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19/03/2025 | FRANCE | N°C2500351

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 mars 2025, C2500351


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° A 23-84.916 F-D


N° 00351




GM
19 MARS 2025




REJET




M. BONNAL président,
















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 19 MARS 2025






La société [1],

partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 633 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 25 juillet 2023, qui, dans la procédure suivie contre personne non dénommée des chefs de faux, usage ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° A 23-84.916 F-D

N° 00351

GM
19 MARS 2025

REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 19 MARS 2025

La société [1], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 633 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 25 juillet 2023, qui, dans la procédure suivie contre personne non dénommée des chefs de faux, usage et tentative d'escroquerie, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société [1], les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [M] [J], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 12 février 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [M] [J], recruté le 4 juin 2007 en qualité de directeur des ressources humaines par la société [1], a été licencié le 3 avril 2018.

3. Le 23 avril 2019, la société [1] a porté plainte à l'encontre de M. [J] pour avoir produit devant la juridiction prud'homale des bulletins de salaire argués de faux et s'est constituée partie civile.

4. Une information a été ouverte des chefs de faux, usage de faux et tentative d'escroquerie au cours de laquelle M. [J] a été placé sous le statut de témoin assisté.

5. Le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre à son encontre par ordonnance du 16 août 2022 dont la société [1] a relevé appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à suivre contre M. [J] des chefs de faux, usage de faux et tentative d'escroquerie dénoncée par la partie civile, alors :

« 1°/ qu'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; pour écarter les éléments fournis par la partie civile, tirés de deux expertises demandées par elle successivement à deux experts judiciaires, la chambre de l'instruction affirme que la seconde expertise portant sur le logiciel de paie de la société [1], si elle conclut que l'employeur n'a aucun moyen direct d'altérer la base de données de l'outil au-delà de ce qui est permis par le logiciel lui-même, serait en contradiction avec la première expertise de Mme [U], qui aurait considéré qu'il n'était pas possible d'attester de l'authenticité des données numériques issues de ce logiciel ; mais l'expertise du 24 juin 2018 réalisée par Mme [U], expert judiciaire près la cour d'appel de Montpellier, mentionnait expressément que la modification frauduleuse des fichiers lui paraissait très peu probable - ce qui validait les fiches de paye émanant de l'employeur - et que la modification du niveau de classification dans les derniers bulletins ne pouvait qu'être le fait d'un accès légitime par un employé disposant d'un accès au logiciel, comme c'était le cas de M. [J] qui disposait des accès nécessaires avant de quitter l'entreprise ; en affirmant que ces affirmations auraient été contradictoires avec celles de la deuxième expertise qui mentionnait que l'employeur n'avait aucun moyen direct d'altérer la base des données de son outil informatique quand les deux experts concluaient ainsi de façon concordante que l'employeur n'avait pas pu frauduleusement modifier ses propres données informatiques, et qu'il en résultait que les éléments produits par lui étaient probants et de nature à jeter le doute sur les éléments contraires produits par le salarié, la chambre de l'instruction a dénaturé le rapport d'expertise de Mme [U] en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

2°/ qu'il appartient à la juridiction pénale, et notamment à la juridiction d'instruction de procéder à tous les actes d'information qu'elle juge utiles à la manifestation de la vérité ; en faisant grief à la partie civile d'avoir mandaté elle-même de façon non contradictoire deux experts différents, sans avoir sollicité une expertise informatique judiciaire, et en reconnaissant ainsi qu'une telle expertise informatique eût été nécessaire à la manifestation de la vérité, demande pourtant formulée de l'aveu même de la chambre de l'instruction par la partie civile en fin d'information, la chambre de l'instruction a méconnu le principe selon lequel le juge doit ordonner les mesures d'instruction dont il reconnaît lui-même la nécessité et violé les articles 81 et 593 du code de procédure pénale ;

3°/ qu'en s'abstenant de répondre par des motifs explicites à la demande de supplément d'information et de mise en oeuvre d'une expertise informatique judiciaire expressément formulée dans le mémoire déposé régulièrement devant la chambre de l'instruction, la chambre de l'instruction n'a pas vidé le litige qui lui était soumis, et a violé les articles 81 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

7. Pour rejeter la demande d'expertise formée par la société [1] et confirmer l'ordonnance de non-lieu, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé que la partie civile a pris l'initiative de saisir successivement deux experts judiciaires aux fins d'analyse des données informatiques de la société [1], notamment les versions numériques des fiches de paie, relève que le premier expert a conclu, d'une part, à l'absence de certitude sur l'authenticité de ces données, d'autre part, que la modification frauduleuse des fichiers du logiciel de paye est improbable, si ce n'est par l'intervention d'un employé disposant d'un accès à ce logiciel.

8. Les juges ajoutent que le second expert, chargé de déterminer et de décrire les possibilités de modifier rétroactivement les fiches de paye, a conclu que le logiciel considéré n'offre aucun moyen direct d'altérer la base de données au-delà de ce qu'il autorise et qu'il ne permet pas à l'utilisateur de modifier les fiches de paye antérieures à la période courante.

9. Ils en déduisent qu'il existe une contradiction entre ces conclusions s'agissant de l'authenticité des données numériques fournies par la société [1].

10. Ils relèvent par ailleurs que la partie civile, qui a fait le choix de mandater elle-même, de façon non contradictoire et pour des missions parcellaires, deux experts différents, sans avoir sollicité une expertise informatique judiciaire, ne démontre pas l'authenticité alléguée des données numériques présentées.

11. Ils considèrent enfin que la demande de supplément d'information aux fins d'expertise, formulée au stade du règlement du dossier, n'est pas utile à la manifestation de la vérité au regard des éléments à décharge précités.

12. En se déterminant ainsi, par des énonciations qui procèdent de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve soumis à son examen et de l'opportunité d'ordonner un supplément d'information, la chambre de l'instruction a, sans insuffisance ni dénaturation, justifié sa décision.

13. Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.

14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que la société [1] devra payer à M. [M] [J] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2500351
Date de la décision : 19/03/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, 25 juillet 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 mar. 2025, pourvoi n°C2500351


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi, SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers

Origine de la décision
Date de l'import : 25/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:C2500351
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