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10/10/2024 | FRANCE | N°32400540

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 octobre 2024, 32400540


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 3


JL






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 10 octobre 2024








Cassation partielle




Mme TEILLER, président






Arrêt n° 540 F-D


Pourvoi n° E 22-22.402








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
__________________

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 OCTOBRE 2024


M. [R] [V], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-22.402 contre l'arrêt rendu le 25 août 2022 par la cour d'appel de Nîmes (2e ch...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 octobre 2024

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 540 F-D

Pourvoi n° E 22-22.402

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 OCTOBRE 2024

M. [R] [V], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-22.402 contre l'arrêt rendu le 25 août 2022 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre civile, section A), dans le litige l'opposant à M. [O] [F], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pons, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [V], de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de M. [F], après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Pons, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 25 août 2022), M. [V], propriétaire d'une maison d'habitation bâtie dans un lotissement, a assigné le propriétaire du fonds voisin, M. [F], pour obtenir sa condamnation à procéder à l'abattage et, subsidiairement, à l'élagage du pin parasol dont les branches avancent sur sa propriété, à la prise en charge des coûts de nettoyage de la toiture et des chéneaux de sa maison, ainsi qu'en paiement de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

3. M. [V] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes d'élagage du pin, de prise en charge du coût du nettoyage de sa toiture et des chéneaux et de paiement de dommages-intérêts, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que dans son rapport définitif du 26 novembre 2018, l'expert judiciaire a conclu que si la partie du houppier de l'arbre surplombant le fonds de M. [V] ne pouvait être totalement supprimée sans nuire à l'équilibre de l'arbre, « par contre il p[ouvait] être contenu par une taille régulière sous réserve que celle-ci ne soit pratiquée que sur du bois âgé de moins de deux ans et concerne toutes les faces du houppier » ; que pour débouter M. [V] de sa demande d'élagage du pin litigieux, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que, selon l'expert, « la taille de la partie du houppier dépassant sur le fonds [V] aurait des conséquences néfastes pour l'équilibre et la pérennité de l'arbre » ; qu'en occultant le fait que, dans son rapport, l'expert judiciaire estimait également que l'élagage de l'arbre était tout à fait envisageable à certaines conditions, la cour d'appel a violé le principe suivant lequel le juge ne doit pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

4. Pour rejeter la demande d'élagage, l'arrêt retient qu'il ressort du rapport d'expertise que la taille de la partie du houppier du pin litigieux dépassant sur le fonds [V] aurait des conséquences néfastes pour l'équilibre et la pérennité de l'arbre.

5. En statuant ainsi, alors que le rapport d'expertise énonce que, si le surplomb du houppier ne peut être supprimé sans nuire à l'équilibre de l'arbre, il peut être contenu par une taille très régulière, sous réserve que celle-ci ne soit pratiquée que sur du bois âgé de moins de deux ans et concerne toutes les faces du houppier, la cour d'appel, qui a dénaturé, par omission, les termes clairs et précis du rapport d'expertise, a violé le principe susvisé.

Et sur le second moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

6. M. [V] fait le même grief à l'arrêt, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que l'article 20 du règlement du lotissement stipule dans son paragraphe « a », intitulé « déboisement - reboisement », que « l'abattage des arbres bien portants est interdit en dehors des aires de construction ; que les arbres qui pour une raison quelconque doivent être abattus, seront remplacés en un nombre égal d'arbres appelés au même développement, de même essence ou d'une essence choisie parmi celles qui peuvent être éventuellement imposées? En toute hypothèse, la densité moyenne des plantations ne devra pas être inférieure à deux arbres par lot » ; que si cette stipulation interdit l'abattage des arbres du lotissement, elle n'impose en aucune façon la conservation en l'état de la végétation existante, en prohibant toute mesure d'élagage de celle-ci ; qu'en retenant, pour débouter M. [V] de sa demande d'élagage du pin litigieux, que l'article 20 du règlement du lotissement impose « la conservation de la végétation existante » de sorte que « la coupe des branches du pin parasol entraînerait une mutilation contraire à [cet] objectif contractualisé », la cour d'appel, qui a dénaturé l'article 20 du règlement du lotissement, a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil, ensemble le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ».

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

7. Pour rejeter la demande d'élagage, l'arrêt retient qu'elle entraînerait une mutilation de l'arbre contraire à l'objectif de conservation de la végétation existante, contractualisé à l'article 20 du règlement du lotissement, lequel dispose en son a) que « L'abattage des arbres bien portants est interdit en dehors des aires de construction. Les arbres qui pour une raison quelconque doivent être abattus, seront remplacés en un nombre égal d'arbres appelés au même développement, de même essence ou d'une essence choisie parmi celles qui peuvent être éventuellement imposées. En toute hypothèse, la densité moyenne des plantations ne devra pas être inférieure à deux arbres par lot ».

8. En statuant ainsi, alors que ces stipulations se limitent à interdire l'abattage des arbres bien portants, sans en proscrire l'élagage, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis du règlement du lotissement, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. [V] de sa demande d'arrachage du pin parasol litigieux, l'arrêt rendu le 25 août 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne M. [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [F] et le condamne à payer à M. [V] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 32400540
Date de la décision : 10/10/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nimes, 25 août 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 oct. 2024, pourvoi n°32400540


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:32400540
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