LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 21-86.542 F-D
N° 00534
ECF
10 MAI 2023
IRRECEVABILITE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 10 MAI 2023
L'établissement public industriel et commercial La monnaie de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 4e section, en date du 27 octobre 2021, qui a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté sa demande de constatation de la prescription.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de l'établissement public industriel et commercial La monnaie de Paris, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de l'association [1], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. A la suite d'une plainte déposée le 3 juillet 2009 auprès du procureur de la République, pour mise en danger d'autrui par violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements concernant l'amiante, ainsi que pour infraction aux règles d'hygiène et de sécurité des conditions de travail, une enquête préliminaire a été diligentée, puis une information ouverte, sur réquisitoire introductif du 20 février 2015, des chefs de mise en danger d'autrui, blessures involontaires et homicide involontaire au cours des années 1973 à 1997. Un réquisitoire supplétif du 19 octobre 2015 a étendu la période de temps à des faits commis jusqu'au 31 décembre 2011.
3. L'établissement public La monnaie de Paris, placé sous le statut de témoin assisté a, dans les six mois de sa première audition intervenue le 20 mars 2019, déposé, le 20 septembre suivant, une requête tendant à ce que soit constatée la prescription de l'action publique.
4. Par ordonnance du 5 février 2020, le juge d'instruction a rejeté la requête comme non fondée.
5. L'établissement public La monnaie de Paris a relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
6. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel du témoin assisté contre l'ordonnance disant non fondée sa demande tendant à constater la prescription, alors :
« 1°/ que l'article 82-3 du code de procédure pénale oblige le témoin assisté à saisir le juge d'instruction dans les six mois de sa première audition s'il entend soutenir que la prescription est acquise ; que le témoin assisté a la qualité de partie à ce contentieux ayant la prescription pour unique objet ; que l'article 186-1 du code de procédure pénale ouvre aux parties la faculté de faire appel contre les ordonnances visées à l'article 82-3 ; que dès lors en déclarant irrecevable l'appel l'arrêt attaqué a violé les articles 82-3, 186-1 du code de procédure pénale et par fausse application l'article 113-3 du même code ;
2°/ que la faculté reconnue au témoin assisté par l'article 82-3 du code de procédure pénale de saisir le juge d'instruction d'une demande tendant à constater la prescription de l'action publique, implique en toute hypothèse que, bien que n'étant pas partie à la procédure principale, il est recevable à interjeter appel de l'ordonnance se prononçant sur cette demande ; que l'arrêt attaqué encourt la censure pour violation des articles 82-3 du code de procédure pénale par refus d'application, et 113-3 du code de procédure pénale par fausse application. »
Réponse de la Cour
8. Pour déclarer irrecevable l'appel formé par l'établissement public La monnaie de Paris de l'ordonnance ayant rejeté sa demande de constatation de la prescription, l'arrêt attaqué énonce, notamment, que le témoin assisté, qui n'a pas la qualité de partie à la procédure et dont les droits sont limitativement énumérés à l'article 113-3 du code de procédure pénale, ne tire d'aucune disposition légale le droit d'interjeter appel des ordonnances du juge d'instruction.
9. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.
10. En effet, si la personne placée sous le statut de témoin assisté tient de l'article 82-3, alinéa 2, du code de procédure pénale, le droit de saisir le juge d'instruction d'une demande tendant à voir constater l'acquisition de la prescription de l'action publique, elle ne tire d'aucune disposition légale le droit d'interjeter appel de la décision qu'il est amené à prendre.
11. Le moyen ne peut qu'être écarté.
12. L'appel ayant à bon droit été déclaré irrecevable, il en est de même du pourvoi.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DÉCLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
FIXE à 2 500 euros la somme que l'établissement public La monnaie de Paris devra payer à l'association [1] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille vingt-trois.