LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 octobre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 965 F-D
Pourvoi n° D 22-17.088
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024
La caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 3], a formé le pourvoi n° D 22-17.088 contre l'arrêt rendu le 25 avril 2022 par la cour d'appel d'Amiens (2e protection sociale), dans le litige l'opposant à Mme [C] [D], domiciliée [Adresse 1], [Localité 4], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Montfort, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale, et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Montfort, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 25 avril 2022), à la suite d'un contrôle de l'application des règles de tarification et de facturation des actes professionnels, la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale (la caisse) a notifié, le 7 novembre 2017, à Mme [D], infirmière (la professionnelle de santé), un indu d'un certain montant.
2. La professionnelle de santé a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches
Enoncé du moyen
3. La caisse fait grief à l'arrêt d'annuler l'indu, alors que :
« 1°/ le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en tranchant le litige au regard des dispositions de la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'assurance maladie, laquelle est dépourvue de toute valeur normative, les juges du fond ont violé l'article 12 du code de procédure civile ;
2°/ sauf exceptions légalement prévues, la doctrine administrative n'est pas créatrice de droits ; qu'à supposer que la cour d'appel ait entendu opposer à la caisse sa propre doctrine, résultant notamment de ce qu'elle s'est elle-même référée à la charte, les juges du fond ont encore violé l'article 12 du code de procédure civile ;
4°/ en cas de contrôle opéré par les services administratifs de la caisse, la procédure obéit aux seules dispositions des articles L. 133-4 et R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale, lesquels ne font peser sur la caisse aucune obligation préalablement à l'envoi de la notification d'indu ; qu'en tenant la procédure pour irrégulière, à raison de prétendus manquements de la caisse, aux obligations qui s'imposeraient à elles préalablement à la notification de l'indu, les juges du fond ont violé les articles L. 133-4 et R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 12 du code de procédure civile, L. 133-4 et R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale :
4. Aux termes du premier de ces textes, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.
5. Selon le deuxième de ces textes, en cas d'inobservation des règles de tarification ou de facturation des actes et prestations, le directeur de l'organisme d'assurance maladie adresse au professionnel ou à l'établissement de santé, une notification de payer l'indu.
6. Selon le troisième de ces textes, cette notification de payer comporte notamment la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement.
7. Pour déclarer irrégulière la procédure de contrôle, l'arrêt constate que la caisse a rendu opposable la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé diffusée par la circulaire n° 10/2012 du directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie du 10 avril 2012 en la mentionnant dans le courrier adressé à la professionnelle de santé le 23 août 2017. Il retient qu'en ne motivant pas le courrier du 24 juillet 2017 l'informant des manquements constatés lors du contrôle, en ne lui notifiant pas les droits de demander à être entendu, de présenter des observations écrites et d'être assistée lors de la procédure par un membre de la profession ou un avocat et, enfin, en ne l'informant pas des droits de consulter le dossier ou de se faire assister lors de l'entretien du 1er août 2017 avec ses services administratifs, la caisse a méconnu l'article 6.1.1 de la Charte.
8. En statuant ainsi, par une application des dispositions d'une circulaire dépourvue de toute portée normative et alors que la procédure de recouvrement des indus afférents au non-respect par les professionnels ou établissements de santé des règles de tarification ou de facturation des actes, prestations et produits, obéit aux seules dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Amiens, autrement composée ;
Condamne Mme [D] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [D] et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre.