Tribunal administratif N° 46514 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:46514 2e chambre Inscrit le 30 septembre 2021 Audience publique du 1er février 2024 Recours formé par Madame … et consort, …, contre une décision du conseil communal de la commune de Leudelange et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 46514 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2021 par Maître Nicolas Bannasch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … et de Monsieur …, demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation - de la « délibération du conseil communal de la commune de Leudelange du 17 novembre 2020 […] portant adoption du projet de la refonte du plan d’aménagement général (PAG) de la commune de Leudelange » ; et - de la « décision d’approbation de la délibération […] du conseil communal de Leudelange, prise par le Ministre de l’Intérieur datée du 18 juin 2021 […] » ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre Biel, demeurant à Luxembourg, du 13 octobre 2021, portant signification de ce recours à l’administration communale de Leudelange, ayant sa maison communale à L-3361 Leudelange, 5, Place des Martyrs, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 8 octobre 2021 par Maître Albert Rodesch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 22 novembre 2021 par Maître Anne-Laure Jabin, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Leudelange, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 30 décembre 2021 par Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 13 janvier 2022 par Maître Anne-Laure Jabin, au nom de l’administration communale de Leudelange, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 janvier 2022 par Maître Nicolas Bannasch, au nom des parties demanderesses, préqualifiées ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 février 2022 par Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 février 2022 par Maître Anne-Laure Jabin, au nom de l’administration communale de Leudelange, préqualifiée ;
Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions déférées ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Nicolas Bannasch, Maître Anne-Laure Jabin et Maître Stéphane Sunnen, en remplacement de Maître Albert Rodesch, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 27 novembre 2023.
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Lors de sa séance publique du 10 septembre 2019, le conseil communal de la commune Leudelange, ci-après désigné par le « conseil communal », émit un vote favorable, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », tant sur la « partie Nord » que sur la « partie Sud » du projet d’aménagement général de la commune de Leudelange et chargea le collège des bourgmestre et échevins, ci-après désigné par « le collège échevinal », de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.
Le même jour, le collège échevinal constata, en application de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, la conformité du projet d’aménagement particulier « quartiers existants » avec le projet d’aménagement général et décida d’entamer la procédure d’adoption dudit projet d’aménagement particulier.
Par courrier du 21 octobre 2019, l’architecte-urbaniste Marc Oswald, déclarant agir au nom et pour compte de Madame … et de Monsieur …, ci-après désignés par « les consorts … », en leur qualité de propriétaires des parcelles inscrites au cadastre de la commune de Leudelange, section … de Leudelange, sous les numéros … et …, sises au lieu-dit « rue … », adressa au collège échevinal un « courrier de réclamation concernant le projet du nouveau PAG de la Commune de Leudelange », dans lequel il déclara, qu’après avoir constaté que le « reclassement du terrain en question, du secteur de faible densité en zone HAB-1 » entraînerait « une diminution de la profondeur de construction de 20 mètres à 15 mètres », les consorts … s’opposeraient formellement « aux réglementations du nouveau projet de PAG QE HAB-1-L ».
La commission d’aménagement émit son avis quant au projet d’aménagement général dans sa séance du 11 décembre 2019, tandis que le ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable émit son avis sur le projet d’aménagement général en application de l’article 5 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par « la loi du 18 juillet 2018 », ainsi que son avis sur le rapport sur les incidences environnementales et sur le projet d’aménagement général en application des dispositions de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, ci-après désignée par « la loi du 22 mai 2008 », en date du 29 janvier 2020.
Lors de sa séance publique du 17 novembre 2020, le conseil communal décida d’adopter ledit projet d’aménagement général, parties écrite et graphique de la « partie Nord » et de la « partie Sud », tout en adoptant « les modifications proposées par le Collège des bourgmestre et échevins au projet du plan d’aménagement général de la commune de Leudelange, parties écrite et graphique […], suite aux objections des réclamants et aux réunions d’aplanissement des différends, ainsi qu’aux avis étatiques et découlant du redressement d’erreurs matérielles mineures ».
Le même jour, le conseil communal décida d’adopter le projet d’aménagement particulier « quartiers existants », tout en adoptant « les modifications proposées par le Collège des bourgmestre et échevins au projet du plan d’aménagement particulier « quartiers existants », suite aux objections des réclamants et aux réunions d’aplanissement des différends, ainsi qu’aux avis étatiques et découlant du redressement d’erreurs matérielles mineures ».
Par courrier recommandé avec avis de réception du 24 novembre 2020, le collège échevinal informa les consorts … de l’adoption du projet d’aménagement général, tout en attirant leur attention sur le fait que, conformément à l’article 16 de la loi du 19 juillet 2004, les réclamations à l’encontre du projet d’aménagement général étaient à adresser au ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », dans un délai de 15 jours à compter de la notification dudit courrier, sous peine de forclusion.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 7 décembre 2020, les consorts … introduisirent par l’intermédiaire de leur litismandataire auprès du ministre une réclamation « conformément aux prescriptions de l’article 16 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ».
Lors de sa séance du 19 mai 2021, la commission d’aménagement délivra son avis sur les réclamations introduites devant le ministre tout en proposant de déclarer la réclamation des consorts … irrecevable.
Par décision du 18 juin 2021, le ministre approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 17 novembre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, dont notamment la réclamation introduite par les consorts …, qu’il déclara irrecevable. Les passages de la décision ministérielle, précitée, se rapportant à cette réclamation sont libellés comme suit :
« […] Ad réclamation … (rec 1) Les réclamants demandent à ce que le « plan d’aménagement particulier ”quartier existant” [PAP QE] couvrant les parcelles cadastrales n°… et …, sises à Leudelange, classées en « zone d’habitation 1 [HAB-1] », soit modifié afin d’élever la profondeur des constructions de 15 mètres à 20 mètres.
Or, la réclamation sur les prescriptions du « plan d’aménagement particulier ”quartier existant” [PAP QE] est irrecevable, alors que la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ne prévoit aucune faculté de réclamation devant le ministre en cette matière. […] ».
Par décision du même jour, le ministre approuva la délibération du conseil communal du 17 novembre 2020 portant adoption du projet d’aménagement particulier « quartiers existants ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2021, les consorts … ont fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la « la délibération du conseil communal de la commune de Leudelange du 17 novembre 2020 […] portant adoption du projet de la refonte du plan d’aménagement général (PAG) de la commune de Leudelange » et de la « décision d’approbation de la délibération […] du conseil communal de Leudelange, prise par le Ministre de l’Intérieur datée du 18 juin 2021 […] ».
I. Quant à la compétence du tribunal Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1, étant précisé qu’en ce qui concerne la procédure d’adoption du plan d’aménagement général (« PAG »), le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision ministérielle du 18 juin 2021 ayant statué sur la réclamation introduite par les consorts …, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.
Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par la « loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.
Le tribunal est partant incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal. Il est, en revanche, compétent pour statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire.
II. Quant à la loi applicable La procédure d’adoption d’un PAG est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0, dont l’entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2021, par l’article 16 de la loi en question et (viii) par la loi du 7 août 2023 relative au logement abordable.
1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires, n° 55 et les autres références y citées.Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des décisions déférées et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elles ont été prises, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois précitées des 30 juillet 2021 et 7 août 2023, entrées en vigueur postérieurement à la décision du conseil communal du 17 novembre 2020, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, telles que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.
Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018 et 18 juillet 2018.
III. Quant à la recevabilité Arguments de parties L’administration communale, rejointe sur ce point par l’Etat, conclut à l’irrecevabilité omisso medio du recours, en ce qu’il vise les décisions du conseil communal et du ministre des 17 novembre 2020 et 18 juin 2021 portant adoption, respectivement approbation du projet d’aménagement général de la commune de Leudelange, au motif que les consorts … n’auraient en réalité jamais réclamé contre le projet d’aménagement général, mais davantage contre une des prescriptions contenues dans le plan d’aménagement « quartiers existants » de la commune de Leudelange, ci-après désigné par le « PAP QE ». En effet, à la lecture de leur « réclamation contre la mise sur orbite auprès du conseil communal », il apparaîtrait qu’ils n’auraient eu aucun grief à faire valoir contre le projet d’aménagement général. A cela s’ajouterait qu’il ne ferait aucun doute que dans le cadre de leur réclamation devant le ministre, ils n’auraient visé que les dispositions du PAP QE qu’ils auraient demandé à voir modifier. Ce serait pour cette raison que cette réclamation aurait été déclarée irrecevable par ledit ministre. Il devrait être conclu de ce qui précède, que les consorts … n’auraient pas respecté la procédure précontentieuse par rapport à l’adoption du projet d’aménagement général et qu’en conséquence, « leur réclamation » serait à déclarer irrecevable.
Dans leur mémoire en réplique, les consorts … réfutent le moyen d’irrecevabilité leur opposé en relevant que suivant une jurisprudence constante, il serait interdit de se contredire au détriment d’autrui, ce qui serait toutefois le cas de la commune en l’espèce. Ils font, à cet égard, valoir que la commune serait particulièrement malvenue d’invoquer un tel moyen d’irrecevabilité alors même qu’elle aurait elle-même « admis et reconnu l’effectivité d’une réclamation contre le PAG » présentée par eux et ce conformément au prescrit de l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004. Ils s’appuient, à cet égard, d’une part, sur un courrier du 24 novembre 2020 dont il découlerait que l’actuel litismandataire de la commune serait en aveu d’avoir considéré que par le biais de leur courrier du 21 octobre 2019, ils auraient dûment présenté leurs observations et objections contre le projet d’aménagement général et, d’autre part, sur l’extrait du registre aux délibérations du collège échevinal du 21 janvier 2020 dans lequel il serait fait référence à l’observation présentée par leur architecte « contre le projet d’aménagement général de la commune de Leudelange ».
A cela s’ajouterait qu’ils auraient bien, tant dans le cadre de leurs observations et objections du 21 octobre 2019, soumises sur le fondement de l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004, que dans le cadre de leur réclamation du 7 décembre 2020, introduite sur le fondement de l’article 16 de la même loi, contesté le projet d’aménagement général de la commune de Leudelange en demandant sans équivoque que leurs parcelles ne soient pas classées « en zone d’habitation 1 de sorte à pouvoir réaliser l’annexe envisagée lorsque lesdites parcelles étaient classées en zone de faible densité ».
Dans son mémoire en duplique, la commune maintient son moyen d’irrecevabilité en insistant sur le fait qu’il serait manifeste que les consorts … n’auraient contesté le classement de leurs parcelles ni devant le collège échevinal, ni devant le ministre. Cet état de fait se dégagerait incontestablement du contenu de la « réclamation en elle-même ». La commune réfute ensuite qu’il puisse valablement lui être reproché d’avoir été en aveu de considérer que leur courrier du 21 octobre 2019 s’était inscrit dans le cadre des observations et objections prévues à l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004. En renvoyant au contenu dudit article, la commune explique que du seul fait qu’elle aurait reçu un courrier de l’architecte des consorts … « prétendument dirigé contre le projet de PAG et ce endéans le délai de 30 jours » prévu à l’article 13, prévisé, un aplanissement des différends aurait dû avoir lieu, aplanissement au cours duquel leur architecte n’aurait formulé que des objections visant les prescriptions découlant du projet de PAP QE afin d’obtenir des modifications au niveau de celui-ci, mais non pas l’affectation de leurs parcelles en zone d’habitation 1 [HAB-1], ci-après désignée par « la zone [HAB-1] ». Les objections en question auraient dès lors été dépourvues d’objet par rapport au projet d’aménagement général, ce qui aurait d’ailleurs été confirmé par le ministre qui, tout en s’étant tenu au contenu de la réclamation, l’aurait déclarée irrecevable.
La commune souligne, par ailleurs, que la loi du 19 juillet 2004 ne prévoirait pas de possibilité pour le conseil communal de déclarer une réclamation sans objet, ce qui expliquerait également que les consorts … avaient été informés par la commune du résultat du vote du PAG.
Dans son mémoire en duplique, la partie étatique rejoint, en substance, les développements de la commune en insistant sur le fait que même si la formule employée dans le courrier du 21 octobre 2019 était « quelque peu ambiguë », il serait évident que l’objection y formulée viserait le PAP QE, en ce que la demande aurait porté sur une modification de la profondeur de construction qui serait réglementée dans le PAP QE et non pas au niveau du PAG. Elle ajoute que les consorts … auraient réitéré cette demande dans le cadre de la réclamation introduite auprès du ministre en invoquant à nouveau l’article 2.6 de la partie écrite du PAP QE.
Elle en conclut que comme les consorts … auraient accompli la procédure précontentieuse en matière de PAP QE, sans aucunement viser une quelconque disposition du PAG, ils n’auraient pu se pourvoir valablement en justice qu’à l’encontre du seul PAP QE.
A titre subsidiaire, et à supposer que les requérants puissent être considérés comme ayant valablement accompli « la procédure précontentieuse en matière de PAG », la partie étatique est d’avis que le recours sous analyse resterait néanmoins irrecevable faute d’intérêt à agir dans leur chef et ce, au motif que « la disposition critiquée sur les profondeurs de construction figure[rait] dans le PAP QE » et non dans le PAG.
Analyse du tribunal 6 Le tribunal relève qu’à travers les articles 10 et suivants de la loi du 19 juillet 2004, le législateur a mis en place une procédure d’adoption des PAG qui se déroule en plusieurs étapes, comprenant notamment une enquête publique.
Ainsi, l’article 12 de ladite loi dispose qu’après le vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la même loi, le projet d’aménagement général fait l’objet d’une publication, comprenant, notamment, le dépôt du projet pendant trente jours à la maison communale où le public peut en prendre connaissance, ainsi que des mesures de publicité de ce dépôt. L’article 13 de la même loi prévoit que dans le délai de trente jours de la publication du dépôt du projet dans les quatre quotidiens imprimés et publiés au Grand-Duché de Luxembourg, les observations et objections contre le projet doivent être présentées par écrit au collège échevinal, sous peine de forclusion. Cette disposition légale prévoit encore qu’au cas où une ou plusieurs réclamations écrites ont été présentées dans le délai, le collège échevinal convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l’aplanissement des différends, présenter leurs observations.
Aux termes de l’article 14, alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004, le projet d’aménagement général est ensuite soumis au conseil communal qui peut approuver le projet dans sa forme originale ou y apporter des modifications qui soit sont proposées par la commission d’aménagement, soit répondent en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions, soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées. En vertu du 3e alinéa du même article, le conseil communal est tenu de renvoyer le dossier au collège échevinal lorsqu’il entend apporter des modifications autres que celles visées à l’alinéa 1er. Enfin, il peut rejeter le projet d’aménagement général présenté et dans cette hypothèse, le dossier est clôturé. Aux termes de l’article 15 de la loi du 19 juillet 2004, la décision du conseil communal fait l’objet d’une publication, par voie d’affichage et par notification aux personnes ayant introduit une réclamation écrite. Cette publication est suivie d’une procédure de réclamation devant le ministre, organisée par l’article 16 de la même loi, libellé comme suit : « Les réclamations contre le vote du conseil communal introduites par les personnes ayant réclamé contre le projet d’aménagement général conformément à l’article 13 doivent être adressées au ministre dans les quinze jours suivant la notification prévue à l’article qui précède, sous peine de forclusion.
Les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil communal doivent être adressées au ministre dans les quinze jours de l’affichage prévu à l’article qui précède, sous peine de forclusion.
Sont recevables les réclamations des personnes ayant introduit leurs observations et objections conformément à l’article 13 et les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil communal lors du vote. ». Aux termes de l’article 18 de ladite loi du 19 juillet 2004, le ministre est, par la suite, amené à statuer sur les réclamations lui soumises, en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général.
Aux termes d’une jurisprudence des juridictions administratives devenue constante, le recours introduit devant le juge administratif contre un PAG n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation ainsi mise en place par les articles 13 et suivants de la loi du 19 juillet 2004, impliquant en particulier que l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au ministre à l’encontre du vote du conseilcommunal portant adoption du projet d’aménagement général2, entraîne l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif.
En ce qui concerne le contenu des observations et objections à adresser au collège échevinal, respectivement au ministre, il convient d’abord de constater que la loi du 19 juillet 2004 a prévu à travers ses articles 13 et suivants, une procédure non contentieuse d’adoption et d’approbation des PAG, tendant à voir disparaître au cours de l’élaboration du PAG, les objections et réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées. Le fait que l’intention du législateur est de faire disparaître, au fur et à mesure des procédures d’aplanissement des différends, les différentes demandes et réclamations des administrés implique que seules les réclamations d’ores et déjà formulées au cours de la procédure précontentieuse sont susceptibles d’être portées devant le juge administratif, étant précisé à cet égard que la motivation à l’appui de ces réclamations peut être complétée et développée durant la phase contentieuse pour autant que la réclamation en elle-même ait d’ores et déjà été présentée en phase précontentieuse.
La procédure d’adoption d’un PAG a été mise en place en vue d’aplanir les différends dans une phase non contentieuse, cette procédure permettant, en effet, aux personnes intéressées de faire valoir leurs points de vue, leurs argumentaires et ce, en dehors de tout procès. S’agissant d’une phase précontentieuse, les différents acteurs s’efforcent de trouver une solution aux réclamations introduites en ayant pour objectif d’éviter un allongement des procédures, allongement qui serait inévitable si chaque réclamation devait faire l’objet d’une procédure contentieuse.
En l’espèce, le tribunal constate que c’est à tort que les parties défenderesses soutiennent que les consorts … n’auraient pas formulé d’objections, respectivement de réclamation à l’encontre du projet d’aménagement général. En effet, pour ce qui est du courrier que l’architecte des parties requérantes a adressé en leur nom et pour leur compte au collège échevinal le 21 octobre 2019, il y a lieu de relever que celui-ci indique non seulement clairement comme objet : « Plan d’aménagement général de la commune de Leudelange », mais il y est également expliqué (i) qu’il s’agit d’un « courrier de réclamation concernant le projet du nouveau PAG de la Commune de Leudelange » et (ii) que les raisons pour lesquelles les consorts … s’opposent au « projet du nouveau PAG » résideraient dans le fait qu’ils auraient « constaté un reclassement du terrain en question, du secteur de faible densité en zone HAB-
1 », ce qui entraînerait « une diminution de la profondeur de construction de 20 mètres à 15 mètres ». Il doit dès lors être admis qu’à travers ledit courrier, les consorts … ont entendu s’opposer au classement de leurs parcelles tel que décidé dans le cadre de la refonte du PAG, en critiquant plus particulièrement le fait qu’en raison de ce classement, ces mêmes parcelles se trouveraient soumises aux prescriptions du nouveau projet d’aménagement particulier « quartiers existants » et plus particulièrement à celles figurant dans la deuxième partie intitulée « Prescriptions concernant les quartiers existants situés dans les zones d’habitation 1 [HAB-
1 » sous l’article 2.6., intitulé « Profondeur de construction », ce qui réduirait, sur leurs parcelles, la profondeur de construction admissible.
Pour ce qui est du courrier du 7 décembre 2020 que les consorts … ont fait adresser au ministre par le biais de leur litismandataire à la suite de l’adoption, par le conseil communal, du projet d’aménagement général, il s’en dégage que les intéressés, après avoir critiqué le choix 2 En ce sens : Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Urbanisme, n° 345 et les autres références y citées.communal « de classer les parcelles […] en zone d’habitation 1 spéciale [HAB-1-L] et de les soumettre ainsi aux prescriptions de l’article 2.6 du PAP QE », pour ne pas s’inscrire « dans des considérations d’ordre urbanistique et politique pertinentes répondant à une finalité d’intérêt général », tout en ayant relevé, entre autres, que « d’autres immeubles de la commune, situés à proximité de ceux [leur] appartenant, n’[auraient] pas fait l’objet du reclassement contesté » et en ayant invoqué le principe constitutionnel d’égalité devant la loi, ont, en conclusion, prié le ministre de « ne pas approuver le Projet d’Aménagement Général de Commune de Leudelange et d’imposer les adaptations nécessaires afin que [leurs] parcelles ne soient pas classifiées en zone d’habitation 1 spéciale Leudelange [HAB-1-L] ». Il doit dès lors être admis qu’à travers ledit courrier, les consorts … ont entendu réclamer contre le classement de leurs parcelles tel qu’opéré suite à l’adoption du projet d’aménagement général par le conseil communal et ce, indépendamment de la question du bien-fondé de la motivation avancée à la base de leur réclamation. Le simple fait que la réclamation fasse erronément état d’un classement des parcelles litigieuses en « zone d’habitation 1 spéciale Leudelange [HAB-
1-L] » et non pas en zone [HAB-1], n’est pas de nature à ébranler la conclusion qui précède.
Au vu des considérations qui précèdent, les développements relatifs à l’irrecevabilité omisso medio du recours sont à rejeter pour ne pas être fondés.
En ce qui concerne l’intérêt à agir des consorts …, il y a lieu de rappeler, tel que retenu ci-avant, qu’il ressort d’une jurisprudence constante des juridictions administratives3, que le recours introduit devant le juge administratif contre un projet d’aménagement général communal n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation, impliquant que notamment l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au gouvernement à l’encontre de la délibération portant adoption d’un projet entraîne l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif. En contrepartie, peu importe que cette réclamation ait été déclarée irrecevable ou non fondée par le ministre, le réclamant en question dispose d’un intérêt à voir vérifier la légalité de la décision ministérielle prise à son encontre et, plus loin, de la délibération communale ainsi approuvée, de sorte que son recours en annulation est recevable sous l’aspect de l’intérêt à agir au-delà de toutes autres considérations.
En l’espèce, il est constant que le ministre a approuvé, par sa décision déférée du 18 juin 2021, la délibération du conseil communal du 17 novembre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général, tout en déclarant la réclamation afférente des consorts … irrecevable.
Eu égard aux considérations qui précèdent, et dans la mesure où le tribunal vient de retenir ci-avant que les objections et réclamation en cours de phase précontentieuse ont été valablement introduites par les consorts …, ces derniers disposent partant en l’espèce d’un intérêt à agir suffisant par le seul fait que leur réclamation adressée au ministre a été déclarée irrecevable par celui-ci.
Le moyen d’irrecevabilité sous analyse encourt, dès lors, également le rejet.
En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité et au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le tribunal est amené à conclure que le recours subsidiaire en annulation sous analyse est recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délais de la loi.
3 Idem.
9 IV. Quant au fond 1. Quant à la légalité externe des décisions déférées Arguments des parties Les demandeurs sollicitent tout d’abord l’annulation des décisions déférées au motif qu’elles seraient entachées d’un vice de forme.
Ils relèvent, à cet égard, qu’aux termes de sa décision du 18 juin 2021, le ministre aurait pris en considération l’avis de la commission d’aménagement du 10 juin 2021, de même que celui du conseil communal du 23 février 2021 sur les réclamations contre les modifications apportées au projet d’aménagement général lors du vote du conseil communal, tels qu’émis conformément à l’article 17 de la loi du 19 juillet 2004, sans toutefois que lesdits avis ne leur aient été communiqués. Cet état de fait les aurait mis dans l’impossibilité de vérifier la régularité formelle des « avis discutés », respectivement d’appréhender la teneur de ceux-ci, ce qui aurait porté atteinte à leurs droits de la défense.
Pour le surplus, les demandeurs se rapportent à prudence de justice quant aux autres causes d’illégalité externe pouvant affecter les décisions déférées.
Dans son mémoire en réponse, la partie étatique réfute ce moyen en donnant à considérer que les demandeurs resteraient en défaut de citer une quelconque disposition légale obligeant l’administration à produire les avis en question de sa propre initiative. A cela s’ajouterait (i) qu’ils n’auraient eux-mêmes jamais demandé la communication des avis en question, (ii) que les avis en question auraient, par ailleurs, été versés dans le cadre de la présente procédure contentieuse et que (iii) le ministre n’aurait procédé à aucun renvoi à ces avis dans le cadre de sa décision.
La commune relève dans son mémoire en réponse que la loi du 19 juillet 2004 serait une loi de procédure qui ne prévoirait nulle part que l’avis de la commission d’aménagement, voire le rapport du conseil communal, visés dans son article 17, devraient être rendus publics d’une quelconque manière. Elle rejoint encore la partie étatique dans son constat que les demandeurs eux-mêmes n’auraient jamais formulé la moindre demande en ce sens. Enfin, elle insiste sur le fait qu’il serait de jurisprudence constante que les règles de la procédure administrative non contentieuse ne seraient pas applicables aux actes à caractère réglementaire, tel qu’un PAG.
La commune réfute ensuite toute atteinte aux droits de la défense des demandeurs en mettant en avant que rien ne les aurait empêchés de demander la communication de l’avis de la commission d’aménagement, respectivement du rapport du conseil communal.
Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs réitèrent les mêmes critiques que celles développées dans la requête introductive d’instance, tout en ajoutant qu’après s’être finalement vu communiquer lesdits avis par la partie étatique en date du 29 décembre 2021, ils auraient pu se rendre compte, à la lecture de l’avis émis par la commission d’aménagement le 10 juin 2021, que lors de sa séance du 19 mai 2021 au cours de laquelle elle a statué conformément à l’article 17 de la loi du 19 juillet 2004, ladite commission n’aurait été composée que de trois membres. Or, suivant les articles 1er et 2 de l’arrêté ministériel du 21 septembre 2020 portantnomination du président, du vice-président et du vice-président suppléant et des membres de la commission d’aménagement et de la cellule d’évaluation, en vigueur jusqu’au 22 novembre 2021, ci-après désigné par « l’arrêté ministériel du 21 septembre 2020 », ladite commission aurait dû être composée d’un président, d’un vice-président, d’un vice-président suppléant et de six autres membres. Ils ajoutent que suivant l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant l’organisation et le fonctionnement de la commission d’aménagement ainsi que l’organisation et le fonctionnement de la cellule d’évaluation, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 », ladite commission ne pourrait rendre son avis que si la majorité de ses membres était présente. Comme seuls trois membres auraient été présents lors de la séance du 19 mai 2021, la commission d’aménagement n’aurait pas pu rendre valablement un avis. De ce point de vue, les décisions déférées seraient également à annuler.
Dans son mémoire en duplique, la partie étatique, après avoir relevé que l’avis de la commission d’aménagement du 10 juin 2021 aurait porté sur le PAG et non pas sur le PAP QE contre lequel, de son avis, les demandeurs auraient seul dirigé leur réclamation, fait valoir que même à supposer que la procédure d’adoption du PAG puisse être considérée comme étant entachée d’une erreur, cet état de fait resterait sans conséquence puisque les doléances des demandeurs ne porteraient que sur les prescriptions du PAP QE. Elle réitère ensuite que comme aucun texte de loi n’imposerait la communication de l’avis de la commission d’aménagement au public ni a fortiori ne sanctionnerait une absence de communication, aucune violation des formes ne saurait être retenue. A cela s’ajouterait qu’il serait de jurisprudence constante que l’annulation d’un acte ne saurait constituer une fin en soi mais ne devrait intervenir que lorsque le contenu de la nouvelle décision à intervenir à la suite de l’annulation serait susceptible de différer de la décision annulée. Or, en l’espèce, rien ne permettrait de supposer que la décision à intervenir à la suite d’une annulation des décisions déférées différerait de celles-ci.
Dans son mémoire en duplique et en ce qui concerne le reproche lié à la composition de la commission d’aménagement lors de la rédaction de son avis prévu à l’article 17 de la loi du 19 juillet 2004, la commune insiste tout d’abord sur le fait que les demandeurs n’auraient subi aucun grief en relation avec le nombre exact de personnes ayant assisté à la séance de la commission d’aménagement du 19 mai 2021. Ce constat s’imposerait d’autant plus que l’avis de ladite commission, tel qu’adressé au ministre, serait simplement consultatif. Le moyen afférent serait dès lors à rejeter.
A titre subsidiaire, la commune se prévaut de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, précité, lequel prévoirait qu’en cas de deuxième convocation avec le même ordre du jour, la commission d’aménagement peut délibérer quel que soit le nombre des membres présents. Or, en l’espèce, l’avis de la commission d’aménagement en cause aurait été rendu dans le cadre d’une deuxième convocation, de sorte que le moyen adverse serait également à rejeter de ce point de vue.
Analyse du tribunal En ce qui concerne la première branche du moyen sous analyse, le tribunal relève qu’il n’est pas contesté que les avis de la commission d’aménagement et du conseil communal tels qu’émis en application de l’article 17 de la loi du 19 juillet 2004 ont été transmis au ministre, mais qu’il est reproché à l’autorité ministérielle de ne pas avoir communiqué lesdits avis aux demandeurs alors même que la décision ministérielle du 18 juin 2021 y ferait référence.
A ce sujet, il convient tout d’abord de souligner que les règles de la procédure administrative non contentieuse, telles que contenues dans le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », et a fortiori les dispositions de l’article 4 dudit règlement traitant des avis des organismes consultatifs pris préalablement à une décision administrative individuelle ne trouvent pas à s’appliquer aux actes à caractère réglementaire, les règles établies par ledit règlement grand-ducal ne concernant que les décisions administratives individuelles pour lesquelles un texte particulier n’organise pas de procédure spéciale présentant au moins des garanties équivalentes pour l’administré4.
Ensuite, le tribunal rejoint la commune et la partie étatique dans leur constat que les demandeurs restent en défaut d’indiquer la moindre disposition légale ou réglementaire qui imposerait à l’autorité ministérielle de rendre d’une quelconque manière publics les avis simplement consultatifs visés à l’article 17 de la loi du 19 juillet 2004, étant encore relevé qu’outre le fait que l’autorité ministérielle n’a pas renvoyé expressément à la motivation contenue dans lesdits avis ni n’a fait sienne ladite motivation, les consorts … ne contestent pas non plus n’avoir jamais adressé à l’autorité ministérielle une demande en vue de se voir communiquer lesdits avis.
Enfin, et dans la mesure où les avis en question ont été communiqués aux demandeurs au cours de la phase contentieuse et qu’ils ont été en mesure de prendre position y relativement dans le cadre de leur mémoire en réplique - ce qu’ils ont, par ailleurs, fait - il n’apparaît de toute façon pas que leurs droits de la défense aient pu se trouver lésés d’une quelconque manière en l’espèce.
Au vu des considérations qui précèdent, la première branche du moyen sous analyse est dès lors à rejeter pour ne pas être fondée.
Pour ce qui est de la deuxième branche du moyen et du reproche suivant lequel plus particulièrement l’avis de la commission d’aménagement serait vicié au motif que ladite commission n’aurait pas pu valablement le rendre, faute pour les six membres la composant d’avoir été présents lors de la séance du 19 mai 2021, il y a lieu de relever que l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, précité, dispose comme suit :
« La commission d’aménagement ne peut rendre son avis que si la majorité de ses membres est présente. La présence du membre effectif représentant le ministre ayant l’Aménagement du territoire dans ses attributions ou de son suppléant est requise pour les délibérations concernant la refonte ou la mise à jour complète des projets d’aménagement général.
Si à la suite d’une première convocation le quorum des présences prévu à l’alinéa 1er n’est pas donné, la commission est convoquée une deuxième fois avec le même ordre du jour, et elle peut dans ces conditions délibérer quel que soit le nombre des membres présents. ».
Au vœu des articles 1er et 2 de l’arrêté ministériel du 21 septembre 2020, ladite commission aurait dû être composée d’un président, d’un vice-président, d’un vice-président suppléant et de six membres.
4 Trib. adm., 4 juillet 2000, n° 11385 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 6 et les autres références y citées.
Tout d’abord, le tribunal tient à rappeler que, tel que relevé ci-avant, non seulement l’avis de la commission d’aménagement est purement consultatif, mais, par ailleurs, l’autorité ministérielle n’a pas expressément renvoyé à la motivation contenue dans ledit avis ni a fortiori fondé sa décision sur celui-ci puisque celle-ci repose sur des motifs qui lui sont propres. Au vu de ces considérations, il aurait appartenu aux demandeurs d’expliquer dans quelle mesure un vice ayant prétendument entaché la composition de ladite commission leur a concrètement causé un grief, ce qu’ils restent toutefois en défaut de faire.
Ensuite, et indépendamment de ce constat, il est vrai que suivant l’article 6 du règlement grand-ducal, précité, la commission d’aménagement ne peut rendre son avis que si la majorité de ses membres, qui, tel que relevé ci-avant, sont au nombre de six, est présente. A la lecture de l’avis du 10 juin 2021, qui indique, conformément au prescrit de l’article 7 du même règlement grand-ducal, la composition de la commission, de même que les noms des membres ayant assisté à la séance du 19 mai 2021, il apparaît que les membres en question étaient seulement au nombre de trois et que l’avis en cause a été émis à l’unanimité des voix des membres présents.
Il est toutefois également vrai que suivant le deuxième alinéa de l’article 6, prévisé, la commission d’aménagement peut délibérer quel que soit le nombre de membres présents lorsque, à la suite d’une première convocation, le quorum des présences prévu à l’alinéa 1er du même article n’est pas donné, et qu’elle est convoquée une deuxième fois avec le même ordre du jour.
Or, il se dégage des explications contenues dans le mémoire en duplique de la commune que l’avis de la commission d’aménagement émis lors de sa séance du 19 mai 2021 n’a été rendu qu’à la suite d’une deuxième convocation. Sur question afférente du tribunal, le représentant de la commune a d’ailleurs reconfirmé à l’audience des plaidoiries que l’avis en question aurait bien été rendu à la suite d’une deuxième convocation, tout en soulignant qu’elle-
même aurait participé à la séance en question, sans que le litismandataire des demandeurs n’ait remis en cause, voire contesté cet état de fait.
Au vu des considérations qui précèdent et plus particulièrement dans la mesure où il n’est pas contesté que la commission d’aménagement a délibéré et rendu son avis à la suite d’une deuxième convocation de sorte qu’au vœu de l’article 6, alinéa 2 du règlement grand-
ducal du 8 mars 2017, il lui était possible de délibérer quel que soit le nombre des membres présents, le moyen des demandeurs pris dans sa deuxième branche est également à rejeter pour manquer de fondement.
Si les demandeurs se rapportent encore à prudence de justice pour ce qui est de toutes les autres causes d’illégalité externe susceptible d’affecter les décisions litigieuses et bien qu’il soit exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins, qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au tribunal administratif de suppléer à la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions. Dès lors, étant donné que les demandeurs sont restés en défaut de préciser dans quelle mesure les décisions litigieuses seraient affectées d’illégalités externes autres que celles spécifiquement invoquées dans le cadre du recours sous analyse et tranchées ci-avant, le moyen afférent ainsi soulevé encourt le rejet.
2. Quant à la légalité interne des décisions déférées Arguments des parties Les demandeurs reprochent, en substance, au ministre d’avoir, à travers sa décision du 18 juin 2021, déclaré irrecevable leur réclamation au motif qu’elle aurait visé des prescriptions du PAP QE, tandis que la loi du 19 juillet 2004 ne prévoirait aucune faculté de réclamation devant lui en matière de plan d’aménagement particulier (« PAP »). Ce faisant, le ministre n’aurait pas correctement appréhendé la réclamation lui adressée qui viserait « expressément et itérativement le plan d’aménagement général de Leudelange et non le plan d’aménagement particulier ».
Pour sous-tendre leurs dires, ils renvoient au contenu de la réclamation en question laquelle préciserait, tout comme cela aurait déjà été indiqué dans le cadre de leurs objections adressées aux collège échevinal, que le PAG en cause opérerait un reclassement de leurs parcelles - classées sous l’égide de l’ancien PAG en zone de faible densité où la profondeur de construction des constructions principales pouvait aller jusqu’à 20 mètres -, « en zone d’habitation 1 spéciale Leudelange », classement qui impliquerait qu’elles seraient dorénavant soumises aux prescriptions du nouveau PAP QE et plus particulièrement à l’article 2.6 de la partie écrite de celui-ci qui permettrait une profondeur de construction des constructions principales hors-sols jusqu’à 15 mètres seulement. Concrètement, le fait que leurs parcelles soient dorénavant classées en zone [HAB-1] et soumises au nouveau PAP QE les empêcherait d’y ériger l’annexe qu’ils auraient projetée et dont la mise en place aurait été possible sous le classement opéré par l’ancien PAG. Ce serait dans cette optique qu’ils auraient demandé au ministre de ne pas approuver le projet d’aménagement général et d’imposer les adaptations nécessaires afin que leurs parcelles ne soient pas classées « en zone d’habitation 1 spéciale Leudelange ».
Au vu des considérations qui précèdent, les demandeurs sont d’avis que contrairement à l’appréciation ministérielle, leur réclamation du 7 décembre 2020 aurait répondu aux prescriptions de l’article 16 de la loi du 19 juillet 2004, de sorte qu’elle serait à déclarer recevable. A titre subsidiaire, ils sollicitent l’annulation de la décision ministérielle d’approbation.
Ensuite, les demandeurs critiquent le fait que le collège échevinal aurait décidé de faire purement et simplement abstraction de leurs objections en indiquant laconiquement que « le projet de PAG initial est maintenu », tandis que le conseil communal aurait décidé de se rallier à la proposition du collège échevinal, de sorte à ne pas avoir apporté de modification au projet d’aménagement général, sans toutefois avoir fourni la moindre explication ou motivation à cet égard, les demandeurs se prévalant de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 pour reprocher au collège échevinal d’avoir « cruellement » manqué à ses obligations telles qu’elles découleraient dudit article. Ils expliquent ensuite plus en détail les raisons pour lesquelles ils estiment qu’en l’espèce, le choix de « classer [leurs] parcelles […] en zone d’habitation 1 spéciale Leudelange [HAB-1-L] et de les soumettre de ce fait aux prescriptions de l’article 2.6 du PAP QE ne s’inscri[rait] cependant pas dans des considérations d’ordre urbanistique et politique pertinentes répondant à une finalité d’intérêt général », contrairement au classement initial qui aurait, quant à lui, parfaitement rempli les objectifs fixés dans la « nouvelle » loi modifiée du 17 avril 2018 sur l’aménagement du territoire, ci-après désignée par « la loi du 17 avril 2018 », et dans l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004. De ce fait, le changement de classement opéré relèverait de l’arbitraire, ce d’autant plus que d’autres immeubles situés surle territoire communal, et à proximité de ceux leur appartenant n’auraient pas fait l’objet du « reclassement contesté » et ce, alors même que le principe constitutionnel d’égalité devant la loi, tel qu’inscrit à l’article 10bis de la Constitution dans sa version applicable en l’espèce, imposerait de traiter de la même façon tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit. Or, compte tenu du seul classement de certaines parcelles, dont les leurs, il devrait être conclu que la différence de traitement opérée en l’espèce entre les demandeurs et les propriétaires des autres immeubles avoisinants « non reclassés en zone d’habitation 1 spéciale Leudelange » ne procéderait pas de disparités objectives, rationnellement justifiées, adéquates et proportionnées à leur but.
Dans son mémoire en réponse, la partie étatique conteste qu’il puisse être affirmé que le ministre n’aurait pas apprécié correctement la réclamation des demandeurs, tout en insistant sur le fait qu’il se dégagerait de l’ensemble des éléments du dossier que le seul grief soulevé par ceux-ci « tout au long de cette affaire » aurait porté sur le fait que suite à un changement de la réglementation urbanistique, la profondeur de construction autorisée sur leurs parcelles aurait diminué. Or, aucune disposition du PAG n’aurait trait aux règles de profondeur de constructions des immeubles situés en zone d’habitation, ces aspects étant uniquement régis par les dispositions du PAP QE. Elle estime que les demandeurs seraient bien au courant de cet état de fait puisqu’ils auraient visé aussi bien dans le cadre de leurs objections devant le collège échevinal, que dans le cadre de leur réclamation devant le ministre et dans le recours sous analyse spécifiquement l’article 2.6. de la partie écrite du PAP QE duquel découle le changement de profondeur de construction querellé. Elle fait encore valoir que le nouveau PAG n’aurait pas changé la situation des parcelles des demandeurs qui se seraient déjà trouvées auparavant en zone d’habitation sans qu’un quelconque argument n’ait été avancé contre le principe de ce classement. Les demandeurs n’expliqueraient d’ailleurs pas en quoi une annulation des décisions d’adoption, respectivement d’approbation du projet d’aménagement général serait de nature à améliorer leur situation, étant donné que leur grief concernerait la seule diminution de profondeur de construction opérée au niveau du PAP QE.
Au vu de ces considérations, ce serait dès lors à bon droit que le ministre aurait déclaré la réclamation du 7 décembre 2020 comme étant irrecevable faute de disposition légale prévoyant un droit de réclamation auprès du ministre contre un PAP QE.
Dans son mémoire en réponse, la commune rejoint la partie étatique dans son constat selon lequel ce serait à bon droit que la réclamation adressée par les demandeurs au ministre a été déclarée irrecevable faute pour la loi du 19 juillet 2004 de prévoir une possibilité de réclamation en matière de PAP QE. En effet, contrairement à ce qu’affirmeraient les consorts …, leur réclamation adressée au ministre n’aurait pas visé le PAG, mais n’aurait porté que sur la question de la réduction de la profondeur de construction permise sur leurs parcelles et donc sur des prescriptions dimensionnelles issues du PAP QE. Or, le PAP QE ne serait pas un « document » du PAG, mais il s’agirait d’un acte réglementaire distinct, pris en exécution du PAG, conformément aux articles 25 et 26 de la loi du 19 juillet 2004, lequel fixerait les prescriptions dimensionnelles, conformément aux articles 1er et 2 du règlement grand-ducal modifié du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement particulier « quartier existant » et du plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », contrairement au PAG qui fixerait les règles de classement et d’affectation des parcelles conformément aux articles 1er à 6 du règlement grand-ducal modifié du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune.
Pour ce qui est du reproche tenant à une violation de l’article 6 du règlement grand-
ducal du 8 juin 1979, celui-ci serait à réfuter faute pour les règles de la procédure administrative contentieuse de s’appliquer aux actes réglementaires.
Ce serait encore erronément que les demandeurs affirmeraient que leurs parcelles auraient été classées en « zone d’habitation 1 spéciale Leudelange [HAB-1-L] » puisque suite à la mise sur orbite du projet d’aménagement général et dans le cadre du vote du conseil communal, toute forme de zone spéciale pour la zone [HAB-1] aurait été supprimée. Leurs parcelles auraient en réalité été classées en zone [HAB-1].
Après avoir relevé que toutes les contestations des demandeurs dirigées contre les règles du PAP QE seraient inopérantes du fait que le recours sous analyse serait dirigé contre les décisions d’adoption et d’approbation du seul PAG et non du PAP QE, la commune fait valoir que le moyen visant à contester le classement de leurs parcelles en zone [HAB-1], tel que décidé par la commune, serait très vague en ce qu’il ne serait pas expliqué concrètement quel objectif, qu’il soit prévu par la loi du 17 avril 2018 ou par celle du 19 juillet 2004, n’aurait pas été respecté. A toutes fins utiles, elle explique plus en avant les raisons pour lesquelles il a été décidé de réduire les règles tenant à la profondeur de construction, tout en insistant sur le fait que la maison existante des demandeurs aurait une profondeur d’environ 15 mètres, de sorte à ne pas être concernée par les nouvelles règles issues du PAP QE et ce conformément à l’article 1.9. de la partie écrite de celui-ci.
La commune ajoute (i) qu’outre le fait que le projet des demandeurs de construire une annexe serait purement hypothétique, (ii) que l’ancien PAG aurait d’ores et déjà interdit des constructions en deuxième position et (iii) que s’agissant de la construction de dépendances ou autres, celle-ci resterait toujours possible suivant les règles du PAP QE, elle ne saisirait pas quel serait le reproche concret « au titre d’un classement en zone HAB-1 ou encore en PAP QE ». Elle précise, à cet égard, que ce serait au vu de la situation des parcelles litigieuses qu’elle aurait « procédé à un classement en PAP QE », ce qui serait d’ailleurs plus favorable aux demandeurs puisque cela leur permettrait de ne devoir recourir qu’à la procédure directe d’autorisation de construire.
La commune réfute ensuite l’existence d’une différence de traitement non justifiée en faisant valoir que toutes les parcelles situées au lieu-dit « … » seraient classées en zone [HAB-
1], à l’exception des aires de jeux, classées en zone de bâtiments et d’équipements publics 2 -
espaces libres [BEP-2], des zones de verdure, classées en zone de parcs publics [PARC], ainsi que de la gare.
Enfin, ce serait également à tort que les demandeurs prétendraient que le classement de leurs parcelles « ne procéderait pas de disparités objectives, rationnellement justifiées, adéquates et proportionnées à leur but », puisque, outre le fait que le moyen en question ne serait pas suffisamment développé, il resterait, par ailleurs, à l’état de pure allégation. Elle rappelle, à cet égard, qu’il appartiendrait aux demandeurs de prouver l’illégalité du PAG, ce qu’ils resteraient cependant en défaut de faire. A cela s’ajouterait que, comme les parcelles des demandeurs auraient été classées en zone de faible densité sous l’égide de l’ancien PAG, il serait normal qu’elles aient été classées en zone [HAB-1] dans le cadre de la refonte de celui-
ci alors que cette dernière zone serait le pendant de l’ancienne zone de faible densité. Comme le classement des parcelles litigieuses aurait dès lors été maintenu, il y aurait lieu de s’interroger dans quelle mesure il serait disproportionné ou non justifié d’avoir procédé à ce maintien quiserait, par ailleurs, conforme à l’affectation actuelle de la maison d’habitation unifamiliale des demandeurs.
Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs maintiennent leur critique suivant laquelle ce serait à tort que le ministre n’a pas statué sur le bien-fondé de leur réclamation, mais l’a simplement déclarée irrecevable alors même qu’elle aurait été conforme aux prescriptions de l’article 16 de la loi du 19 juillet 2004. Ils réitèrent, dans ce contexte, en substance les développements contenus dans leur requête introductive d’instance, tout en ajoutant que si « [l]ors de la mise sur orbite du projet de refonte du PAG, [leurs] parcelles [auraient] été classées en zone HAB-1-L et en quartier existant », suite à l’avis émis par la commission d’aménagement le 11 décembre 2019, elles auraient in fine été classées en zone [HAB-1]. Or, ils auraient préconisé un classement de leurs parcelles en zone d’habitation 2 [HAB-2], ci-après désignée par « la zone [HAB-2] », auquel cas elles auraient été soumises aux prescriptions de l’article 3.6. de la partie écrite du PAP QE, lequel permettrait une profondeur de construction des constructions principales hors-sols jusqu’à 20 mètres au rez-de-chaussée et jusqu’à 15 mètres aux étages. Ils font encore valoir que, selon eux, rien n’aurait empêché la commune d’opérer des différenciations dans la zone [HAB-1] en créant par exemple des zones [HAB-1 a] et [HAB-1 b], tel que cela aurait été le cas dans d’autres communes. De cette manière, le PAG aurait permis d’opérer des distinctions entre les constructions déjà existantes et présentant une profondeur de 20 mètres et les autres, de même qu’une telle classification aurait également été de nature à préserver les droits des propriétaires d’immeubles, tout en s’inscrivant dans une « finalité d’intérêt général ». Au vu des considérations qui précèdent, les demandeurs estiment qu’il apparaîtrait que le classement opéré par le PAG litigieux modifierait bien leur situation.
Enfin, ils relèvent que les parties défenderesses resteraient toujours en défaut de justifier la raison d’être du classement de leurs parcelles en zone [HAB-1].
Dans son mémoire en duplique, la commune relève que si les demandeurs sollicitaient dans leur mémoire en réplique pour la première fois un classement de leurs parcelles en zone [HAB-2], respectivement reprochaient à la commune de ne pas avoir créé différentes zones [HAB-1], les moyens afférents seraient à rejeter pour être tardifs, voire même contradictoires par rapport à leurs objections et réclamation adressées respectivement au collège échevinal et au ministre. Pour ce qui est de la demande concrète des consorts …, il conviendrait, en tout état de cause, de se baser non pas sur la demande nouvelle formulée dans le cadre de leur mémoire en réplique en relation avec un classement de leurs parcelles en zone [HAB-2], mais sur leur demande exacte telle que formulée tant auprès du collège échevinal qu’auprès du ministre. Or, nulle part n’y aurait-il été question de contester le classement de leurs parcelles tel qu’opéré au niveau du PAG en zone [HAB-1], la demande ayant uniquement visé à voir modifier les prescriptions du PAP QE.
La commune insiste encore sur le fait que la possibilité d’avoir une profondeur de construction de 20 mètres pour les rez-de-chaussée en zone [HAB-2] et en zone mixte villageoise [MIX-v] correspondrait uniquement à la volonté communale de favoriser l’implantation de commerces au rez-de-chaussée, commerces qui seraient limités en zone [HAB-1] du fait qu’il ne s’agirait pas de la destination principale de cette zone, conformément à l’article 1er de la partie écrite du PAG. Il n’en resterait pas moins que les propriétaires de parcelles classées en zone [HAB-1] auraient conservé leurs droits « à avoir des mètres carrés supplémentaires » puisque sous l’égide de l’ancien PAG, le nombre de niveaux aurait été limité à 2 dans la zone de faible densité et qu’en exécution du PAP QE, il serait dorénavant possible soit d’avoir un niveau en retrait supplémentaire, soit d’aménager un niveau sous combles. Lesdemandeurs auraient dès lors bien la possibilité d’agrandir leur maison, certes non pas au niveau de l’emprise au sol, mais en hauteur.
La commune réitère ensuite que les parcelles des demandeurs seraient soumises au même classement que toutes les autres parcelles situées au lieu-dit « … », de sorte qu’un classement en zone [HAB-2] ne ferait aucun sens.
Enfin, elle souligne que, contrairement à ce qu’affirment les demandeurs, le classement des parcelles litigieuses en zone [HAB-1] aurait bien été expliqué, tout en renvoyant, à ce sujet, aux développements contenus dans son mémoire en réponse suivant lesquels la zone [HAB-1] de l’actuel PAG serait le pendant de la zone de faible densité de l’ancien PAG et que tout le quartier bâti serait soumis à ce seul classement et en insistant sur le fait que les demandeurs resteraient en défaut de prouver que le choix communal ne répondrait pas à une finalité d’intérêt général.
Analyse du tribunal A titre liminaire, il convient de relever que si dans le cadre de leur requête introductive d’instance, les demandeurs soutiennent que leurs parcelles auraient été classées en « zone d’habitation 1 spéciale Leudelange [HAB-1-L] », ils ont précisé, dans le cadre de leur mémoire en réplique, que si lors de la mise sur orbite du projet d’aménagement général, les parcelles en question avaient été classées dans cette zone et soumises à un PAP QE, il aurait au final été décidé, suite à l’avis rendu par la commission d’aménagement, de les classer en zone [HAB-1] et de les soumettre à un PAP QE.
Ensuite, tel que le tribunal vient de le retenir ci-avant dans le cadre du volet ayant trait à la recevabilité du recours, il doit être admis qu’à travers leur courrier du 7 décembre 2020, les consorts … ont entendu réclamer contre le choix communal de procéder dans le cadre de l’adoption du projet d’aménagement général, au classement de leurs parcelles en zone [HAB-
1], en critiquant plus particulièrement le fait qu’en raison de ce classement, ces mêmes parcelles se trouveraient soumises à des prescriptions établies par le nouveau projet d’aménagement particulier « quartiers existants » dont ils estiment qu’elles leur seraient moins favorables que celles qui se seraient appliquées si lesdites parcelles avaient fait l’objet d’un classement différent au niveau du projet d’aménagement général litigieux.
C’est dès lors à tort que le ministre a déclaré la réclamation du 7 décembre 2020 purement et simplement irrecevable au motif qu’elle n’aurait visé que des prescriptions du PAP QE et que la loi du 19 juillet 2004 ne prévoirait aucune faculté de réclamation devant le ministre en cette matière. Cette conclusion s’impose indépendamment de la question du bien-fondé, respectivement de la pertinence de la motivation invoquée dans la réclamation pour contester le choix communal de classer les parcelles litigieuses en zone [HAB-1], cette analyse ayant, en effet, dû être effectuée par le ministre qui aurait dû statuer sur la réclamation en question au lieu de simplement la déclarer irrecevable.
Au vu des considérations qui précèdent et sans qu’il n’y ait lieu de statuer plus en avant, il y a lieu d’annuler la décision ministérielle du 18 juin 2021 dans la seule mesure où elle a déclaré irrecevable la réclamation dirigée par les consorts … contre le classement de leurs parcelles, inscrites au cadastre de la commune de Leudelange, section … de Leudelange, sous les numéros … et …, sises au lieu-dit « … », en zone [HAB-1], tel qu’opéré suite à l’adoption du projet d’aménagement général par le conseil communal. Il convient, par conséquent, derenvoyer l’affaire en prosécution de cause devant le ministre actuellement compétent afin qu’il tranche la question du bien-fondé de la réclamation dirigée par les consorts … contre la délibération du conseil communal du 17 novembre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général.
V. Quant à la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure Les demandeurs sollicitent encore la condamnation de l’Etat à une indemnité de procédure de 2.000.- euros sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine ». Cette demande est toutefois à rejeter, étant donné que les demandeurs restent en défaut d’établir en quoi il serait inéquitable de laisser des frais non répétibles à leur charge.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;
au fond, le déclare justifié ;
partant, annule la décision du ministre de l’Intérieur du 18 juin 2021 approuvant la délibération du conseil communal de la commune de Leudelange du 17 novembre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général, parties écrite et graphique, dans la seule mesure où elle a déclaré irrecevable la réclamation dirigée par les consorts … contre le classement de leurs parcelles, inscrites au cadastre de la commune de Leudelange, section … de Leudelange, sous les numéros … et …, sises au lieu-dit « … », en zone d’habitation 1 [HAB-1], tel qu’opéré suite à l’adoption du projet d’aménagement général par le conseil communal ;
renvoie l’affaire en prosécution de cause devant le ministre actuellement compétent afin qu’il tranche la question du bien-fondé de la réclamation dirigée par les consorts … contre la délibération du conseil communal de la commune de Leudelange du 17 novembre 2020 portant adoption du projet d’aménagement général ;
rejette la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de 2.000.- euros telle que formulée par les consorts … ;
met les frais et dépens de l’instance à charge de l’Etat.
Ainsi jugé par:
Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, et lu à l’audience publique du 1er février 2024 par le vice-président, en présence du greffier Luana Poiani.
s. Luana Poiani s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 1er février 2024 Le greffier du tribunal administratif 20