LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
OR
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 septembre 2023
Cassation
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 819 F-D
Pourvoi n° C 21-22.373
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 SEPTEMBRE 2023
La société Groupe Astek, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 21-22.373 contre le jugement rendu le 31 août 2021 par le président du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence selon la procédure accélérée au fond, dans le litige l'opposant à la société Cateis, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Carillon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Groupe Astek, de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de la société Cateis, après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Carillon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (président du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence, 31 août 2021) statuant selon la procédure accélérée au fond, par une délibération du 26 février 2019, le comité social et économique de la société Groupe Astek (le CSE) a voté une résolution portant nomination d'un expert, la société Cateis, pour évaluer les risques psycho-sociaux envers les élus du personnel et déterminer l'ensemble des facteurs sur le périmètre Astek sud-est.
2. Contestant le recours à l'expertise, la société Groupe Astek (la société) a saisi le tribunal judiciaire aux fins d'annulation de la délibération.
3. Contestant par ailleurs le coût de l'expertise, elle a fait assigner la société Catéis le 17 septembre 2019 devant le président d'un tribunal judiciaire, statuant en la forme des référés, aux fins de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de la procédure ayant pour objet l'annulation de la délibération et, subsidiairement en cas de rejet, réduire le coût de l'expertise.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société fait grief au jugement de déclarer irrecevable l'action en contestation du coût prévisionnel de l'expertise confiée à la sociét Cateis suivant délibération du CSE du 26 février 2019 et de la condamner à payer à la société Cateis une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que le juge qui relève d'office une fin de non-recevoir même d'ordre public doit préalablement provoquer les explications des parties ; qu'en l'espèce, il ressort des conclusions de la société Cateis et des mentions du jugement que cette dernière ne contestait pas la recevabilité de l'action de la société Groupe Astek et n'invoquait pas en particulier la forclusion de son action ; qu'il ressort en outre des mentions du jugement que le Président du tribunal n'a pas sollicité les explications des parties sur le respect du délai de forclusion de l'action en contestation du coût prévisionnel de l'expertise ; qu'en relevant d'office la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action au regard des dispositions des articles L. 2315-86 et R. 2315-49 du code du travail, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, le président du tribunal a violé l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
5. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
6. Pour déclarer irrecevable l'action en contestation du coût prévisionnel de l'expertise confiée à la société Catéis, le jugement retient que, l'assignation datant du 17 septembre 2019, ce sont les dispositions de l'article L. 2315-86.3° du code du travail, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2018 au 1erjanvier 2020, qui sont applicables et qui prévoient, conformément à l'article R. 231-49 du même code, que l'employeur saisit le juge judiciaire dans le délai de dix jours à compter de la notification de la lettre de mission par l'expert. Ayant constaté que l'expert avait communiqué au CSE son protocole le 11 mars 2019 et que la société Groupe Astek avait introduit l'instance le 17 septembre 2019, il en déduit que la demande est irrecevable.
7. En statuant ainsi, alors que la recevabilité de la demande n'était pas contestée par l'expert désigné, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 31 août 2021, entre les parties, par le président du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le président du tribunal judiciaire de Marseille ;
Condamne la société Catéis aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Catéis et la condamne à payer à la société Groupe Astek la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille vingt-trois.