LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° U 23-80.195 F-D
N° 00386
MAS2
27 MARS 2024
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 27 MARS 2024
M. [U] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 11e chambre, en date du 28 décembre 2022, qui, pour abus de confiance, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, cinq ans d'interdiction de gérer et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. de Lamy, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [U] [F], les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [1], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 février 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. de Lamy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 1er février 2021, le tribunal correctionnel a condamné M. [U] [F] pour abus de confiance à six mois d'emprisonnement avec sursis, cinq ans d'interdiction d'exercer une profession, commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société et l'a condamné à réparer les préjudices subis par la société [1] (la société), partie civile.
3. M. [F], la société et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier et troisième moyens
4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé à l'encontre de M. [F], à titre de peine complémentaire, l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de cinq ans, alors « que les articles 131-27 et 314-10 2°) du code pénal visent la peine complémentaire d'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale ; qu'en confirment le jugement entrepris ayant prononcé à l'encontre de M. [F] une interdiction de diriger, administrer, gérer ou contrôle une entreprise ou une société (arrêt, p. 17, § 9 ; jugement, p. 9, § 8), sans limiter cette interdiction aux entreprises commerciales ou industrielles et aux sociétés commerciales, la cour d'appel a méconnu l'article 111-3 du code pénal et le principe selon lequel nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 111-3 du code pénal :
6. Selon ce texte, nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi.
7. Après avoir déclaré M. [F] coupable d'abus de confiance, l'arrêt attaqué le condamne, notamment, à l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de cinq ans.
8. En prononçant ainsi une interdiction de gérer toute entreprise ou toute société, alors que l'article 314-10 du code pénal, applicable au délit reproché, limite une telle interdiction aux entreprises commerciales ou industrielles et aux sociétés commerciales, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
9. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
10. La cassation, qui sera limitée aux dispositions relatives à la peine complémentaire d'interdiction de gérer prononcée, aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.
11. Les dispositions de l'article 618-1 du code de procédure pénale sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de M. [F] étant devenue définitive, par suite du rejet de son premier moyen de cassation, contesté par la défenderesse au pourvoi, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de cette dernière.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rennes, en date du 28 décembre 2022, mais en ses seules dispositions relatives à la peine complémentaire d'interdiction de gérer prononcée, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT que l'interdiction de gérer prononcée à titre de peine complémentaire contre M. [F] est limitée à la direction, à l'administration, au contrôle ou à la gestion, directes ou indirectes, d'une entreprise commerciale ou industrielle ou d'une société commerciale ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. [F] devra payer à la société [1] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille vingt-quatre.