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18/12/2024 | FRANCE | N°C2401545

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 décembre 2024, C2401545


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° D 23-82.527 F-B


N° 01545




GM
18 DÉCEMBRE 2024




CASSATION




M. BONNAL président,
















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 18 DÉCEMBRE 2024






L'a

dministration des douanes, partie poursuivante, a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 15 mars 2023, qui dans la procédure suivie contre M. [J] ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° D 23-82.527 F-B

N° 01545

GM
18 DÉCEMBRE 2024

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 18 DÉCEMBRE 2024

L'administration des douanes, partie poursuivante, a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 15 mars 2023, qui dans la procédure suivie contre M. [J] [V], a ordonné la mainlevée d'une mesure de retenue douanière.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la société Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de direction générale des douanes et droits indirects et la direction régionale des douanes et des droits indirects de Montpellier, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [J] [V], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 29 septembre 2022, les agents des douanes ont procédé, à la gare maritime de [Localité 1], au contrôle d'un véhicule embarquant sur un car-ferry à destination du Maroc.

3. Interrogés sur le point de savoir s'ils détenaient des sommes, titres ou valeurs d'un montant égal ou supérieur à 10 000 euros, ses occupants, M. [J] [V] et son épouse, ont répondu qu'ils détenaient chacun 5 000 euros.

4. Le contrôle des bagages du couple a toutefois révélé que M. [V] transportait dans sa sacoche des enveloppes contenant de nombreux billets de banque pour un montant de 69 250 euros, et qu'il en était de même pour son épouse s'agissant d'une somme de 13 550 euros.

5. Les agents des douanes ont procédé à la retenue temporaire de cette somme d'argent de 82 800 euros en application de l'article L. 152-4 du code monétaire et financier.

6. M. [V] a formé un recours contre cette décision devant le président de la chambre de l'instruction, en application de l'article L. 152-5 du code monétaire et financier.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Énoncé du moyen

7. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a déclaré bien fondé le recours de M. [V], qui a ordonné la mainlevée de la mesure de rétention temporaire d'argent liquide et a ordonné la restitution de la somme de 82 800 euros, alors :

« 2°/ qu'en relevant, pour considérer que le recours formé par M. [V] contre la mesure de retenue temporaire d'argent liquide était bien-fondé, qu'il y avait lieu de faire à son recours et d'ordonner la mainlevée de la rétention des sommes saisies au vu des justificatifs qu'il avait produits quand le juge saisi d'un recours contre une décision de retenue temporaire ne peut, pour justifier la mainlevée de cette mesure, se fonder sur des éléments ne résultant pas des énonciations du procès-verbal de constat aux termes duquel la rétention temporaire d'argent liquide a été décidée, la présidente de la chambre de l'instruction de la cour d'appel a derechef violé les prescriptions de l'article 593 du code de procédure pénale et des articles L. 152-4 et L. 152-5 du code monétaire et financier. »

Réponse de la Cour

8. Le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que le président de la chambre de l'instruction, pour faire droit au recours exercé contre la décision de retenue douanière des agents des douanes fondée sur l'article L. 152-4, II, du code monétaire et financier, soit sur le seul motif de la méconnaissance des obligations déclaratives des sommes transportées supérieures à 10 000 euros, et ordonner la mainlevée de cette mesure, se soit fondé sur les justificatifs produits par le demandeur.

9. En effet, il appartient au requérant dans le cadre de la procédure prévue à l'article précité d'établir la licéité de l'origine des sommes transportées pour justifier du bien-fondé de son recours exercé en application de l'article
L. 152-5 du code monétaire et financier.

10. Dès lors, le grief doit être écarté.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Énoncé du moyen

11. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a déclaré bien fondé le recours de M. [V], qui a ordonné la mainlevée de la mesure de rétention temporaire d'argent liquide et a ordonné la restitution de la somme de 82 800 euros, alors :

« 1°/ qu'en se contentant d'affirmer, pour considérer que le recours formé par M. [V] contre la mesure de retenue temporaire d'argent liquide était bien fondé, qu'au vu des justificatifs produits par M. [V], il y avait lieu de faire droit à son recours et d'ordonner la mainlevée de la rétention des sommes saisies sans exposer les raisons de fait et de droit pour lesquelles une telle mainlevée devait être ordonnée et sans expliquer, en particulier, en quoi les pièces produites par M. [V] justifiaient de faire droit à son recours, la présidente de la chambre de l'instruction de la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation des prescriptions de l'article 593 du code de procédure pénale, des articles L. 152-4 et L. 152-5 du code monétaire et financier et de l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 152-4 du code monétaire et financier et 593 du code de procédure pénale :

12. Selon le premier de ces textes, en cas de constatation d'une infraction aux obligations déclaratives énoncées aux articles L. 152-1 à L. 152-1-2 du code monétaire et financier et dans le règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l'argent liquide entrant dans l'Union ou sortant de l'Union par les agents des douanes, ceux-ci peuvent prononcer la retenue temporaire de la totalité de l'argent liquide sur lequel a porté l'infraction ou la tentative d'infraction. Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés à l'auteur de l'infraction.

13. Selon le second, toute décision de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

14. Pour ordonner la mainlevée de la mesure de retenue temporaire d'argent liquide et la restitution de la somme de 82 800 euros, l'ordonnance attaquée énonce qu'au vu des justificatifs produits, il y a lieu de faire droit au recours et d'ordonner la mainlevée de la rétention des sommes saisies.

15. En prononçant par ces seuls motifs, la présidente de la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision.

16. La cassation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance susvisée de la présidente de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 15 mars 2023, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2401545
Date de la décision : 18/12/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Analyses

DOUANES - Transfert de capitaux à destination ou en provenance de l'étranger - Défaut de déclaration - Retenue temporaire d'argent liquide - Recours - Juridiction saisie d'une demande de mainlevée de la mesure de retenue - Elements à considérer

Lorsqu'une mesure de retenue temporaire d'argent liquide a été décidée par les agents des douanes sur le fondement de l'article L. 152-4, II, du code monétaire et financier, soit sur le seul motif de la méconnaissance des obligations déclaratives des sommes transportées supérieures à 10 000 euros, la juridiction saisie d'une demande de mainlevée de cette mesure peut se prononcer au vu de tout document produit par le demandeur de nature à établir la licéité de l'origine des sommes transportées


Références :

Article L. 152-4 II du code monétaire et financier.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Président de la Chambre de l'Instruction de Montpellier, 15 mars 2023

Sur l'obligation de motiver et sur la possibilité pour la Cour de cassation de relever d'office l'absence de motivation : Crim., 28 juin 1972, pourvoi n° 72-91868, Bull. crim. n° 223 p. 582 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 déc. 2024, pourvoi n°C2401545


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:C2401545
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