LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 avril 2025
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 334 F-D
Pourvoi n° A 22-24.698
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 AVRIL 2025
La caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 3], dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° A 22-24.698 contre l'arrêt rendu le 28 octobre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant à la société [2], société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lapasset, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 3], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [2], et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 mars 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Lapasset, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 octobre 2022), la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 3] (la caisse) a pris en charge, au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles, par décision du 30 août 2017, l'affection déclarée par l'un des salariés de la société [2] (l'employeur).
2. L'employeur a contesté l'opposabilité de cette décision devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer inopposable à l'employeur la décision litigieuse, alors « que la première constatation médicale de la maladie professionnelle peut se déduire de toute manifestation de nature à révéler l'existence de cette maladie ; qu'elle peut notamment se déduire de l'avis du médecin conseil fondé sur un élément médical sans qu'il soit besoin d'être corroboré ; qu'en jugeant que l'avis du médecin conseil qui se référait à un certificat médical ne pouvait, à lui seul, suffire pour fixer la date de première constatation médicale à une date antérieure à celle qui était mentionnée dans le certificat médical initial, la cour d'appel a violé les articles L. 461-1, L. 461-2 et D. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans leurs versions applicables au litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 461-1, L. 461-2 et D. 461-1-1 du code de la sécurité sociale, et le tableau n° 57 des maladies professionnelles :
4. Il résulte de la combinaison des trois premiers de ces textes que la première constatation médicale de la maladie professionnelle exigée au cours du délai de prise en charge écoulé depuis la fin de l'exposition au risque concerne toute manifestation de nature à révéler l'existence de cette
maladie, que la date de la première constatation médicale est celle à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin avant même que le diagnostic ne soit établi et qu'elle est fixée par le médecin conseil.
5. Pour dire que la caisse n'apporte pas la preuve que la condition du tableau n° 57 des maladies professionnelles relative au délai de prise en charge est remplie, l'arrêt retient que si le colloque médico-administratif fixe la date de première constatation médicale au 28 novembre 2016 en visant un certificat médical, aucun élément ne vient confirmer cette affirmation. Il ajoute qu'en l'absence d'élément autre que la seule mention dans le colloque médico-administratif de ce certificat médical, la caisse n'établit pas l'existence de la pathologie de la victime antérieurement au 2 décembre 2016.
6. En statuant ainsi, alors que le médecin conseil fixait au 28 novembre 2016 la date de la première constatation médicale de l'affection déclarée au vu d'un certificat médical établi par le médecin traitant de la victime, de sorte que le délai de prise en charge de la pathologie déclarée n'était pas dépassé, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement en tant qu'il déclare recevable le recours de la société [2], l'arrêt rendu le 28 octobre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société [2] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [2] et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 3] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille vingt-cinq.