Tribunal administratif Numéro 47124 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47124 2e chambre Inscrit le 3 mars 2022 1 Audience publique du 22 janvier 2024 Recours formé par Madame …, …, contre une décision de l’Equipe Contact Tracing de la direction de la Santé auprès du ministère de la Santé en matière de santé publique
___________________________________________________________________________
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 47124 du rôle et déposée le 3 mars 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Christian Bock, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats du Barreau de Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon l’annulation d’une « décision de l’Equipe Contact Tracing de la Direction de Santé du Ministère de la Santé » du 11 février 2022 par le biais de laquelle elle se serait vu opposer un refus à sa demande de se voir délivrer des « certificats de rétablissement au Covid-
19 et le certificat numérique correspondant (QR code) sans limitation de validité, à l’instar des certificats de vaccination après injection d’une dose de rappel, sinon subsidiairement, de[s] certificats d’une durée équivalente à ceux émis à une personne présentant un schéma vaccinal complet à la date de l’établissements de [ses] certificats de rétablissement […], ainsi que la possibilité de justifier à intervalles réguliers par après de l’existence d’une réponse immunitaire persistante au COVID-19 pour prolonger le cas échéant les certificats de rétablissement correspondants, sinon subsidiairement […] [de se voir] délivrer des certificats de rétablissement et le QR code correspondant, au moins à valeur nationale » ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 16 mai 2022 ;
Vu le mémoire en réplique de Maître Christian Bock, déposé au greffe du tribunal administratif le 14 juin 2022 pour compte de Madame …, préqualifiée ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2022 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment l’acte déféré ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Christian Bock et Monsieur le délégué du gouvernement Luc Reding en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 novembre 2023.
____________________________________________________________________________
Il est constant en cause qu’en date du 20 janvier 2022, après s’être vue délivrer un certificat de rétablissement au Covid-19 dont la durée de validité avait été fixée à 180 jours, 1Madame … s’est adressée par courrier recommandé au ministère de la Santé dans le but de formuler « un recours gracieux de demande de rectification de [ses] certificats de rétablissement du Covid-19 et des certificats COVID numériques de l’UE correspondants pour (i) en aligner la durée minimale sur celle des certificats de vaccination et (ii) prendre en compte l’immunité naturelle acquise tant qu’elle persiste ».
Par courrier électronique du 11 février 2022, l’Equipe Contact Tracing de la direction de la Santé auprès du ministère de la Santé, ci-après désignée par « l’Equipe Contact Tracing », s’adressa à Madame … dans les termes suivants :
« […] J’accuse bonne réception de votre recours gracieux du 20 janvier 2022.
Tel que vous le soulignez à juste titre, l’émission des certificats de rétablissement est régie par le règlement UE 2021/953, ainsi que par les dispositions de l’article 3ter de la loi du 17 juillet 2020 portant introduction d’une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19.
Le règlement UE 2021/953 sur lequel est basé l’article 3ter de la loi du 17 juillet 2020 prévoit une durée de validité de 180 jours à dater du premier test TAAN positif. Cette règle des 180 jours est prévue dans l’annexe du règlement.
Vous estimez que le délai fixé serait en contradiction avec les données scientifiques actuelles et qu’il y aurait lieu de fixer un délai individualisé au cas par cas. La loi ne prévoit pas l’approche individualisée que vous préconisez. L’administration est tenue d’appliquer la loi sans pouvoir y déroger, de sorte que vos développements portent à faux.
Vous contestez encore le fait que des durées de validité différentes ont été retenues pour les différents types de certificats. Cependant, les développements contenus dans votre courrier ne font ressortir aucune discrimination. Il appartient au contraire au législateur de tenir compte de différents facteurs en fixant des délais différents en fonction de la situation dans laquelle une personne se situe. Il peut donc être justifié et proportionnée de prévoir des dispositions différentes pour des personnes se trouvant dans des situations différentes.
Il résulte de ce qui précède que votre recours est infondé et est partant à rejeter. […] ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 3 mars 2022, Madame … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision, ainsi qualifiée, de l’Equipe Contract Tracing, du 11 février 2022.
Aucune disposition légale ne prévoyant de recours en réformation en la présente matière, le tribunal doit se déclarer incompétent pour connaître du recours principal en réformation. Il est, en revanche, compétent pour connaître du recours en annulation introduit à titre subsidiaire.
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours au motif que ni les certificats de rétablissement contre lesquels Madame … a dirigé son recours gracieux, en ce qu’ils se limiteraient à accorder à leurs destinataires un statut légalement prévu pendant une durée légalement fixée à la suite d’une infection avec le Covid-19, ni le courrier électronique du 11 février 2022 de l’Equipe Contact Tracing, en ce qu’il ne constituerait qu’une simple prise de position, ne pourraient être considérés comme un acte administratif ayant un caractère décisionnel et susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux.
Dans son mémoire en réplique, Madame … conteste le fait que le courrier électronique visé par le recours devrait s’analyser en une simple prise de position de la part de l’Etat, voire qu’il ne s’agirait que de l’expression d’une opinion destinée à l’éclairer. Il s’agirait, au contraire, 2d’une décision de nature à lui faire grief puisqu’elle aurait affecté sa situation personnelle. Pour cette raison, elle aurait un intérêt légitime, personnel et direct, effectif, né et actuel de voir annuler l’acte déféré.
A l’audience des plaidoiries, le délégué du gouvernement a encore relevé que même à admettre que l’acte déféré avait un caractère décisionnel, il n’en resterait pas moins qu’il serait à l’heure actuelle beaucoup trop tard pour faire encore valoir un intérêt à agir contre celui-ci, de sorte que le recours sous analyse serait à déclarer irrecevable pour ne plus avoir d’objet.
Pour ce qui est de la question de l’objet du recours sous analyse et plus particulièrement de celle de la satisfaction que Madame … entend à l’heure actuelle encore tirer de sa demande visant à voir annuler l’acte litigieux, - telle que soulevée à l’audience des plaidoiries non seulement par le délégué du gouvernement, mais également par le tribunal -, le litismandataire de Madame …, tout en admettant que les mesures instituées à travers la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, ci-après désignée par « la loi du 17 juillet 2020 », et critiquées à travers le recours sous analyse, avaient entretemps toutes été abrogées, a fait valoir qu’il faudrait prendre en compte la situation légale telle qu’elle s’était présentée au moment où l’Equipe Contact Tracing a envoyé le courrier électronique litigieux du 11 février 2022. Il a, dans ce contexte, insisté sur le fait que, face aux problèmes de discrimination et d’exclusion auxquels aurait été confrontée Madame …, celle-ci aurait eu de bonnes raisons d’introduire le recours sous analyse, démarche qui aurait été rendue d’autant plus difficile en raison du changement constant de la législation.
En guise de conclusion, le litismandataire de Madame … a souligné que comme il ne pourrait pas être exclu qu’une nouvelle « loi anti-pandémie » puisse être adoptée à l’avenir, il serait d’autant plus important d’avoir une décision de justice par rapport aux problèmes mis en lumière dans le cadre du recours sous analyse en rapport avec les dispositions légales entretemps abrogées de la loi du 17 juillet 2020.
Il se dégage des développements à la base du recours sous analyse que Madame … critique, en substance, le fait qu’à travers l’acte entrepris, il a été refusé de faire droit à sa demande relative à la « délivrance d’un certificat de rétablissement au Covid-19 et [du] certificat numérique correspondant (QR code) sans limitation de validité, à l’instar des certificats de vaccination après injection d’une dose de rappel, sinon subsidiairement, de certificats d’une durée équivalente à ceux émis à une personne présentant un schéma vaccinal complet à la date de l’établissement de [ses] certificats de rétablissement, soit 12 mois, ainsi que la possibilité de justifier à intervalles réguliers par après de l’existence d’une réponse immunitaire persistante au COVID-19 pour prolonger le cas échéant les certificats de rétablissement correspondants, et subsidiairement […] de délivrer des certificats de rétablissement et le QR code correspondant, au moins à valeur nationale ». Elle explique, à cet égard, que sa demande tendant à obtenir un certificat dit « CovidCheck » sur base de la sérologie, n’aurait, en substance, visé rien d’autre que de se voir accorder le même statut qu’une personne vaccinée et les mêmes droits qu’une personne vaccinée avec « booster », ainsi que de voir mettre fin à « cette discrimination injustifiée alors qu’elle ne [serait] pas à considérer comme étant en danger, ni comme étant un danger pour autrui, en tout cas pas plus qu’une personne vaccinée et/ou guérie ». Après avoir développé les raisons pour lesquelles elle estime que la loi du 17 juillet 2020 aurait institué une différence de traitement entre personnes qui se seraient trouvées dans une situation objectivement identique ou comparable, laquelle ne serait pas fondée et se heurterait aux principes de liberté et d’égalité sur base desquels notre société démocratique serait construite et qu’en tant que telle, ladite loi romprait de manière incontestable l’égalité de traitement de toutes les personnes vivant au Luxembourg, elle entend voir soumettre à la Cour constitutionnelle, sur le fondement de l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle, les questions préjudicielles de constitutionnalité suivantes :
3 « Est-ce que la différence de traitement effectuée entre personnes vaccinées et personnes rétablies il y a plus de 180 jours ayant une sérologie positive au SARS-COV-2, effectuée dans le cadre de la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, notamment dans les articles 1er point 27°, article 1er bis, article 2, article 3septies, article 4, article 4bis, 4quater et article 7, est-elle conforme au principe d'égalité devant la loi retenu par l'article 10bis de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 en ce qu'elle écarte les personnes présentant une sérologie positive contre le SARS-COV-2 et en ce qu'elle force les personnes voulant participer à la vie sociale à se soumettre à un traitement expérimental en phase d'essai clinique, communément appelé « vaccination au Covid-19 », est-elle conforme à l'article 10bis de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 en ce qu'elle force les personnes voulant participer à la vie sociale à se soumettre à un traitement expérimental en phase d'essai clinique, communément appelé « vaccination au Covid-19», est-elle conforme aux articles 11(1) et 11(3) de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 1er bis de ladite loi, en ce qu'elle limite l'accès à des rassemblements, manifestations ou événements de quelque nature à des personnes deux fois vaccinées avec ou sans test, à des personnes avec une vaccination de rappel, à des personnes en possession d'un certificat de rétablissement, mais non pas à des personnes en possession d'un certificat de sérologie positive au SARS-COV-2 récent, est-elle conforme à l'article 10bis de la Constitution ;
Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 3ter, de ladite loi, en ce qu'elle limite la validité du certificat de rétablissement à cent quatre-vingt jour à compter d'un test TAAN positif, tandis qu'elle ne limite pas la durée de validité des certificats de vaccination, et en provoquant de telle manière une différence de traitement, est-elle conforme à l'article 10bis de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 2, alinéa 1er, de ladite loi, en ce qu'il soumet l'accès à des établissements de restaurant et de débit de boissons au régime Covid check tel que visé à l'article 1er, point 27, soit en refusant l'accès à toute personne ayant des anticorps au SARS-COV-2 mais étant hors mesure de présenter un certificat de rétablissement conforme à l'article 3ter valable, est-celle conforme à l'article 10bis de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 4, point (3), de ladite loi, en ce qu'elle soumet des rassemblements au régime Covid check tel que défini à l'article 1er, ou bien à l'obligation de porter un masque et se voir attribuer des places assises en observant une distance minimale de deux mètres, est-elle, au vu des développements qui précèdent, conforme à l'article 10bis de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 4, point (3), de ladite loi, 4en ce qu'elle interdit tout rassemblement au-délà de deux cent personnes, est-elle conforme à l'article 25 de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 4bis, point (1), alinéa 2, en ce qu'il soumet au régime Covid check tel que visé à l'article 1er, point 27, toute activité sportive ou de culture physique, est-elle conforme à l'article 10bis de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 7, point (1), 1°, en ce qu'il exempte de la mise en quarantaine les personnes vaccinées ou rétablies, mais non pas les personnes présentant un test sérologique positif récent contre le SARS-COV-2, est-elle conforme à l'article 10bis de la Constitution ? Est-ce que la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, et plus particulièrement l'article 7, point (1), 2°, en ce qu'il permet de réduire la mise en isolement des personnes vaccinées et des personnes rétablies à partir du 5e et 6e en cas réalisation de tests antigéniques rapides SARS-COV-2, mais en excluant les personnes présentant une sérologie positive au SARS-COV-2, est-elle conforme à l'article 10bis de la Constitution ? ».
Le tribunal se doit de relever qu’indépendamment de la question du caractère décisionnel de l’acte lui soumis, la recevabilité d’un recours est conditionnée en principe par l’existence et la subsistance d’un objet, qui s’apprécie du moment de l’introduction du recours jusqu’au prononcé du jugement. L’exigence de la subsistance de l’objet du recours est en général liée à l’exigence du maintien de l’intérêt à agir, et plus particulièrement de l’intérêt à voir sanctionner l’acte faisant l’objet du recours, étant précisé que l’existence d’un tel intérêt à agir présuppose que la censure de l’acte querellé soit de nature à procurer au demandeur une satisfaction personnelle et certaine.
Il importe, à cet égard, que l’intérêt, qui doit non seulement être né et actuel, effectif et légitime1, soit non pas impersonnel et général, mais personnel2.
En l’espèce, il est constant en cause, pour avoir, par ailleurs, été confirmé par le litismandataire de Madame … à l’audience publique des plaidoiries, qu’au plus tard depuis l’entrée en vigueur de la loi du 21 juillet 2023 portant modification de la loi du 17 juillet 2020, précitée, les dispositions légales critiquées à travers le recours sous analyse au motif qu’elles auraient introduit des mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 qui seraient contraires « aux principes fondamentaux de droit et ancrés dans la Constitution » et en relation avec lesquelles l’intéressée entend voir poser toute une série de questions préjudicielles à la Cour constitutionnelle, pour ensuite voir annuler l’acte litigieux « pour abus de pouvoir, sinon pour détournement de pouvoir sinon pour excès de pouvoir et de surcroît pour violation de la règle de proportionnalité », ont été abrogées.
De ce point de vue, si certes l’acte querellé a été pris à un moment où les mesures de lutte contre la pandémie du Covid-19, telles que critiquées à travers le recours sous analyse étaient encore en vigueur, Madame … reste toutefois en défaut d’expliquer dans quelle mesure, suite à l’abrogation des dispositions légales ayant institué les mesures qu’elle critique, et plus particulièrement celles en relation avec les conditions d’émission des certificats dits de rétablissement de la Covid-19, respectivement, de manière générale, des certificats dits « CovidCheck » - objet de l’échange entre elle et l’Equipe du Contact Tracing -, l’acte querellé 1 Trib. adm. 11 octobre 1999, n°11243 et 11244, confirmé par Cour adm. 17 février 2000, n° 11608C, Pas. adm.
2022, V° Procédure contentieuse, n° 17 et les autres références y citées.
2 En ce sens « Le contentieux administratif en droit luxembourgeois » par Rusen Ergec mis à jour par Francis Delaporte, Procédure contentieuse, n° 114, Pas. adm. 2022, p. 70.
5continue à l’heure actuelle à affecter négativement sa situation en fait ou en droit, ni a fortiori en quoi sa censure serait de nature à lui procurer à l’heure actuelle une satisfaction personnelle et certaine, étant relevé que l’intérêt doit en premier lieu consister à faire disparaître l’acte critiqué de l’ordonnancement juridique, respectivement à le voir remplacé par un acte conforme aux attentes de l’administré, ce qui est la finalité du recours en annulation, respectivement celle du recours en réformation auprès des juridictions administratives.
Pour ce qui est de l’intention affirmée de Madame … de vouloir maintenir son recours afin surtout d’obtenir une décision de justice venant toiser les problèmes mis en lumière dans le cadre du recours sous analyse en rapport avec les dispositions légales entretemps abrogées de la loi du 17 juillet 2020 et ce, dans le but d’empêcher qu’à l’avenir le législateur puisse être amené à adopter une nouvelle « loi anti-pandémie » tout aussi inconstitutionnelle, outre le fait que, ce faisant, l’intéressée ne tente ni plus ni moins que de s’ériger en défenseur de l’intérêt général et qu’une telle action est irrecevable, les juridictions administratives étant conçues et organisées pour résoudre les litiges individuels et non pour juger et sanctionner des agissements politiques visant la population entière3, il y a encore et surtout lieu de rappeler que ces mêmes juridictions n’ont pas été instituées pour procurer aux plaideurs des satisfactions purement platoniques ou leur fournir des consultations, de sorte que le seul intérêt d’un administré à voir trancher son argumentation au fond dans l’optique de disposer d’une décision de principe, tel que c’est le cas en l’espèce, n’est pas un intérêt suffisant4.
Au vu des considérations qui précèdent et du fait que, tel que relevé ci-avant, l’exigence de la subsistance de l’objet du recours est liée à celle du maintien d’un intérêt à voir sanctionner l’acte qu’il vise, lequel fait, en l’espèce, défaut, Madame … ne cherchant à l’heure actuelle plus qu’à voir trancher son argumentation au fond dans l’optique d’obtenir une satisfaction purement platonique, le recours est à rejeter pour être dépourvu d’objet.
Eu égard à l’issue du litige, la demande de Madame … tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 10.000.- euros sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives est à rejeter.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
rejette le recours subsidiaire en annulation pour défaut d’objet ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par Madame … ;
met les frais et dépens à charge de Madame ….
Ainsi jugé par :
Alexandra Castegnaro, vice-président, 3 Trib. adm., 11 janvier 2012, n° 27576 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n°185 et les autres références y citées.
4 Trib. adm., 14 janvier 2009, n° 22029 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n°63 (premier volet) et les autres références y citées, et trib. adm., 13 février 2017, n° 37050 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 63 (deuxième volet).
6Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, et lu à l’audience publique du 22 janvier 2024 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.
s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 23 janvier 2024 Le greffier du tribunal administratif 7