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02/10/2024 | FRANCE | N°12400519

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 02 octobre 2024, 12400519


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


IJ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 2 octobre 2024








Cassation partielle




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 519 F-D


Pourvoi n° V 22-20.990








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
________________

_________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 OCTOBRE 2024


Mme [F] [V], domiciliée [Adresse 2] (Maroc), a formé le pourvoi n° V 22-20.990 Rouen contre l'arrêt rendu le 27 janvier 2022 par la cour d'ap...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

IJ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 octobre 2024

Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 519 F-D

Pourvoi n° V 22-20.990

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 OCTOBRE 2024

Mme [F] [V], domiciliée [Adresse 2] (Maroc), a formé le pourvoi n° V 22-20.990 Rouen contre l'arrêt rendu le 27 janvier 2022 par la cour d'appel de (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à M. [P] [I], domicilié [Adresse 1] défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, cinq moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Daniel, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [V], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [I], après débats en l'audience publique du 2 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Daniel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 27 janvier 2022), un arrêt du 22 juin 2012 a prononcé le divorce de M. [I] et de Mme [V], mariés sans contrat préalable.

2. Un jugement du 17 octobre 2013 a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.

3. Des difficultés sont survenues à l'occasion de ces opérations.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, le deuxième moyen, en ce qu'il est dirigé contre le chef de dispositif de l'arrêt disant que le placement Loi Madelin FIP Avenir replacé dans le contrat E-C-Vie constitue un bien propre de M. [I] et ne doit pas être inclus dans l'actif commun ou indivis à partager, le troisième moyen, pris en sa troisième branche, le quatrième moyen, pris en sa première branche, et le sixième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le quatrième moyen, pris en sa première branche, qui est irrecevable, et sur le premier moyen, le deuxième moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de dire que le placement Loi Madelin FIP Avenir replacé dans le contrat E-C-Vie constitue un bien propre de M. [I] et ne doit pas être inclus dans l'actif commun ou indivis à partager, le troisième moyen, pris en sa troisième branche, et le sixième moyen, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen, en ce qu'il est dirigé contre le chef de dispositif de l'arrêt rejetant la demande de récompense au bénéfice de la communauté pour avoir financé le contrat FIP Avenir

Enoncé du moyen

5. Mme [V] fait grief à l'arrêt de rejeter la demande de récompense au bénéfice de la communauté pour avoir financé le contrat FIP Avenir jusqu'à la date des effets du divorce, soit un montant de 102 212 euros, alors « qu'un compte d'épargne de retraite complémentaire financé par des deniers communs donne lieu à récompense à la communauté, nonobstant son caractère de bien propre de l'époux souscripteur ; que l'arrêt attaqué a constaté que le placement Loi Madelin FIP Avenir souscrit par le mari avait été financé par des deniers communs, à tout le moins en partie ; qu'en retenant néanmoins que le mari n'était pas tenu à récompense envers la communauté pour la seule raison que le contrat d'épargne retraite en cause constituait un bien propre attaché à sa personne et que les sommes futures sur lesquelles l'assuré disposait d'un droit au titre d'un tel contrat d'épargne retraite, constituaient des biens "qui (avaient) un caractère personnel" ou des "droits exclusivement attachés à la personne", la cour d'appel a violé l'article 1437 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1437 du code civil :

6. Selon ce texte, toutes les fois qu'il est pris sur la communauté une somme pour acquitter les dettes ou charges personnelles à l'un des époux, celui-ci en doit récompense.

7. Pour rejeter la demande de récompense formée par Mme [V] à l'encontre de M. [I] au titre du financement, par la communauté, du contrat FIP Avenir jusqu'à la date des effets du divorce, l'arrêt relève que les sommes futures sur lesquelles l'assuré dispose d'un droit au titre d'un tel contrat d'épargne retraite constituent des biens qui ont un caractère personnel ou des droits exclusivement attachés à la personne, et que M. [I] est fondé à soutenir qu'il n'est tenu à aucune récompense envers la communauté à ce titre.

8. En statuant ainsi, alors que l'époux ayant alimenté, par des deniers communs, un compte personnel d'épargne de retraite complémentaire en doit récompense à la communauté, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. Mme [V] fait grief à l'arrêt de dire qu'elle est redevable à l'indivision post-communautaire d'une indemnité d'occupation de 525 euros par mois, du 1er juillet 2020 jusqu'au partage définitif, au titre de l'occupation de l'immeuble de [Adresse 3] au Maroc, et au besoin de l'y condamner, alors « que l'occupation privative d'un bien postérieurement à la date de la jouissance divise ne donne lieu à aucune indemnité d'occupation à la charge de l'époux auquel est attribué le bien ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a attribué à l'exposante le bien immobilier d'Agadir, commune de [Adresse 3], [T] [N] ; qu'en décidant qu'elle était redevable d'une indemnité d'occupation pour la période de juillet 2020 jusqu'au partage définitif après avoir fixé la date de jouissance divise au 2 juillet 2014, la cour d'appel a violé les articles 829, 815-9 et 815-10 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 815-9, alinéa 2, 815-10, alinéa 2, et 829 du code civil :

10. Il résulte de ces textes que, l'indemnité d'occupation étant assimilée à un revenu accroissant à l'indivision, elle n'est plus due à celle-ci à compter de la date de la jouissance divise.

11. Pour dire que Mme [V] est redevable à l'indivision post-communautaire d'une indemnité de 525 euros par mois, du 1er juillet 2020 jusqu'au partage définitif, au titre de l'occupation de l'immeuble de [Adresse 3] au Maroc, l'arrêt retient que l'intéressée s'est comportée en propriétaire et occupante exclusive des lieux.

12. En statuant ainsi, alors qu'elle avait fixé la date de jouissance divise au 2 juillet 2014 et attribué le bien en cause à Mme [V], la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

13. Mme [V] fait grief à l'arrêt de, réparant l'omission de statuer du premier juge, dire qu'il y a lieu de lire dans le jugement n° RG 16/02303 rendu le 21 novembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Rouen : « déboute Mme [V] de sa demande tendant à ce que les contrats d'assurance-vie Nuance privilège, Multiance Cap et Fructi Sélection Vie soient évalués à une date la plus proche du partage autre que celle de la jouissance divise du 2 juillet 2014 », alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en procédant d'office à la réparation d'une omission de statuer qui n'était pas demandée sur une prétention qui n'était pas discutée, sans inviter les parties à présenter leurs observations tout en adoptant une solution opposée à celle résultant des motifs du jugement entrepris sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

14. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

15. Pour compléter le dispositif du jugement entrepris en rejetant la demande de Mme [V] tendant à ce que trois contrats d'assurance sur la vie soient évalués à une date la plus proche du partage autre que celle de la jouissance divise du 2 juillet 2014, l'arrêt retient que cette demande ne peut être accueillie et que, le premier juge ayant omis de statuer de ce chef, il convient de réparer cette omission en ce sens.

16. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

17. Mme [V] fait grief à l'arrêt de, réparant l'omission de statuer du premier juge, dire qu'il y a lieu de lire dans le jugement n° RG 16/02303 rendu le 21 novembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Rouen : « déclare sans objet les demandes de Mme [V] tendant à voir ordonner la création d'un compte d'administration pour les trois contrats d'assurance-vie/capitalisation susvisés afin de réintégrer les sommes perçues par M. [I] entre l'ordonnance de non-conciliation et la date de jouissance divise, et en conséquence, les rejette », alors « que la cassation à intervenir sur le quatrième moyen entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré sans objet les demandes de l'exposante tendant à voir ordonner la création d'un compte d'administration pour les trois comptes d'assurance vie/capitalisation susvisés, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

18. La cassation prononcée sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, entraîne la cassation par voie de conséquence de la disposition de l'arrêt qui, réparant une omission de statuer du premier juge, rejette la demande de création d'un compte d'administration pour les trois contrats d'assurance sur la vie ayant pour objet de réintégrer les sommes perçues par M. [I] entre l'ordonnance de non-conciliation et la date de jouissance divise, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

Portée et conséquences de la cassation

19. La cassation des chefs de dispositif rejetant la demande de récompense au bénéfice de la communauté pour avoir financé le contrat FIP Avenir jusqu'à la date des effets du divorce, disant que Mme [V] est redevable envers l'indivision post-communautaire d'une indemnité d'occupation de 525 euros par mois, du 1er juillet 2020 jusqu'au partage définitif, au titre de l'occupation de l'immeuble de [Adresse 3] au Maroc, et réparant deux omissions de statuer du premier juge, n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt statuant sur les dépens et les frais irrépétibles, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de récompense au bénéfice de la communauté pour avoir financé le contrat FIP Avenir jusqu'à la date des effets du divorce, soit un montant de 102 212 euros, dit que Mme [V] est redevable à l'indivision post-communautaire d'une indemnité d'occupation de 525 euros par mois, du 1er juillet 2020 jusqu'au partage définitif, au titre de l'occupation de l'immeuble de [Adresse 3] au Maroc, et au besoin l'y condamne, ainsi qu'en ce que, réparant l'omission de statuer du premier juge, il dit qu'il y a lieu de lire dans le jugement n° RG 16/02303 rendu le 21 novembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Rouen : « déboute Mme [V] de sa demande tendant à ce que les contrats d'assurance-vie Nuance privilège, Multiance Cap et Fructi Sélection Vie soient évalués à une date la plus proche du partage autre que celle de la jouissance divise du 2 juillet 2014», et en ce que, réparant l'omission de statuer du premier juge, il dit qu'il y a lieu de lire dans le même jugement : « déclare sans objet les demandes de Mme [V] tendant à voir ordonner la création d'un compte d'administration pour les trois contrats d'assurance-vie/capitalisation susvisés afin de réintégrer les sommes perçues par M. [I] entre l'ordonnance de non-conciliation et la date de jouissance divise, et en conséquence, les rejette », l'arrêt rendu le 27 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne M. [I] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [I] et le condamne à payer à Mme [V] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400519
Date de la décision : 02/10/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 27 janvier 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 02 oct. 2024, pourvoi n°12400519


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400519
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