LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CL6
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 2 mai 2024
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 442 F-D
Pourvoi n° Y 22-20.924
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 MAI 2024
M. [Y] [V], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 22-20.924 contre l'arrêt rendu le 22 avril 2022 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'opposant à la société Décathlon, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [V], de la SCP Boullez, avocat de la société Décathlon, après débats en l'audience publique du 20 mars 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 22 avril 2022), M. [V] a été engagé par la société Décathlon France (la société) le 1er juin 2001 en qualité de vendeur. Il a été promu responsable de rayon, statut cadre, le 1er septembre 2001. Il a exercé divers mandats de représentation du personnel au sein de l'entreprise entre 2002 et 2013. Il est devenu conseiller prud'homme le 14 décembre 2017.
2. Le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie du 21 octobre 2006 au 4 octobre 2009, puis sans discontinuer à compter du 4 avril 2013.
3. Par arrêt du 5 février 2016, interprété par arrêt du 19 avril 2017, la cour d'appel de Toulouse a notamment, au titre de la discrimination syndicale subie par le salarié, fixé sa rémunération à un certain montant, dit qu'elle sera valorisée selon des modalités qu'elle a fixées et alloué à l'intéressé des dommages-intérêts en réparation de son préjudice.
4. Le 10 novembre 2010, le salarié a demandé la reconnaissance de sa dépression comme maladie professionnelle. Par jugement du 21 mai 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne a notamment infirmé la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne ayant refusé la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle, dit que la demande du salarié devait faire l'objet d'une instruction et mis hors de cause la société. Par décision du 9 juillet 2015, la caisse primaire d'assurance maladie a reconnu la dépression du salarié comme maladie professionnelle.
5. Par jugement du 2 mai 2019, le tribunal judiciaire de Toulouse a dit que la maladie professionnelle déclarée par le salarié le 10 novembre 2010 était due à la faute inexcusable de la société et, avant-dire droit sur la réparation des préjudices, a ordonné une expertise médicale.
6. Le 23 février 2018, soutenant être victime d'une discrimination salariale en raison de ses activités syndicales et de son état de santé, le salarié a saisi à nouveau la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à condamner la société au paiement d'un rappel de primes pendant la période d'arrêt de la maladie professionnelle et de diverses sommes à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié à la perte de valeur du plan d'épargne entreprise sur les primes non perçues, pour la perte des droits à la retraite, pour discrimination et pour violation de l'obligation de bonne foi.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et troisième moyens et sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche
7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, le deuxième moyen, le troisième moyen, pris en sa première branche, et sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, qui est irrecevable.
Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de primes de février 2015 à février 2016 et de ses demandes de dommages-intérêts pour perte de valeur du plan d'épargne entreprise sur les primes non perçues, pour perte de droits à la retraite sur les primes non perçues et pour violation de l'obligation de bonne foi, alors « que l'inopposabilité à l'employeur, dans ses rapports avec la caisse primaire d'assurance maladie, du caractère professionnel de la maladie ne fait pas obstacle à ce que le salarié invoque à l'encontre de son employeur l'origine professionnelle de sa maladie ; que la cour d'appel, après avoir constaté que la CPAM avait reconnu le caractère professionnel de la maladie par décision du 9 juillet 2015, a dit que cette décision était inopposable à l'employeur qui avait été mis hors de cause par jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 21 mai 2014, l'avis du 3 décembre 2018 du 2e comité régional n'ayant été donné que dans le cadre de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable à laquelle la société Décathlon était partie ; qu'elle en a déduit qu'en 2015 et 2016, à l'égard de cette dernière, M. [V] qui était réputé en arrêt maladie simple et non en arrêt maladie professionnelle, ne pouvait par conséquent prétendre au versement des primes d'intéressement et ne pouvait y prétendre de manière rétroactive suite à l'avis du 3 décembre 2018 ; qu'en statuant ainsi, quand l'inopposabilité à l'employeur de la décision de la CPAM du 9 juillet 2015 ne faisait pas obstacle à ce que le salarié invoque à l'encontre de son employeur l'origine professionnelle de sa maladie pour réclamer le paiement des primes, la cour d'appel a violé le principe précité. »
Réponse de la Cour
9. La cour d'appel, qui a constaté que par avis du 3 décembre 2018 donné dans le cadre de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de la société, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles du Limousin-Poitou-Charentes avait retenu l'existence d'un lien entre la pathologie déclarée par le salarié et le travail, faisant ainsi ressortir que la société n'avait eu connaissance du caractère professionnel de la maladie du salarié qu'à la date du 3 décembre 2018, a, par ces seuls motifs, pu en déduire que le salarié ne pouvait invoquer le caractère professionnel de sa maladie à l'appui de sa demande de rappel de primes pour la période de février 2015 à février 2016.
10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux mai deux mille vingt-quatre.