LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 février 2025
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 114 F-B
Pourvoi n° U 22-19.586
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 FÉVRIER 2025
La société Banque CIC Ouest, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 22-19.586 contre l'arrêt rendu le 18 mai 2022 par la cour d'appel d'Orléans (chambre des urgences), dans le litige l'opposant à Mme [G] [D], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Grandemange, conseiller, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de la société Banque CIC Ouest, de la SCP Duhamel, avocat de Mme [D], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 décembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Grandemange, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 18 mai 2022), Mme [D] a assigné la société Banque CIC Ouest (la banque) devant le juge de l'exécution d'un tribunal judiciaire, en annulation d'un commandement aux fins de saisie-vente signifié le 7 juillet 2020 et en mainlevée de cette mesure.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
2. La banque fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du commandement aux fins de saisie-vente du 7 juillet 2020 et celle du procès-verbal de saisie-vente du 23 septembre 2020, ainsi que d'ordonner en tant que de besoin la mainlevée de la saisie-vente du 23 septembre 2020, alors « que l'article 7 de la loi 27 décembre 1923, relative à la suppléance des huissiers blessés et à la création des clercs assermentés, prévoit qu'en cas de signification par un clerc assermenté, l'acte à signifier est préalablement signé par l'huissier de justice ; que l'omission de la signature préalable de l'huissier de justice sur l'acte à signifier ne constitue qu'un vice de forme et non un vice de fond ; que partant, en considérant que « le non-respect des prescriptions de l'article 7 de la loi du 27 décembre 1923 est sanctionné par une nullité de fond qui n'est pas subordonnée à l'existence d'un grief », pour prononcer la nullité du commandement aux fins de saisie-vente en date du 7 juillet 2020 et celle du procès- verbal de saisie-vente du 23 septembre 2020, la cour d'appel a violé l'article 114 du code de procédure civile, ensemble l'article 7 de la loi du 27 décembre 1923. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 114 du code de procédure civile et 7 de la loi du 23 septembre 1923 relative à la suppléance des huissiers blessés et à la création des clercs assermentés :
3. Aux termes du premier de ces textes, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
4. Selon le second, l'acte à signifier est préalablement signé par l'huissier de justice qui, après la signification, vise les mentions faites par le clerc assermenté, le tout à peine de nullité.
5. Pour prononcer la nullité du commandement aux fins de saisie-vente du 7 juillet 2020, l'arrêt constate que le commandement aux fins de saisie-vente, matérialisé par un feuillet recto-verso, en tête duquel figure la mention « SCP [S] [O], Huissier de justice ('), soussignée », ne comporte aucune signature ni sur la première ni sur la deuxième page de l'acte lui-même, lequel est suivi d'une page intitulée « signification de l'acte », avec indication que cette signification est faite par un clerc assermenté, et au bas de laquelle figure la signature d'[S] [O], huissier de justice. Il relève, ensuite, que la banque ne verse à la procédure aucune pièce de nature à justifier que la signature préalable de l'huissier de justice figure sur l'original du commandement.
6. Enfin, il retient que le non-respect des prescriptions de l'article 7 de la loi du 27 décembre 1923 est sanctionné par une nullité de fond qui n'est pas subordonnée à l'existence d'un grief.
7. En statuant ainsi, alors que l'irrégularité tirée du défaut de signature préalable par l'huissier de justice de l'acte signifié par un clerc assermenté est un vice de forme dont l'inobservation n'est susceptible d'entraîner la nullité que dans les conditions prévues par l'article 114 du code de procédure civile, sur la démonstration d'un grief, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit n'y avoir lieu à annulation de la déclaration d'appel et en ce qu'il déboute Mme [D] de sa demande tendant à voir constater que la déclaration d'appel n'emporte pas d'effet dévolutif, l'arrêt rendu le 18 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges.
Condamne Mme [D] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme [D] à payer à la société Banque CIC Ouest la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille vingt-cinq.