicule est en date du 23 mai 2007 et est connexe aux faits antérieurs de même nature, le gérant de la société ACD ayant confirmé que les certificats d'immatriculation étaient nécessairement remis à ses clients postérieurement à l'encaissement du prix du véhicule par INC.
8. Les juges en déduisent que la dernière délivrance de certificats fiscaux obtenue par suite de manoeuvres frauduleuses caractérisées notamment par la fausse facturation établie par Mme U..., gérante de fait d'INC, simple officine de facturation, est nécessairement postérieure au 23 mai 2007.
9. Ils en concluent que les faits n'étaient pas prescrits, moins de trois ans s'étant écoulés entre cette date et le 7 avril 2010, date du réquisitoire introductif, premier acte interruptif de prescription laquelle ne commence à courir qu'à partir de la dernière remise, les manoeuvres frauduleuses, déployées en l'espèce sur une longue période et déterminantes de remises successives, formant un tout indivisible.
10. Le moyen, qui soutient que les derniers encaissements de mai 2017, qui proviennent de règlements d'un client espagnol, ne correspondent pas à un fait compris dans la prévention, qui ne vise que les factures adressées au client français et ne peuvent être pris en compte pour écarter la prescription, n'a pas été proposé devant les juges du fond, est nouveau et mélangé de fait et comme tel irrecevable, les constatations des juges du fond ne permettant pas d'en apprécier la valeur.
11. Ainsi, le moyen doit être écarté.
12. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CONSTATE la déchéance du pourvoi formé par M. P... I... ;
REJETTE le pourvoi formé par Mme U... ;
FIXE à 2 500 euros la somme que Mme U... devra payer à l'Etat français au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six janvier deux mille vingt et un.