LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 décembre 2023
Cassation
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 688 F-D
Pourvoi n° Z 22-18.533
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 DÉCEMBRE 2023
M. [U] [S], domicilié [Adresse 2], exerçant sous le nom commercial de la société Camping du Haras, a formé le pourvoi n° Z 22-18.533 contre le jugement rendu le 28 avril 2022 par le tribunal judiciaire de Vannes, dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [R] [B], domicilié [Adresse 1],
2°/ à Mme [T] [P], domiciliée [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [S], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [B] et de Mme [P], après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Vannes, 28 avril 2022), après avoir annulé la réservation d'un hébergement dans le camping exploité par M. [S], Mme [P] et M. [B] ont sollicité le remboursement de la somme prélevée sur le compte de ce dernier et demandé des dommages et intérêts.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première et quatrième branches
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
3. M. [S] fait grief au jugement de le condamner à payer à Mme [P] et M. [B] la somme de 281,20 euros, alors :
« 2°/ que le juge ne peut d'office, relever un moyen sans le soumettre préalablement à la discussion contradictoire des parties ; qu'en considérant que les parties auraient convenu d'une "résolution" d'un commun accord, cependant qu'aucune des parties n'invoquait les règles sur la résolution des contrats, le tribunal a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3°/ que le juge ne peut méconnaître les termes du litige ; qu'en énonçant que le camping aurait accepté la "résolution" du contrat, laquelle implique une inexécution contractuelle, cependant que M. [B] et Mme [P] faisaient valoir qu'ils n'avaient reçu ni signé le moindre contrat de réservation et qu'il y avait lieu de considérer que le contrat n'existait pas, le tribunal a violé l'article 4 du code de procédure civile ; »
Réponse de la Cour
Vu les articles 4 et 16 du code de procédure civile :
4. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
5. Aux termes du second, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
6. Pour condamner M. [S] à rembourser Mme [P] et M. [B], le jugement retient que Mme [P] ayant annulé son séjour par courrier électronique le 17 mars 2021 et le camping indiqué avoir annulé la réservation le 22 août 2021, les parties sont donc convenues d'une résolution d'un commun accord et qu'en acceptant la résolution du contrat, le camping se devait de restituer l'acompte versé.
7. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré de l'existence d'un accord révocatoire du contrat, et alors que, dans leurs conclusions écrites, qui selon le jugement ont été développées à l'audience, M. [S] soutenait que le contrat avait été formé et qu'en application des stipulations contractuelles, le remboursement de l'acompte n'était pas dû en cas d'annulation de la réservation, tandis que Mme [P] et M. [B] soutenaient que le contrat n'existait pas faute d'avoir été formé, le tribunal, qui a modifié l'objet du litige, a violé le premier texte susvisé et n'a pas satisfait aux exigences posées par le second.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
8. M. [S] fait grief au jugement de le condamner à payer la somme de 1 000 euros de dommages et intérêts à Mme [P] et M. [B], alors « que la défense à une action constitue un droit et ne peut justifier une condamnation à des dommages et intérêts qu'en cas de malice ou de mauvaise foi ; qu'en condamnant M. [S] à verser une somme de 1 000 euros de dommages et intérêts à Mme [P] et M. [B] en raison des troubles et tracas causés par le litige au motif qu'il aurait incombé au camping de rembourser spontanément l'acompte reçu, après les avoir au surplus déboutés de leur demande de remboursement de la somme de 375 euros correspondant à l'aide VACAF prélevée par le camping, plus élevée que l'acompte de 281,20 euros, le tribunal a violé l'article 1240 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
9. La cassation prononcée sur le premier moyen emporte, par voie de conséquence, cassation du chef de dispositif condamnant M. [S] à payer des dommages et intérêts à Mme [P] et M. [B], qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 28 avril 2022, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Vannes ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Lorient ;
Condamne Mme [P] et M. [B] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille vingt-trois.