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12/05/2021 | FRANCE | N°20-10525

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 2021, 20-10525


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 522 F-D

Pourvoi n° D 20-10.525

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [B].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

A

U NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

M. [S] [B], domicilié [Adres...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 522 F-D

Pourvoi n° D 20-10.525

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [B].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

M. [S] [B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 20-10.525 contre l'arrêt rendu le 26 octobre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Socares, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Maron, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [B], de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Socares, après débats en l'audience publique du 16 mars 2021 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Maron, conseiller rapporteur, M. Le Corre, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 26 octobre 2018), M. [B], qui occupait les fonctions d'assistant de direction du restaurant « Le fer à cheval », géré par la société Socares, a été licencié le 18 juillet 2012.

2. Il a contesté cette décision devant la juridiction prud'homale et demandé la condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes.

3. Devant cette juridiction, après un premier renvoi, l'affaire a été à nouveau appelée le 17 octobre 2013, date à laquelle, constatant le défaut de diligences des parties, la juridiction a pris une ordonnance de radiation conditionnant la réinscription de l'affaire à la justification, par la partie la plus diligente, de la communication de l'ensemble des moyens et pièces entre les parties.

4. Le 16 octobre 2015, le greffe a reçu du salarié une demande de réinscription de l'affaire au rôle.

5. L'exception de péremption a alors été soulevée et a été rejetée par le conseil de prud'hommes qui a statué au fond.

6. Sur appel de l'employeur, la cour a rendu l'arrêt attaqué.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater la péremption de l'instance et par voie de conséquence son extinction, alors :

« 1°/ qu'en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ; que l'ordonnance du 17 octobre 2013 s'était bornée à ordonner la radiation de l'affaire du rôle et à dire que l'affaire sera réinscrite après échange des pièces et moyens entre les parties en rappelant les dispositions des articles 15 et 16 du code de procédure civile ; qu'en retenant néanmoins que cette ordonnance avait mis à la charge des parties des diligences, pour en déduire que la péremption était acquise faute pour le salarié d'avoir accompli toutes ces diligences, la cour d'appel a violé l'article R. 1452-8 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige ;

2°/ qu'en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ; que si l'expiration de ce délai constitue une date butoir, les parties peuvent valablement accomplir lesdites diligences avant qu'il n'ait commencé à courir ; que, par ordonnance de radiation du 17 octobre 2013, notifiée le 23 octobre suivant, il a été précisé « que l'affaire ne pourra être réinscrite qu'à la condition expresse que la partie la plus diligente justifie que celle-ci est en état d'être plaidée (sur justification que l'ensemble des pièces et moyens ont été bien échangés entre les parties » ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le salarié avait communiqué à la juridiction et à la partie adverse ses conclusions et pièces le 4 mars 2013 et que les conclusions qu'il avait transmises au greffe par courrier du 16 octobre 2015 étaient identiques aux précédentes ; qu'en retenant néanmoins qu'aucun élément de la procédure ne venait attester de la communication des écritures et pièces de l'exposant à la partie adverse à la date du 16 octobre 2015 pour en déduire que, à défaut de justification de l'accomplissement de toutes les diligences requises au 25 octobre 2015, l'instance était périmée, quand l'ensemble des diligences mises à la charge des parties avaient été accomplies antérieurement à l'expiration du délai de péremption de deux ans, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 386 du code de procédure civile et R. 1452-8 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;

3°/ en toute hypothèse que le salarié faisait valoir que, par courrier du 16 octobre 2015, il avait accompli les diligences mises à sa charge par l'ordonnance de radiation en communiquant au conseil de prud'hommes ses conclusions et bordereau de pièces en réplique aux conclusions adverses du 11 juin 2013, avec copie au conseil de la société Socares, de telle sorte que l'affaire était en état d'être plaidée ; qu'en retenant qu'aucun élément de la procédure ne venait attester de la communication des écritures et pièces à la partie adverse à cette date, la cour d'appel, qui a dénaturé par omission le courrier du 16 octobre 2015 dont il ressortait au contraire que l'exposant avait procédé à la communication à la partie adverse de ses conclusions en réplique et bordereau de pièces, a violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturé les documents de la cause ;

4°/ au demeurant que l'employeur ne contestait pas avoir reçu communication des conclusions produites le 16 octobre 2015 par l'exposant accompagnées du bordereau des pièces communiquées ; qu'il soutenait que ces conclusions en réplique n'étaient pas accompagnées de pièces nouvelles et qu'en les lui communiquant quelques jours avant l'expiration du délai de péremption, le salarié ne lui avait pas permis d'en prendre utilement connaissance et d'y répondre ; qu'en retenant qu'aucun élément de la procédure ne venait attester de la communication des écritures et pièces à la partie adverse à cette date du 16 octobre 2015, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

5°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat ; qu'en retenant que la lecture du dossier du conseil de prud'hommes permettait de se convaincre du défaut d'accomplissement de ces diligences dans les délais impartis dans la mesure où il y figurait une correspondance de M. Segard Delephance, conseil de la société Socares en date du 17 mai 2016, mentionnant n'avoir reçu les pièces et conclusions adverses que le 13 mai à 19h00, la cour d'appel, qui a procédé par vérification personnelle et s'est dès lors fondée sur des faits qui n'ont pas été mis dans le débat, a violé l'article 7 du code de procédure civile ;

6°/ à tout le moins que la cour d'appel devait appeler les parties à s'expliquer sur les faits qu'elle relevait qui n'était pas dans le débat ; qu'en omettant de le faire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

8. Selon l'article R. 1452-8 du code du travail, en matière prud'homale l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.

9. Pour interrompre la péremption, les parties doivent s'acquitter de l'ensemble des diligences mises à leur charge par l'ordonnance de radiation.

10. La cour d'appel a constaté, d'une part, que l'ordonnance de radiation précisait que l'affaire ne serait réinscrite qu'à la condition que « l'affaire soit en état d'être jugée », ce qui impliquait qu'il soit justifié par la partie la plus diligente de ce que « l'ensemble des pièces et moyens ont bien été échangés entre les parties » et, d'autre part, sans dénaturation, que le salarié ne justifiait pas avoir effectué avant l'expiration du délai de péremption toutes les diligences mises à sa charge, notamment la communication des pièces.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé par Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président en ayant délibéré en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [B].

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR constaté la préemption de l'instance et par voie de conséquence son extinction.

AUX MOTIFS QUE la juridiction prud'homale a expressément mentionné dans l'ordonnance de radiation, notifiée aux parties le 23 octobre 2013 que l'affaire ne serait réinscrite qu'à la condition que « l'affaire soit en état d'être jugée », ce qui impliquait qu'il soit justifié par la partie la plus diligente de ce que « l'ensemble des pièces et moyens ont bien été échangés entre les parties ». Il y a lieu de préciser que dans la motivation de sa décision, le conseil des prud'hommes s'est référé aux dispositions des articles 15 et 16 du code de procédure civile en insistant sur cette nécessaire communication entre les parties des moyens et pièces. Or, force est de constater qu'au moment où M. [B] a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle, soit le 16 octobre 2013 (il faut lire 2015), c'est-à-dire à 7 jours de la date limite de péremption, il venait seulement de transmettre au greffe ses conclusions. Aucun élément de la procédure ne vient attester de la communication des écritures et pièces à la partie adverse à cette date. La lecture du dossier du conseil des prud'hommes permet même de se convaincre du défaut d'accomplissement de ces diligences dans les délais impartis dans la mesure où il y figure une correspondance de Maître Segard Deleplanque, conseil de la société Socares, en date du 17 mai 2016, mentionnant n'avoir reçu les pièces et conclusions adverses que le 13 mai à 19h00. Il s'ensuit que faute de justifier de l'accomplissement de toutes les diligences requises au 25 octobre 2015, l'instance prud'homale était périmée.

1° ALORS QU'en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ; que l'ordonnance du 17 octobre 2013 s'était bornée à ordonner la radiation de l'affaire du rôle et à dire que l'affaire sera réinscrite après échange des pièces et moyens entre les parties en rappelant les dispositions des articles 15 et 16 du code de procédure civile ; qu'en retenant néanmoins que cette ordonnance avait mis à la charge des parties des diligences, pour en déduire que la péremption était acquise faute pour le salarié d'avoir accompli toutes ces diligences, la cour d'appel a violé l'article R. 1452-8 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige.

2° ALORS QU'en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ; que si l'expiration de ce délai constitue une date butoir, les parties peuvent valablement accomplir lesdites diligences avant qu'il n'ait commencé à courir ; que, par ordonnance de radiation du 17 octobre 2013, notifiée le 23 octobre suivant, il a été précisé « que l'affaire ne pourra être réinscrite qu'à la condition expresse que la partie la plus diligente justifie que celle-ci est en état d'être plaidée (sur justification que l'ensemble des pièces et moyens ont été bien échangés entre les parties » ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué (v. p. 3, alinéa 5) que le salarié avait communiqué à la juridiction et à la partie adverse ses conclusions et pièces le 4 mars 2013 et que les conclusions qu'il avait transmises au greffe par courrier du 16 octobre 2015 étaient identiques aux précédentes (arrêt p. 4, alinéa 1er) ; qu'en retenant néanmoins qu'aucun élément de la procédure ne venait attester de la communication des écritures et pièces de l'exposant à la partie adverse à la date du 16 octobre 2015 pour en déduire que, à défaut de justification de l'accomplissement de toutes les diligences requises au 25 octobre 2015, l'instance était périmée, quand l'ensemble des diligences mises à la charge des parties avaient été accomplies antérieurement à l'expiration du délai de péremption de deux ans, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 386 du code de procédure civile et R 1452-8 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige.

3° ALORS en toute hypothèse QUE le salarié faisait valoir (concl. d'appel du 31 août 2017, p. 5) que, par courrier du 16 octobre 2015, il avait accompli les diligences mises à sa charge par l'ordonnance de radiation en communiquant au conseil de prud'hommes ses conclusions et bordereau de pièces en réplique aux conclusions adverses du 11 juin 2013, avec copie au conseil de la société Socares, de telle sorte que l'affaire était en état d'être plaidée ; qu'en retenant qu'aucun élément de la procédure ne venait attester de la communication des écritures et pièces à la partie adverse à cette date, la cour d'appel, qui a dénaturé par omission le courrier du 16 octobre 2015 dont il ressortait au contraire que l'exposant avait procédé à la communication à la partie adverse de ses conclusions en réplique et bordereau de pièces, a violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturé les documents de la cause.

4° ALORS au demeurant QUE l'employeur ne contestait pas avoir reçu communication des conclusions produites le 16 octobre 2015 par l'exposant accompagnées du bordereau des pièces communiquées ; qu'il soutenait que ces conclusions en réplique n'étaient pas accompagnées de pièces nouvelles et qu'en les lui communiquant quelques jours avant l'expiration du délai de péremption, le salarié ne lui avait pas permis d'en prendre utilement connaissance et d'y répondre (v. ses concl n° II, pp. 11 et 12) ; qu'en retenant qu'aucun élément de la procédure ne venait attester de la communication des écritures et pièces à la partie adverse à cette date du 16 octobre 2015, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile.

5° ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat ; qu'en retenant que la lecture du dossier du conseil de prud'hommes permettait de se convaincre du défaut d'accomplissement de ces diligences dans les délais impartis dans la mesure où il y figurait une correspondance de Maître Segard Delephance, conseil de la société Socares en date du 17 mai 2016, mentionnant n'avoir reçu les pièces et conclusions adverses que le 13 mai à 19h00, la cour d'appel, qui a procédé par vérification personnelle et s'est dès lors fondée sur des faits qui n'ont pas été mis dans le débat, a violé l'article 7 du code de procédure civile.

6° ALORS à tout le moins QUE la cour d'appel devait appeler les parties à s'expliquer sur les faits qu'elle relevait qui n'était pas dans le débat ; qu'en omettant de le faire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-10525
Date de la décision : 12/05/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 26 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 2021, pourvoi n°20-10525


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.10525
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