LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 décembre 2022
Rejet
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1309 F-D
Pourvoi n° B 21-18.991
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 DÉCEMBRE 2022
La société Samsic sécurité, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 21-18.991 contre l'arrêt rendu le 5 mai 2021 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [F] [D], domicilié [Adresse 1],
2°/ à la société Action conseil intervention, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ à Pôle emploi Occitanie, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Grandemange, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Samsic sécurité, de la SCP Gaschignard, avocat de la société Action conseil intervention, après débats en l'audience publique du 18 octobre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Grandemange, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 5 mai 2021), M. [D], engagé à compter du 1er novembre 1996 par la société Ardial, aux droits de laquelle vient la société Samsic sécurité, en qualité d'agent d'exploitation, occupait au dernier état de la relation de travail un poste d'agent de sécurité sur le site de la Banque populaire du Sud à Saint-Estève (66).
2. Après un entretien, le 8 juin 2015, avec la société Action conseil intervention (la société ACI), nouvel attributaire du marché de gardiennage des sites de la Banque populaire du Sud à compter du 1er juillet 2015, le salarié informait cette dernière, par lettre du 15 juin 2015, de son refus du transfert de son contrat de travail.
3. Avisée de ce refus par la société entrante, la société Samsic sécurité, le 17 juin 2015, proposait au salarié sa mutation sur un poste d'agent de sécurité à [Localité 5] (31). Le 19 juin 2015, le salarié refusait cette nouvelle affectation, mais déclarait à son employeur qu'il acceptait le transfert de son contrat de travail à la société ACI. La société Samsic sécurité en informait la société entrante par courriel du 25 juin et lui demandait d'organiser le transfert du contrat de travail le 1er juillet 2015.
4. Le 29 juillet 2015, la société Samsic sécurité transmettait au salarié son solde de tout compte et les documents sociaux de fin de contrat.
5. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale en contestation du refus du transfert de son contrat de travail par la société ACI, en contestation de la rupture de son contrat de travail et en condamnation solidaire des entreprises entrante et sortante à lui payer diverses sommes à ce titre.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. La société Samsic sécurité fait grief à l'arrêt de mettre hors de cause la société ACI, de la condamner à payer au salarié une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre celles à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et d'indemnité de licenciement ainsi que de lui ordonner le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage payées au salarié dans la limite de six mois d'indemnités, alors :
« 1°/ que lors de la reprise d'un marché de prestation de sécurité, le manquement de la société entrante à son obligation de reprendre les salariés qui remplissent les conditions édictées par l'article 2.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, ne peut empêcher un changement d'employeur, sauf si elle est dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché ; qu'il en résulte que la rupture du contrat de travail du salarié qui n'a pas été transféré par la faute de la société entrante est imputable à celle-ci ; qu' ayant constaté que la société entrante avait commis une faute en refusant le transfert du salarié en dépit de l'accord de celui-ci qui remplissait toutes les conditions fixées par l'article 2.2 précité et en considérant cependant que seule la société sortante avait conservé la qualité d'employeur pour en déduire que la rupture du contrat du salarié lui était exclusivement imputable la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé les articles 2.2 et 2.3.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel ensemble l'article L. 1231-1 du code du travail ;
2°/ que la remise des documents de fin de contrat au salarié par la société sortante, conformément à 3.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002, lors de la perte d'un marché de prestation de sécurité ne vaut pas licenciement de sa part ; qu'en jugeant que la société sortante avait procédé au licenciement du salarié aux motifs inopérants qu'elle avait remis à ce dernier divers documents de fin de contrat, la cour d'appel a violé les articles 2.3.2 et 3.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel ensemble l'article 1231-1 du code du travail.»
Réponse de la Cour
8. Le transfert des contrats de travail prévu par l'avenant du 28 janvier 2011, étendu par arrêté du 29 novembre 2012, à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel dans le secteur prévention et sécurité ne s'opérant pas de plein droit et étant subordonné à l'accomplissement des diligences prescrites par cet accord, lorsque les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ne sont pas remplies, le manquement de l'entrepreneur entrant aux diligences que l'accord met à sa charge fait obstacle au changement d'employeur. L'action indemnitaire dont dispose le salarié contre l'entrepreneur entrant qui a empêché sans raison légitime le changement d'employeur n'est pas exclusive de celle qu'il peut aussi exercer contre l'entrepreneur sortant qui a pris l'initiative de la rupture du contrat, sans préjudice du recours éventuel de ce dernier contre le nouveau titulaire du marché, si sa carence a fait obstacle au changement d'employeur.
9. La cour d'appel, qui n'était saisie d'aucun recours en garantie de la société Samsic sécurité contre la société ACI et qui a constaté que la première avait pris l'initiative de rompre le contrat de travail de son salarié, sans procédure de licenciement, en a exactement déduit que le manquement de la société entrante aux diligences que l'accord met à sa charge faisait obstacle au changement d'employeur, et que la société Samsic sécurité était tenue au paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Samsic sécurité aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Samsic sécurité et la condamne à payer à la société Action conseil intervention la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Samsic sécurité.
La société Samsic Sécurité fait grief à l'arrêt attaqué qui a dit que le refus du transfert du contrat de travail par la société ACI était injustifié, d'AVOIR mis hors de cause la société ACI, de l'AVOIR condamnée à payer au salarié une somme de 35 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre celles à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et d'indemnité de licenciement ainsi que de lui AVOIR ordonné le remboursement à Pôle emploi des indemnité de chômage payées à M. [D] dans la limite de six mois d'indemnité ;
1°- ALORS QUE lors de la reprise d'un marché de prestation de sécurité, le manquement de la société entrante à son obligation de reprendre les salariés qui remplissent les conditions édictées par l'article 2.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, ne peut empêcher un changement d'employeur, sauf si elle est dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché ; qu'il en résulte que la rupture du contrat de travail du salarié qui n'a pas été transféré par la faute de la société entrante est imputable à celle-ci ; qu' ayant constaté que la société entrante avait commis une faute en refusant le transfert du salarié en dépit de l'accord de celui-ci qui remplissait toutes les conditions fixées par l'article 2.2 précité et en considérant cependant que seule la société sortante avait conservé la qualité d'employeur pour en déduire que la rupture du contrat du salarié lui était exclusivement imputable la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé les articles 2.2 et 2.3.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel ensemble l'article L .1231-1 du code du travail ;
2°- ALORS, de surcroît, QUE la remise des documents de fin de contrat au salarié par la société sortante, conformément à 3.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002, lors de la perte d'un marché de prestation de sécurité ne vaut pas licenciement de sa part ; qu'en jugeant que la société sortante avait procédé au licenciement du salarié aux motifs inopérants qu'elle avait remis à ce dernier divers documents de fin de contrat, la cour d'appel a violé les articles 2.3.2 et 3.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel ensemble l'article 1231-1 du code du travail.