LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 novembre 2021
Irrecevabilité
M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 823 F-D
Pourvoi n° E 20-14.574
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 24 NOVEMBRE 2021
La société KL immobilier, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 20-14.574 contre le jugement rendu le 14 janvier 2020 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Grenoble, dans le litige l'opposant :
1°/ au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 1], dont le siège est [Adresse 2], représenté par son syndic la société B2C immobilier,
2°/ au Trésor public, dont le siège est [Adresse 5], représenté par la trésorerie de Grenoble, centre des finances publiques,
3°/ au Trésor public - service des impôts particuliers - centre des finances publiques de Grenoble DRAC,
4°/ au Trésor public - service des impôts des entreprises - centre des finances publiques de Grenoble Chartreuse,
ayant tous deux leur siège [Adresse 3],
5°/ à M. [F] [G], domicilié [Adresse 6], pris en qualité d'administrateur ad hoc de la société KL immobilier,
6°/ à M. [C] [Y], domicilié [Adresse 4], adjudicataire,
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société KL immobilier, de Me Haas, avocat de M. [Y], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 1], après débats en l'audience publique du 5 octobre 2021 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Grenoble,14 janvier 2020) et les productions, par une ordonnance du 4 octobre 2018, M. [G] a été désigné en qualité d'administrateur ad hoc de la société KL immobilier afin de la représenter dans la procédure de saisie immobilière d'un local commercial dont elle était propriétaire, introduite par un syndicat des copropriétaires.
2. Par un jugement du 14 janvier 2020, le juge de l'exécution a adjugé ce local commercial à M. [Y].
3. Par une ordonnance du 9 décembre 2020, un juge des référés a prononcé la rétractation de l'ordonnance du 4 octobre 2018.
Recevabilité du pourvoi, contestée par la défense
Vu l'article R. 322-60, alinéa 2, du code des procédures civiles d'exécution :
4. Il résulte de ce texte que le jugement d'adjudication qui ne statue sur aucune contestation n'est susceptible d'aucun recours sauf excès de pouvoir.
5. La société KL immobilier s'est pourvue en cassation contre un jugement qui a prononcé l'adjudication d'un bien lui appartenant.
6. Le jugement d'adjudication n'ayant tranché aucune contestation, le pourvoi n'est donc pas recevable, sauf si un excès de pouvoir est caractérisé.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. La société KL immobilier fait grief au jugement de déclarer M. [Y] adjudicataire du local commercial lui appartenant pour un certain prix, alors :
« 1°/ que la radiation d'office d'une société civile immobilière du registre du commerce et des sociétés n'a pas pour effet de mettre fin aux fonctions de son gérant lequel, en l'absence de disposition statutaire, est nommé pour la durée de la société ; qu'en l'espèce, il résulte de l'extrait Kbis à jour au 24 janvier 2020 que constituée pour une durée expirant le 20 juillet 2100, elle avait comme gérante Mme [P], ce dont il résulte que quand bien-même elle avait été radiée d'office le 26 novembre 2015, elle était toujours représentée par sa gérante Mme [P] ; qu'en prononçant l'adjudication de son immeuble à l'issue d'une procédure dont elle constate qu'elle avait été menée à l'encontre d'un mandataire ad hoc qui plus est non représenté à l'instance et non à l'encontre de sa gérante, ce dont il résulte qu'elle n'avait pas été appelée à l'instance, le juge de l'exécution a excédé ses pouvoirs et violé les articles 123-136 du code de commerce, 1846 du code civil et 14 du code de procédure civile ;
2°/ que la rétractation de l'ordonnance du 4 octobre 2018 désignant M. [G] en qualité de mandataire ad hoc qui ne manquera pas d'intervenir dès lors que les fonctions de sa gérante n'avaient pas pris fin, entraînera la cassation du jugement attaqué pour perte de son fondement légal au regard des dispositions de l'article 14 du code de procédure civile selon lesquelles nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée. »
Réponse de la Cour
8. En l'état d'une ordonnance de référé du 4 octobre 2018, prenant acte de la dissolution de la société KL immobilier et nommant M. [G] mandataire ad hoc de cette société à l'effet de la représenter dans le procès l'opposant au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et, plus particulièrement, dans toute action en recouvrement de charges et procédure de saisie immobilière des biens dont elle était propriétaire, c'est sans excéder ses pouvoirs que le juge de l'exécution, après avoir constaté que M. [G], ès qualités, avait été régulièrement attrait à la procédure et pris en considération l'ensemble des éléments de la cause disponibles au jour où il statuait, a prononcé l'adjudication du local commercial appartenant à la société KL immobilier sis à l'adresse susmentionnée.
9. Formé contre une décision qui n'est entachée d'aucun excès de pouvoir, le pourvoi est, en conséquence, irrecevable.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi ;
Condamne la société KL immobilier aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société KL immobilier et la condamne à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic la société B2C immobilier, et à M. [Y] la somme de 2 000 euros chacun ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille vingt et un.