LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 décembre 2023
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 658 F-D
Pourvoi n° N 21-16.908
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 DÉCEMBRE 2023
La société Menou autos, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 21-16.908 contre l'arrêt rendu le 9 février 2021 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [C] [B], domicilié [Adresse 1],
2°/ à la société Automobiles Peugeot, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Menou autos, de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [B], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Automobiles Peugeot, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 octobre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, Mme Mallet-Bricout, avocat général, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 9 février 2021), le 22 mars 2011, M. [B] (l'acquéreur) a acquis de la société Menou autos (le vendeur) un véhicule automobile d'occasion.
2. Le 7 février 2013, après avoir fait procéder à un diagnostic par un garage, réalisé le 7 juillet 2011, en raison de désordres, l'acquéreur a assigné en référé le vendeur aux fins d'obtenir une expertise judiciaire qui a été ordonnée le 23 mars 2013. Le rapport a été déposé le 16 août 2014. Le 4 août 2016, l'acquéreur a assigné le vendeur en résolution de la vente et paiement de certaines sommes sur le fondement de la garantie des vices cachés. Le vendeur a appelé en garantie le fabricant, la société Automobiles Peugeot, et a opposé la prescription de l'action.
3. L'action du vendeur contre le fabricant a été déclarée irrecevable comme prescrite.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le vendeur fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action de l'acquéreur, de prononcer la résolution de la vente et de le condamner à payer diverses sommes, alors « que le délai biennal prévu par le premier alinéa de l'article 1648 du code civil pour exercer une action en garantie de vices cachés est un délai de forclusion ; que l'interruption de ce délai par une assignation en référé-expertise fait courir, à compter de la date du prononcé de l'ordonnance désignant un expert, un nouveau délai de forclusion de deux ans ; que ce délai ne peut pas être ensuite suspendu jusqu'au dépôt du rapport de l'expert, les dispositions de l'article 2239 du code civil n'étant pas applicables au délai de forclusion ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que l'acquéreur avait eu connaissance du vice le 7 juillet 2011, qu'il avait assigné le vendeur en référé-expertise le 7 février 2013, que l'expert judiciaire a été nommé par ordonnance du 23 mars 2013, et que le rapport d'expertise a été déposé le 16 août 2014 ; que l'action en garantie des vices cachés n'a été engagée au fond que le 4 août 2016, soit plus de deux ans après l'ordonnance ayant désigné l'expert ; qu'en jugeant néanmoins cette action recevable, aux motifs erronés que le délai biennal de l'article 1648 du code civil n'était pas un délai de forclusion mais de prescription qui aurait ainsi pu être suspendu jusqu'au dépôt du rapport d'expertise en application de l'article 2239 du code civil, la cour d'appel a violé les articles 1648, alinéa 1er, 2239 et 2241 du code civil. »
Réponse de la Cour
5. Le délai biennal prévu par l'article 1648, alinéa 1er, du code civil pour intenter l'action en garantie à raison des vices cachés de la chose vendue est un délai de prescription susceptible de suspension en application de l'article 2239 du même code (Ch. Mixte, 21 juillet 2023, pourvoi n° 21-15.809, publié).
6. Ayant retenu que le délai de prescription, qui avait commencé à courir le 7 juillet 2011, date de révélation des vices à l'acquéreur, avait été interrompu le 7 février 2013, date de l'assignation en référé expertise, puis suspendu le 23 mars 2013, date à laquelle il avait été fait droit à la demande, et avait recommencé à courir le 16 août 2014, date du dépôt du rapport de l'expert, elle en a exactement déduit que l'action en garantie introduite le 4 août 2016 n'était pas prescrite.
7. C'est donc à bon droit que la cour d'appel a jugé que le délai de l'article 1648 du code civil constitue un délai de prescription et qu'après avoir relevé que la prescription avait commencé à courir le 7 juillet 2011, date de révélation des vices à l'acquéreur, et avait été interrompue le 7 février 2013, date de l'assignation en référé expertise, elle a retenu qu'elle avait été suspendue le 23 mars 2013, date à laquelle il avait été fait droit à la demande, et avait recommencé à courir le 16 août 2014, date du dépôt du rapport de l'expert, de sorte que l'action en garantie introduite le 4 août 2016 n'était pas prescrite.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Menou autos aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Automobiles Peugeot, rejette la demande formée par la société Menou Autos et la condamne à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six décembre deux mille vingt-trois.