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15/12/2021 | FRANCE | N°19-24096;19-24098

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 décembre 2021, 19-24096 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 décembre 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1434 F-D

Pourvois n°
J 19-24.096
M 19-24.098 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 DÉCEMBRE 2021


La société Ambulances de la [Adresse 6] (SARL), dont le siège est [Adresse 2], représentée par son liquidateur judiciaire la société selas [L] et a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 décembre 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1434 F-D

Pourvois n°
J 19-24.096
M 19-24.098 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 DÉCEMBRE 2021

La société Ambulances de la [Adresse 6] (SARL), dont le siège est [Adresse 2], représentée par son liquidateur judiciaire la société selas [L] et associés, prise en la personne de M. [O] [L], domicilié11 [Adresse 4],

a formé les pourvois n° J 19-24.096 et M 19-24.98 contre deux arrêts rendus le 19 mars 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section B), dans les litiges les opposant respectivement :

1°/ à Mme [B] [N], domiciliée [Adresse 5],

2°/ à M. [S] [G], domicilié [Adresse 1],

3°/ à l'association AGS-CGEA de Nancy, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de ses pourvois, le moyen unique de cassation commun annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la société Ambulances de la [Adresse 6], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [G] et de Mme [N], après débats en l'audience publique du 4 novembre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° J 19-240.96 et M 19-24.098 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Colmar, 19 mars 2019), Mme [N] et M. [G], salariés de la société Ambulances de la [Adresse 6], exerçant les fonctions d'ambulancier ou d'auxiliaire ambulancier à temps complet ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes dont certaines portaient sur des rappels de salaire au titre des heures supplémentaires, outre congés payés afférents.

3. Après avoir été placée en redressement judiciaire et bénéficié d'un plan de redressement, la société Ambulances de la [Adresse 6] a été mise en liquidation judiciaire par jugement rendu par la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Colmar le 12 juillet 2019 qui a désigné la société [L] et associés prise en la personne de M. [L] et M. [V] en qualité de liquidateur judiciaire.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de fixer la créance des salariés au passif de la liquidation à certaines sommes à titre de rappels de salaire et repos compensateurs, alors « qu'en se bornant, pour écarter le calcul auquel avait procédé l'employeur des heures supplémentaires accomplies par les salariés par quinzaine et non sur une base hebdomadaire, à relever que l'article D. 3312-7 du code du travail, entré en vigueur le 1er janvier 2007, n'était pas applicable en la cause, sans rechercher si ce texte ne résultait pas de la codification à droit constant des dispositions de l'article 4 du décret n° 2003-1242 du 22 décembre 2003 qui comportait des dispositions similaires, la cour d'appel a violé ce dernier texte par refus d'application. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du décret n° 2003-1242 du 22 décembre 2003 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de personnes, les articles 1 et 2 du décret n° 2016-1549 du 17 novembre 2016 relatif à certaines dispositions de la partie réglementaire du code des transports et l'article D. 3312-7 du code des transports :

5. En application du premier de ces textes, la durée hebdomadaire du travail peut être calculée sur deux semaines consécutives à condition que cette période comprenne au moins trois jours de repos et que soit respectée pour chacune des semaines la durée maximale pouvant être accomplie au cours d'une même semaine telle que définie à l'article L. 212-7 du code du travail.

6. Ces dispositions ont été abrogées par l'article 1er du décret du 17 novembre 2016.

7. L'article D. 3312-7 du code des transports, applicable depuis le 1er janvier 2017, prévoit que la durée hebdomadaire du travail est calculée sur une semaine, que pour le personnel roulant, la durée hebdomadaire du travail peut être déterminée sur la base d'une moyenne calculée sur deux semaines consécutives, à condition que cette période comprenne au moins trois jours de repos et sous réserve, pour chacune de ces deux semaines, du respect des limites prévues aux articles L. 3121-20 et L. 3121-21 du code du travail.

8. Pour faire droit à la demande des salariés au titre des heures supplémentaires, outre congés payés afférents, les arrêts retiennent que l'employeur, s'il a payé des heures supplémentaires, procédait à des décomptes à la quatorzaine et non par semaine civile.

9. Ils ajoutent que cette dérogation se trouvait sans fondement faute de s'adosser à un accord d'entreprise à une époque où l'article D. 3312-7 du code des transports, seulement entré en vigueur le 1er janvier 2017, n'était pas applicable.

10. En statuant ainsi, alors qu'avant l'entrée en vigueur de l'article D. 3312-7 du code des transports, l'article 4 du décret du 22 décembre 2003 permettait un décompte de la durée du travail sur deux semaines consécutives dans les conditions qu'il fixait, la cour d'appel, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

11. Aucune créance n'ayant été fixée par les arrêts au titre des repos compensateurs, la cassation ne saurait s'étendre à un chef de dispositif inexistant.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils fixent à une certaine somme des rappels de salaire au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents, les arrêts rendus le 19 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne les salariés aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen commun produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour la société Ambulances de la [Adresse 6], demanderesse aux pourvois

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir condamné les ou la société employeuse à payer aux salariés appelants telles sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et repos compensateurs ;

Aux motifs que la partie appelante administre la preuve des manquements de l'employeur en matière de décompte du temps de travail et donc de respect des obligations de paiement complet des heures supplémentaires et majorations ainsi que des durées maximales ; que d'abord, au contraire des prescriptions impératives – qui visent à garantir le caractère fiable des décomptes d'heures travaillées ainsi que des temps de pause et accès au repos, mais aussi de l'application des coefficients réducteurs des systèmes d'équivalence – de l'arrêté du 19 décembre 2001, l'employeur ne mettait pas à disposition des salariés, dont la partie appelante, des feuilles de route à remplir par procédé autocopiant ; que cette dernière produit les feuilles de route pour les années considérées dont il s'évince que ce n'est que courant 2016 que figureront des carnets réglementairement conformes ; que par ailleurs, l'employeur, s'il a payé des heures supplémentaires, procédait à des décomptes « à la quatorzaine » et non par semaine civile ; que cette dérogation se trouvait sans fondement faute de s'adosser à un accord d'entreprise à une époque où l'article D. 3312-7 du Code des Transports, seulement entré en vigueur le 1er janvier 2017, n'était pas applicable ; que partant faute par l'employeur – qui supporte de ce chef exclusivement la charge de la preuve et dont les assiettes de calcul au vu de ce qui précède se trouvent dépourvues de caractère fiable – d'établir le respect par lui des durées maximales de travail, il n'est pas fondé à se prévaloir des coefficients réducteurs du système des équivalences ; que consécutivement au sens de l'article L. 3171-4 du code du travail la partie appelante (au moyen des feuilles de route, bulletins de paye et décomptes) étaye suffisamment sa réclamation au titre des heures supplémentaires, y compris avec les dépassements de contingent sans information du droit au repos, sans que l'employeur ne justifie de manière fiable des horaires, et ceci d'autant moins que ce sont sur les modalités de décompte et pas sur le nombre d'heures que les parties divergent ; qu'il sera précisé ultérieurement les sommes à revenir à la partie appelante et celles-ci même dans le cadre de la procédure collective n'ont à ce jour pas été payées ;

Alors, de première part, que les dispositions de l'article 3.1 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire et de l'article 3 du décret n° 2009-30 du 9 janvier 2009 selon lesquels, afin de tenir compte des périodes d'inaction, de repos, repas, coupures et de la variation de l'intensité de leur activité, le temps de travail effectif des personnels ambulanciers roulants est décompté sur la base du cumul hebdomadaire de leurs amplitudes journalières d'activité affectées d'un coefficient de minoration, ne sont pas subordonnées à la preuve par l'employeur des horaires réellement effectués par ses salariés, ni a fortiori du respect par l'employeur des durées maximales de travail ; que la cour d'appel qui a refusé de faire application de ces temps d'équivalence en raison de l'absence de preuve par l'employeur du respect des durées maximales de travail a violé par refus d'application les dispositions précitées ;

Alors de deuxième part qu'en s'abstenant de ce fait de vérifier si les calculs des salariés étaient conformes aux dispositions conventionnelles et réglementaires précitées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ces textes ;

Alors, de troisième part, qu'en se bornant, pour écarter le calcul auquel avait procédé l'employeur des heures supplémentaires accomplies par les salariés par quinzaine et non sur une base hebdomadaire, à relever que l'article D. 3312-7 du code du travail, entré en vigueur le 1er janvier 2007, n'était pas applicable en la cause, sans rechercher si ce texte ne résultait pas de la codification à droit constant des dispositions de l'article 4 du décret n° 2003-1242 du 22 décembre 2003 qui comportait des dispositions similaires, la cour d'appel a violé ce dernier texte par refus d'application.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-24096;19-24098
Date de la décision : 15/12/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 19 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 déc. 2021, pourvoi n°19-24096;19-24098


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.24096
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