LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 31 mars 2021
Rejet
Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président
Arrêt n° 307 F-D
Pourvoi n° J 19-16.207
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 31 MARS 2021
La société Compagnie de représentation export vêtements enfants, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 19-16.207 contre l'arrêt rendu le 20 novembre 2018 par la cour d'appel d'Angers (chambre A - commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Kidiliz Group, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Catimini,
2°/ à la société U..., société civile professionnelle, dont le siège est [...] , en la personne de M. L... U..., prise en qualité d'administrateur de la société Kidiliz Group,
3°/ à la société J... Partners, société civile professionnelle, dont le siège est [...] , en la personne de Mme N... T..., prise en qualité d'administrateur de la société Kidiliz Group,
4°/ à la société [...] (BTSG), société civile professionnelle, dont le siège est [...] , en la personne de M. F... M..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Kidiliz Group,
5°/ à la société Mandataires judiciaires associés (MJA), société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [...] , en la personne de Mme E... W..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Kidiliz Group,
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Compagnie de représentation export vêtements enfants, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Kidiliz group, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 février 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Par mémoire du 3 décembre 2020, la société Compagnie de représentation export vêtements enfants a repris l'instance, interrompue par le redressement judiciaire de la société Kidiliz Group, contre les organes de la procédure collective.
2. La société Kidiliz Group ayant fait l'objet d'une liquidation judiciaire et d'un plan de cession, cette reprise d'instance a été limitée aux liquidateurs judiciaires, soit la société [...] (BTSG), prise en la personne de M. M..., et la société Mandataires judiciaires associés (MJA), prise en la personne de Mme W....
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 20 novembre 2018), la société Catimini, aux droits de laquelle se trouve la société Kidiliz Group (la société Kidiliz), a confié à la société Compagnie de représentation export vêtements enfants (la société Cie Reve), à effet du 1er juin 1997, le mandat de vendre diverses collections de vêtements à des clients multi-marques, à des grands magasins et, en général, à toute surface de vente, à l'exception des franchises et succursales Catimini.
4. L'article 4 du contrat d'agence commerciale ainsi conclu concédait à la société Cie Reve l'exclusivité sur le secteur géographique de la Suisse et du Liechtenstein et son article 7 stipulait qu'en raison de cette exclusivité, une commission serait due à l'agent sur l'ensemble des ventes effectuées dans son secteur, « que les commandes aient été transmises par lui ou soient parvenues autrement au mandant. »
5. Après avoir constaté que des produits de la marque Catimini étaient proposés à la vente sur le site internet « Zalando.ch » accessible à la clientèle suisse, la société Cie Reve a vainement demandé à sa mandante de lui communiquer le chiffre d'affaires réalisé par l'intermédiaire de ce site afin de calculer les commissions lui revenant sur les ventes ainsi réalisées, puis l'a assignée devant un tribunal de commerce.
Examen des moyens
Sur les deux moyens, réunis
Enoncé des moyens
6. Par son premier moyen la société Cie Reve fait grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble de ses demandes, alors :
« 1°/ que l'agent commercial chargé d'un secteur géographique a droit à la commission afférente aux opérations conclues avec des clients qui déploient
leurs activités commerciales effectives dans ce secteur, même si elles l'ont été sans son intervention ; qu'en jugeant qu'aucune commission n'était due à la société Cie Reve au titre des ventes des produits de la marque Catimini dès lors qu'elles n'avaient pas été conclues par la société Catimini auprès d'un client suisse, mais avec la société Zalando, dont le siège social est en Allemagne, après avoir relevé que cette dernière avait offert les produits acquis de la société Catimini aux particuliers sur le territoire suisse via son site internet Zalando.ch, ce dont il résultait qu'elle avait déployé ses activités commerciales effectives en Suisse, à l'intérieur du secteur géographique de la société Cie Reve, ce qui ouvrait droit à celle-ci à la commission afférente aux opérations ainsi conclues, la cour d'appel a violé l'article L. 134-6 du code de commerce ;
2°/ que l'agent commercial chargé d'un secteur géographique a droit à la commission afférente aux opérations conclues par des clients appartenant à ce secteur avec un tiers en cas d'intervention, même indirecte, du commettant ; qu'en jugeant qu'aucune commission n'était due à la société Cie Reve au titre des ventes des produits de la marque Catimini conclues sur le territoire suisse avec la société Zalando, bien que la société Catimini ait elle-même directement cédé ses produits à cette dernière, ce dont il résultait qu'elle était intervenue, fût-ce indirectement, dans les opérations conclues en Suisse, ce qui ouvrait droit au versement de commissions pour l'agent commercial, la cour d'appel a violé l'article L. 134-6 du code de commerce. »
7. Par son second moyen la société Cie Reve fait le même grief à l'arrêt, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article 4 du contrat d'agent commercial conclu le 28 mai 1997 entre la société Cie Reve et la société Catimini que "le secteur danslequel l'agent est chargé du mandat est constitué par les pays suivants : Suisse/Lichtenstein qui lui sont attribués en exclusivité" et que "l'agent exerce son mandat auprès des catégories de clients ci-après : clients multimarques et grands magasins et en général toute surface de vente, à l'exception des franchises et succursales Catimini", de sorte qu' "en conséquence, toutes correspondances, en provenance de ce secteur, qui seraient adressées au mandant, seront immédiatement transmises par lui à l'agent et les doubles de toutes correspondances, propositions ou factures émises par le mandant à destination du secteur lequel l'exclusivité est accordée à l'agent seront adressées à celui-ci " ; que l'article 7.2, relatif à la rémunération, ajoutait qu' "en raison de l'exclusivité accordée à l'agent et de la représentation permanente qu'il assure dans son secteur, la commission est due à l'agent sur l'ensemble des ventes effectuées dans son secteur, que les commandes aient été transmises par lui ou soient parvenues autrement au mandant" ; qu'il en résulte que la société Catimini s'interdisait de vendre des produits de sa marque en Suisse sans passer par l'intermédiaire de la société Cie Reve ; qu'en considérant néanmoins que les ventes consenties par la société Catimini en Allemagne, à la société Zalando, ne contrevenaient pas à cette clause d'exclusivité, bien que cette dernière les ait ensuite revendus en Suisse et en jugeant que la société Cie Reve ne pouvait faire reproche à la société Catimini de ne pas s'être abstenue de vendre des produits à la société Zalando au motif que cette dernière aurait eu vocation à revendre la marchandise vendue sur le territoire suisse, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103 du code civil ;
2°/ que le mandant est tenu envers l'agent commercial d'une obligation de loyauté qui implique celle de ne pas le concurrencer ; que la clause par laquelle le mandant attribue à l'agent commercial une exclusivité sur un secteur géographique déterminé lui interdit de le concurrencer sur ce secteur ; qu'en affirmant que la société Catimini n'avait pas manqué à ses obligations de loyauté et d'information ni méconnu la clause d'exclusivité lui interdisant de vendre les produits de sa marque sur le territoire suisse, après avoir pourtant relevé qu'elle avait vendu ses produits à la société Zalando qui les avaient revendus sur le territoire suisse, ce dont il résultait qu'elle avait manqué à ses obligations envers son agent commercial en n'empêchant pas la revente des produits qu'elle cédait sur le territoire suisse, la cour d'appel a violé les articles L. 134-4 du code de commerce, et 1134 devenu 1103 et 1104 du code civil. »
Réponse de la Cour
8. Après avoir énoncé que l'article 7-2 du contrat n'ouvrait droit à commission à la société Cie Reve que pour les ventes que la société Catimini aurait effectuées, même sans son intermédiaire, sur son secteur, soit la Suisse et le Liechstenstein, et auprès de la clientèle confiée, l'arrêt relève que les pièces produites ne démentaient pas les allégations de la société Catimini, selon lesquelles elle avait vendu les marchandises litigieuses à la société allemande Zalando, qui a son siège social à [...], en Allemagne, et non, comme le soutenait la société Cie Reve, directement ou indirectement au site marchand Zalando.ch qui, selon elle, constitue une boutique en ligne multi-marques destinée aux particuliers.
9. Ayant ainsi fait ressortir que les produits visés par le contrat avaient été commercialisés en Suisse, auprès d'une clientèle distincte de celle qui lui avait été confiée par le contrat, sans que la société Catimini ait eu un contrôle direct ou indirect sur cette commercialisation, intervenue à l'initiative des consommateurs après qu'elle eût perdu tout droit sur ces produits, l'arrêt retient exactement que la société Cie Reve, qui n'avait aucune exclusivité sur la clientèle allemande et dont la clientèle confiée par le mandat ne comprenait pas les consommateurs, ne pouvait se prévaloir d'un droit à commission sur les ventes litigieuses ni faire reproche à la société Catimini de ne pas s'être abstenue de vendre des produits à un client situé sur sa zone d'exclusivité. La cour d'appel en a déduit à bon droit qu'aucune violation de la clause d'exclusivité ni de l'obligation de loyauté s'imposant au mandant n'était démontrée.
10. Les moyens ne sont donc pas fondés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Compagnie de représentation export vêtements enfants aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Compagnie de représentation export vêtements enfants et la condamne à payer à la société [...] (BTSG), prise en la personne de M. M... et la société Mandataires judiciaires associés (MJA), prise en la personne de Mme W..., en leur qualité de mandataires liquidateurs de la société Kidiliz Group, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie de représentation export vêtements enfants.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande principale de donner injonction à la société Kidiliz Group, venant aux droits de la société Catimini, de produire le chiffre d'affaires réalisé avec le site « zalando.ch » sur le secteur de la Suisse et du Lichtenstein et au vu de ces éléments, de condamner la société Kidiliz Group au paiement de la commission due à la société Cie REVE sur toutes les ventes ne lui ayant pas été déclarées, d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande subsidiaire tendant à la condamnation de la société Kidiliz Group à lui payer la somme forfaitaire de 56.000 € au titre des commissions dues sur les ventes réalisées pour les années 2013 à 2016 outre la somme de 15.000 € pour l'année 2017 et 15.000 € pour l'année 2018, d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande tendant à la condamnation de la société Kidiliz Group à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de ses obligations contractuelles et résistance abusive, et d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande tendant à ordonner à la société Kidiliz Group de cesser de vendre ses produits sur le site « zalando.ch » en respect de ses obligations contractuelles, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
AUX MOTIFS QUE le mandat consenti à la société Cie REVE mentionne qu'il porte sur un secteur géographique composé de la Suisse et du Liechtenstein qui lui sont attribués en exclusivité. Il est encore mentionné que l'agent exerce son mandat au profit des clients multimarques et grands magasins et en général, toutes surfaces de vente, à l'exception des franchises et succursales Catimini ; que le mandat porte donc sur un groupe déterminé de clientèle sur le secteur géographique de la Suisse et du Lichenstein ; qu'il est précisé que le mandat portait sur les collections Babymini, P414, C414 et Crabtango, Marchand de sable, Catimini Jean's ; que, par ailleurs l'article 7 du contrat stipule :
« 1 L'agent perçoit sur les ventes de son secteur une commission égale à 11 % du chiffre d'affaires hors taxes (...)
2 En raison de l'exclusivité accordée à l'agent et de la représentation permanente qu'il assure dans son secteur, la commission est due à l'agent sur l'ensemble des ventes effectuées sur son secteur, que les commandes aient été transmises par lui ou soient parvenues autrement au mandant. » ; qu'il est constant que des produits de la marque Catimini ont été offerts à la vente sur le site internet dédié au territoire suisse Zalando.ch ; qu'il n'est pas soutenu qu'il s'agirait de vêtements ne relevant pas des collections listées dans le contrat d'agent ; que cependant, l'article 7-2 susvisé n'ouvre droit à commission à l'intimée que pour les ventes que la société Catimini aurait effectuées, même sans son intermédiaire, sur son secteur soit ici sur la Suisse et le Liechtenstein ; que cela implique que pour bénéficier du droit à commission qu'elle invoque, l'intimée doit établir, tant en application de la convention d'agent commercial alléguée que, d'ailleurs, des dispositions de l'article L 134-6 alinéa 2 du code de commerce invoquées par la société Catimini elle-même et auxquelles il n'a pas été dérogé, que cette dernière a, personnellement, vendu des produits des collections visées dans le contrat, en Suisse à des clients faisant partie du groupe de clients mentionné dans le contrat ; que pour soutenir que tel est bien le cas en l'espèce, la société Cie REVE reproche à son mandant d'avoir vendu ses produits, directement ou indirectement par le biais de la société mère Zalando, au site marchand Zalando.ch qui constitue, selon elle, une boutique en ligne multi marques destinée aux particuliers, peu important l'implantation de ce site.
Cependant, sans que les pièces produites aux débats ne fassent la preuve contraire, la société Catimini indique qu'elle a vendu les marchandises litigieuses à la société allemande Zalando qui a son siège social à [...] en Allemagne ; que dès lors, la société Compagnie REVE qui n'avait aucune exclusivité sur la clientèle allemande, ne peut se prévaloir de droit à commission au motif que la société Zalando, après avoir acquis, en Allemagne, des produits auprès de la société Catimini, les a ensuite offerts à la vente à des consommateurs domiciliés en Suisse, via son site internet Zalando.ch ; qu'elle ne saurait non plus, sans excéder les termes de la protection contractuelle d'exclusivité dont elle bénéficie, faire reproche à la société Catimini de ne pas s'être abstenue de vendre des produits à un client dont elle savait qu'il « agissait directement sur la Suisse » ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Compagnie REVE ne justifie pas du droit à commission qu'elle invoque.
Elle sera déboutée de ses demandes de ce chef, notamment par infirmation du jugement s'agissant de demandes de commissions pour la période de 2013 à 2015 ; que la société Compagnie REVE n'établissant pas son droit à commission, elle ne peut utilement faire reproche à la société Catimini de ne pas lui avoir communiqué les éléments comptables et plus généralement toute information relative aux ventes de produits Catimini réalisées sur le site Zalando.ch ; qu'il ne ressort pas des termes du contrat que la société Catimini aurait dû lui donner connaissance des commandes passées par la société allemande Zalando et des factures qu'elle avait émises à l'égard de cette dernière société ; qu'en effet, le contrat ne met une obligation de communication à la charge de la société Catimini que pour les correspondances en provenance de son secteur et les propositions ou factures émises par le mandant à destination du seul secteur sur lequel l'exclusivité est accordée au mandataire ; qu'or, la vente de produits en Allemagne ne porte pas sur le secteur de la société Cie REVE ; qu'au regard de ce qui a plus haut été jugé, cette dernière ne peut non plus faire grief à l'appelante de lui avoir dissimulé « une partie de son activité sur son secteur exclusif » ; que la société Compagnie REVE sera donc déboutée de sa demande indemnitaire qu'ainsi qu'il a été dit, il n'est pas interdit à la société Catimini de vendre ses produits à la société Zalando et il ne peut lui être imposé de ne vendre ses produits à la société allemande que sous condition que cette dernière ne les commercialise pas via le site internet Zalando.ch ; que la demande de l'appelante tendant à voir ordonner à la société Catimini de cesser de vendre ses produits sur le site internet Zalando.ch sera rejetée (arrêt, p. 5 et 6) ;
1°) ALORS QUE l'agent commercial chargé d'un secteur géographique a droit à la commission afférente aux opérations conclues avec des clients qui déploient leurs activités commerciales effectives dans ce secteur, même si elles l'ont été sans son intervention ; qu'en jugeant qu'aucune commission n'était due à la société Cie REVE au titre des ventes des produits de la marque Catimini dès lors qu'elles n'avaient pas été conclues par la société Catimini auprès d'un client suisse, mais avec la société Zalando, dont le siège social est en Allemagne, après avoir relevé que cette dernière avait offert les produits acquis de la société Catimini aux particuliers sur le territoire suisse via son site internet zalando.ch, ce dont il résultait qu'elle avait déployé ses activités commerciales effectives en Suisse, à l'intérieur du secteur géographique de la société Cie REVE, ce qui lui ouvrait droit à la commission afférente aux opérations ainsi conclues, la cour d'appel a violé l'article L. 134-6 du code de commerce ;
2° ALORS QUE l'agent commercial chargé d'un secteur géographique a droit à la commission afférente aux opérations conclues par des clients appartenant à ce secteur avec un tiers en cas d'intervention, même indirecte, du commettant ; qu'en jugeant qu'aucune commission n'était due à la société Cie REVE au titre des ventes des produits de la marque Catimini conclues sur le territoire suisse avec la société Zalando, bien que la société Catimini ait elle-même directement cédé ses produits à cette dernière, ce dont il résultait qu'elle était intervenue, fût-ce indirectement, dans les opérations conclues en Suisse, ce qui ouvrait droit au versement de commissions pour l'agent commercial, la cour d'appel a violé l'article L. 134-6 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande principale de donner injonction à la société Kidiliz Group, venant aux droits de la société Catimini, de produire le chiffre d'affaires réalisé avec le site « zalando.ch » sur le secteur de la Suisse et du Lichtenstein et au vu de ces éléments, de condamner la société Kidiliz Group au paiement de la commission due à la société Cie REVE sur toutes les ventes ne lui ayant pas été déclarées, d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande subsidiaire tendant à la condamnation de la société Kidiliz Group à lui payer la somme forfaitaire de 56.000 € au titre des commissions dues sur les ventes réalisées pour les années 2013 à 2016 outre la somme de 15.000 € pour l'année 2017 et 15.000 € pour l'année 2018, d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande tendant à la condamnation de la société Kidiliz Group à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de ses obligations contractuelles et résistance abusive, et d'AVOIR débouté la société Cie REVE de sa demande tendant à ordonner à la société Kidiliz Group de cesser de vendre ses produits sur le site « zalando.ch » en respect de ses obligations contractuelles, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
AUX MOTIFS QUE le mandat consenti à la société Cie REVE mentionne qu'il porte sur un secteur géographique composé de la Suisse et du Liechtenstein qui lui sont attribués en exclusivité. Il est encore mentionné que l'agent exerce son mandat au profit des clients multimarques et grands magasins et en général, toutes surfaces de vente, à l'exception des franchises et succursales Catimini ; que le mandat porte donc sur un groupe déterminé de clientèle sur le secteur géographique de la Suisse et du Lichenstein ; qu'il est précisé que le mandat portait sur les collections Babymini, P414, C414 et Crabtango, Marchand de sable, Catimini Jean's ; que, par ailleurs l'article 7 du contrat stipule :
« 1 L'agent perçoit sur les ventes de son secteur une commission égale à 11 % du chiffre d'affaires hors taxes (...)
2 En raison de l'exclusivité accordée à l'agent et de la représentation permanente qu'il assure dans son secteur, la commission est due à l'agent sur l'ensemble des ventes effectuées sur son secteur, que les commandes aient été transmises par lui ou soient parvenues autrement au mandant. » ; qu'il est constant que des produits de la marque Catimini ont été offerts à la vente sur le site internet dédié au territoire suisse Zalando.ch ; qu'il n'est pas soutenu qu'il s'agirait de vêtements ne relevant pas des collections listées dans le contrat d'agent ; que cependant, l'article 7-2 susvisé n'ouvre droit à commission à l'intimée que pour les ventes que la société Catimini aurait effectuées, même sans son intermédiaire, sur son secteur soit ici sur la Suisse et le Liechtenstein ; que cela implique que pour bénéficier du droit à commission qu'elle invoque, l'intimée doit établir, tant en application de la convention d'agent commercial alléguée que, d'ailleurs, des dispositions de l'article L 134-6 alinéa 2 du code de commerce invoquées par la société Catimini elle-même et auxquelles il n'a pas été dérogé, que cette dernière a, personnellement, vendu des produits des collections visées dans le contrat, en Suisse à des clients faisant partie du groupe de clients mentionné dans le contrat ; que pour soutenir que tel est bien le cas en l'espèce, la société Cie REVE reproche à son mandant d'avoir vendu ses produits, directement ou indirectement par le biais de la société mère Zalando, au site marchand Zalando.ch qui constitue, selon elle, une boutique en ligne multi-marques destinée aux particuliers, peu important l'implantation de ce site.
Cependant, sans que les pièces produites aux débats ne fassent la preuve contraire, la société Catimini indique qu'elle a vendu les marchandises litigieuses à la société allemande Zalando qui a son siège social à [...] en Allemagne ; que dès lors, la société Compagnie REVE qui n'avait aucune exclusivité sur la clientèle allemande, ne peut se prévaloir de droit à commission au motif que la société Zalando, après avoir acquis, en Allemagne, des produits auprès de la société Catimini, les a ensuite offerts à la vente à des consommateurs domiciliés en Suisse, via son site internet Zalando.ch ; qu'elle ne saurait non plus, sans excéder les termes de la protection contractuelle d'exclusivité dont elle bénéficie, faire reproche à la société Catimini de ne pas s'être abstenue de vendre des produits à un client dont elle savait qu'il « agissait directement sur la Suisse » ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Compagnie REVE ne justifie pas du droit à commission qu'elle invoque.
Elle sera déboutée de ses demandes de ce chef, notamment par infirmation du jugement s'agissant de demandes de commissions pour la période de 2013 à 2015 ; que la société Compagnie REVE n'établissant pas son droit à commission, elle ne peut utilement faire reproche à la société Catimini de ne pas lui avoir communiqué les éléments comptables et plus généralement toute information relative aux ventes de produits Catimini réalisées sur le site Zalando.ch ; qu'il ne ressort pas des termes du contrat que la société Catimini aurait dû lui donner connaissance des commandes passées par la société allemande Zalando et des factures qu'elle avait émises à l'égard de cette dernière société ; qu'en effet, le contrat ne met une obligation de communication à la charge de la société Catimini que pour les correspondances en provenance de son secteur et les propositions ou factures émises par le mandant à destination du seul secteur sur lequel l'exclusivité est accordée au mandataire ; qu'or, la vente de produits en Allemagne ne porte pas sur le secteur de la société Cie REVE ; qu'au regard de ce qui a plus haut été jugé, cette dernière ne peut non plus faire grief à l'appelante de lui avoir dissimulé « une partie de son activité sur son secteur exclusif » ; que la société Compagnie REVE sera donc déboutée de sa demande indemnitaire qu'ainsi qu'il a été dit, il n'est pas interdit à la société Catimini de vendre ses produits à la société Zalando et il ne peut lui être imposé de ne vendre ses produits à la société allemande que sous condition que cette dernière ne les commercialise pas via le site internet Zalando.ch ; que la demande de l'appelante tendant à voir ordonner à la société Catimini de cesser de vendre ses produits sur le site internet Zalando.ch sera rejetée (arrêt, p. 5 et 6) ;
1° ALORS QU'aux termes de l'article 4 du contrat d'agent commercial conclu le 28 mai 1997 entre la société Cie REVE et la société Catimini que « le secteur dans lequel l'agent est chargé du mandat est constitué par les pays suivants : Suisse/Lichtenstein qui lui sont attribués en exclusivité » et que « l'agent exerce son mandat auprès des catégories de clients ci-après : clients multimarques et grands magasins et en général toute surface de vente, à l'exception des franchises et succursales Catimini », de sorte qu'« en conséquence, toutes correspondances, en provenance de ce secteur, qui seraient adressées au mandant, seront immédiatement transmises par lui à l'agent et les doubles de toutes correspondances, propositions ou factures émises par le mandant à destination du secteur lequel l'exclusivité est accordée à l'agent seront adressées à celui-ci » ; que l'article 7.2, relatif à la rémunération, ajoutait qu' « en raison de l'exclusivité accordée à l'agent et de la représentation permanente qu'il assure dans son secteur, la commission est due à l'agent sur l'ensemble des ventes effectuées dans son secteur, que les commandes aient été transmises par lui ou soient parvenues autrement au mandant » ; qu'il en résulte que la société Catimini s'interdisait de vendre des produits de sa marque en Suisse sans passer par l'intermédiaire de la société Cie REVE ; qu'en considérant néanmoins que les ventes consenties par la société Catimini en Allemagne, à la société Zalando, ne contrevenaient pas à cette clause d'exclusivité, bien que cette dernière les aient ensuite revendus en Suisse et en jugeant que la société Cie REVE ne pouvait faire reproche à la société Catimini de ne pas s'être abstenue de vendre des produits à la société Zalando au motif que cette dernière aurait eu vocation à revendre la marchandise vendue sur le territoire suisse, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103 du code civil ;
2° ALORS QUE le mandant est tenu envers l'agent commercial d'une obligation de loyauté qui implique l'obligation de ne pas le concurrencer ; que la clause par laquelle le mandant attribue à l'agent commercial une exclusivité sur un secteur géographique déterminé lui interdit de le concurrencer sur ce secteur ; qu'en affirmant que la société Catimini n'avait pas manqué à ses obligations de loyauté et d'information ni méconnu la clause d'exclusivité lui interdisant de vendre les produits de sa marque sur le territoire suisse, après avoir pourtant relevé qu'elle avait vendu ses produits à la société Zalando qui les avaient revendus sur le territoire suisse, ce dont il résultait qu'elle avait manqué à ses obligations envers son agent commercial en n'empêchant pas la revente des produits qu'elle cédait sur le territoire suisse, la cour d'appel a violé les articles L. 134-4 du code de commerce, et 1134 devenu 1103 et 1104 du code civil.