LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 septembre 2022
Cassation
Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 969 F-D
Pourvois n°
J 21-11.638
T 21-13.762 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022
I) La société [Z], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° J 21-11.638 contre un arrêt rendu le 12 novembre 2020 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [S] [B], domiciliée [Adresse 3],
2°/ à Mme [V] [Z], domiciliée [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
II) Mme [S] [B] a formé le pourvoi n° T 21-13.762 contre le même arrêt rendu entre les mêmes parties.
La demanderesse au pourvoi n° J 21-11.638 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi n° T 21-13.762 invoque, à l'appui de son recours, les dix moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [B], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [Z], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [Z], et après débats en l'audience publique du 21 juin 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, M. Pion, conseiller, Mme Wurtz, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n°J 21-11.638 et T 21-13.762 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Nancy,12 novembre 2020) et les productions, Mme [B] a été engagée par la société [Z] à compter du 15 juin 2005 en qualité d'assistante ressources humaines et a été élue membre suppléant de la délégation unique du personnel le 28 octobre 2008.
3. Le 9 décembre 2009, elle a déposé plainte à l'encontre de Mme [Z] du chef de harcèlement moral puis saisi la juridiction prud'homale, le 23 juillet 2010, d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.
4. Par arrêt du 5 décembre 2012, la cour d'appel a sursis à statuer sur ces demandes jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur l'action publique.
5. L'affaire a été radiée du rôle par ordonnance du 5 juillet 2016.
6. La salariée a été licenciée pour faute lourde le 1er juin 2018.
Examen des moyens
Sur le premier moyen du pourvoi J 21-11.638
Enoncé du moyen
7. L'employeur fait grief à l'arrêt de rejeter les exceptions et fins de non-recevoir qu'il a présentées, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts exclusifs, de dire que cette résiliation produirait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de le condamner au paiement de sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, alors « que la cour d'appel a visé les conclusions déposées par la société [Z] le 6 septembre 2019 tandis qu'il ressort des productions que celle-ci avait déposé le 14 mai 2020 des conclusions en réplique et récapitulatives développant sur les différentes questions jugées une argumentation complémentaire précise et circonstanciée ; que la cour d'appel, qui n'a pas visé ces dernières conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les articles 455 alinéa 1er et 954 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 2, du code de procédure civile :
8. Il résulte de ces textes que s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date.
9. Pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, puis le condamner à payer à la salariée diverses sommes, l'arrêt se prononce au visa des conclusions notifiées par la société [Z] le 6 septembre 2019.
10. En statuant ainsi, alors qu'il ressort des productions que la société [Z] avait déposé le 14 mai 2020 par voie électronique, des conclusions développant d'une part une argumentation complémentaire sur la portée de l'article 392 du code de procédure civile et la date de l'expiration du délai de péremption ainsi que sur le régime probatoire du harcèlement moral et comportant d'autre part une demande nouvelle, la cour d'appel, qui n'a pas visé ces dernières conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi n° T 21-13.762 ;
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne Mme [B] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Pion, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société [Z], demanderesse au pourvoi n° J 21-11.638
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
La société [Z] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté les exceptions et fins de non-recevoir qu'elle a présentées, d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [B] aux torts exclusifs de la société [Z], d'AVOIR dit que cette résiliation produirait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de l'AVOIR condamnée à payer à la salariée les sommes de 14.039, 45 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 20.700 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 2.070 euros à titre de congés payés afférents, 22.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.820,29 euros au titre du salarie pour mise à pied à titre conservatoire, ainsi que de l'AVOIR condamnée à payer à Madame [B] les sommes de 404,07 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre 40,41 euros au titre des congés payés afférents ; 310,25 euros au titre des heures de délégation, outre 31,02 euros de congés payés, 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour privation de l'indemnité temporaire d'inaptitude, et 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
ALORS QUE la cour d'appel a visé les conclusions déposées par la société [Z] le 6 septembre 2019 tandis qu'il ressort des productions que la société [Z] avait déposé le 14 mai 2020 des conclusions en réplique et récapitulatives développant sur les différentes questions jugées une argumentation complémentaire précise et circonstanciée ; que la cour d'appel, qui n'a pas visé ces dernières conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les articles 455 alinéa 1er et 954 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
La société [Z] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté les exceptions et fins de non-recevoir qu'elle a présentées, d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [B] aux torts exclusifs de la société [Z], d'AVOIR dit que cette résiliation produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de l'AVOIR condamnée à payer à la salariée les sommes de 14.039, 45 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 20.700 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 2.070 euros à titre de congés payés afférents, 22.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.820,29 euros au titre du salarie pour mise à pied à titre conservatoire, ainsi que de l'AVOIR condamnée à payer à Madame [B] les sommes de 404,07 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre 40,41 euros au titre des congés payés afférents ; 310,25 euros au titre des heures de délégation, outre 31,02 euros de congés payés, 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour privation de l'indemnité temporaire d'inaptitude, et 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
1. ALORS QU'aucune diligence interruptive du délai de péremption d'instance ne peut être utilement accomplie durant la période de suspension de l'instance consécutive à une décision de sursis à statuer ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'ordonnance de non-lieu mettant fin à la période de suspension a été rendue le 15 février 2016 et que, faute d'appel interjeté, cette ordonnance a définitivement mis fin à l'action publique à compter du 26 février 2016, date à laquelle l'instance d'appel prud'homal a repris et un nouveau délai de péremption de deux ans a commencé à courir ; que ce nouveau délai de péremption a pris fin le 26 février 2018 sans que l'ordonnance de radiation du 5 juillet 2016 ait pu constituer le point de départ d'un nouveau délai de péremption et sans que la demande postérieure de ré-enrôlement, du 5 juillet 2018, ait donc pu produire effet ; qu'en jugeant néanmoins que la péremption de l'instance n'était nullement acquise, la cour d'appel a violé les articles 378, 386 et 392 du code de procédure civile ;
2. ALORS QU'aucune diligence interruptive du délai de péremption d'instance ne peut être utilement accomplie durant la période de suspension de l'instance consécutive à une décision de sursis à statuer ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'ordonnance de non-lieu mettant fin à la période de suspension a été rendue le 15 février 2016 et que faute d'appel interjeté cette ordonnance a définitivement mis fin à l'action publique à compter du 26 février 2016, date à laquelle l'instance a repris et un nouveau délai de péremption de deux ans a commencé à courir, de telle sorte que ce délai de péremption a pris fin le 26 février 2018 ; qu'il en résulte que le courrier de Madame [B] du 3 novembre 2014 s'associant à l'initiative de Madame [Z] de remise au rôle du 20 octobre 2014 ne pouvait avoir eu aucun effet utile sur le délai de péremption qui était alors suspendu par l'effet de la décision de sursis à statuer ; qu'en retenant, pour juger que la péremption de l'instance n'était nullement acquise, que l'affaire avait été remise au rôle « à l'initiative du conseil de Madame [Z] le 20 octobre 2014 auquel s'était associé son conseil par courrier du 3 novembre 2014 », la cour d'appel a violé les articles 378, 386 et 392 du code de procédure civile ;
3. ALORS ENFIN QU'une ordonnance de radiation n'a pas pour effet d'interrompre le cours du délai de péremption ; qu'en considérant que l'ordonnance de radiation du 5 juillet 2016 constituait le point de départ d'un nouveau délai de deux ans, de telle sorte que Madame [B] avait pu valablement déposer ses conclusions de réinscription au rôle le 5 juillet 2018, la cour d'appel a violé les articles 378, 386 et 392 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
La société [Z] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [B] aux torts exclusifs de la société [Z], d'AVOIR dit que cette résiliation produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de l'AVOIR condamnée à payer à la salariée les sommes de 14.039,45 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 20.700 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 2.070 euros à titre de congés payés afférents, 22.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.820,29 euros au titre du salarie pour mise à pied à titre conservatoire, ainsi que 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour privation de l'indemnité temporaire d'inaptitude, et 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
1. ALORS QU'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que les conditions d'organisation du travail et notamment l'utilisation par la salariée d'un logiciel ayant pu occasionner une surcharge de travail ressortent du pouvoir de direction de l'employeur, que la salariée exerçait une activité lui imposant une adaptation permanente, qu'un « soutien indéfectible » était apporté au travail de Madame [B], confirmé par des échanges de courriels, que, si un état de souffrance au travail avait pu être constaté – d'autant que Mme [B] était en arrêt maladie à compter de mai 2009 pour un syndrome anxiodépressif en lien avec le travail –, il ressortait néanmoins des pièces du dossier que la société [Z] a saisi le CHSCT de cette question ainsi qu'un mandataire extérieur ; qu'en outre, la société [Z] avait vainement tenté d'organiser une réunion avec l'intéressée et de mettre en place une commission d'enquête, initiatives demeurées vaines en raison des arrêts de travail de Madame [B] et de son absence de réponse à la convocation de la commission d'enquête ; qu'en jugeant néanmoins que les manquements de la société [Z] à son obligation de sécurité étaient suffisamment graves pour faire obstacle à la poursuite du contrat de travail et pour justifier que soit prononcée la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations desquelles il résultait que la société [Z] avait pris des mesure effectives et concrètes afin de répondre aux doléances de la salariée et, partant, a violé les articles 1224 du code civil et L.1231-1 du code du travail, ensemble les articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail ;
2. ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait pas retenir que la société [Z] n'avait pas fait une application diligente de ses obligations en matière de sécurité sans rechercher si, en l'absence de tout fait de harcèlement moral constaté et compte tenu de la longue durée d'absence de Madame [B], les tentatives visant à l'organisation de réunions, sa saisine du CHSCT et de la Halde en vue d'une médiation, ainsi que la mise en place d'une commission d'enquête ne constituaient pas des diligences effectives et adaptées à la situation dont la poursuite et le succès n'ont pas pu être assurés du fait de la salariée, de telle sorte que les manquements constatés ne rendaient pas impossible la poursuite de la relation de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1231-1, L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail.
Moyens produits par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux conseils, pour Mme [B], demanderesse au pourvoi n° T 21-13.762
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande au titre du harcèlement moral ;
1°) Alors que si le juge estime que les éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il doit apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande au titre du harcèlement moral, la cour d'appel s'est bornée, après avoir relevé que les éléments laissaient présumer une situation de harcèlement, à affirmer que l'employeur démontrait que les éléments dénoncés pris dans leur ensemble n'étaient pas constitutifs de harcèlement, sans préciser en quoi ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en statuant ainsi, la cour a fait reposer la charge de la preuve du harcèlement sur la salariée, en violation des articles L 1154-1, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L 1152-1 du code du travail ;
2°) Alors qu'un classement sans suite comme une ordonnance de non-lieu ne sont revêtus d'aucune autorité de chose jugée à l'égard du juge civil ; que pour débouter Mme [B] de sa demande engagée à l'encontre de la société [Z] au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a retenu que la plainte déposée par Mme [B] contre la société du chef de harcèlement moral avait fait l'objet d'un classement sans suite et que la plainte avec constitution de partie civile avec fait l'objet d'une ordonnance de non-lieu ; qu'en opposant ainsi des décisions qui n'avaient aucun effet sur les juridictions civiles, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
3°) Alors que le seul exercice du pouvoir de direction de l'employeur ne peut suffire à justifier des faits de harcèlement ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a considéré que les conditions d'organisation du travail et notamment d'utilisation par la salariée d'un logiciel ayant pu occasionner une surcharge de travail ressortent du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en se fondant sur cet élément insusceptible de justifier des faits de harcèlement dont elle avait retenu qu'ils permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement, la cour d'appel a violé les articles L 1152-1 et L 1154-1 du code du travail, ce dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de rappel de salaire lié à la classification ;
Alors que la qualification professionnelle d'un salarié dépend des fonctions qu'il exerce effectivement ; qu'en l'espèce, Mme [B] a fait valoir qu'à compter de janvier 2007, elle s'était retrouvée seule au service ressources humaines, M. [P] son supérieur hiérarchique ayant été licencié et Mme [Z] n'ayant pas les connaissances en matière de gestion des ressources humaines (concl p. 47) ; que pour rejeter sa demande de rappel de salaire lié à la classification, la cour a retenu qu'elle ne produisait pas d'élément pertinent permettant de retenir qu'elle aurait exercé des fonctions correspondant à la classification relevant de la position IIIA de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen que Mme [B] avait exercé seule la fonction de responsable du service des ressources humaines après le licenciement de son supérieur hiérarchique, Mme [Z] ne disposant pas des connaissances en matière de gestion des ressources humaines, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de rappel de salaire et congés payés afférents sur la période du 15 juin au septembre 2005 ;
Alors que le salarié a droit au salaire correspondant aux fonctions effectivement exercées dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, Mme [B] a demandé un rappel de salaire correspondant aux fonctions qu'elle a réellement exercées pour la période du 15 juin au 30 septembre 2005 (conclusions p 46, § 3 et suiv.) ; que pour écarter cette demande, la cour d'appel s'est bornée à considérer que les bulletins de salaire versés aux débats mentionnaient une ancienneté correspondant à une embauche au 15 juin 2005 ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si la rémunération reçue par Mme [B] correspondait aux fonctions qu'elle avait effectivement exercées pendant cette période, ce que la salariée contestait, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à 22.000 € les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui lui ont été octroyés ;
Alors que les dommages et intérêts alloués en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse doivent réparer tous les préjudices subis par le salarié du fait de la rupture ; qu'en l'espèce, Mme [B] a fait valoir (concl p. 50) que les agissements de Mme [Z] avaient notamment dégradé durablement ses conditions de travail, porté atteinte à ses droits et à sa dignité, que son préjudice moral était conséquent, que l'employeur ne l'ayant ni licenciée ni reclassée avant le 1er juin 2018, elle n'avait jamais pu rebondir sur le plan professionnel, ce qui avait eu un impact sur ses droits à la retraite ; qu'en considérant au contraire que les salaires versés pendant six ans par l'employeur étaient pris en compte pour le calcul de la retraite sans répondre au moyen invoquant l'impact sur ses droits à la retraite et le préjudice moral subi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés ;
Alors que le salaire correspondant à l'emploi que le salarié physiquement inapte occupait avant la suspension de son contrat et au paiement duquel l'employeur est tenu à défaut de reclassement ou de licenciement à l'issue du délai d'un mois ouvre droit à une indemnité de congés payés ; que pour débouter Mme [B] de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés, la cour d'appel a considéré que selon les bulletins de salaire communiqués, il lui restait 56,5 jours de congés à la date du 30 septembre 2012, solde reporté chaque année jusqu'au mois de juillet 2014, et 16,5 jours de congés au 1er juin 2018 au titre du solde de tout compte selon les mentions portées sur les bulletins de salaire correspondant, que l'examen des bulletins du mois d'août 2014 à la date du licenciement le 1er juin 2018 révèle qu'ont été décomptés un total de 58 jours et que Mme [B] a perçu en sus au titre de solde de tout compte en juin 2018 la somme de 2 503,05 € en rémunération de 16,5 jours de congés payés ; qu'en statuant ainsi alors qu'à compter du 29 septembre 2012, date de reprise du paiement des salaires à la suite de l'avis d'inaptitude du 29 août 2012, Mme [B] aurait dû percevoir l'intégralité de ses congés payés jusqu'à la date de son licenciement le 1er juin 2018, la cour d'appel a violé les articles L 1226-4 et L 3141-22 du code du travail.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande d'indemnité compensatrice de congés de réduction du temps de travail ;
1°) Alors qu'aux termes du contrat de travail conclu entre la société [Z] et Mme [B], la base hebdomadaire de travail a été fixée à 37 heures ; que la cour d'appel a considéré au contraire que la salariée ne justifiait pas d'horaire allant au-delà de 35 heures lui ouvrant droit à l'acquisition de RTT ; qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de travail de Mme [B] prévoyait 2 heures hebdomadaires ouvrant droit au bénéfice de RTT, la cour d'appel a méconnu le principe selon lequel les juges ne peuvent pas dénaturer l'écrit qui leur est soumis ;
2°) Alors qu'aux termes du contrat de travail conclu entre la société [Z] et Mme [B], la rémunération a été fixée sur la base d'une durée moyenne de travail hebdomadaire de 35 heures ; que la cour d'appel a considéré que la rémunération de la salariée incluait celle correspondant aux RTT ; qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de travail ne prévoyait pas la rémunération des deux heures hebdomadaire ouvrant droit à la salariée l'acquisition de RTT, la cour d'appel a méconnu le principe selon lequel les juges ne peuvent pas dénaturer l'écrit qui leur sont soumis.
SEPTIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de rappel de primes de vacances ;
Alors que le salaire que le salarié physiquement inapte au paiement doit percevoir à défaut de reclassement ou de licenciement à l'issue du délai d'un mois ouvre droit à la prime de vacances ; que pour débouter Mme [B] de sa demande de rappel de primes de vacances, après avoir relevé qu'il n'était pas discuté que la salariée pouvait bénéficier de cette prime, la cour d'appel a considéré que la prime était versée sous la condition d'une présence à l'effectif de l'entreprise au mois de juillet de l'année de référence ; qu'en statuant ainsi, alors que cette prime était due même si la salariée n'était pas présente, la cour d'appel a violé les articles L.1226-4 du code du travail et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
HUITIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de condamnation de la société au titre de l'absence de régularisation des indemnités journalières ;
Alors que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande en paiement au titre de l'absence de régularisation des indemnités journalières, après avoir constaté qu'il était établi que les difficultés rencontrées par la salariée dans le calcul de ses indemnités journalières et l'absence de revalorisation de ses indemnités étaient consécutives à une carence de l'employeur dans l'établissement des déclarations nécessaires auprès de la caisse primaire d'assurance maladie, la cour d'appel a relevé que les indemnités journalières ne sont égales qu'à une fraction du gain journalier de base majorée éventuellement et qu'il ne lui est pas communiqué d'élément lui permettant d'apprécier l'indice de revalorisation applicable ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle devait ordonner toute mesure d'instruction nécessaire pour fixer le montant de l'indice de revalorisation dès lors qu'elle reconnaissait que des indemnités journalières étaient dues à Mme [B], la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil.
NEUVIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de rappel de 13ème mois pour les années 2012 à 2018, sur les heures supplémentaires et sur les heures de délégation ;
1°) Alors que lorsque le juge relève qu'est applicable un accord d'entreprise, il doit se procurer ce texte par tous moyens, au besoin en invitant les parties à lui en faire parvenir un exemplaire ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande de rappel de 13ème mois pour la période de 2012 à 2018, la cour d'appel a retenu que n'étaient pas communiqués les accords d'entreprise en vigueur permettant de calculer la prime de 13ème mois dont elle relevait l'application ; qu'en statuant ainsi, sans avoir préalablement invité les parties à lui faire parvenir cet accord, la cour d'appel a méconnu ses pouvoirs en violation des articles L 2221-2 et L.2254-1 du code du travail ;
2°) Alors qu'en matière prud'homale, la preuve est libre ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande de rappel du 13ème mois pour la période de 2012 à 2018, la cour d'appel a considéré que cette demande n'était pas justifiée en dehors des propres calculs de Mme [B] ; qu'en refusant de tenir compte des calculs effectués par la salariée, la cour d'appel a violé le principe de la liberté de la preuve en matière prud'homale ;
3°) Alors que le juge ne peut fonder sa décision sur un motif dubitatif ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande au titre du 13ème mois des années 2012 à 2018, la cour d'appel a considéré que les modalités de versement semblent subordonner le versement de cette prime versée en décembre chaque année à une présence effective dans l'entreprise le 31 décembre de l'année de référence ; qu'en statuant par ce motif dubitatif, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
DIXIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [B] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de rappel de salaire consécutif à la reconnaissance de maladie professionnelle (période du 22 janvier au 28 août 2012) ;
1°) Alors que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande en paiement d'un rappel de salaire consécutif à la reconnaissance de maladie professionnelle, la cour d'appel a considéré qu'au vu de la production par l'employeur de l'ensemble des décomptes des indemnités journalières versées à Mme [B] consécutivement à son arrêt maladie et des mentions figurant sur les bulletins de paie selon lesquelles Mme [B] a perçu en février 2012 des indemnités complémentaires du 26 décembre 2011 au 21 janvier 2012, la demande fondée sur des données regroupées dans un tableau inexploitable dès lors qu'il n'intègre pas les exigences posée par la convention collective sera rejetée ; qu'en refusant ainsi d'évaluer le complément de salaire restant dû à Mme [B], en raison de l'insuffisance de preuve pour l'établir alors même que cette créance n'était pas déniée, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;
2°) Alors que la délivrance des bulletins de salaire ne permet pas de rapporter la preuve de son paiement dont la charge incombe à l'employeur ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme [B] de sa demande en paiement d'un complément de salaire consécutif à la reconnaissance de sa maladie professionnelle, la cour d'appel a opposé les mentions figurant sur les bulletins de paie indiquant que Mme [B] a perçu des indemnités complémentaires du 26 décembre 2011 au 21 janvier 2012 ; qu'en statuant ainsi, alors que Mme [B] contestait que son employeur ait versé un quelconque complément (conclusions p 59, § 7), la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1341 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.