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23/02/2024 | LUXEMBOURG | N°48297

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 février 2024, 48297


Tribunal administratif N° 48297 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:48297 4e chambre Inscrit le 21 décembre 2022 Audience publique du 23 février 2024 Recours formé par Madame …, …, en matière de nomination d’un commissaire spécial

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48297 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 décembre 2022 par Maître Jean-Jacques Lorang, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, psychologue, demeurant à L-…, tendant à la nomination

d’un commissaire spécial à la suite d’un jugement du tribunal administratif du 5 févrie...

Tribunal administratif N° 48297 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:48297 4e chambre Inscrit le 21 décembre 2022 Audience publique du 23 février 2024 Recours formé par Madame …, …, en matière de nomination d’un commissaire spécial

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48297 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 décembre 2022 par Maître Jean-Jacques Lorang, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, psychologue, demeurant à L-…, tendant à la nomination d’un commissaire spécial à la suite d’un jugement du tribunal administratif du 5 février 2021, inscrit sous le numéro 42186 du rôle ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 17 mars 2023 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2023 par Maître Jean-Jacques Lorang pour compte de sa mandante ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont l’exécution fait l’objet de la requête introductive d’instance ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Gaëlle Relouzat, en remplacement de Maître Jean-Jacques Lorang, et Madame le délégué du gouvernement Pascale Millim en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 décembre 2023.

Par une demande signée en date du 20 janvier 2018, réceptionnée en date du 8 février 2018, Madame … sollicita l’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute.

En date du 28 février 2018, le Collège médical du Grand-Duché de Luxembourg émit un avis favorable quant à la demande d’autorisation de Madame … d’exercer comme psychothérapeute et le port de titre y relatif, et ce, au motif que le « (…) dossier [de] la candidate satisfait aux critères exigés par [la loi modifiée du 14 juillet 2015 portant création de la profession de psychothérapeute] et du [règlement grand-ducal du 31 juillet 2015 fixant la procédure à suivre pour obtenir l’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute] (…) » , ci-après désignés par « la loi du 14 juillet 2015 », respectivement par « le règlement grand-ducal du 31 juillet 2015 ».

En date du 2 août 2018, le Conseil scientifique de psychothérapie émit un avis défavorable quant à la demande d’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute présentée par Madame …, aux motifs que sa « (…) pratique de psychothérapie [est] non reconnue (…) » et qu’elle ne disposait pas « (…) de formation en psychothérapie qualifiante (…) », de sorte à ne pas remplir « (…) les conditions de formation de base et 1 continue ou de pratique en psychothérapie exigées par la Loi du 14 juillet 2015 portant création de la profession de psychothérapeute pour l’accès à l’exercice de la profession de psychothérapeute (Cf. Art. 2 et 20) (…) ». Il se dégage encore du compte-rendu de la réunion précitée du 2 août 2018 que l’avis négatif du Conseil scientifique de psychothérapie était encore basé sur les considérations suivantes : « (…) Le certificat « Systemische Familienberaterin » délivré par le Kannerschlass ne rentre pas dans les courants psychothérapeutiques reconnus par le Conseil scientifique de psychothérapie. Il en va de même pour l’attestation de formation en artthérapie. D’autant plus, en tant que psychologue elle n’exerce des actes psychothérapeutiques que depuis 2017. (…) ».

En date du 5 décembre 2018, le ministre de la Santé, ci-après dénommé le « ministre » informa Madame … de ce qui suit :

« (…) En référence à votre demande du 20 janvier 2018, je suis au regret de vous informer que je ne suis pas en mesure de faire droit à votre demande d’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute.

En effet, je me rallie à l’avis que vient d’émettre le Conseil scientifique de psychothérapie, qui retient que vous ne remplissez pas la condition de formation spécifique et continue en psychothérapie d’au moins 450 heures prévue à l’article 20 point 2 de la loi modifiée du 14 juillet 2015 portant création de la profession de psychothérapeute.

Ledit avis est annexé à la présente et fait partie intégrante. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 2 janvier 2019, Madame … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 5 décembre 2018.

Par jugement du 5 février 2021, portant le numéro 42186 du rôle, le tribunal administratif, dans le cadre du recours principal en réformation, annula la décision précitée du ministre du 5 décembre 2018 et lui renvoya le dossier en prosécution de cause. Pour arriver à cette conclusion, le tribunal retint, d’une part, que le Collège médical n’avait pas convoqué Madame … à un entretien, en violation de l’article 4, paragraphe (3) du règlement grand-ducal du 31 juillet 2015 fixant la procédure à suivre pour obtenir l’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute et, d’autre part, que le ministre n’avait pas motivé sa décision de donner davantage de poids à l’avis négatif du Conseil scientifique de psychothérapie au lieu de l’avis positif du Collège médical, en violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes.

Aucune des parties n’interjeta appel contre le prédit jugement du tribunal administratif du 5 février 2021.

Par courrier du 10 février 2021, le litismandataire de Madame … s’adressa au ministre dans les termes suivants :

« (…) Suite au jugement rendu le 5 février 2021 par le Tribunal Administratif dans l'affaire sous rubrique, je prends la respectueuse liberté de m'attacher votre concours au nom et pour le compte de ma mandante, alors que vous avez été chargée de la prosécution de ce dossier.

2 Madame … déposa sa demande en vue de l'obtention du titre de psychothérapeute en date du 20 janvier 2018.

La décision ministérielle fut rendue le 5 décembre 2018, soit près d'un an après et ce alors que le règlement grand-ducal du 31 juillet 2015 fixant la procédure à suivre pour obtenir l'autorisation d'exercer la profession de psychothérapeute dispose en son article 5 que « La procédure d'admission en vue de l'exercice de la profession de psychothérapeute doit être achevée au plus tard dans les trois mois après la présentation du dossier complet ».

Aujourd'hui, soit plus de trois ans après l'introduction de la demande de Madame …, nous en sommes à nouveau au même point.

Aussi je sollicite par la présente l'entretien avec le Collège Médical conformément au règlement précité.

J'ose espérer que celui-ci pourra se tenir dans les plus brefs délais alors que dans l'expectative depuis plus de trois ans, ma mandante s'inquiète de savoir ce qu'il adviendra de sa pratique professionnelle. Ceci engendre pour elle un important préjudice, tout comme pour sa patientèle.

Enfin, je tiens à rappeler que Madame … a obtenu en mars 2020 son certificat en tant que « Systemische Therapeutin / Familientherapeutin » de la Deutsche Gesellschaft für Systemische Therapie, Beratung und Familientherapie. (…) ».

Le prédit courrier fit l’objet d’un rappel le 9 avril 2021.

Par courrier du 19 avril 2021, le ministre prit position comme suit :

« (…) Par la présente, je me permets de vous contacter suite au jugement rendu le 5 février 2021 par le Tribunal administratif dans l'affaire sous rubrique qui annule la décision ministérielle du 5 décembre 2018 refusant de vous accorder l'autorisation d'exercer la profession de psychothérapeute et qui renvoie l'affaire devant mon ministère en prosécution de cause.

À titre liminaire, je tiens à attirer votre attention sur le jugement rendu le 2 février 2021 par le Tribunal administratif dans une affaire similaire (TA 2021-02-02;43555), où il a été retenu : « (…) force est de retenir qu'à la date de la prise de la décision litigieuse, le ministre ne pouvait plus légalement faire droit, ni refuser la demande d'autorisation lui soumise par Madame … sur base de l'article 20 de la loi du 14 juillet 2015, et ceci nonobstant le fait que la demande en question avait été introduite le 19 décembre 2016, soit endéans le délai susmentionné de trois ans et il lui aurait appartenu d'examiner ladite demande au regard des dispositions légales applicables à la date de la prise de la décision litigieuse. ».

Conformément au jugement du 2 février 2021, le régime transitoire prévu à l'article 20 de la loi modifiée du 14 juillet 2015 portant création de la profession de psychothérapeute ne s'applique seulement lorsque la décision ministérielle a été prise avant l'écoulement du délai de trois ans à partir de la publication de ladite loi.

Dès lors, votre demande d'autorisation d'exercer la profession de psychothérapeute devra être analysée selon les dispositions de l'article 2 de la loi précitée. Cependant, il faut 3 savoir que cette procédure change par rapport au régime transitoire prévu à l'article 20 de ladite loi. A noter que le demandeur d'autorisation d'exercer la profession de psychothérapeute doit préalablement solliciter la reconnaissance de la formation étrangère en psychothérapie auprès du Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche avant de pouvoir introduire une demande d'autorisation d'exercer la profession de psychothérapeute au sein de mon ministère. (…) » Par courrier électronique de son litismandataire du 5 août 2021, Madame … réfuta l’analyse ministérielle du 19 avril 2021 dans les termes suivants :

« (…) Je reviens vers vous suite à votre courrier adressé à Madame … en date du 19 avril dernier.

Je souhaite ici vous rappeler que la demande déposée le 20 janvier 2018 par ma mandante ne visait aucune disposition particulière et qu'elle était dès lors valable tant pour l'article 2 que pour l'article 20.

Il ne me semble dès lors pas à propos de déposer une nouvelle demande exclusivement sous le régime de l'article 2, demande qui par sa simple existence anéantirait celle du 20 janvier 2018.

Par ailleurs, je me permets de vous rappeler que la question du délai de 3 ans visée par la loi n'a pas fait l'objet d'un examen par le Tribunal dans le cas de ma mandante.

Quand bien-même l'aurait-il été, ma mandante a droit de faire entendre ses arguments devant la Cour et l'obliger à procéder par le biais d'une nouvelle demande reviendrait à la priver du 2ème degré de juridiction. (…) ».

Par courrier électronique du 9 août 2021, le ministre fit suite à la prise de position de Madame … et informa cette dernière que le dossier avait été transmis à nouveau au Collège médical.

Par courrier électronique du 30 décembre 2021 de son litismandataire, Madame s’enquit sur l’état d’avancement de son dossier, courrier qui resta sans suites.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 21 décembre 2022, Madame … a fait introduire un recours tendant à la nomination d’un commissaire spécial afin de prendre la décision en lieu et place de l’autorité compétente.

Le recours en nomination d’un commissaire spécial sous examen doit être déclaré recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi, conclusion qui n’est pas remise en cause par l’affirmation non autrement étayée du délégué du gouvernement selon laquelle le recours serait irrecevable, ladite affirmation étant à rejeter pour être simplement suggérée sans être effectivement soutenue à défaut de toute explication factuelle, respectivement juridique la soutenant, le tribunal n’entrevoyant d’ailleurs pas de cause d’irrecevabilité qui serait d’ordre public.

A l’appui de son recours, la partie demanderesse retrace, tout d’abord, les faits et rétroactes à la base du litige sous examen en reprenant les différents courriers et courriers électroniques échangés entre parties pour en conclure qu’elle se trouverait à l’heure actuelle 4 toujours dans la même situation qu’au jour du prononcé du jugement du tribunal administratif du 5 février 2021, la seule différence étant qu’entretemps la Cour administrative, dans un arrêt du 9 novembre 2021, inscrit sous les numéros 45993C et 46024C du rôle, aurait retenu que le régime transitoire de l’article 20 de la loi du 14 juillet 2015 s’appliquerait à toute demande introduite endéans la période d’application dudit régime, même si le ministre prendrait sa décision après l’expiration dudit délai.

En rappelant encore les dispositions de l’article 5 du règlement grand-ducal du 31 juillet 2015 selon lequel le ministre devrait se prononcer dans un délai de 3 mois sur une demande visant à obtenir l’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute, tandis qu’en l’espèce, le ministre aurait nécessité dix mois avant de prendre la décision du 5 décembre 2018, la demanderesse constate qu’au jour de l’introduction de sa requête en nomination d’un commissaire spécial plus de vingt-et-un mois se seraient écoulés depuis le jugement, précité, du 5 février 2021, sans qu’une décision ministérielle n’aurait été prise sur sa demande du 20 janvier 2018.

Il y aurait partant lieu de voir désigner un commissaire spécial sur le fondement de l’article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », afin que ce dernier prenne la décision en lieu et place et aux frais du ministre.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours sous examen en expliquant, tout d’abord, que le ministre aurait analysé l’ensemble des demandes d’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute lui soumises pendant la période d’application du régime provisoire prévu à l’article 20 de la loi du 14 juillet 2015, conformément audit régime transitoire, nonobstant la circonstance que les décisions afférentes n’auraient été prises qu’à l’issue de ladite période, démarche qui n’aurait pas été admise, dans un premier temps, par le tribunal administratif dans des jugements antérieurs et postérieurs à celui de Madame …, la partie étatique précisant encore que, dans le cas concret de Madame …, le tribunal administratif, dans son jugement du 5 février 2021, ne se serait pas prononcé sur l’applicabilité dudit régime transitoire. Ce n’aurait été qu’à travers un arrêt de la Cour administrative du 9 novembre 2021, inscrit sous les numéros 45993C et 46024C du rôle, qu’il aurait été retenu que le régime transitoire s’applique à toute demande introduite endéans la période d’application dudit régime, même si le ministre prend sa décision après l’expiration dudit régime, changement de paradigme que le ministre n’aurait pas pu prendre en considération lors de l’exécution du jugement litigieux du 5 février 2021 pour être intervenu postérieurement audit jugement. Ceci expliquerait également la demande ministérielle adressée à Madame … le 19 avril 2021 l’invitant à faire procéder à la reconnaissance par le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, de sa formation de psychothérapeute accomplie à l’étranger, préalablement à l’introduction d’une demande d’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute.

La partie étatique conclut de l’ensemble de ces considérations que le dossier de Madame … serait toujours en prosécution de cause auprès du ministre et qu’il appartiendrait uniquement à celle-ci de verser les documents sollicités et plus particulièrement la reconnaissance de la formation étrangère en psychothérapie, de sorte que le recours en nomination d’un commissaire spécial devrait encourir le rejet pour manquer de fondement.

Dans son mémoire en réplique, Madame … insiste sur le fait que la partie étatique, dans son mémoire en réponse, serait en aveu que les demandes introduites endéans la période 5 d’application du régime transitoire de l’article 20 de la loi du 14 juillet 2015 devraient être analysées conformément audit régime, même si la décision ministérielle interviendrait à l’issue de ladite période. La demanderesse réfute encore, dans ce contexte, l’argumentation du délégué du gouvernement selon laquelle le ministre n’aurait, dans le cadre de l’exécution du jugement litigieux du 5 février 2021, pas pu prendre en considération l’arrêt, précité, de la Cour administrative du 9 novembre 2021 pour avoir été postérieur au prédit jugement du 5 février 2021, ladite argumentation, si elle devait être retenue, créant une discrimination proscrite par les articles 10bis et 111 de la Constitution.

En relevant que le ministre, à travers son courrier du 9 août 2021, l’aurait informée que son dossier aurait à nouveau été transmis au Collège médical, sans qu’elle n’aurait dû réserver de suite à la demande de communication d’une reconnaissance de sa formation obtenue à l’étranger, la demanderesse en conclut que le ministre aurait renoncé à instruire sa demande conformément à l’article 2 de la loi du 14 juillet 2015.

La demanderesse insiste finalement sur la nomination d’un commissaire spécial, alors que les conditions de l’article 84 de la loi du 7 novembre 1996 seraient remplies en l’espèce, dans la mesure où le jugement, précité, du 5 février 2021 serait définitif et le ministre serait resté en défaut de prendre une décision, inertie qui ne serait pas justifiée par le fait que Madame … ne lui aurait pas soumis la reconnaissance de sa formation suivie à l’étranger, laquelle serait dépourvue de pertinence dans l’instruction d’une demande d’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute basée sur l’article 20 de la loi du 14 juillet 2015. Madame … se prévaut encore de l’article 5 du règlement grand-ducal du 31 juillet 2015 selon lequel la procédure pour statuer sur une demande d’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute ne devrait durer que trois mois.

Aux termes de l’article 84 de la loi du 7 novembre 1996, « Lorsqu’en cas d’annulation ou de réformation, coulée en force de chose jugée, d’une décision administrative qui n’est pas réservée par la Constitution à un organe déterminé, la juridiction ayant annulé ou réformé la décision a renvoyé l’affaire devant l’autorité compétente et que celle-ci omet de prendre une décision en se conformant au jugement ou à l’arrêt, la partie intéressée peut, à l’expiration d’un délai de trois mois à partir du prononcé de l’arrêt ou du jugement, saisir la juridiction qui a renvoyé l’affaire en vue de charger un commissaire spécial de prendre la décision aux lieu et place de l’autorité compétente et aux frais de celle-ci. La juridiction fixe au commissaire spécial un délai dans lequel il doit accomplir sa mission. La désignation du commissaire spécial dessaisit l’autorité compétente. » Il y a lieu de rappeler que par jugement du 5 février 2021, portant le numéro 42186 du rôle, le tribunal administratif a annulé la décision, précitée, du ministre du 5 décembre 2018 ayant refusé l’octroi à Madame … d’une autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute et a renvoyé le dossier en prosécution de cause à ce dernier afin que celui-ci puisse, tout d’abord, renvoyer la demande de Madame … devant le Collège médical qui devrait, préalablement à l’émission de son avis circonstancié, avoir un entretien avec la demanderesse, conformément à l’article 4, paragraphe (3) du règlement grand-ducal du 31 juillet 2015, avant de prendre sa décision sur base de l’avis du Collège médical et de l’avis du Conseil scientifique de psychothérapie.

Il échet ensuite de constater que les seuls actes pris par le ministre suite au jugement précité du tribunal administratif du 5 février 2021 sont son courrier du 19 avril 2021, ainsi que son courrier du 6 et son courrier électronique du 9 août 2021, lesquelles ne comportent aucun 6 élément décisionnel par rapport à la demande de Madame … quant à l’octroi d’une autorisation pour exercer la profession de psychothérapeute, mais s’analysent en des mesures d’instruction de ladite demande, alors que le ministre, d’une part, n’y fait que solliciter des documents de la part de Madame … quant à la reconnaissance de ses formations pertinentes suivies à l’étranger dans le cadre de l’instruction de sa demande par rapport à l’article 2 de la loi du 14 juillet 2015, respectivement, d’autre part, a transmis pour avis le dossier au Collège médical, sans qu’il ne ressorte des documents soumis au tribunal que ledit collège aurait réservé des suites au courrier ministériel du 6 août 2021.

Dans ce contexte, il y a encore lieu de relever que, bien que la partie demanderesse ait refusé de communiquer un quelconque document au ministre relatif à la reconnaissance de ses formations suivies à l’étranger, le tribunal doit constater que le ministre est resté en défaut de prendre une quelconque décision depuis le jugement, précité, du 5 février 2021, ni même le cas échéant une décision de refus sur base du constat d’un dossier incomplet.

Sur base de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de retenir que l’autorité compétente devant laquelle l’affaire a été renvoyée a omis dans un délai de trois mois et à ce jour de prendre une décision se conformant au jugement précité du tribunal administratif du 5 février 2021 coulé en force de chose jugée.

Le recours de Madame … tendant à la nomination d’un commissaire spécial chargé de prendre, en lieu et place du ministre de la Santé, la décision remplaçant celle qui fut annulée par le prédit jugement est partant fondée, de sorte qu’il y a lieu de désigner le soussigné, vice-

président du tribunal administratif présidant la quatrième chambre, comme commissaire spécial avec la mission de prendre, en lieu et place du ministre de la Santé et aux frais de celui-

ci une décision, dans un délai de trois mois à partir du jour où le présent jugement a acquis autorité de chose jugée, en se conformant au jugement du tribunal administratif du 5 février 2021, inscrit sous le numéro 42186 du rôle.

Eu égard à l’issue du litige et au regard de l’attitude du ministre consistant en le fait de ne pas avoir pris de décision suite au jugement, précité, du tribunal administratif du 5 février 2021, ayant contraint Madame … de devoir recourir aux services d’un avocat à la Cour pour introduire une requête en nomination d’un commissaire spécial, sa demande tendant à l’obtention d’une indemnité de procédure, sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine », est à déclarer fondée et il y a lieu de lui allouer, à ce titre, une indemnité fixée ex aequo et bono à un montant de 1.000 euros.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit la requête en nomination d’un commissaire spécial en la forme ;

au fond, la déclare justifiée ;

7 partant nomme commissaire spécial le soussigné, vice-président du tribunal administratif présidant la quatrième chambre, aux fins de prendre la décision concernant la demande d’autorisation d’exercer la profession de psychothérapeute de Madame … en lieu et place du ministre de la Santé et aux frais de celui-ci ;

dit que le commissaire spécial est tenu de prendre sa décision dans le délai de trois mois à compter du jour où le présent jugement a acquis autorité de chose jugée ;

dit que le commissaire spécial touchera une indemnité dont le montant sera fixé sur déclaration par le tribunal administratif sur base du règlement grand-ducal modifié du 28 novembre 2009 portant fixation des indemnités et tarifs en cas de réquisition de justice en tenant compte de la nature et de la complexité de l’affaire ;

dit que la désignation du commissaire spécial dessaisit le ministre de la Santé du dossier ;

condamne l’Etat à payer à Madame … une indemnité de procédure de 1.000 euros ;

condamne l’Etat aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 23 février 2024 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, vice-président, Emilie Da Cruz De Sousa, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 23 février 2024 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 48297
Date de la décision : 23/02/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-02-23;48297 ?

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