LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 mars 2021
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 214 F-D
Pourvoi n° U 18-24.124
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 MARS 2021
La société [...] , société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société EGC Bat, a formé le pourvoi n° U 18-24.124 contre l'arrêt rendu le 9 août 2018 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. V... B..., domicilié [...] , pris en qualité d'ancien gérant de la société EGC Bat et en qualité de liquidateur amiable de la société EGC Bat,
2°/ au procureur général près la cour d'appel de Nouméa, domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SCP Lesourd, avocat de la société [...] , ès qualités, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. B..., ès qualités, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société [...] , en qualité de liquidateur de la société EGC Bat, du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le procureur général près la cour d'appel de Nouméa.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 9 août 2018), par un jugement du 7 juin 2010, le tribunal mixte de commerce a ouvert le redressement judiciaire de la société EGC Bat (la société). Un plan de redressement ayant été arrêté le 21 mars 2011, le tribunal en a prononcé la résolution et a ouvert, le 23 février 2015, la liquidation judiciaire de la société, la société [...] , en la personne de Mme Y..., étant désignée liquidateur.
3. Suivant requête du 8 novembre 2017, M. B..., ancien dirigeant de la société, a demandé la clôture de la liquidation judiciaire pour extinction du passif. Par un jugement du 26 février 2018, le tribunal, relevant que des instances en recouvrement de créances étaient en cours, a dit n'y avoir lieu à clôture de la procédure et prorogé de 24 mois le terme du délai fixé par le jugement du 23 février 2015 pour l'examen de la clôture. M. B..., ès qualités, a fait appel du jugement.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société [...] , ès qualités, fait grief à l'arrêt de déclarer l'appel recevable, de prononcer la clôture pour extinction du passif de la société et de lui enjoindre de remettre au liquidateur amiable le boni de liquidation, alors « que la décision par laquelle le tribunal proroge le délai d'examen de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire en application de l'article L. 643-9, alinéa 1er, du code de commerce et rejette une demande de clôture faite pour s'opposer à ce report est une mesure d'administration judiciaire non susceptible de recours, fût-ce pour excès de pouvoir ; qu'en se fondant exclusivement, pour déclarer l'appel recevable, sur le fait que le jugement frappé d'appel avait rejeté une demande de clôture de la procédure de liquidation judiciaire, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si ledit jugement n'avait pas par ailleurs prorogé le délai d'examen de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire, ce dont il résultait qu'il s'agissait d'une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 537 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Si la décision par laquelle le tribunal proroge le délai d'examen de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire en application de l'article L. 643-9, alinéa 1er, du code de commerce et rejette, par voie de conséquence, la demande de clôture faite par le débiteur pour s'opposer à ce report est une mesure d'administration judiciaire non susceptible de recours, fût-ce pour excès de pouvoir, celle qui rejette la demande de clôture de la procédure formée à tout autre moment par le débiteur en application de l'article L. 643-9, alinéa 4, du même code, et notamment la demande de clôture pour extinction du passif fondée sur l'alinéa 2 du même texte, est susceptible d'appel, peu important qu'après avoir rejeté la demande, le tribunal ait aussi prorogé le terme du délai d'examen de la clôture.
6. Après avoir relevé que le tribunal avait été saisi, le 8 novembre 2017, d'une requête de M. B..., ès qualités, tendant au prononcé de la clôture pour extinction du passif de la liquidation judiciaire de la société, ouverte le 23 février 2015, l'arrêt retient qu'aucune disposition du code de commerce ou de la délibération du congrès de la Nouvelle-Calédonie n° 352 du 18 janvier 2008 portant mesures de protection en matière de sauvegarde des entreprises ne prévoit que la décision par laquelle le tribunal rejette une demande de clôture pour extinction du passif serait une mesure d'administration judiciaire non susceptible de recours, et qu'en disant n'y avoir lieu en l'état à clôture, le jugement déféré a rejeté la requête de l'ancien dirigeant de la société et tranché une partie du principal dans son dispositif au sens de l'article 544 du code de procédure civile. De ces constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que l'appel formé par M. B..., ès qualités, était recevable.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société [...] , en qualité de liquidateur judiciaire de la société EGC Bat, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour la société [...] , en qualité de liquidateur judiciaire de la société EGC Bat.
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR déclaré l'appel de M. B..., ès qualités, recevable et d'AVOIR prononcé la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour extinction du passif et enjoint à la SELARL [...], ès qualités, de remettre au liquidateur amiable de la société EGC Bat le boni de liquidation ;
AUX MOTIFS QUE « l'article 543 du code de procédure civile dispose que « la voie de l'appel est ouverte en toute matière, même gracieuse, contre les jugements de première instance sauf dispositions contraires » ; qu'aucune disposition du code de commerce ou de la délibération n° 352 du 18 janvier 2008 portant mesures de procédure en matière de sauvegarde des entreprises ne prévoit que la décision par laquelle le tribunal mixte de commerce de Nouméa rejette une demande de clôture pour insuffisance du passif serait une mesure d'administration judiciaire non susceptible de recours ; qu'en disant n'y avoir lieu en l'état à clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société EGC Bat, le jugement référé a rejeté la requête de l'ancien dirigeant de la société débitrice et tranché une partie du principal dans son dispositif au sens de l'article 544 du code de procédure civile ; que l'appel formé par M. B..., ès qualités, doit être déclaré irrecevable » ;
ALORS QUE la décision par laquelle le tribunal proroge le délai d'examen de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire en application de l'article L. 643-9, alinéa 1er, du code de commerce et rejette une demande de clôture faite pour s'opposer à ce report est une mesure d'administration judiciaire non susceptible de recours, fût-ce pour excès de pouvoir ; qu'en se fondant exclusivement, pour déclarer l'appel recevable, sur le fait que le jugement frappé d'appel avait rejeté une demande de clôture de la procédure de liquidation judiciaire, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si ledit jugement n'avait pas par ailleurs prorogé le délai d'examen de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire, ce dont il résultait qu'il s'agissait d'une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 537 du code de procédure civile.