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04/11/2021 | FRANCE | N°19-18908

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 novembre 2021, 19-18908


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1225 F-D

Pourvoi n° V 19-18.908

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2021

1°/ La société Présent,

dont le siège est [Adresse 4], société à responsabilité limitée,

2°/ la société Ascagne AJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1225 F-D

Pourvoi n° V 19-18.908

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2021

1°/ La société Présent, dont le siège est [Adresse 4], société à responsabilité limitée,

2°/ la société Ascagne AJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en la personne de Mme [T] [E], en qualité d'administrateur de la société Présent,

3°/ la société MJA, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], prise en la personne de Mme [K] [Y], en qualité de mandataire judiciaire de la société Présent,

ont formé le pourvoi n° V 19-18.908 contre l'arrêt rendu le 25 juin 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 10), dans le litige les opposant à M. [R] [F], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat des sociétés Présent, Ascagne AJ et MJA, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [F], après débats en l'audience publique du 15 septembre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 juin 2019), M. [F] a été engagé à compter du 1er janvier 1982, sans contrat écrit, en qualité de journaliste par la société Présent (la société). Suivant contrat de travail du 31 mai 2000, il a exercé les fonctions de rédacteur à temps partiel, sa durée hebdomadaire de travail étant de 20 heures 43 minutes. A compter du 8 avril 2014, il a été placé en arrêt de travail.

2. Le 26 septembre 2014, il a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir le prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur et paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

3. Le médecin du travail l'ayant, le 3 mars 2016, déclaré « inapte au poste actuel, inapte à tout autre poste dans l'entreprise, apte à un poste assimilé dans un environnement compatible avec sa santé », l'employeur a présenté au salarié des propositions de reclassement que celui-ci a refusées.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui, pris en sa quatrième branche, est irrecevable, et pris en ses deux autres branches, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer recevables les demandes du salarié de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, de prononcer, en conséquence, la résiliation judiciaire du contrat à ses torts, de le condamner au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et de rappel de prime de treizième mois et de lui ordonner de remettre un bulletin de paie récapitulatif conforme, alors « qu'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'il en résulte que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, qui concerne un problème de durée du travail et donc d'une exécution du contrat de travail fondée sur l'absence d'une mention au contrat susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que le salarié a signé le 31 mai 2000, un contrat de travail écrit stipulant une durée hebdomadaire de travail de 20h43 minutes de telle sorte que dès cette date, qui constitue le point de départ du délai de prescription de deux ans de son action en requalification, le salarié était parfaitement informé qu'il exerçait des fonctions à temps partiel ; qu'en décidant néanmoins que le contrat de travail étant toujours en cours, aucune prescription n'est encourue s'agissant de la requalification du contrat de travail à temps partiel en temps complet, la cour d'appel a violé l'article susvisé par refus d'application et l'article L. 3245-1 du même code par fausse application. »

Réponse de la Cour

6. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise au délai de prescription prévu par l'article L. 3245-1 du code du travail.

7. La cour d'appel, qui a constaté que la juridiction prud'homale avait été saisie le 18 septembre 2014 et que le rappel de salaire fondé sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet portait sur la période de juin 2010 à octobre 2017, en a exactement déduit qu'aucune prescription n'était encourue de ce chef.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors « que la cassation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré recevable comme non prescrite la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel de M. [F] en contrat de travail à temps complet entraînera par voie de conséquence en application de l'article 624 du code de procédure civile sa censure en ce qu'il a condamné la société à payer au salarié les sommes de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de treizième mois. »

Réponse de la Cour

10. Le premier moyen pris en sa première branche étant rejeté, ce moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence est sans portée.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. L'employeur fait encore grief à l'arrêt de déclarer recevables les demandes du salarié, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts, de le condamner au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et de rappel de prime de treizième mois et de lui ordonner de remettre un bulletin de paie récapitulatif conforme, alors :

« 1°/ que l'employeur n'est pas tenu de rompre le contrat de travail d'un salarié inapte ; qu'en retenant néanmoins que l'employeur avait commis une faute de nature à justifier la résiliation du contrat de travail à ses torts en maintenant délibérément le salarié dans une situation d'inactivité forcée au sein de l'entreprise et sans aucune évolution possible, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2, L. 1226-4, L. 1226-11 et L. 1226-12 du code du travail, ensemble 1184 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;

2°/ que dans ses conclusions d'appel, la société et les organes de la procédure de sauvegarde avaient fait valoir que dans l'esprit de la société, devant le refus injustifié du salarié de ses 5 propositions de reclassement jamais remises en cause par le médecin du travail qui a été destinataire de chacune d'elles, mieux valait continuer à verser son salaire à l'intimé jusqu'à sa retraite, ce qui avait le mérite de préserver l'emploi de ses autres salariés ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre à ces conclusions qui étaient de nature à influer sur la décision si elles avaient été prises en considération, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

12. La cour d'appel a, d'abord, par motifs adoptés, énoncé à bon droit qu'en cas de refus du poste de reclassement proposé en application de l'article L. 1226-2 du code du travail au salarié déclaré inapte, il appartenait à l'employeur de tirer les conséquences du refus du salarié, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l'intéressé aux motifs de l'impossibilité de reclassement, la reprise par l'employeur du paiement des salaires, à laquelle il est tenu en application de l'article L. 1226-4 du même code, ne le dispensant pas de l'obligation qui lui était faite par l'article L. 1226-2 susvisé de proposer un poste de reclassement.

13. Elle a, ensuite, également par motifs adoptés, relevé qu'alors que le salarié avait refusé plusieurs fois le poste proposé à titre de reclassement en télétravail à hauteur de 20 heures, 15 heures ou 12 heures hebdomadaires selon les propositions, l'employeur s'était pour sa part abstenu, postérieurement à sa dernière proposition de reclassement, d'effectuer de nouvelles recherches de reclassement ou de procéder au licenciement de l'intéressé aux motifs de l'impossibilité de reclassement.

14. Elle a, enfin, par motifs propres, retenu que l'employeur avait maintenu délibérément le salarié dans une situation d'inactivité forcée au sein de l'entreprise sans aucune évolution possible.

15. Elle a ainsi pu, sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, en déduire que ce comportement consistant à suspendre abusivement le contrat de travail constituait un manquement suffisamment grave justifiant que la résiliation judiciaire du contrat de travail fût prononcée aux torts de l'employeur.

16. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

17. L'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts et de le condamner, en conséquence, au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire, de congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents et de prime de treizième mois, alors « que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif à la requalification du contrat de travail du salarié à temps partiel en temps complet et sur le troisième moyen de cassation relatif à la suspension prétendument abusive du contrat de travail depuis l'avis d'inaptitude entraînera par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile l'annulation du chef de l'arrêt ayant prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et d'avoir en conséquence condamné la société à payer au salarié les sommes de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de treizième mois. »

Réponse de la Cour

18. Le troisième moyen, relatif au prononcé de la résiliation judiciaire, étant rejeté, ce moyen, qui invoque une cassation par voie de conséquence, est sans portée.

Mais sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

19. L'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer recevables les demandes du salarié de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, de prononcer, en conséquence, la résiliation judiciaire du contrat à ses torts, de le condamner au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et de rappel de prime de treizième mois et de lui ordonner de remettre un bulletin de paie récapitulatif conforme, alors :

« 2°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le juge ne saurait procéder par voie de simple affirmation ; qu'en se contentant de retenir que même si l'horaire est restée à temps partiel, l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaines ou les semaines du mois en méconnaissance de l'article L. 3123-6 du code du travail, sans autrement justifier en fait cette appréciation, quand la société et les organes de la procédure de sauvegarde faisaient valoir au contraire à l'instar du jugement du conseil de prud'hommes dont la confirmation sur ce point était sollicitée que non seulement le salarié, également associé du journal, avait lui-même rappelé dans une note qu'il avait faite le 17 mars 2014 à M. [I] le temps qu'il consacrait à l'écriture de ses livres et le nombre de livres qu'il avait écrit (une trentaine), ce qui excluait qu'il ait travaillé à temps complet pour le journal mais de surcroît que les attestations versées aux débats quant à l'organisation du travail durant la semaine n'établissaient aucunement que l'intéressé effectuait des heures de travail au-delà de 20h43, ces mêmes pièces justifiant en outre du fait que le salarié pouvait prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était dès lors nullement dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de son employeur, peu important à cet égard l'existence d'une erreur sur les bulletins de paie pendant plus de 12 ans jusqu'à la saisine du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a procédé par voie de simple affirmation et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à affirmer, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet que l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3123-6 du code du travail sans justifier concrètement son appréciation au regard des éléments de fait et de preuve produits aux débats et notamment des attestations produites aux débats par la société démontrant que le salarié, qui était également associé du journal, disposait d'une très grande autonomie pour organiser son temps de travail, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

20. Selon ce texte, le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et de ce qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

21. Pour accueillir la demande du salarié de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et condamner l'employeur à un rappel de salaire, l'arrêt retient qu'à compter du 1er janvier 2002, les bulletins de paye du salarié ont mentionné un horaire de travail mensuel de 151h,66 (puis en mars 2002 151h,67) soit 35 heures par semaine, qu'il importe peu qu'il s'agisse ou non d'une erreur matérielle dans la mesure où un horaire à temps complet n'a fait l'objet d'aucun avenant, qu'en tout état de cause, même si l'horaire est resté à temps partiel, l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3123-6 du code du travail, qu'il convient donc de requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet.

22. En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à réfuter les motifs du jugement que l'employeur, en en sollicitant la confirmation, s'était approprié, aux termes desquels les premiers juges avaient retenu que les bulletins de salaire étaient affectés d'une erreur et que l'employeur rapportait la preuve de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et de ce qu'il n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

23. L'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer recevables les demandes du salarié de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, de prononcer, en conséquence, la résiliation judiciaire du contrat à ses torts, de le condamner au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et de rappel de prime de treizième mois et de lui ordonner de remettre un bulletin de paie récapitulatif conforme, alors « que le jugement ouvrant la procédure de sauvegarde emporte interdiction de plein droit de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture et interrompt les actions en justice ; qu'en l'espèce, la société avait demandé à la cour d'appel dans le dispositif de ses conclusions d'appel au visa des jugements du tribunal de commerce des 8 août 2018 et 5 février 2019 de constater l'intervention des organes de la procédure de sauvegarde ; que la cour d'appel a constaté que Me [Y] (Selafa MJA) était mandataire judiciaire de la société et Me [T] [E] (Selarl Ascagne AJ) administrateur judiciaire de la société ; qu'en condamnant néanmoins la société à payer diverses sommes d'argent au salarié au titre de la résiliation de son contrat de travail et de la requalification de son contrat à durée indéterminée à temps partiel en temps complet prononcé le 6 octobre 2017 par le conseil de prud'hommes, soit avant le jugement d'ouverture, la cour d'appel, qui ne pouvait condamner la société, objet d'une procédure de sauvegarde, à payer une somme d'argent au titre de créances nées avant le jugement ayant ouvert la procédure de sauvegarde, a violé les articles L. 622-7 et L. 622-21 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 622-7, L. 622-21, L. 622-22 et L. 625-3 du code de commerce :

24. Aux termes du premier texte susvisé, le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception du paiement par compensation de dettes connexes et emporte également de plein droit interdiction de payer toute créance née après le jugement d'ouverture non mentionnée au I de l'article L. 622-17.

25. Selon le deuxième, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent.

26. Il résulte de l'effet combiné des deux derniers que les instances en cours devant la juridiction prud'homale à la date du jugement d'ouverture sont poursuivies en présence du mandataire judiciaire et de l'administrateur lorsqu'il a une mission d'assistance mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

27. La cour d'appel a confirmé partiellement le jugement et, statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant, a condamné la société à payer au salarié diverses sommes.

28. En statuant ainsi par voie de condamnation à paiement alors que, la société débitrice étant, depuis un jugement du 8 août 2018, sous la protection d'une procédure de sauvegarde, elle avait constaté que les organes de cette procédure étaient intervenus à l'instance devant elle et qu'il était constant au débat que les créances du salarié étaient antérieures à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

29. La cassation à intervenir sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence des chefs du dispositif relatifs au rappel de salaire pour la période de juin 2010 à octobre 2017 ainsi qu'au montant des indemnités de rupture, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

30. Elle n'emporte, en revanche, pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen pris en sa quatrième branche, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement ayant condamné la société Présent au paiement de la somme de 65 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamne ladite société à payer à M. [F] les sommes de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 801,06 euros à titre de congés payés afférents, 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de treizième mois, 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2010 à octobre 2017 et 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 25 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour les sociétés Présent, Ascagne AJ et MJA.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevables les demandes de M. [F] de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, d'avoir en conséquence prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] aux torts de l'employeur à compter du jugement, d'avoir condamné la société Présent à payer à Monsieur [F] les sommes de 65.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de 13e mois et d'avoir ordonné à la société Présent de remettre à Monsieur [F] un bulletin de paie récapitulatif conforme.

- AU MOTIF QUE Sur la requalification de contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et le rappel de salaire afférent, la société soulève la prescription de la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en temps complet depuis le 31 décembre 2007. Monsieur [F] a été engagé, sans contrat écrit, à compter du 1 er janvier 1982. Il reconnaît qu'il travaillait à temps partiel à concurrence de 20h43 minutes par semaine. Le 31 mai 2000, un contrat de travail écrit a été signé stipulant une durée hebdomadaire de travail de 20h43 minutes. Monsieur [F] a saisi la juridiction prud'homale 18 septembre 2014. Le contrat de travail étant toujours en cours, aucune prescription n'est encourue s'agissant de la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en temps complet. À compter du 1er janvier 2002, les bulletins de paye de Monsieur [F] ont mentionné un horaire de travail mensuel de 151h,66 (puis en mars 2002 151h,67) soit 35 heures par semaine. Il importe peu qu'il s'agisse ou non d'une erreur matérielle dans la mesure où un horaire à temps complet n'a fait l'objet d'aucun avenant. En tout état de cause, même si l'horaire est resté à temps partiel, l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3123-6 du code du travail. Il convient donc de requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet. Sur la prescription des salaires, Monsieur [F] a saisi le conseil de prud'hommes le 26 septembre 2014 (date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation) interrompant ainsi la prescription. Le nouveau délai prévu par la loi du 14 juin 2013 a commencé à courir à cette date sans qu'il puisse excéder l'ancien délai de 5 ans. Il s'ensuit que les salaires ne sont pas prescrits à compter du 13 juin 2010. Il sera fait droit la demande de rappel de salaire sur la base d'un taux horaire de 26,41 euros convenu initialement par les parties, et dans la limite de 105 327,75 euros, le salarié ne justifiant pas de la différence du montant des salaires figurant dans les motifs et le dispositif de ses conclusions.

1°)- ALORS QUE D'UNE PART aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'il en résulte que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, qui concerne un problème de durée du travail et donc d'une exécution du contrat de travail fondée sur l'absence d'une mention au contrat susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que M. [F] a signé le 31 mai 2000, un contrat de travail écrit stipulant une durée hebdomadaire de travail de 20 h 43 minutes de telle sorte que dès cette date, qui constitue le point de départ du délai de prescription de deux ans de son action en requalification, M. [F] était parfaitement informé qu'il exerçait des fonctions à temps partiel ; qu'en décidant néanmoins que le contrat de travail étant toujours en cours, aucune prescription n'est encourue s'agissant de la requalification du contrat de travail à temps partiel en temps complet, la cour d'appel a violé l'article susvisé par refus d'application et l'article L. 3245-1 du même code par fausse application.

2°)- ALORS QUE D'AUTRE PART tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le juge ne saurait procéder par voie de simple affirmation ; qu'en se contentant de retenir que même si l'horaire est restée à temps partiel, l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaines ou les semaines du mois en méconnaissance de l'article L 3123-6 du code du travail, sans autrement justifier en fait cette appréciation, quand la SARL Présent et les organes de la procédure de sauvegarde faisaient valoir (cf conclusions p 12 § 2) au contraire à l'instar du jugement du conseil de Prud'hommes dont la confirmation sur ce point était sollicitée que non seulement M. [F], également associé du journal, avait lui-même rappelé dans une note qu'il avait faite le 17 mars 2014 (pièce n° 21) à M. [I] le temps qu'il consacrait à l'écriture de ses livres et le nombre de livres qu'il avait écrit (une trentaine), ce qui excluait qu'il ait travaillé à temps complet pour le journal mais de surcroit que les attestations versées aux débats (pièce 59) quant à l'organisation du travail durant la semaine n'établissaient aucunement que l'intéressé effectuait des heures de travail au-delà de 20h43, ces mêmes pièces justifiant en outre du fait que le salarié pouvait prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était dès lors nullement dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de son employeur, peu important à cet égard l'existence d'une erreur sur les bulletins de paie pendant plus de 12 ans jusqu'à la saisine du conseil de Prud'hommes, la cour d'appel a procédé par voie de simple affirmation et violé l'article 455 du code de procédure civile.

3°) - ALORS QUE DE TROISIEME PART les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à affirmer, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet que l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois en méconnaissance des dispositions de l'article L 3123-6 du code du travail sans justifier concrètement son appréciation au regard des éléments de fait et de preuve produits aux débats et notamment des attestations produites aux débats par la SARL Présent démontrant que M. [F], qui était également associé du journal, disposait d'une très grande autonomie pour organiser son temps de travail, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

4°) - ALORS QUE DE QUATRIEME PART et en tout état de cause, comme le rappelait la SARL Présent et les organes de la procédure de sauvegarde dans leurs conclusions d'appel (p 10), aux termes de l'article 29 de la convention collective des journaliste les partenaires sociaux reconnaissent que « les nécessités inhérentes à la profession ne permettent pas de déterminer la répartition des heures de travail », la répartition du travail pouvant, en effet, dépendre de l'actualité ; qu'en se bornant à affirmer, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet que l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois en méconnaissance des dispositions de l'article L 3123-6 du code du travail sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'article 29 de la convention collective des journalistes ne permettait pas de déroger, eu égard à la spécificité du métier de journaliste, à une répartition fixe des horaires de travail en fonction de l'actualité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à décision au regard de l'article susvisé.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevables les demandes de M. [F] de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, d'avoir en conséquence prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] aux torts de l'employeur à compter du jugement, d'avoir condamné la société Présent à payer à Monsieur [F] les sommes de 65.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de 13e mois et d'avoir ordonné à la société Présent de remettre à Monsieur [F] un bulletin de paie récapitulatif conforme.

- AU MOTIF QUE Sur la prescription des salaires, Monsieur [F] a saisi le conseil de prud'hommes le 26 septembre 2014 (date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation) interrompant ainsi la prescription. Le nouveau délai prévu par la loi du 14 juin 2013 a commencé à courir à cette date sans qu'il puisse excéder l'ancien délai de 5 ans. Il s'ensuit que les salaires ne sont pas prescrits à compter du 13 juin 2010. Il sera fait droit la demande de rappel de salaire sur la base d'un taux horaire de 26,41 euros convenu initialement par les parties, et dans la limite de 105 327,75 euros, le salarié ne justifiant pas de la différence du montant des salaires figurant dans les motifs et le dispositif de ses conclusions (?.). L'absence de fixation contractuelle des horaires de travail à temps partiel et la suspension abusive du contrat de travail depuis l'avis d'inaptitude constituent des manquements suffisamment graves justifiant que la résiliation judiciaire du contrat de travail soit prononcée aux torts de l'employeur. Il sera fait droit à la demande d'indemnité de préavis et congés payés afférents sur la base d'un salaire à temps complet.

1°) - ALORS QUE D'UNE PART la cassation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré recevable comme non prescrite la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel de M. [F] en contrat de travail à temps complet entrainera par voie de conséquence en application de l'article 624 du code de procédure civile sa censure en ce qu'il a condamné la SARL Présent à payer à M. [F] les sommes de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de 13e mois.

2°) - ALORS QUE D'AUTRE PART la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; que, dans ses motifs, l'arrêt indique que les salaires ne sont pas prescrits à compter du 13 juin 2010 cependant que, dans son dispositif, il fixe à la somme de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire, outre les congés payés y afférents pour la période de juin 2000 à octobre 2017; qu'ainsi, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif et violé l'article 455 du code de procédure civile.

3°) - ALORS QUE DE TROISIEME PART une insuffisance de motivation équivaut à un défaut de motivation ; qu'en se bornant à énoncer péremptoirement qu'il sera fait droit la demande de rappel de salaire sur la base d'un taux horaire de 26,41 euros convenu initialement par les parties, et dans la limite de 105.327,75 euros sans s'expliciter davantage sur le mode de calcul qu'elle retenait, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile, ensemble 6 de la convention européenne des droits de l'homme.

4°- ALORS QUE DE QUATRIEME PART dans leurs conclusions d'appel (p 22), la SARL PRESENT et les organes de la procédure de sauvegarde avaient rappelé que l'article 36 de la convention collective des journalistes permettait à M. [F] comptant une ancienneté supérieure à 15 ans de bénéficier du maintien de 100 % de son salaire pendant les 6 premiers mois de son salaire puis de 50 % les mois suivants, le salaire qui lui était versé l'étant sous déduction des indemnités journalières de sécurité sociale et des prestations versées par le régime de prévoyance souscrit par la SARL Présent pour les cadres dont les journalistes ; qu'elles rappelaient à cet égard que le contrat de prévoyance permettait aux cadres de bénéficier après franchise de 90 jours du versement d'une allocation égale à 80 % de leur salaire brut plafonné pendant une durée de trois ans, le contrat ne couvrant que la tranche A ; que les plafonds bruts étaient de 3129 € pour 2014 et de 2536 € pour 2015 ; que la SARL Présent avait versé 100 % de son salaire brut plafonné à M. [F] pendant les 6 premiers mois de son arrêt de travail soit du 8 avril au 7 octobre 2014 puis 80 % à compter du 8 octobre 2014 ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que M. [F] a, à compter du 8 avril 2014, été en arrêt de travail de façon ininterrompue (cf arrêt p 2 2ème §) ; qu'en se bornant dès lors à énoncer qu'il sera fait droit la demande de rappel de salaire sur la base d'un taux horaire de 26,41 euros convenu initialement par les parties, et dans la limite de 105.327,75 euros sans tenir compte de l'incidence de la suspension du contrat de travail pour maladie de M. [F] sur sa rémunération depuis le 8 avril 2014 jusqu'au 6 octobre 2017, date de la résiliation de son contrat de travail prononcée par le conseil de Prud'hommes de Paris, la cour d'appel a violé l'article 36 de la convention collective nationale des journalistes, ensemble 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable les demandes de M. [F], d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] aux torts de l'employeur à compter du jugement, d'avoir condamné la société Présent à payer à Monsieur [F] les sommes de 65.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de 13e mois et d'avoir ordonné à la société Présent de remettre à Monsieur [F] un bulletin de paie récapitulatif conforme.

- AU MOTIF QUE Sur la suspension abusive du contrat de travail depuis l'avis d'inaptitude Le conseil de prud'hommes a retenu à juste titre que la société avait manqué à l'exécution de ses obligations découlant de la constatation de l'inaptitude du salarié à son emploi et l'a maintenu délibérément dans une situation d'activité d'inactivité forcée au sein de l'entreprise et sans aucune évolution possible.

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE aux termes de l'article 1184 ancien du code civil applicable aux faits de l'espèce, la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances. En application de ces dispositions, les manquements de l'employeur susceptibles de justifier la résiliation judiciaire à ses torts doivent être d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail. Lorsque les manquements sont établis et d'une gravité suffisante, la résiliation judiciaire prononcée produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En application des dispositions de l'article L 1226-2 du Code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'if formule sur l'aptitude du salarié à exercer une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Aux termes de l'article L 1226-4 du Code du travail, lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constaté par le médecin du travail. En cas de licenciement, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L 1234-9, Par dérogation à l'article L 1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice. En l'espèce, il résulte de l'avis de la médecine du travail du 3 mars 2016 que « suite à la visite de pré-reprise du 18 février 2016 et à l'étude de poste et des conditions de travail réalisée le 25 février 2016, Monsieur [F] est inapte au poste actuel, inapte à tout autre poste dans l'entreprise, apte à un poste assimilé dans un environnement compatible avec sa santé ». Étant rappelé qu'en cas de refus du poste de reclassement proposé en application de l'article L 1226-2 du code du travail au salarié déclaré inapte, il appartient à l'employeur de tirer les conséquences du refus du salarié, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l'intéressé aux motifs de l'impossibilité de reclassement, la reprise par l'employeur du paiement des salaires à laquelle il est tenu en application de l'article L 1226-4 dudit code ne le dispensant pas de l'obligation qui lui est faite par l'article L 1226-2 du code du travail, de proposer un poste de reclassement, il apparaît en l'espèce qu'alors que Monsieur [R] [F] a refusé, suivant courriers des 23 mars, 27 avril, 18 mai, 10 juin et 25 juillet 2016, le poste proposé à titre de reclassement (télétravail à hauteur de 20h00, 15h00 ou 12h00 hebdomadaires selon les propositions), l'employeur s'est pour sa part abstenu, postérieurement à sa dernière proposition de reclassement en date du 4 juillet 2016, d'effectuer de nouvelles recherches de reclassement ou de procéder au licenciement de l'intéressé aux motifs de l'impossibilité de reclassement. Par conséquent, la SARL Présent ayant manqué à 1'exécution de ses obligations découlant de la constatation de l'inaptitude du salarié à son emploi en le maintenant délibérément dans une situation d'inactivité forcée au sein de l'entreprise et sans aucune évolution possible, ledit manquement apparaissant à lui seul d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, il convient, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs allégués, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail liant les parties à compter de la date de la présente décision.

- ALORS QUE D'UNE PART l'employeur n'est pas tenu de rompre le contrat de travail d'un salarié inapte ; qu'en retenant néanmoins que l'employeur avait commis une faute de nature à justifier la résiliation du contrat de travail à ses torts en maintenant délibérément le salarié dans une situation d'inactivité forcée au sein de l'entreprise et sans aucune évolution possible, la cour d'appel a violé les articles L 1226-2, L. 1226-4, L 1226-11 et L 1226-12 du code du travail, ensemble 1184 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;

- ALORS QUE D'AUTRE PART dans ses conclusions d'appel (p 9), la SARL Présent et les organes de la procédure de sauvegarde avaient fait valoir que dans l'esprit de la SARL Présent, devant le refus injustifié de M. [F] de ses 5 propositions de reclassement jamais remises en cause par le médecin du travail qui a été destinataire de chacune d'elles, mieux valait continuer à verser son salaire à l'intimé jusqu'à sa retraite, (né en 1956, M. [F] pouvait prendre sa retraite dès l'âge de 60 ans selon les dispositions de l'article 51 de la CCN des journalistes, soit en 2016) ce qui avait le mérite de préserver l'emploi de ses autres salariés ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre à ces conclusions qui étaient de nature à influer sur la décision si elles avaient été prises en considération, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
:

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] aux torts de l'employeur et d'avoir en conséquence condamné la société Présent à payer à Monsieur [F] les sommes de 65.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de 13e mois.

- AU MOTIF QUE L'absence de fixation contractuelle des horaires de travail à temps partiel et la suspension abusive du contrat de travail depuis l'avis d'inaptitude constituent des manquements suffisamment graves justifiant que la résiliation judiciaire du contrat de travail soit prononcée aux torts de l'employeur. Il sera fait droit à la demande d'indemnité de préavis et congés payés afférents sur la base d'un salaire à temps complet. Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de rappel d'indemnité de licenciement dans la mesure où la commission arbitrale des journalistes a déjà fixé l'indemnité conventionnelle de licenciement à 86 000 euros. Le jugement sera confirmé sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à une juste évaluation du préjudice du salarié.

- ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif à la requalification du contrat de travail de M. [F] à temps partiel en temps complet et sur le troisième moyen de cassation relatif à la suspension prétendument abusive du contrat de travail depuis l'avis d'inaptitude entrainera par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile l'annulation du chef de l'arrêt ayant prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] aux torts de l'employeur et d'avoir en conséquence condamné la société Présent à payer à Monsieur [F] les sommes de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de 13e mois.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
:

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable les demandes de M. [F], d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] aux torts de l'employeur à compter du jugement et d'avoir en conséquence condamné la société Présent à payer à Monsieur [F] les sommes de 65.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 105 327,75 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2000 à octobre 2017, de 10 532,78 euros à titre de congés payés afférents de 8 010,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 801,06 euros à titre de congés payés afférents et de 8 777,31 euros à titre de rappel de prime de 13e mois et ordonné à la société Présent de remettre à Monsieur [F] un bulletin de paie récapitulatif conforme.

- AU MOTIF QUE Sur la requalification de contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et le rappel de salaire afférent. La société soulève la prescription de la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en temps complet depuis le 31 décembre 2007. Monsieur [F] a été engagé, sans contrat écrit, à compter du 1 er janvier 1982. Il reconnaît qu'il travaillait à temps partiel à concurrence de 20h43 minutes par semaine. Le 31 mai 2000, un contrat de travail écrit a été signé stipulant une durée hebdomadaire de travail de 20h43 minutes. Monsieur [F] a saisi la juridiction prud'homale 18 septembre 2014. Le contrat de travail étant toujours en cours, aucune prescription n'est encourue s'agissant de la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en temps complet. À compter du 1er janvier 2002, les bulletins de paye de Monsieur [F] ont mentionné un horaire de travail mensuel de 151h,66 (puis en mars 2002 151h,67) soit 35 heures par semaine. Il importe peu qu'il s'agisse ou non d'une erreur matérielle dans la mesure où un horaire à temps complet n'a fait l'objet d'aucun avenant. En tout état de cause, même si l'horaire est resté à temps partiel, l'employeur ne justifie pas de la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3123-6 du code du travail. Il convient donc de requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet. Sur la prescription des salaires, Monsieur [F] a saisi le conseil de prud'hommes le 26 septembre 2014 (date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation) interrompant ainsi la prescription. Le nouveau délai prévu par la loi du 14 juin 2013 a commencé à courir à cette date sans qu'il puisse excéder l'ancien délai de 5 ans. Il s'ensuit que les salaires ne sont pas prescrits à compter du 13 juin 2010. Il sera fait droit la demande de rappel de salaire sur la base d'un taux horaire de 26,41 euros convenu initialement par les parties, et dans la limite de 105 327,75 euros, le salarié ne justifiant pas de la différence du montant des salaires figurant dans les motifs et le dispositif de ses conclusions. Sur la suspension abusive du contrat de travail depuis l'avis d'inaptitude, le conseil de prud'hommes a retenu à juste titre que la société avait manqué à l'exécution de ses obligations découlant de la constatation de l'inaptitude du salarié à son emploi et l'a maintenu délibérément dans une situation d'activité d'inactivité forcée au sein de l'entreprise et sans aucune évolution possible (?) sur la résiliation judiciaire du contrat de travail. L'absence de fixation contractuelle des horaires de travail à temps partiel et la suspension abusive du contrat de travail depuis l'avis d'inaptitude constituent des manquements suffisamment graves justifiant que la résiliation judiciaire du contrat de travail soit prononcée aux torts de l'employeur. Il sera fait droit à la demande d'indemnité de préavis et congés payés afférents sur la base d'un salaire à temps complet. Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de rappel d'indemnité de licenciement dans la mesure où la commission arbitrale des journalistes a déjà fixé l'indemnité conventionnelle de licenciement à 86 000 euros. Le jugement sera confirmé sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à une juste évaluation du préjudice du salarié. Celui-ci ne démontre pas l'existence d'un préjudice distinct lié à la retraite et au chômage, non réparé par les dommages-intérêts déjà alloués. Sur le manquement à l'obligation de prévention Si Monsieur [F] a rencontré des difficultés de santé, les certificats médicaux produits se bornent à rapporter ses propos et doléances. Il n'est donc pas établi de manquement de l'employeur, étant en outre observé que la cour n'a pas retenu l'existence d'un harcèlement moral. (?). Sur le rappel de prime de 13e mois. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a accueilli cette demande, Monsieur [F] étant en droit de prétendre à 13è mois conformément aux stipulations contractuelles et conventionnelles. Il lui est également dû un rappel de salaire sur la base d'un contrat de travail à temps complet.

- ALORS QUE le jugement ouvrant la procédure de sauvegarde emporte interdiction de plein droit de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture et interrompt les actions en justice ; qu'en l'espèce, la SARL Présent avait demandé à la cour de Paris dans le dispositif de ses conclusions d'appel (p 25) au visa des jugements du tribunal de commerce de Paris des 8 août 2018 et 5 février 2019 de constater l'intervention des organes de la procédure de sauvegarde ; que la cour d'appel a constaté (p 1) que Me [Y] (SELAFA MJA) était mandataire judiciaire de la SARL Présent et Me [T] [E] (SELARL Ascagne AJ) administrateur judiciaire de la SARL Présent ; qu'en condamnant néanmoins la SARL Présent à payer diverses sommes d'argent à M. [R] [F] au titre de la résiliation de son contrat de travail et de la requalification de son contrat à durée indéterminée à temps partiel en temps complet prononcé le 6 octobre 2017 par le conseil de Prud'hommes de Paris, soit avant le jugement d'ouverture, la cour d'appel, qui ne pouvait condamner la société Présent, objet d'une procédure de sauvegarde, à payer une somme d'argent au titre de créances nées avant le jugement ayant ouvert la procédure de sauvegarde, a violé les articles L. 622-7 et L. 622-21 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-18908
Date de la décision : 04/11/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 nov. 2021, pourvoi n°19-18908


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.18908
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