LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 26 février 2025
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 130 F-D
Pourvoi n° C 23-21.070
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 FÉVRIER 2025
Mme [J] [Z], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 23-21.070 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [S] [T], domicilié [Adresse 5], exerçant sous l'enseigne JB Watersports,
2°/ à la société Axa France Iard, dont le siège est [Adresse 2],
3°/ à la société Pacifica, dont le siège est [Adresse 4],
4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Var, dont le siège est [Adresse 3], agissant au nom et pour le compte de la CPAM des Alpes-Maritimes,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bacache-Gibeili, conseiller, les observations de Me Guermonprez, avocat de Mme [Z], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France Iard, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 janvier 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Bacache-Gibeili, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à Mme [Z] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Pacifica.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué ( Aix-en-Provence, 8 juin 2023), le 13 août 2016, Mme [Z] et M. [D] ont, avec deux amis, loué deux jet-skis auprès de la base nautique JB Watersport, assurée auprès de la société Axa France Iard et exploitée par M. [T] et participé à une sortie en mer, encadrée par M. [G] (le moniteur). Au cours de celle-ci, Mme [Z] a été heurtée et blessée par le jet-ski piloté par M. [D] lors d'une accélération.
3. Les 18 et 19 octobre, 23 novembre et 10 décembre 2018, Mme [Z] a assigné en responsabilité et indemnisation M. [T] et son assureur ainsi que la société Pacifica, assureur de M. [D], dont la garantie a été écartée, et mis en cause la caisse primaire d'assurance-maladie du Var.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Mme [Z] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :
« 1°/ que celui qui est tenu d'une obligation d'information et de conseil doit rapporter la preuve de son exécution ; que, pour débouter Mme [Z] de ses demandes dirigées contre M. [T], ès-qualités, l'arrêt retient que ce dernier est débiteur à son égard d'une obligation de sécurité de moyens et que les éléments qu'elle produit au débat "ne peuvent suffire à démontrer que M. [T] aurait engagé sa responsabilité en manquant à son obligation de dispenser l'ensemble des consignes de sécurité nécessaires à la pratique de l'activité" ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353, anciennement 1315, du code civil ;
2°/ que, dans ses conclusions d'intimée portant appel incident, Mme [Z] reprochait au moniteur de jet-ski, préposé de M. [T], de ne pas avoir consacré un temps de formation suffisant au maniement des engins, avant comme après leur départ en excursion, les explications précédant la mise en marche des engins ayant été rudimentaires et aucune formation pratique n'ayant été dispensée aux participants débutants pour les initier au pilotage des jet-skis une fois l'excursion commencée ; qu'en décidant, pour débouter Mme [Z] de ses demandes dirigées contre M. [T], ès-qualités, qu'elle "ne formule pas de grief à l'égard de M. [G] dans l'accompagnement de l'excursion", la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposante, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
3°/ que l'obligation de moyens à laquelle sont tenus les organisateurs et moniteurs d'un stage d'initiation au jet-ski en ce qui concerne la sécurité des participants, et qui doit s'apprécier avec d'autant plus de sévérité qu'il s'agit d'une activité sportive dangereuse, comporte le devoir de dispenser aux participants débutants une initiation pratique au pilotage de ces engins et, plus généralement, de leur délivrer toute recommandation pratique nécessaire à leur conduite en sécurité ; que, pour débouter Mme [Z] de ses demandes dirigées contre M. [T], èsqualités, l'arrêt retient que les participants au stage d'initiation au jet-ski ont reçu du moniteur "un "briefing" pour expliquer les mesures de sécurité, le déroulement de la séance et la zone de navigation", lors duquel "l'importance des distances de sécurité, l'importance de l'adaptation de la vitesse en fonction de la situation dans laquelle on se trouve, de l'engin qui n'est plus dirigeable si on lâche l'accélération, l'interdiction d'avoir des trajectoires qui se coupent (garder des trajectoires parallèles et ne jamais se croiser)" ont été abordées ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si M. [T] ou son préposé, dont les comportements devaient être appréciés eu égard au caractère dangereux de l'activité sportive pratiquée, avait dispensé aux participants débutants une formation pratique au pilotage des jet-skis et pris la précaution de vérifier, avant de les inviter à accélérer, qu'ils maîtrisaient suffisamment ces puissants engins pour les manier sans danger pour eux et les tiers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1231-1, anciennement 1147, du code civil ;
4°/ que l'obligation de moyens à laquelle sont tenus les organisateurs et moniteurs d'un stage d'initiation au jet-ski en ce qui concerne la sécurité des participants, et qui doit s'apprécier avec d'autant plus de sévérité qu'il s'agit d'une activité sportive dangereuse, comporte le devoir non seulement de dispenser aux participants débutants une initiation pratique au pilotage des jet-skis mais aussi, compte tenu de la puissance de ces engins et de leur dangerosité potentielle, de tester l'état psychologique des participants ; que, pour débouter Mme [Z] de ses demandes dirigées contre M. [T], ès-qualités, l'arrêt retient que les participants au stage d'initiation au jet-ski ont reçu du moniteur "un "briefing" pour expliquer les mesures de sécurité, le déroulement de la séance et la zone de navigation", lors duquel il a été rapporté que "le groupe n'étant pas très attentif, j'ai même entendu [R] faire répéter les consignes aux clients et notamment à M. [D] pour être sûr qu'ils avaient compris" ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si M. [T] ou son préposé, dont les comportements devaient être appréciés eu égard au caractère dangereux de l'activité sportive pratiquée, avaient pris la précaution, une fois les pilotes débutants installés sur les jet-skis et avant de les inviter à accélérer, compte tenu de leur comportement dissipé pendant la réunion d'information, de s'enquérir de leur état psychologique, et notamment celui de M. [D], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1231-1, anciennement 1147, du code civil ».
Réponse de la Cour
5. Il résulte de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que l'organisateur d'une activité sportive est tenu, en ce qui concerne la sécurité des participants, à une obligation de moyens.
6. Après avoir retenu, au vu des éléments de fait et de preuve soumis, sans inversion de la charge de la preuve, ni dénaturation des conclusions des parties n'invoquant pas de faute du moniteur au cours de la sortie, que les participants avaient reçu, au cours « d'un briefing » préalable, des explications sur les mesures de sécurité, le déroulement de la séance et la zone de navigation, qu'ils avaient signé une déclaration préalable à l'utilisation en mer d'un véhicule nautique à moteur (VNM) reconnaissant s'engager à respecter ces consignes et attestant de la formation reçue et que le franchissement sans encombre par les deux pilotes des jet-skis du chenal montrait qu'ils avaient intégré les consignes dispensées, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que M. [T] n'avait pas manqué à son obligation de sécurité et rejeter les demandes de Mme [Z].
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [Z] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt-cinq.