Tribunal administratif N° 47105 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47105 1re chambre Inscrit le 1er mars 2022 Audience publique 5 juin 2024 Recours formé par Monsieur A et consort, … et …, contre deux décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal, en présence de Monsieur C et consort, Bereldange, en matière de permis de construire
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 47105 du rôle et déposée le 1er mars 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Anne-Laure Jabin, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de 1) Monsieur A, demeurant à L-… et 2) Madame B, demeurant à L-…, tendant, aux termes de son dispositif, à l’annulation, d’une part, de « […] l’autorisation de bâtir n°2021/0056 […] » émise le 29 avril 2021 par le bourgmestre de la commune de Kopstal au profit de Monsieur C et de son épouse, Madame C, demeurant ensemble à L-…, et, d’autre part, de « […] la décision de refus du bourgmestre datée du 30 novembre 2021 de refuser de la retirer […] » ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Nadine Tapella, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 4 mars 2022 portant signification de ce recours à 1) l’administration communale de Kopstal, établie à L-8189 Kopstal, 28, rue de Saeul, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, 2) Monsieur C, préqualifié, et 3) Madame C, préqualifiée ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 8 mars 2022 par Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Kopstal, préqualifiée ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2022 par Maître Hervé Hansen, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur C et de Madame C, préqualifiés ;
Vu l’ordonnance du président du tribunal administratif du 25 mars 2022, inscrite sous le numéro 47110 du rôle ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 7 juin 2022 par Maître Steve Helminger, au nom de l’administration communale de Kopstal, préqualifiée ;
1Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 7 juin 2022 par Maître Hervé Hansen, au nom de Monsieur C et de Madame C, préqualifiés ;
Vu l’ordonnance du vice-président du tribunal administratif, en remplacement des président et magistrats plus anciens en rang, du 15 juin 2022 prorogeant les délais impartis pour déposer les mémoires en réplique et en duplique ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 25 août 2022 par Maître Anne-Laure Jabin, au nom de Monsieur A et de Madame B, préqualifés ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 26 septembre 2022 par Maître Hervé Hansen, au nom de Monsieur C et de Madame C, préqualifiés ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 17 octobre 2022 par Maître Steve Helminger, au nom de l’administration communale de Kopstal, préqualifiée ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Anne-Laure Jabin, Maître Steve Helminger et Maître Hervé Hansen en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 janvier 2024.
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Monsieur A expose être propriétaire de la maison sise à L-…, érigée sur la parcelle portant le numéro cadastral 57/1007, maison où il habite actuellement, tandis que Madame B explique être propriétaire de la maison d’habitation sise à L-…, érigée sur la parcelle portant le numéro cadastral 55/2561, ainsi que des parcelles cadastrées sous les numéros 55/2562, 55/2563, 55/2564, 55/2565 et 55/2566 sises en enfilade derrière la parcelle numéro 55/2561 abritant ladite maison d’habitation.
Les propriétés respectives de Monsieur A et de Madame B bordent immédiatement respectivement du côté gauche et du côté droit une série de parcelles numérotées à partir de la rue de Schoenfels 56/2525, 56/2526, 56/2527, 56/2528, 56/2529, 56/2530 et 56/2531, ces parcelles étant issues d’une opération de morcellement.
En date du 24 juillet 2020, le bourgmestre de la commune de Kopstal, ci-après « le bourgmestre », délivra des autorisations de bâtir sur quatre des parcelles issues de ce morcellement.
Monsieur A et Madame B, ci-après désignés par « les consorts AB », firent introduire en date du 23 octobre 2020 un recours gracieux contre chacune de ces quatre autorisations de bâtir, lesquelles firent finalement l’objet, après que les bénéficiaires de ces autorisations purent faire valoir leurs observations, d’une décision de retrait en date du 28 janvier 2021 de la part du bourgmestre.
Il est constant en cause que le 10 mars 2021, une réunion eut lieu entre les responsables communaux, les consorts AB et les bénéficiaires des autorisations de construire retirées le 28 janvier 2021.
2Les consorts AB prirent connaissance début mai 2021 de nouveaux certificats point rouge pour des autorisations de bâtir délivrées le 29 avril 2021 sur les mêmes parcelles par le bourgmestre, ces autorisations étant ci-après désignées par « les autorisations du 29 avril 2021 ». Parmi ces autorisations figure celle portant le numéro de référence 2021/0056, émise au profit de Monsieur C et de son épouse, Madame C, ci-après désignés par « les époux C », et portant sur la construction d’une maison unifamiliale à L-…, sur la parcelle cadastrée sous le numéro 56/2527, ladite autorisation étant ci-après désignée par « l’autorisation 0056 ».
Une demande des consorts AB en communication des autorisations de bâtir resta sans réponse de la part de l’administration communale de Kopstal, ci-après désignée par « l’administration communale ».
Les consorts AB, après prise de connaissance à la maison communale des autorisations et plans afférents, introduisirent par courrier du 28 juillet 2021, réceptionné le lendemain, un recours gracieux visant, d’après eux, chacune des autorisations du 29 avril 2021.
Par décision du 30 novembre 2021, le bourgmestre, après avoir initialement proposé de révoquer les autorisations litigieuses par courriers du 30 septembre 2021, décida toutefois finalement de les maintenir pour les motifs suivants :
« […] Par la présente, je me permets de faire suite à mes courriers du 30 septembre 2021 vous informant de ma volonté de retirer les autorisations sous rubrique suite à un recours gracieux introduit en date du 29 juillet 2021 par Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, au nom et pour compte de Monsieur A et Madame B.
En date du 15 octobre 2021, Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, a introduit deux courriers en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059.
En date du 18 octobre 2021, Maître Hervé HANSEN, avocat à la Cour, a introduit un courrier en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0055 et 2021/0056.
Par un courrier du 28 octobre 2021, l’Administration communale de Kopstal a donné quelques précisions quant aux propositions de révocation en question.
En date du 22 novembre 2021, Maître Hervé HANSEN a introduit un courrier en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0055 et 2021/0056.
Après avoir analysé tous les moyens et arguments présentés, soit dans le recours gracieux du 29 juillet 2021, soit pour donner suite à la proposition de révocation des autorisations, je suis arrivé à la conclusion suivante :
Les cinq autorisations de construire en question se basent sur des autorisations de morcellement délivrées en 2018/2019 qui reprenaient exactement l’implantation des futures constructions.
3Bénéficiaire d’une telle autorisation de morcellement était entre autres Madame B qui, à l’époque, ne s’opposait ni à sa propre autorisation de morcellement, ni à celles délivrées pour les parcelles adjacentes.
On peut donc retenir qu’il n’y avait aucun recours contre le projet urbanistique planifié sur l’ensemble des différentes parcelles de terrain, bien au contraire.
Or aujourd’hui, la même Madame B demande la révocation des autorisations de construire délivrées sur base des mêmes considérations que les autorisations de morcellement précitées.
Ensuite Monsieur A, autre signataire du recours gracieux du 29 juillet 2021, a bénéficié lors de la construction d’un immeuble sur la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro 57/1007 d’une dérogation similaire quant aux reculs à celles demandées par les bénéficiaires des autorisations de construire litigieuses.
Afin d’éviter toute rupture d’égalité de traitement et notamment afin de se conformer au principe général de confiance légitime qui a été consacré tant par la jurisprudence communautaire en tant que principe du droit communautaire que par la jurisprudence nationale en tant que principe général du droit, il n’y a pas lieu de faire droit au recours gracieux introduit en date du 29 juillet 2021. Les autorisations n° 2021/0055, 2021/0056, 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059 du 8 juillet 2021 ne sont dès lors pas révoquées.
La présente décision est susceptible d’un recours devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d’un avocat à la Cour dans un délai de 3 mois à partir de la notification de la présente. […] ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 1er mars 2022, inscrite sous le numéro 47105 du rôle, les consorts AB firent introduire un recours tendant, aux termes de son dispositif, auquel le tribunal est seul tenu, à l’annulation de l’autorisation 0056 et de la décision, précitée, du bourgmestre du 30 novembre 2021, les autres autorisations du 29 avril 2021 ayant, elles aussi, fait l’objet de recours contentieux introduits par les consorts AB le même jour, inscrits respectivement sous les numéros 47102, 47103, 47104 et 47106 du rôle.
Par requête séparée déposée le même jour, inscrite sous le numéro 47110 du rôle, ils introduisirent encore une demande tendant à voir prononcer un sursis à exécution de l’autorisation de construire déférée en attendant la solution de leur recours au fond, inscrit sous le numéro 47105 du rôle, demande à laquelle le président du tribunal administratif fit droit, par ordonnance du 25 mars 2022.
Par quatre ordonnances du même jour, portant respectivement les numéros 47107, 47108, 47109 et 47111 du rôle, le président du tribunal administratif fit encore droit aux demandes de sursis à exécution introduites par les consorts AB le 1er mars 2022 dans le cadre de leurs recours parallèles visant les autres autorisations du 29 avril 2021.
Par courriers du 16 mai 2022, le bourgmestre annonça aux bénéficiaires des autorisations du 29 avril 2021 son intention de procéder au retrait de ces dernières, compte tenu des susdites ordonnances du président du tribunal administratif du 25 mars 2022.
4Par courriers du 19 juillet 2022, il informa cependant lesdits bénéficiaires du maintien des autorisations en question.
I) Quant à la compétence du tribunal Aucun recours au fond n’étant prévu en matière d’autorisation de construire, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en l’espèce.
II) Quant à la recevabilité du recours A) Quant à la recevabilité ratione temporis du recours Les époux C, rejoints sur ce point par l’administration communale, soulèvent l’irrecevabilité ratione temporis du recours sous examen.
A cet égard, ils soutiennent que le certificat point rouge relatif à l’autorisation 0056 aurait été affiché le 4 mai 2021 et que les demandeurs en auraient pris connaissance au plus tard le 7 mai 2021, date à laquelle leur litismandataire aurait envoyé une photographie dudit certificat à l’administration communale. Le délai pour agir à l’encontre de l’autorisation déférée aurait, dès lors, expiré le 4 août 2021, sinon au plus tard le 9 août 2021, le 7 août 2021 ayant été un samedi. Etant donné qu’endéans ce délai, les demandeurs n’auraient introduit ni un recours gracieux ni un recours contentieux contre l’autorisation litigieuse, ils seraient actuellement forclos à agir à son encontre.
Dans ce contexte, les époux C insistent sur le fait que l’autorisation 0056 n’aurait pas été comprise dans l’assiette du recours gracieux des demandeurs du 28 juillet 2021, qui aurait été dirigé exclusivement à l’encontre des quatre autorisations de bâtir référencées sous les numéros 2021/0055, 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059.
Ils ajoutent que dans la mesure où l’autorisation litigieuse serait ainsi devenue définitive, le bourgmestre n’aurait plus eu compétence ratione temporis pour retirer rétroactivement l’acte en question, conformément aux dispositions de l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ». Il s’ensuivrait que le recours, en ce qu’il vise la décision du bourgmestre du 30 novembre 2021, pour autant que celle-ci maintiendrait l’autorisation 0056, serait à déclarer irrecevable pour cause de tardiveté.
Dans leur mémoire en duplique, les époux C réfutent l’argumentation des demandeurs selon laquelle leur moyen d’irrecevabilité ratione temporis serait à rejeter pour ne pas avoir été soulevé in limine litis. A cet égard, ils font valoir, d’une part, que ledit moyen aurait bien été soulevé in limine litis, étant donné qu’il aurait été présenté après l’exposé des faits et avant tout moyen au fond, et, d’autre part, qu’en matière de contentieux administratif, aucune règle n’imposerait aux plaideurs de soulever des irrecevabilités ayant trait aux conditions d’exercice de l’action avant tout débat au fond.
Ils insistent sur le fait que contrairement à l’argumentation des demandeurs, l’autorisation 0056 n’aurait pas été visée par leur recours gracieux du 28 juillet 2021. Si, certes, ce dernier mentionne à deux repises la parcelle 56/2527, et ce de manière « […] totalement anecdotique […] », rien n’indiquerait que les demandeurs, qui auraient clairement délimité le 5champ de leur recours gracieux, auraient entendu soulever une contestation quant au projet de construction basé sur l’autorisation 0056 qui porterait sur ladite parcelle, les époux C soulignant, dans ce contexte, que l’autorisation 0056 ne serait pas mentionnée une seule fois dans les neuf pages dudit recours gracieux.
Les demandeurs concluent au rejet de ce moyen d’irrecevabilité.
Le tribunal précise d’abord que c’est à juste titre que les époux C concluent au rejet de l’argumentation des demandeurs selon laquelle leur moyen d’irrecevabilité ratione temporis n’aurait pas été soulevé in limine litis, étant donné qu’aucun texte légal relatif à la procédure à suivre devant les juridictions de l’ordre administratif ne prévoit l’exigence de soulever in limine litis un moyen d’irrecevabilité devant le tribunal administratif, le seul paramètre en la matière étant fixé par l’article 29 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », en ce qu’une irrecevabilité du recours ne saurait être encourue que si elle a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense.1 Le tribunal relève ensuite qu’aux termes de l’article 13 de la loi du 21 juin 1999, « (1) Sauf dans les cas où les lois ou les règlements fixent un délai plus long ou plus court et sans préjudice des dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice, le recours au tribunal n’est plus recevable après trois mois du jour où la décision a été notifiée au requérant ou du jour où le requérant a pu en prendre connaissance.
(2) Toutefois si la partie intéressée a adressé un recours gracieux à l’autorité compétente avant l’expiration du délai de recours fixé par la disposition qui précède ou d’autres dispositions législatives ou réglementaires, le délai du recours contentieux est suspendu et un nouveau délai commence à courir à partir de la notification de la nouvelle décision qui intervient à la suite de ce recours gracieux.
(3) Si un délai de plus de trois mois s’est écoulé depuis la présentation du recours gracieux sans qu’une nouvelle décision ne soit intervenue, le délai du recours contentieux commence à courir à partir de l’expiration du troisième mois. La date du dépôt du recours gracieux est constatée par la notification qui en a été faite ou par un récépissé délivré au requérant par l’autorité administrative compétente ou son préposé. Ce récépissé doit être produit à l’appui du recours contentieux du tribunal. […] ».
Par ailleurs, quant au point de départ du délai de recours contentieux en matière d’autorisations de construire, l’article 37 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 », prévoit ce qui suit, en ses alinéas 6 et 7 :
« Un certificat délivré par le bourgmestre attestant que la construction projetée a fait l’objet de son autorisation est affiché par le maître de l’ouvrage aux abords du chantier, de manière aisément visible et lisible à partir de la voie publique par les personnes intéressées.
Le certificat mentionne que le public peut prendre inspection à la maison communale des plans afférents appartenant à l’autorisation de construire pendant le délai durant lequel 1 Trib. adm., 14 juin 2004, nos 17045 et 17076 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 904 et l’autre référence y citée.
6l’autorisation est susceptible de recours. Une information mentionnant la délivrance de l’autorisation de construire est publiée sur le site internet de la commune.
Le délai de recours devant les juridictions administratives court à compter de l’affichage du certificat conformément à l’alinéa 6. ».
Il s’ensuit que le délai pour agir à l’encontre d’une autorisation de construire court à compter de l’affichage du certificat point rouge afférent.
En l’espèce, il ressort des pièces versées par les époux C que ledit certificat a été affiché dès le 4 mai 2021, date à laquelle le délai pour agir à l’encontre de l’autorisation 0056 a, dès lors, commencé à courir. La date d’expiration théorique du délai en question est, par conséquent, le 4 août 2021.
Ainsi, la recevabilité ratione temporis du recours sous examen, introduit seulement le 1er mars 2022, dépend de la question de savoir si le recours gracieux des demandeurs, daté du 28 juillet 2021 et introduit le lendemain, a pu avoir pour effet de suspendre le délai en question et de faire courir un nouveau délai de recours à compter de la notification de la décision confirmative du 30 novembre 2021, en application des dispositions de l’article 13 (2) de la loi du 21 juin 1999, ladite notification étant intervenue le 2 décembre 2021, selon les explications des demandeurs.
La réponse à cette question dépend à son tour de la question de savoir si l’assiette dudit recours gracieux comprenait l’autorisation 0056 ou non.
A cet égard, le tribunal relève qu’il est certes exact que le recours gracieux litigieux précise explicitement être dirigé contre « quatre » autorisations de bâtir, identifiées comme étant référencées sous les numéros 2021/0055, 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059 et définies comme « les Autorisations Litigieuses » que les demandeurs ont déclaré contester. Ainsi, ledit recours gracieux n’a pas formellement identifié l’autorisation de construire 0056, elle aussi émise le 29 avril 2021, comme en faisant également l’objet.
Il n’en reste pas moins, d’une part, que le recours gracieux en question contient un extrait du site « géoportail », sur lequel ont été apposées des étoiles qui « […] indiquent les parcelles visées par les Autorisations Litigieuses […] ». L’une de ces étoiles, qui sont au nombre de cinq, et non pas de quatre, est apposée sur la parcelle 56/2527, sur laquelle porte l’autorisation 0056. D’autre part, le recours gracieux critique encore explicitement la légalité de la construction autorisée sur ladite parcelle 56/2527, et ce tant en ce qui concerne la question du respect du recul antérieur qu’en ce qui concerne la question de sa desserte par une voirie privée non règlementaire, cette voirie étant encore plus particulièrement critiquée.
Or, il ressort des explications de l’administration communale que la voirie privée a été autorisée en son intégralité par l’autorisation 0056, nonobstant le fait qu’elle traverse différentes parcelles et propriétés.
Au vu de l’ensemble de ces éléments et des antécédents de l’affaire – les demandeurs ayant déjà contesté, dans leur recours gracieux du 23 octobre 2020 ayant conduit au retrait des autorisations initiales, de même qu’au cours d’une réunion entre parties en date du 10 mars 2021, la constructibilité du site dans son ensemble et en son état actuel, au motif que les parcelles concernées ne seraient pas encore viabilisées, critique qu’ils réitèrent tant dans le 7cadre de leur recours gracieux du 28 juillet 2021 que dans le présent recours et dans les recours parallèles introduits à l’encontre des autres autorisations délivrées le 29 avril 2021 –, le tribunal arrive à la conclusion qu’à travers le recours gracieux sous analyse, les demandeurs ont entendu critiquer l’ensemble des autorisations du 29 avril 2021, en ce compris l’autorisation 0056, et que la référence faite à la première page dudit recours gracieux à « quatre autorisations » – référence qui selon les explications plausibles du litismandataire des demandeurs, fournies à l’audience publique des plaidoiries du 10 janvier 2024, provient d’un copier-coller du recours gracieux du 23 octobre 2020 –, de même que le défaut de mention expresse de l’autorisation 0056 parmi les autorisations définies comme « les Autorisations Litigieuses » sont les fruits d’erreurs matérielles.
Le bourgmestre ne s’est, d’ailleurs, pas mépris sur la portée réelle du recours gracieux lui soumis, tel que cela ressort clairement tant de son courrier du 30 septembre 2021, dans lequel il a annoncé son intention de procéder au retrait de l’autorisation 0056, en se référant expressément au recours gracieux introduit le 29 juillet 2021 par les demandeurs, que de sa décision du 30 novembre 2021, dont l’objet y est décrit comme suit : « […] Concerne :
Recours gracieux contre les autorisations de construire n° 2021/0055, 2021/0056, 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059 […] », et à travers laquelle le bourgmestre a informé les litismandataires respectifs des parties en cause de ce que « […] [l]es autorisations n° 2021/0055, 2021/0056, 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059 […] ne [seraient] […] pas révoquées […] ».
Il s’ensuit qu’en application des dispositions de l’article 13 (2) de la loi du 21 juin 1999, le recours gracieux introduit le 29 juillet 2021, soit avant le 4 août 2021, date d’expiration théorique du délai pour agir à l’encontre de l’autorisation 0056, a eu pour effet de suspendre le délai de recours contentieux et qu’un nouveau délai a commencé à courir à compter de la notification de la décision, précitée, du bourgmestre du 30 novembre 2021.
Etant donné qu’il ressort des explications des demandeurs, non contestées par l’administration communale et les époux C, que cette notification est intervenue le 2 décembre 2021, le recours sous examen, introduit le 1er mars 2022, n’est pas tardif, de sorte que le moyen d’irrecevabilité ratione temporis sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.
B) Quant à l’intérêt à agir des demandeurs Dans leur mémoire en duplique, les époux C font plaider que le fait qu’il existerait d’innombrables voiries privées sur le territoire communal serait de nature à enlever aux demandeurs tout intérêt à agir à l’encontre de l’autorisation 0056, d’autant plus que deux chemins privés similaires seraient en construction à proximité, perpendiculairement à la rue des Genêts.
L’administration communale se rapporte à prudence de justice quant à l’intérêt à agir des demandeurs, ce qui vaut contestation.2 Le tribunal relève que l’intérêt conditionne la recevabilité d’un recours contentieux. En matière de contentieux administratif, portant, comme en l’espèce, sur des droits objectifs, l’intérêt ne consiste pas dans un droit allégué, mais dans le fait vérifié qu’une décision 2 Trib. adm., 27 octobre 2004, n° 17634 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 905 et les autres références y citées.
8administrative affecte négativement la situation en fait ou en droit d’un administré qui peut en tirer un avantage corrélatif de la sanction de la décision par le juge administratif.3 Par ailleurs, toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général. Si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constitue certes un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder. Il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin.4 En d’autres termes, il faut que la construction litigeuse affecte directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien d’un demandeur, lequel doit ainsi voir sa situation s’aggraver effectivement et réellement5, la simple qualité de voisin, même direct, étant dès lors insuffisante pour justifier un intérêt à agir dans le chef du demandeur.
En tout état de cause, l’intérêt à agir s’apprécie non pas de manière abstraite, par rapport à la seule qualité de propriétaire d’un immeuble voisin, mais concrètement au regard de la situation de fait invoquée.6 Le tribunal est, certes, saisi à travers le présent recours de la seule autorisation 0056.
Il n’en reste pas moins qu’afin d’apprécier l’existence d’une aggravation de la situation de propriétaires des demandeurs, le tribunal ne saurait, sans méconnaître la réalité des choses et dans les circonstances particulières de l’espèce, considérer l’autorisation déférée de manière isolée et ainsi faire abstraction du fait que celle-ci s’insère dans un projet d’ensemble consistant en la réalisation de cinq maisons reliées entre elles par une voirie privée nouvellement créée, qui longe la propriété de Monsieur A au nord et touche, en partie, au niveau de la rue des Genêts, la propriété de Madame B, ladite voirie privée, qui est précisément autorisée à travers l’autorisation de construire déférée, s’étendant de la parcelle 56/2525 sise à la rue de Schoenfels vers l’est jusqu’à la parcelle 56/2531, pour être reliée à la rue de Steinsel par le biais de servitudes de passage grevant les parcelles 56/2531, 57/1006 et 57/1746, ainsi que cela se dégage des plans soumis à l’appréciation du tribunal, ensemble l’acte notarié de constitution de servitudes du 31 décembre 2020, tel que versé par les époux C.
Cette conclusion s’impose d’autant plus que le litismandataire de l’administration communale a explicitement admis lors de l’audience des plaidoiries que le recours à des morcellements suivis de la délivrance d’autorisations de construire individuelles s’explique par la volonté des autorités communales d’éviter la procédure d’élaboration d’un plan d’aménagement particulier (« PAP »), procédure qui aurait cependant permis aux demandeurs de discuter le projet dans son ensemble, d’abord à travers des objections adressées au collège échevinal et ensuite à travers un recours contentieux dirigé à l’encontre des éventuelles décisions d’adoption et d’approbation du PAP.
3 Cour adm. 14 juillet 2009, n° 23857C et 23871C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse n° 2 et les autres références y citées.
4 Trib. adm., 22 janvier 1997, n° 9443 du rôle, confirmé par Cour adm., 24 juin 1997, n° 9843C du rôle, Pas. adm.
2023, V° Procédure contentieuse, n° 89 et les autres références y citées.
5 Trib. adm., 21 février 2018, n° 38029 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 89 et les autres références y citées.
6 Trib. adm., 8 décembre 2003, n°16236 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse n° 112 et les autres références y citées.
9Le tribunal relève ensuite que le projet immobilier dans lequel s’insère l’autorisation déférée consiste en la réalisation d’un nouvel ensemble urbanisé – comprenant sa propre voirie –, implanté entre les propriétés respectives de Madame B et de Monsieur A, et ce sur un site qui accueillait auparavant des jardins privés, ainsi que cela ressort de l’image aérienne versée par les époux C.
Dans ces circonstances, le tribunal retient que le projet dans sa globalité, dont l’autorisation actuellement déférée n’est qu’une émanation, expose les demandeurs à une aggravation de leur situation de propriétaires, en termes de vue et – surtout – de tranquillité, suffisante pour leur conférer l’intérêt à agir légalement requis.
Le simple fait qu’il existe d’ores et déjà des chemins privés sur le territoire communal, en ce compris dans le quartier concerné, n’est pas de nature à invalider cette conclusion.
Le moyen d’irrecevabilité sous analyse encourt, dès lors, le rejet.
C) Quant à la recevabilité du recours quant à la forme L’administration communale se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours quant à la forme.
S’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation7, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer à la carence des parties et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions8. Dès lors, et dans la mesure où l’administration communale est restée en défaut d’expliquer en quoi le recours serait irrecevable quant à la forme, ses contestations afférentes encourent le rejet.
A défaut d’autres moyens d’irrecevabilité, le recours en annulation est à déclarer recevable.
III) Quant au fond Prétentions des parties A l’appui de leur recours, après avoir exposé les faits et rétroactes gisant à la base des décisions déférées, les demandeurs soulèvent, d’abord, une violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, au motif que le bourgmestre aurait omis de les informer de ce projet de construction, alors pourtant qu’il n’aurait pu ignorer leur opposition à celui-ci, ne serait-ce que du fait de de leur premier recours gracieux du 26 octobre 2020, ayant abouti à un retrait des précédentes autorisations litigieuses le 28 janvier 2021, ainsi que du fait d’une réunion en présence de toutes les parties en date du 10 mars 2021.
Ensuite, ils contestent le bien-fondé des motifs avancés par le bourgmestre dans sa décision du 30 novembre 2021 pour justifier le maintien des autorisations du 29 avril 2021.
7 Trib. adm., 27 octobre 2004, n° 17634 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 905 et les autres références y citées.
8 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 905 et les autres références y citées.
10 A cet égard, ils concluent au caractère inopérant de l’argumentation du bourgmestre ayant trait à un morcellement antérieur, en faisant valoir (i) qu’un morcellement aurait pour objet de procéder à un découpage du parcellaire et non pas de fixer l’implantation des constructions, (ii) que ledit morcellement serait illégal, étant donné qu’en vertu des dispositions des articles 23, alinéa 2 et 108bis (2), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 et compte tenu du caractère non viabilisé des terrains en cause, l’opération de morcellement, qui aurait consisté en la réalisation de 9 lots à bâtir et d’un lot de voirie et s’analyserait en une opération de lotissement, aurait dû faire l’objet d’un PAP et (iii) que Monsieur A serait totalement étranger à ces morcellements.
Ils insistent encore sur le fait que le principe de confiance légitime, dont se prévaut le bourgmestre, ne saurait être utilement invoqué à l’appui d’une autorisation de construire illégale, les demandeurs soulignant qu’en vertu de l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004, une autorisation de construire ne pourrait être délivrée si, tel qu’en l’espèce, elle n’est pas conforme au plan d’aménagement général (« PAG »).
Les demandeurs contestent encore l’argumentation du bourgmestre selon laquelle Monsieur A aurait lui-même bénéficié d’une dérogation aux règles relatives aux reculs pour la construction de sa maison d’habitation, en soulignant, d’une part, que cette maison aurait été construite en 1964 et qu’il serait « […] fort douteux qu’il [aurait déjà existé] une réglementation à cette époque dans la commune […] » et, d’autre part, que le principe d’égalité devant la loi, tel qu’invoqué dans ce contexte par le bourgmestre, ne saurait mettre en échec les dispositions de l’article 37, précité, de la loi du 19 juillet 2004, qui imposerait qu’un projet de construction devrait être conforme à la réglementation urbanistique applicable, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.
Les demandeurs relèvent ensuite l’absence de viabilisation de la parcelle 56/2527 au sens de la règlementation communale. Ainsi, ladite parcelle, devant accueillir une maison d’habitation portant le numéro … de la rue de Schoenfels, n’aurait aucun accès à une voirie publique et serait érigée en 3ème position, en méconnaissance de l’article 2.2.2.2 de la partie écrite du PAG.
Ils s’emparent des articles 22, 23.1 et 23.2 de la partie écrite du PAG pour soutenir que la voirie privée projetée, qui ne ferait apparemment pas l’objet d’une autorisation formelle et dont on ignorerait comment elle serait créée ou encore quelles infrastructures seraient enterrées, ne serait pas conforme à ces dispositions règlementaires et constituerait une voie non achevée, les demandeurs relevant par ailleurs que la largeur de cette voirie privée d’environ 3,10 mètres serait insuffisante pour assurer les règles élémentaires de sécurité.
Ils excipent ensuite d’une violation de l’article 2.1.2.4 de la partie écrite du PAG, lequel exigerait un recul postérieur d’au moins une fois et demie la hauteur à la corniche et au minimum de 8 mètres.
Ils estiment que les reculs postérieurs et les reculs antérieurs auraient été inversés en l’espèce, alors que la voirie privée donnerait un accès à la parcelle 56/2528 qui devrait être la partie du futur prolongement de la rue des Genêts, le recul postérieur se situant du côté de la rue de Schoenfels et le recul avant se situant à côté de la parcelle 56/2528.
11Du fait de cette inversion, le recul postérieur se retrouverait vers l’est et n’aurait pas la profondeur minimale requise de 8 mètres.
Ils rappellent encore que le recul postérieur devrait être de 1,5 fois la hauteur à la corniche. Or, en l’espèce, les indications figurant sur les plans seraient inexistantes ou illisibles quant à la question de savoir quelle est la hauteur à la corniche, de sorte qu’ils contestent que la hauteur à la corniche renseignée soit correcte.
Par ailleurs, les demandeurs affirment que le niveau du rez-de-chaussée serait erroné.
Ils estiment à cet égard que l’architecte aurait renseigné un point de référence pour le niveau de la rue de Schoenfels, niveau qui ne serait toutefois pas documenté par un quelconque relevé topographique, de sorte qu’il serait « […] contesté que le niveau renseigné soit le bon niveau […] ».
Les demandeurs contestent également que le niveau renseigné pour correspondre à celui de la rue de Schoenfels serait correct, alors que le plan de coupe indiquerait un prétendu niveau du sous-sol à moitié enterré, de sorte qu’il serait impossible que le niveau du rez-de-chaussée se retrouve « […] à ce point « sortant » du niveau du terrain naturel […] », alors pourtant que l’article 2.2.2.1 de la partie écrite du PAG imposerait un maximum de 2 niveaux pleins et un niveau sous combles, les demandeurs soutenant toutefois qu’en l’espèce, il y aurait 3 niveaux pleins et un niveau sous combles.
Les consorts AB relèvent ensuite qu’il ressortirait des plans de coupe que manifestement, il s’agirait d’une construction à toiture plate, alors que le PAG ne semblerait autoriser, sur base de l’article 2.2.2.1 de sa partie écrite, qu’un niveau sous combles et non un étage en retrait, de sorte qu’il y aurait violation dudit article 2.2.2.1.
Ils s’emparent également de l’article 2.2.2 de la partie écrite du PAG quant au recul avant, ladite disposition imposant que « […] les constructions servant à l’habitation seront implantées dans une bande de 15m de profondeur, parallèle à l’alignement des rues et distante de 6 m de ce dernier […] ». Or, en l’espèce, il y aurait lieu de prendre en compte la rue de Schoenfels, comme l’autorisation de bâtir le mentionnerait, de sorte que le recul avant serait de plus de 106 mètres, et non pas de 6 mètres au maximum.
Les demandeurs s’emparent enfin de l’article 15.2 de la partie écrite du PAG, disposant que « [l]es marges de reculement postérieures et latérales seront à aménager en jardin ou en places de stationnement pour les besoins des habitants de la construction […] », pour soutenir que comme il ressortirait des plans que la marge de recul postérieure serait intégralement scellée, l’autorisation devrait encourir l’annulation.
L’administration communale et les époux C concluent au rejet du recours.
L’administration communale fait plaider que puisque l’autorisation 0056, qui prévoirait la voirie de desserte, serait coulée en force de chose décidée pour ne pas avoir été visée par le recours gracieux des demandeurs, ceux-ci ne seraient pas fondés à contester l’existence d’une voirie de desserte et les implantations qui auraient été considérées à partir de cette voirie de desserte.
Les époux C concluent d’abord au rejet du moyen tiré de la violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, en soutenant que les demandeurs ne seraient pas fondés 12à se plaindre de l’absence d’invitation de la part de l’administration communale à présenter leurs observations préalablement à la délivrance de l’autorisation de construire déférée et qu’admettre le contraire relèverait d’un formalisme stérile.
A cet égard, ils réitèrent leur argumentation antérieure relative à l’absence d’introduction d’un recours gracieux ou contentieux endéans le délai légal, et soutiennent que les demandeurs n’auraient subi aucun préjudice, alors qu’ils auraient déjà largement participé au processus décisionnel relatif aux autorisations de construire du 24 juillet 2020, révoquées par le bourgmestre le 28 janvier 2021, et que les arguments présentés dans leurs recours gracieux des 23 octobre 2020 et 28 juillet 2021 seraient identiques, de sorte qu’au moment de la délivrance de l’autorisation de construire actuellement déférée, le bourgmestre aurait déjà eu connaissance de l’ensemble des intérêts divergents en cause et que, dès lors, une participation supplémentaire des demandeurs à la prise de l’autorisation 0056 aurait été superfétatoire.
Quant à l’argumentation des demandeurs ayant trait à l’absence de viabilisation de la parcelle 56/2527, les époux C soutiennent que s’il n’est pas contesté que cette dernière n’aurait actuellement pas d’accès à une voirie publique, il n’en resterait pas moins qu’il existerait un projet d’extension de la rue des Genêts, qui serait conforme aux plans de morcellement respectifs des parcelles des demandeurs et de leur propres parcelles et aux fins de la réalisation duquel des parcelles auraient déjà été cédées au domaine public. Une fois cette extension réalisée, la parcelle litigieuse serait directement desservie par la rue des Genêts et la maison unifamiliale projetée serait érigée en première position depuis ce référentiel.
Par ailleurs, la parcelle 56/2527 serait desservie par un chemin privé, qui s’étendrait depuis la rue de Schoenfels, présenterait une largeur de 4 mètres, certes non atteinte sur deux tronçons, et serait formellement autorisé à travers l’autorisation 0056, laquelle indiquerait le tracé de cette voirie et le détail des infrastructures y relatives.
Ce serait à tort que les demandeurs déduiraient du caractère non achevé de cette voirie privée une interdiction d’y implanter des constructions, étant donné que l’article 23 de la partie écrite du PAG, dont ils se prévalent à cet égard, viserait les seules voies publiques, de sorte qu’il ne serait pas interdit d’implanter une habitation en bordure d’un chemin privé non achevé.
Les époux C contestent encore l’argumentation des demandeurs selon laquelle la largeur de cette voirie privée serait insuffisante pour assurer les règles élémentaires de sécurité, en soulignant (i) que les demandeurs ne se prévaudraient dans ce contexte d’aucune disposition normative que l’autorisation de construire déférée violerait à cet égard, (ii) que toutes les habitations qui seraient construites le long de la future voirie privée auraient une entrée se situant à moins de 50 mètres d’une voirie publique accessible par les engins des services d’urgence et (iii) que les problèmes de circulation évoqués par les demandeurs ne se poseraient pas, alors qu’il y aurait une sortie vers la rue de Steinsel.
Par ailleurs, les époux C insistent sur le fait que les constructions projetées seraient tout à fait ordinaires au regard du tissu urbain existant de la commune de Kopstal, en général, et de celui du quartier des rues de Schoenfels, de Steinsel et des Genêts, en particulier, tant en ce qui concerne la hauteur des constructions, que l’accès aux constructions en seconde position par un chemin privé.
Les époux C contestent encore toute violation de l’article 2.1.2.4 de la partie écrite du PAG, en faisant valoir que puisque le futur chemin privé desservira la parcelle 56/2527 depuis 13la rue de Schoenfels, cette dernière serait le point de référence à prendre en considération, et non pas le prolongement de la rue des Genêts dont la réalisation ne serait pas encore achevée.
Ce serait, dès lors, à tort que les demandeurs feraient état d’une inversion des reculs. Ils ajoutent que compte tenu du fait que la parcelle 56/2528 leur appartiendrait également, l’ensemble des reculs imposés par la partie écrite du PAG seraient respectés. Une fois le prolongement de la rue des Genêts achevé, après cession de la parcelle 56/2528, le référentiel changerait pour devenir la rue des Genêts telle que prolongée et l’ensemble des reculs seraient à nouveau respectés.
Par ailleurs, ils font valoir que contrairement à l’argumentation des demandeurs, l’article 2.2.2.1 de la partie écrite du PAG serait bien respecté en l’espèce, étant donné que plus de la moitié du sous-sol de la construction projetée serait enterrée par rapport au terrain naturel, que les caves et garages de ladite construction auraient une hauteur de 2,40 mètres, de sorte qu’ils ne pourraient être qualifiés d’étages pleins, en application de l’article 11.1 de la partie écrite du PAG, et que le niveau sous combles serait conforme aux prescriptions de l’article 17.1 de ladite partie écrite.
Les époux C concluent encore au rejet du moyen tiré de la violation de l’article 2.2.2 de la partie écrite du PAG, en réitérant leurs développements ayant trait à l’absence d’inversion des reculs antérieur et postérieur et en soulignant que la distance de 6 mètres, telle que prévue par ladite disposition réglementaire, constituerait une valeur minimale, et non pas une valeur absolue.
Finalement, les époux C concluent au rejet du moyen tiré de la violation de l’article 15.2 de la partie écrite du PAG, en faisant valoir que ce serait à tort que les demandeurs soutiendraient que le recul postérieur serait entièrement scellé, alors qu’il se dégagerait des plans que ledit recul serait aménagé en place de stationnement et entrée de garage, conformément aux dispositions des articles 2.2.3 et 15.2 de la partie écrite du PAG.
Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs soutiennent, en substance, qu’il se dégagerait de la jurisprudence récente de la Cour administrative qu’en la présente matière, une information des tiers par un affichage ex post ne serait pas suffisante au regard des dispositions de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.
Par ailleurs, ils réfutent l’argumentation des époux C ayant trait à leur participation au processus décisionnel relatif aux autorisations de construire du 24 juillet 2020, révoquées par le bourgmestre le 28 janvier 2021, et à l’identité des arguments invoqués dans les recours gracieux des 23 octobre 2020 et 28 juillet 2021. Sur ce dernier point, ils insistent sur le fait que ces arguments auraient été différents pour avoir visé des autorisations différentes, que dans le cadre du recours gracieux du 23 octobre 2020, il n’y aurait eu aucune discussion quant à la prolongation de la rue des Genêts et qu’aucune voirie privée n’aurait été prévue dans le cadre des autorisations de construire du 24 juillet 2020. Le seul élément commun aux deux recours gracieux aurait été l’obligation préalable de recourir à un PAP « nouveau quartier », ci-après désigné par « PAP NQ ».
Quant à leur moyen tiré de l’absence de viabilisation de la parcelle litigieuse, les demandeurs font plaider que les époux C ne sauraient utilement se prévaloir dans ce contexte du projet de prolongement de la rue des Genêts, étant donné que ce prolongement serait futur et hypothétique, les demandeurs soulignant qu’aucune cession au domaine public n’aurait encore eu lieu.
14 Quant à l’argumentation des époux C ayant trait à l’existence d’une voirie privée, les demandeurs soutiennent que ce serait à tort que ces derniers soutiendraient que les articles 23.1 et 23.2 de la partie écrite du PAG ne viseraient que les seules voies publiques. L’article 20 de la partie écrite du PAG serait le pendant de l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004, qui prévoirait que les constructions ne seraient, en principe, permises que sur des parcelles qui seraient viabilisées, ce qui, de l’aveu des époux C, ne serait pas le cas de la parcelle litigieuse. Il se dégagerait dudit article 20 qu’une construction ne pourrait être érigée que le long de voies existantes ou de voies nouvelles. Or, en l’espèce, la voirie privée ne remplirait ni les critères d’une voie existante, tels que prévus par l’article 21 de la partie écrite du PAG, ni ceux d’une voie nouvelle, tels qu’énumérés à l’article 22 de la partie écrite du PAG. Dès lors, il ne pourrait s’agir que d’une voie non achevée, au sens de l’article 23.2 de la partie écrite du PAG, lequel viserait, non pas exclusivement les voies publiques, tel que soutenu par les époux C, mais les voies publiques non achevées, d’une part, et les parties de voies non achevées, d’autre part.
En conclusion, les demandeurs soutiennent qu’il ressortirait de ces dispositions légale et réglementaires qu’aucune autorisation de construire ne saurait être délivrée en présence d’une parcelle non viabilisée et non bordée d’une voirie publique ou nouvelle.
Par ailleurs, ils réfutent l’argumentation des époux C selon laquelle l’autorisation 0056 comprendrait le détail des infrastructures relatives à la voirie privée, en soutenant, en substance, que les informations fournies seraient largement insuffisantes pour qu’il puisse être conclu à une viabilisation des parcelles concernées dans les règles de l’art et pour assurer la sécurité des habitants et usagers, les demandeurs soulignant encore qu’au niveau de la maison d’habitation sise à la rue de Schoenfels, la voirie privée n’aurait qu’une largeur de 3 mètres, ce qui en compromettrait l’accès, et qu’elle ne présenterait pas d’aire de rebroussement, tout en contestant que ladite voirie disposerait d’une sortie vers la rue de Steinsel.
Ils ajoutent que le fait qu’il existerait d’ores et déjà des voiries privées sur le territoire communal serait dépourvu de pertinence, au regard de l’illégalité du projet de construction litigieux.
Quant à leur moyen tiré de la violation de l’article 2.1.2.4 de la partie écrite du PAG, les demandeurs soutiennent que le recul avant serait le recul entre la façade de la construction donnant sur la rue et la voie publique. Or, en l’espèce, le recul arrière serait matérialisé par l’entrée de garage et l’entrée pour piétons, alors que l’inverse devrait être le cas. Le « réel » recul avant constitué par l’entrée de garage et l’entrée pour piétons ne se trouverait pas en direction de la rue de Schoenfels, mais serait établi par rapport à l’hypothétique prolongement de la rue des Genêts. Il y aurait donc bien une inversion des reculs.
Par ailleurs, ils réfutent l’argumentation des époux C selon laquelle la parcelle 56/2528 leur appartiendrait également, de sorte que les reculs réglementaires seraient respectés. A cet égard, ils soulignent qu’un recul serait la distance entre une façade et la limite cadastrale et qu’il ne serait pas possible d’apprécier les reculs en prenant en compte une autre parcelle adjacente.
De même, ce serait à tort que les époux C feraient plaider que les reculs seraient respectés dès la réalisation du prolongement de la rue des Genêts, étant donné que celui-ci serait hypothétique, qu’il serait impossible de connaître la réglementation urbanistique qui 15serait alors applicable et que la légalité d’une autorisation de construire s’apprécierait au jour de sa délivrance.
Les demandeurs ajoutent que le recul postérieur, constitué de l’entrée de la maison projetée, ne mesurerait que 6,17 mètres, de sorte à être inférieur aux valeurs minimales de 8 mètres et de 1,5 fois la hauteur à la corniche, telles que prévues par l’article 2.1.2.4 de la partie écrite du PAG.
Ils contestent l’argumentation des époux C selon laquelle le niveau comprenant le garage serait à qualifier de niveau en sous-sol pour être enterré à raison de plus de sa moitié, en soulignant que seulement 1,24 mètres de ce niveau seraient enterrés, tout en soutenant que le fait que le niveau en question n’aurait que 2,40 mètres de hauteur ne permettrait pas de retenir qu’il ne s’agirait pas d’un niveau plein, étant donné qu’il ne s’agirait pas de pièces destinées à l’habitation. Ils en concluent que ce niveau de la maison projetée en constituerait bien le rez-
de-chaussée.
Quant au recul antérieur, les demandeurs insistent sur le fait que contrairement à l’argumentation des époux C, la distance de 6 mètres prévue à l’article 2.2.2 de la partie écrite du PAG constituerait bien un maximum.
Quant à leur moyen tiré de la violation de l’article 15.2 de la partie écrite du PAG, les demandeurs soutiennent qu’il ne se dégagerait pas des plans que le recul postérieur, qui, de l’aveu des époux C, se situerait au niveau de l’entrée du garage, serait aménagé en place de stationnement. Il en ressortirait uniquement que l’allée de garage serait entièrement scellée. Or, une allée de garage ayant une pente de 14 % ne serait manifestement pas à qualifier d’emplacement de stationnement.
En termes de duplique, l’administration communale insiste sur le fait que l’autorisation 0056 comprendrait la réalisation de la voirie de desserte, que les demandeurs ne préciseraient pas en quoi celle-ci serait illégale et que les dispositions réglementaires relatives aux reculs, aux implantations et aux hauteurs autorisables auraient été appliquées en considération de cette voirie de desserte.
Dans leur mémoire en duplique, les époux C insistent sur le fait que les demandeurs n’auraient pas présenté d’éléments de participation nouveaux par rapport à ceux déjà invoqués dans leur recours gracieux du 23 octobre 2020, de sorte qu’une annulation des décisions déférées pour violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 n’aurait aucun effet utile.
S’agissant de la question de la viabilisation de la parcelle 56/2527, ils soulignent que les articles 20, 22 et 23 de la partie écrite du PAG ne concerneraient que les voies publiques et que retenir le contraire méconnaîtrait le principe de légalité et enlèverait toute cohérence à l’article 23. Ainsi, il n’existerait aucune disposition de la partie écrite du PAG qui interdirait l’implantation d’une construction en bordure d’une voie privée non achevée.
Ils ajoutent (i) que la voirie privée projetée serait documentée de manière extrêmement précise sur les plans de l’autorisation 0056, (ii) que les services de secours, qui n’auraient jamais rencontré de problèmes face aux chemins étroits similaires se trouvant dans les alentours, y pourraient manœuvrer et rebrousser au niveau de l’extrémité sud du cul-de-sac de la future rue des Genêts, sinon des terrains attenants et (iii) qu’il existerait bien une sortie vers 16la rue de Steinsel, les époux C renvoyant, à cet égard, à des photos du chantier et au susdit acte notarié du 31 décembre 2020, qui prévoirait des servitudes de passage et de tréfonds en faveur de la parcelle litigieuse.
Quant au moyen tiré de la violation de l’article 15.2 de la partie écrite du PAG, les époux C insistent sur le fait qu’une place de stationnement serait prévue devant le garage qui pourrait accueillir au moins un véhicule.
Appréciation du tribunal Quant à la légalité externe des décisions déférées et s’agissant, plus particulièrement, du moyen tiré de la violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, le tribunal relève que celui-ci prévoit ce qui suit :
« Lorsqu’une décision administrative est susceptible d’affecter les droits et intérêts de tierces personnes, l’autorité administrative doit lui donner une publicité adéquate mettant les tiers en mesure de faire valoir leurs moyens.
Dans la mesure du possible, l’autorité administrative doit rendre publique l’ouverture de la procédure aboutissant à une telle décision.
Les personnes intéressées doivent avoir la possibilité de faire connaître leurs observations.
La décision définitive doit être portée par tous moyens appropriés à la connaissance des personnes qui ont présenté des observations ».
Il est certes exact que s’agissant de l’application de cette disposition réglementaire en matière d’urbanisme communal, le tribunal de céans a, dans le passé, retenu, d’une part, qu’au vu des travaux parlementaires ayant abouti à la loi du 19 juillet 2004, le législateur aurait explicitement exclu l’obligation de procéder antérieurement à une information de toutes les personnes intéressées, au motif qu’une notification individuelle des personnes intéressées ne serait pas possible pour des raisons pratiques, liées notamment à l’impossibilité d’identifier ex ante toutes les personnes susceptibles d’être intéressées, de sorte à ne retenir a priori en matière d’urbanisme que l’obligation d’une information ex post par la voie de l’affichage9 et, d’autre part, que ce principe ne serait battu en brèche que lorsque des personnes effectivement intéressées ont manifesté préalablement et valablement leur intérêt à être informées d’un projet de construction, respectivement lorsque l’administration ne pouvait pas raisonnablement ignorer l’intérêt de ces tiers à être informés du sort réservé à un projet10.
Cependant, dans son arrêt du 12 mai 2022, portant le numéro 46929C11 du rôle, tel qu’invoqué par les demandeurs, la Cour administrative a pris position quant à cette jurisprudence dans les termes suivants :
9 Trib. adm., 7 juillet 2008, n° 23654 du rôle, confirmé par Cour adm., 29 janvier 2009, n° 24748C du rôle, Pas.
adm. 2023, V° Urbanisme, n° 941 et les autres références y citées.
10 Trib. adm. prés., 9 novembre 2015, n° 37082 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 942 et l’autre référence y citée.
11 Cour adm., 12 mai 2022, n° 46929C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure administrative non contentieuse, nos 184 et 185.
17« […] Cette solution résulte ostensiblement d’une mauvaise lecture des travaux parlementaires, cités par le tribunal et analysés pour la première fois en ce sens au niveau du jugement précité du 7 juillet 2008 (doc. Par. 4486-3, pp. 65 et 66).
En effet, en relisant ces documents, il appert très clairement que le législateur, à l’époque, avait l’intention, d’un côté, de cerner l’ensemble des tiers intéressés par rapport auxquels la décision d’autorisation devait être communiquée et, d’un autre côté, de faire en toute occurrence courir les délais contentieux dans l’intérêt du principe de sécurité juridique.
A aucun endroit, au niveau des travaux parlementaires en question, le législateur ne s’exprime dans le sens d’abandonner la procédure précontentieuse soit de l’affichage, soit de la notification individuelle.
En toute occurrence, l’affichage de la demande d’autorisation ou d’un renseignement suffisant concernant l’existence de pareille demande et la possibilité de tout intéressé de la consulter à un endroit donné avec possibilité de faire valoir ses observations doit être possible dans une très large majorité des cas, de sorte que la réserve de l’alinéa 2 de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 consistant en le bout de phrase « dans la mesure du possible » est appelée à jouer de moins en moins souvent.
Pareil affichage a pour le surplus l’avantage de donner une possibilité égale à tous les intéressés vu qu’il est destiné à se faire à l’endroit de l’objet de la demande d’ouverture de la procédure, généralement, une demande d’autorisation de construire.
[…] De manière générale, la Cour se doit de souligner que précisément en matière d’urbanisme communal, la nécessité d’un dialogue avec une possibilité de prise de participation des personnes intéressées à la décision à prendre est des plus importantes. Ceci est d’autant plus important dans un contexte où, sociologiquement, la pandémie y aidant encore, les personnes sont amenées à se replier de plus en plus sur soi et à éviter ainsi plus souvent que jamais les échanges permettant précisément, à travers des discussions à mener, en vue de trouver des solutions dans l’intérêt d’un meilleur vivre ensemble et de relations de voisinage optimisées.
C’est manifestement l’information ex ante qui rend possible l’objectif valablement visé par l’article 1er de la loi du 1er décembre 1978 en ses alinéas 2 et 3, en ce qu’elle permet seule d’assurer la défense des administrés, voisins en l’occurrence, de leur permettre de participer à leur tour à la prise de la décision, c’est-à-dire l’autorisation à délivrer, en proposant des éléments de participation valables, démarche qui présuppose un accès aux informations et, de manière basique, une information sur l’ouverture de la demande d’autorisation.
L’information ex ante rendant possible la participation de l’administré voisin est aussi la seule garantie de ce processus de participation, par essence de nature, à éviter des conflits ultérieurs et à baliser les difficultés le plus tôt possible. […] ».
Il ressort ainsi des enseignements de la Cour administrative qu’en la présente matière, il doit, en principe, être procédé à l’information ex ante des tiers intéressés, notamment à travers l’affichage de la demande d’autorisation ou d’un renseignement suffisant concernant l’existence de pareille demande, les tiers intéressés devant pouvoir la consulter à un endroit donné avec possibilité de faire valoir leurs observations.
18 En l’espèce, il est constant qu’une telle information ex ante des tiers intéressés – qualité qui doit être reconnue aux demandeurs, dont l’intérêt à agir vient d’être constaté ci-avant – n’a pas eu lieu.
Quant aux conséquences à tirer de ce constat, le tribunal relève que l’omission par l’administration de donner aux tiers intéressés par la prise d’une décision administrative, la possibilité de présenter leurs observations préalables, constitue l’omission d’une formalité substantielle dont la sanction appropriée est en principe l’annulation de la décision administrative. Cette sanction sévère de l’inobservation des exigences de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ne saurait cependant être prononcée que si, du fait de cette inobservation, les tiers ont subi un préjudice. Une absence de préjudice est donnée si ceux-ci ont pu exposer l’ensemble de leurs doléances et démontrer à suffisance le contenu des propositions concrètes tendant à voir prendre une décision différente de celle critiquée. Elle est encore donnée lorsque la décision a été prise dans des matières où l’administration a une compétence liée, ne disposant d’aucun pouvoir d’appréciation, de sorte que l’intervention des tiers dans la procédure d’élaboration de la décision ne saurait utilement influer sur le contenu de la décision litigieuse.12 Il est vrai que dans la matière des autorisations de construire, les autorités compétentes voient leur compétence largement liée, surtout lorsque les dispositions du PAG et du règlement sur les bâtisses sont précises, mais il subsiste généralement, dans des limites plus ou moins étroites, un pouvoir d’appréciation. Il s’agit partant pour le juge d’examiner si la participation des tiers intéressés à la délivrance de l’autorisation de construire litigieuse aurait pu influer sur le contenu de cette dernière, ce qui n’est le cas que si le bourgmestre disposait en la matière d’un pouvoir d’appréciation à l’exercice duquel les tiers auraient pu faire valoir, au préalable, leur point de vue qui aurait dès lors pu être pris utilement en considération.13 Dans le même ordre d’idées, il a été jugé qu’en présence d’une disposition visant la participation de l’administré à la prise d’une décision administrative, présupposant également l’initiative de celui-ci, le défaut d’avoir rendu publique l’ouverture de la procédure afférente, tout en constituant une formalité substantielle, ne saurait être sanctionné que dans la mesure où son non-respect a été invoqué utilement dans le délai contentieux par l’administré qui affirme ne pas avoir pu de ce chef faire valoir ses observations et que ces dernières contiennent, outre les moyens de légalité invoqués, des éléments concrets de participation à la décision à prendre, qui, eussent-ils pu être proposés en temps utile, auraient été de nature à conduire l’autorité compétente à prendre une décision différente en tenant compte de ces propositions, dans les limites d’appréciation laissées au cas précis à l’auteur de la décision.14 En l’espèce, le tribunal rappelle que les demandeurs avaient introduit en date du 23 octobre 2020 un recours gracieux contre les autorisations de bâtir initiales, recours gracieux qui était fructueux dans la mesure où le bourgmestre a retiré ces autorisations par décision du 28 janvier 2021. Le tribunal constate encore à la lecture dudit recours gracieux du 23 octobre 2020 que les demandeurs avaient déjà soulevé à l’époque la problématique de la viabilisation des terrains concernés, de l’absence de voirie publique et de la nécessité d’élaboration d’un 12 Cour adm., 11 juin 2009, nos 25463C et 25465C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 189 et les autres références y citées.
13 Ibid..
14 Trib. adm., 22 janvier 2003, n° 14868 du rôle, confirmé par Cour adm., 17 juin 2003, nos 16056C et 16077C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 188 et les autres références y citées.
19PAP NQ, avant toute délivrance d’une autorisation de construire, problématique qui constitue toujours le point de discorde essentiel entre les parties. Par ailleurs, il est constant en cause que le 10 mars 2021, une réunion a eu lieu entre les responsables communaux, les consorts AB et les bénéficiaires des autorisations de construire retirées le 28 janvier 2021 et il ressort des propres explications des demandeurs qu’au cours de cette réunion, ils ont insisté sur le fait que les différentes parcelles issues des morcellements ne seraient pas viabilisées, qu’une telle viabilisation ne pourrait se faire que par la future prolongation de la rue des Genêts et que la constructibilité du site nécessiterait au préalable l’adoption d’un PAP.
Ainsi, les demandeurs avaient déjà pu porter à la connaissance du bourgmestre leur opposition à l’urbanisation du site en son état factuel et juridique actuel, avant la délivrance des autorisations du 29 avril 2021.
A cela s’ajoute que les demandeurs ont encore pu introduire un recours gracieux à l’encontre des autorisations en question. A travers ce recours gracieux, auquel le bourgmestre a répondu le 30 novembre 2021, ils ont réitéré leur argumentation ayant trait au défaut de viabilisation du site, tout en soulevant différentes violations de la réglementation urbanistique communale.
Au vu de ces considérations, le tribunal conclut que les demandeurs ont, à suffisance, pu présenter leur point de vue au cours de la procédure précontentieuse, malgré l’inobservation des exigences de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, telle qu’invoquée par eux.
A cela s’ajoute que les différents moyens d’annulation qu’ils soulèvent à l’encontre de l’autorisation de construire déférée, à savoir ceux ayant trait (i) à l’absence de viabilisation du site litigieux et à la création d’une voirie privée, en méconnaissance, notamment, des articles 22, 23.1 et 23.2 de la partie écrite du PAG, (ii) au non-respect des dispositions de l’article 2.1.2.4 de la partie écrite du PAG relatives au recul postérieur, (iii) à la violation des dispositions de l’article 2.2.2.1 de la partie écrite du PAG concernant les niveaux d’une construction, (iv) au non-respect du recul antérieur imposé par l’article 2.2.2 de la partie écrite du PAG et (v) au caractère intégralement scellé de la marge de recul postérieure, en violation de l’article 15.2 de la partie écrite du PAG, se résument à des questions de pure légalité et ne constituent pas des éléments de participation qui auraient pu influer dans un sens ou dans l’autre sur l’exercice, par le bourgmestre, d’un pouvoir d’appréciation qui lui aurait été conféré par une disposition de la réglementation urbanistique communale.
Il suit des développements qui précèdent que les demandeurs n’ont pas subi du fait de l’inobservation des dispositions de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 un préjudice qui serait de nature à justifier l’annulation des décisions déférées, de sorte que le moyen afférent est à rejeter.
Quant à la légalité interne des actes déférés, le tribunal rappelle, à titre liminaire, qu’il vient de rejeter le moyen d’irrecevabilité ratione temporis du recours sous examen tel que soulevé par l’administration communale et les époux C, après avoir retenu que contrairement à l’argumentation de ces derniers, l’autorisation 0056 était bien visée par le recours gracieux des demandeurs. C’est, dès lors, à tort que l’administration communale soutient que l’autorisation 0056, qui prévoirait la voirie de desserte, serait coulée en force de chose décidée pour ne pas avoir été visée par le recours gracieux des demandeurs, de sorte que ceux-ci ne 20seraient pas fondés à contester l’existence d’une voirie de desserte et les implantations qui auraient été considérées à partir de cette voirie de desserte.
Le tribunal précise ensuite que c’est à tort que pour justifier sa décision de maintien de l’autorisation de construire litigieuse, le bourgmestre a opposé aux consorts AB les autorisations de morcellement préalablement délivrées.
En effet, un morcellement au sens urbanistique du terme se limite à une division foncière d’une ou de plusieurs parcelles en plusieurs nouvelles parcelles en vue de créer des places à bâtir15, sans imposer juridiquement l’implantation de bâtiments, voire le gabarit de constructions. D’ailleurs, il ne se dégage aucunement des pièces versées en cause que l’implantation concrète des constructions sur les parcelles issues du morcellement, telle qu’elle est actuellement prévue par les autorisations du 29 avril 2021, aurait déjà été définitivement arrêtée lors de la réalisation du morcellement litigieux et les plans afférents, tels que versés par l’administration communale, ne font pas non plus état de la voirie privée actuellement litigieuse.
Par ailleurs, ce morcellement, même à le supposer légal, ne saurait en tout état de cause dispenser le bourgmestre de son obligation de respecter les normes encadrant la délivrance d’une autorisation de construire, telles qu’elles découlent de la loi du 19 juillet 2004 et de la réglementation urbanistique communale, étant relevé que le principe de confiance légitime, auquel le bourgmestre s’est référé dans ce contexte dans sa décision du 30 novembre 2021, ne saurait être invoqué pour voir consacrer une situation contraire à la loi16.
Or, l’article 108bis (2) de la loi du 19 juillet 2004, tel qu’invoqué par les demandeurs et qui réglemente la mise en œuvre des PAG fondés sur la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, entretemps abrogée, tels que celui de la commune de Kopstal, prévoit, en son alinéa 2, que « Dans le cadre de la mise en œuvre du présent article, l’établissement d’un plan d’aménagement particulier dont le contenu des parties graphique et écrite correspond à celui du plan d’aménagement particulier «nouveau quartier» est obligatoire dans les zones définies au plan d’aménagement général comme zones soumises à l’élaboration d’un plan d’aménagement particulier et en cas de développement de lotissements de terrains ou de création de logements sur un ou plusieurs terrains non viabilisés, conformément à l’article 23, alinéa 2. », les critères permettant d’apprécier le caractère viabilisé ou non d’un terrain étant, conformément audit article 23, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 « […] la réalisation des voies publiques, l’installation des réseaux de télécommunication, ainsi que des réseaux d’approvisionnement en eau potable et en énergie, des réseaux d’évacuation des eaux résiduaires et pluviales, de l’éclairage, de l’aménagement des espaces collectifs, des aires de jeux et de verdure ainsi que des plantations […] ».
Au regard de ces critères, il est manifeste qu’au jour de la prise des décisions déférées, la parcelle 56/2527, qui, de manière non contestée, ne dispose pas d’un accès à la voirie publique et qui, selon l’autorisation litigieuse, sera desservie par une voirie privée seulement projetée, était un terrain non viabilisé, tel que soutenu à juste titre par les demandeurs, la qualification de terrain non viabilisé ayant encore été retenue par le tribunal pour les parcelles 15 Trib. adm., 13 octobre 2014, n° 32991 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 726 et les autres références y citées.
16 En ce sens : trib. adm., 15 juin 2022, n° 45237 du rôle, confirmé par Cour adm., 23 mars 2023, n° 47735C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Lois et règlements, n° 61.
2156/2526, 56/2530 et 56/2531, dans ses jugements de ce jour rendus dans les affaires inscrites sous les numéros 47102, 47103 et 47106 du rôle.
Il suit de ce constat que l’autorisation de construire déférée méconnaît non seulement l’article 37, alinéa 3 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel « Le bourgmestre n’accorde aucune autorisation tant que les travaux de voirie et d’équipements publics nécessaires à la viabilité de la construction projetée ne sont pas achevés […] », mais aussi l’article 108bis (2), alinéa 2, précité, de la même loi.
En effet, lorsque les conditions légales et/ou réglementaires imposant l’élaboration d’un PAP sont réunies, l’adoption d’un tel PAP constitue un préalable nécessaire à la délivrance non seulement d’une autorisation de morcellement, mais aussi d’une autorisation de construire.17 Or, en l’espèce, l’autorisation de construire déférée s’insère dans un projet de construction de plusieurs maisons unifamiliales sur des terrains non viabilisés, issus d’un morcellement. Cette opération peut, dans sa globalité, être qualifiée tant de développement d’un lotissement de terrains que de création de logements sur un ou plusieurs terrains non viabilisés, de sorte que peu importe l’existence des autorisations de morcellement invoquées par le bourgmestre et indépendamment de la question de leur légalité, la délivrance de l’autorisation de construire litigieuse aurait en tout état de cause dû être précédée de l’adoption d’un PAP dont le contenu des parties graphique et écrite correspond à celui du PAP NQ, en application des dispositions de l’article 108bis (2), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004.
A cette double illégalité s’ajoute une troisième, consistant en le non-respect des dispositions de la réglementation urbanistique communale relatives aux voies où l’implantation de constructions est permise, prévues aux articles 20 et suivants de la partie écrite du PAG, tels qu’invoqués par les demandeurs.
A cet égard, le tribunal relève que l’article 20 de la partie écrite du PAG, intitulé « Voies publiques où l’implantation de constructions est permise », prévoit que « L’implantation de constructions est permise en principe le long de voies existantes ou nouvelles ou le long des parties de voies existantes et nouvelles figurant au projet d’aménagement. ».
L’article 21 de la partie écrite du PAG, relatif aux « Voies publiques existantes », dispose que « Sont considérées comme voies ou parties de voies existantes, les voies de l’Etat ou de la commune, ou les parties de ces voies qui, de mémoire d’homme, ont servi à l’implantation de constructions et qui, reconnues comme partie intégrante du réseau de voirie publique, ont été spécialement consolidées, pourvues de canalisation d’égout, d’adduction d’eau et d’éclairage public. ».
L’article 22 de la partie écrite du PAG, intitulé « Voies nouvelles », est rédigé comme suit :
« Les voies ou parties de voies nouvelles sont censées prêtes à l’implantation de constructions, lorsque les conditions ci-après sont remplies :
17 Cour adm., 30 avril 2013, n° 31809C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 614.
22a) les alignements de voirie, ainsi que les profils longitudinaux et transversaux doivent être déterminés ;
b) le remembrement éventuellement requis aux termes de l’article 22 de la loi du 12 juin 1937, concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, doit avoir été effectué ;
c) la propriété des voies et trottoirs doit avoir été cédée dans toute sa largeur ;
d) la surface des voies doit correspondre dans toute sa largeur au niveau fixé dans le plan d’alignement du projet d’aménagement et doit se raccorder à une voie existante ou à une voie nouvelle ;
e) la chaussée doit être consolidée conformément aux dispositions de l’autorité compétente ;
f) les canalisations d’égout doivent être installées et raccordées au réseau communal de canalisation ;
g) la voie ou partie de voie doit être raccordée au réseau public d’adduction d’eau, de distribution d’électricité. ».
Par ailleurs, l’article 23, intitulé « Voies non achevées », est subdivisé en un article 23.1 et un article 23.2, qui prévoient respectivement que « Les voies publiques ou parties de voies publiques ne répondant pas aux conditions énumérées à l’article 22 sont considérées comme non achevées. » et qu’« En bordure des voies publiques non achevées ou de parties de voies non achevées, aucune construction ne peut y être implantée. ».
Le tribunal ne saurait partager l’argumentation des époux C selon laquelle les articles 20, 22 et 23 de la partie écrite du PAG ne concerneraient que les voies publiques, de sorte qu’il serait permis d’implanter des constructions le long de voies privées non achevées.
En effet, compte tenu de l’absence, dans la partie écrite du PAG, de dispositions spécifiquement applicables aux voies privées nouvelles, pareille lecture des articles 20 et suivants de la partie écrite du PAG reviendrait à admettre que le pouvoir réglementaire communal, d’une part, aurait pris le soin de réglementer en détail les conditions à respecter pour l’implantation de constructions le long de voies publiques nouvelles et qui tiennent notamment, à l’état consolidé de la chaussée, à l’installation et au raccordement au réseau communal de canalisation des canalisations d’égout et au raccordement au réseau public d’adduction d’eau et de distribution d’électricité et, d’autre part, à permettre la réalisation de constructions le long de voies privées nouvelles sans condition aucune relative aux infrastructures dont ces voies privées doivent être dotées, ce qui, non seulement serait dépourvu de tout sens et de toute cohérence, mais risquerait encore de causer des problèmes évidents de salubrité et de sécurité publiques.
A cela s’ajoute que les voies privées ont bien été prises en considération par le pouvoir réglementaire communal, à travers l’article 21 de la partie écrite du PAG, dont il ressort que deux types de voies différentes peuvent être considérées comme « voies ou parties de voies existantes » au sens de la réglementation urbanistique communale, à savoir, d’une part, les voies de l’Etat ou de la commune, celles-ci étant d’office considérées comme « voies existantes », et, d’autre part, les voies ou parties de voies, ni étatiques, ni communales, partant privées, lorsque ces dernières répondent à une double condition, à savoir avoir servi depuis plusieurs dizaines d’années (« de mémoire d’homme ») à desservir des constructions et avoir été en conséquence pourvues des revêtements et infrastructures nécessaires, de sorte à être de facto considérées comme faisant partie intégrante du réseau de voirie publique. Il s’ensuit qu’une voie privée est susceptible d’être considérée comme « voie existante » au sens du PAG 23lorsqu’elle est de facto considérée comme faisant partie de la voirie publique du fait de son usage et de son aménagement.18 Le fait qu’une voie privée ne peut être considérée comme une « voie existante » permettant, aux termes de l’article 20 de la partie écrite du PAG, l’implantation de constructions qu’à condition, notamment, d’être pourvue des revêtements et infrastructures nécessaires est de nature à corroborer la conclusion dégagée ci-avant quant à l’incohérence de la lecture faite par les époux C des dispositions des articles 20, 22 et 23 de la partie écrite du PAG, selon laquelle ceux-ci ne viseraient que les voies publiques, de sorte qu’il serait permis d’implanter des constructions le long de voies privées non achevées.
Par ailleurs, la lecture de ces dispositions réglementaires préconisée par les époux C se heurte aux dispositions hiérarchiquement supérieures de l’article 37, alinéa 3 de la loi du 19 juillet 2004, qui interdit la délivrance d’une autorisation de construire « […] tant que les travaux de voirie et d’équipements publics nécessaires à la viabilité de la construction projetée ne sont pas achevés […] ».
Au vu de ces considérations, le tribunal retient que les articles 20 à 23 de la partie écrite du PAG sont à interpréter en ce sens que seules peuvent recevoir des constructions, d’une part, les voies pouvant être qualifiées de « voies existantes », en application de l’article 21 de la partie écrite du PAG, ou les parties de celles-ci et, d’autre part, les voies ou parties de voies nouvelles, à condition de remplir l’ensemble des conditions énumérées par l’article 22 de la partie écrite du PAG19, parmi lesquelles figure celle de la cession des surfaces des voies et trottoirs, prévue au point c) de ladite disposition réglementaire, cession qui confère un caractère public à la voie concernée. Ainsi, l’implantation de constructions n’est permise que le long d’une voie publique, sauf l’hypothèse d’une voie privée de facto considérée comme faisant partie de la voirie publique du fait de son usage et de son aménagement et, qui, en application de l’article 21 de la partie écrite du PAG, peut être qualifiée de « voie existante ».
Dès lors, et étant donné qu’en l’espèce, la voie projetée, d’une part, ne saurait manifestement être qualifiée de « voie existante », en application de l’article 21 de la partie écrite du PAG, et, d’autre part, ne remplit pas la susdite condition ayant trait à la cession des surfaces des voies et trottoirs, telle que prévue à l’article 22, point c) de la partie écrite du PAG, il s’agit tout au plus d’une voie non achevée, au sens de l’article 23 de la partie écrite du PAG, de sorte qu’il ne s’agit pas d’une voie permettant l’implantation de constructions en application des articles 20 à 23, précités, de la partie écrite du PAG.
Il suit des considérations qui précèdent et sans qu’il y ait besoin de statuer plus en avant que l’autorisation de construire déférée, et, par voie de conséquence, aussi la décision confirmative sur recours gracieux du 30 novembre 2021, sont à annuler pour violation des articles 37, alinéa 3 et 108bis (2), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, ainsi que des articles 20, 22 et 23 de la partie écrite du PAG.
Cette conclusion n’est pas énervée par l’argumentation du bourgmestre selon laquelle Monsieur A aurait bénéficié d’une dérogation aux règles relatives aux reculs des constructions, étant donné qu’au-delà de toute autre considération, les illégalités constatées ci-avant ne tiennent pas aux reculs de la construction projetée, de sorte que l’argumentation en question 18 Trib. adm., 7 mai 2012, n° 27901 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 610.
19 Sur ce dernier point, voir : trib. adm., 26 mai 2004, n° 17314 du rôle, confirmé par Cour adm., 11 novembre 2004, n° 18278C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 610.
24n’est pas pertinente à cet égard.
La susdite conclusion n’est pas non plus énervée par l’invocation par les époux C d’un futur et hypothétique prolongement de la rue des Genêts en tant que voie desservante. En effet, outre le fait que ce projet futur et éventuel ne saurait être qualifié de voie existante ou nouvelle, le bourgmestre – à instar du juge de l’annulation – doit manifestement statuer uniquement conformément à la réglementation et aux circonstances de fait en vigueur au moment où il rend sa décision, de sorte qu’il ne saurait se prévaloir, dans le cadre de ses compétences en matière de police des bâtisses, d’une éventuelle circonstance de fait inexistante au moment où il rend sa décision.
IV) Quant aux demandes d’octroi d’une indemnité de procédure Les demandeurs sollicitent encore la condamnation de l’administration communale au paiement, à chacun d’entre eux, d’une indemnité de procédure s’élevant, d’après le dernier de leurs conclusions, à 2.500 euros, sur le fondement de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999, aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine. ».
Cette demande est cependant à rejeter, étant donné qu’il n’est pas établi qu’il serait inéquitable de laisser à la charge des demandeurs les sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens. Le seul fait, invoqué par les consorts AB, qu’après avoir annoncé, par des courriers du 16 mai 2022, son intention de procéder au retrait des autorisations du 29 avril 2021, compte tenu des susdites ordonnances du président du tribunal administratif du 25 mars 2022, le bourgmestre ait finalement décidé, en date du 19 juillet 2022, de ne pas révoquer lesdites autorisations, après avoir recueilli les observations des administrés concernés sur base de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, n’est pas suffisant à cet égard.
L’administration communale explique, en effet, de manière plausible qu’elle a finalement décidé de maintenir les autorisations en question, afin d’éviter de nouveaux recours contentieux émanant, cette fois-ci, des différents bénéficiaires de ces dernières, qui, lors d’une réunion avec les responsables communaux, auraient clairement annoncé leur refus d’accepter une éventuelle décision de retrait à intervenir.
Les époux C sollicitent, à leur tour, l’octroi, à chacun d’entre eux, d’une indemnité de procédure de 2.000 euros.
Cette demande est, elle aussi, à rejeter, au vu de l’issue du litige.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond, le déclare justifié, partant annule les décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal des 29 avril et 30 novembre 2021, telles que déférées ;
déboute les demandeurs, ainsi que Monsieur C et Madame C de leurs demandes respectives en allocation d’une indemnité de procédure ;
25 condamne l’administration communale de Kopstal aux frais et dépens.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 juin 2024 par :
Daniel Weber, vice-président, Sibylle Schmitz, juge, Michel Thai, juge, en présence du greffier Luana Poiani.
s. Luana Poiani s. Daniel Weber Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 5 juin 2024 Le greffier du tribunal administratif 26