Tribunal administratif Numéro 47297 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47297 1re chambre Inscrit le 11 avril 2022 Audience publique du 10 juin 2024 Recours formé par Monsieur …, … (Belgique), et Madame …, …, contre deux décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de police des étrangers
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 47297 du rôle et déposée le 11 avril 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Guy Thomas, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Albanie), de nationalité albanaise, demeurant à B-…, et de son épouse, Madame …, née le … à …, de nationalité albanaise, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 29 décembre 2021 refusant à Monsieur … l’octroi d’une autorisation de séjour en vue d’un regroupement familial, ainsi que de la décision confirmative sur recours gracieux du même ministre du 11 janvier 2022 ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 11 juillet 2022 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Linda Maniewski en sa plaidoirie à l’audience publique du 28 février 2024.
Le 16 février 2015, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », informa Madame … et sa famille qu’à la suite de leur demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, introduite le 6 juin 2011, et en exécution d’un arrêt de la Cour administrative du 5 février 2015, le statut conféré par la protection subsidiaire leur était accordée et qu’une autorisation de séjour valable jusqu’au 15 février 2020 leur était octroyée.
Par courrier du 14 avril 2015, le ministre informa Madame … qu’un titre de séjour « […] en qualité de protection internationale […] » lui serait délivré avec une validité du 23 février 2015 au 15 février 2020.
Le 3 juillet 2019, Madame … donna naissance à sa fille, …, à ….
1 Le 9 août 2019, elle introduisit au nom et pour le compte de sa fille une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire.
Le 12 septembre 2019, le ministre informa Madame … que le statut conféré par la protection subsidiaire était accordée à sa fille et qu’une autorisation de séjour valable jusqu’au 11 septembre 2024 lui était octroyée.
A la suite d’une demande de renouvellement de son titre de séjour introduite par Madame … le 25 novembre 2019, le ministre informa celle-ci, en date du 11 décembre 2019, qu’un titre de séjour « […] en qualité de protection internationale – protection subsidiaire […] » lui serait délivrée avec une validité du 11 décembre 2019 au 10 décembre 2024.
Par courrier du 22 janvier 2020, réexpédié le 4 février 2020, le ministre informa Madame … qu’un titre de séjour « […] en qualité de protection internationale – protection subsidiaire […] » serait délivrée à sa fille avec une validité du 18 septembre 2019 au 11 septembre 2024.
En octobre 2021, Madame … et Monsieur …, ci-après désignés par « les époux … », contractèrent mariage à … en Belgique, lieu de résidence de Monsieur …, bénéficiaire du statut de réfugié lui accordé par les autorités belges.
Par courrier de leur litismandataire du 7 décembre 2021, réceptionné le 13 décembre 2021, les époux … introduisirent auprès du ministre une demande tendant à l’octroi, à Monsieur …, d’une autorisation de séjour en vue d’un regroupement familiale, demande qui fut rejetée par décision ministérielle du 29 décembre 2021, libellée comme suit :
« […] J’accuse bonne réception de votre courrier reprenant l’objet sous rubrique qui m’est parvenu en date du 13 décembre 2021.
Je suis au regret de vous informer que je ne suis pas en mesure de faire droit à votre requête.
En effet, en application de l’article 69, paragraphe (1) de loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, le ressortissant de pays tiers peut demander le regroupement familial des membres de famille définis à l’article 70 s’il rapporte la preuve qu’il dispose de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et ceux des membres de famille qui sont à sa charge, sans recourir au système d’aide sociale.
Conformément à l’article 6, paragraphe (1) du règlement grand-ducal modifié du 5 septembre 2008 définissant les critères de ressources et de logement prévus par la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, le niveau des ressources du regroupant est apprécié par référence à la moyenne du taux mensuel du salaire social minimum d’un travailleur non-qualifié sur une durée de douze mois.
Or, votre mandante est bénéficiaire d’une allocation complémentaire qui est octroyé par le Fonds National de Solidarité et elle recourt donc au système d’aide sociale. Les 2 conditions fixées à l’article 69, paragraphe (1) de loi du 29 août 2008 précitée ne sont en conséquence pas remplies.
À titre subsidiaire, vous n’apportez pas de preuve que Monsieur … remplit les conditions exigées pour entrer dans le bénéfice d’une des catégories d’autorisation de séjour prévues par l’article 38 de la loi du 29 août 2008 précitée.
Par conséquent, l’autorisation de séjour lui est refusée en application des articles 75, point 1 et 101, paragraphe (1), point 1. de la loi du 29 août 2008 précitée. […] ».
Par courrier recommandé du 31 décembre 2021, réceptionné le 4 janvier 2022, les époux … introduisirent un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle, précitée, du 29 décembre 2021, lequel fut rejeté par décision ministérielle du 11 janvier 2022, libellée comme suit :
« […] J’accuse bonne réception de votre courrier reprenant l’objet sous rubrique qui m’est parvenu en date du 4 janvier 2022.
Je suis au regret de vous informer qu’à défaut d’éléments pertinents nouveaux, je ne peux que confirmer ma décision du 29 décembre 2021 dans son intégralité. […] ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2022, les époux … ont fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des décisions ministérielles, précitées, des 29 décembre 2021 et 11 janvier 2022.
Aucun recours au fond n’étant prévu en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation introduit en l’espèce.
En revanche, le tribunal est compétent pour connaître du recours subsidiaire en annulation, qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
Prétentions des parties A l’appui de leur recours, et en fait, les demandeurs précisent qu’ils seraient tous les deux bénéficiaires du statut de réfugié, respectivement du statut conféré par la protection subsidiaire, qu’ils se seraient mariés en date du … à … en Belgique et qu’ils auraient un enfant commun, à savoir …, née le … à …, laquelle serait elle aussi bénéficiaire du statut conféré par la protection subsidiaire.
Ils ajoutent que la situation administrative actuelle de Monsieur … rendrait le séjour de ce dernier au Luxembourg impossible au-delà d’une limite de 3 mois sur une période de 6 mois, de sorte que l’intéressé ne pourrait s’installer auprès de son épouse et de sa fille pour y mener une vie familiale normale.
En droit, les demandeurs soulèvent un défaut de motivation, sinon une motivation erronée des décisions déférées, en soutenant que le ministre aurait, à tort, soumis leur demande de regroupement familial aux conditions des articles 38 et 69 (1) de la loi modifiée du 29 août 3 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par « la loi du 29 août 2008 », et limité son analyse à leur situation financière, sans examiner leur demande à la lumière de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ci-après désignée par « la CEDH », et sans tenir compte de leurs relations familiales.
Ils font encore valoir que les décisions de refus déférées méconnaîtraient ledit article 8 de la CEDH, en ce qu’elles s’analyseraient en une ingérence disproportionnée dans leur droit au respect de leur vie privée et familiale.
A cet égard, ils reprochent au ministre de ne pas avoir tenu compte de l’intensité de leurs liens familiaux, de l’entrave à leur vie familiale que représenteraient les décisions déférées et de l’impossibilité pour eux de s’installer dans leur pays d’origine.
Ils insistent, dans ce contexte, sur le fait qu’ils seraient mariés et qu’ils auraient un enfant commun, ce qui prouverait l’existence, dans leur chef, de liens d’affectation intenses et d’une unité familiale, les demandeurs ajoutant qu’à la suite de la naissance de l’enfant …, Madame … aurait pris en location un appartement où Monsieur … les rejoindrait aussi longtemps que la loi le lui permettrait.
Par ailleurs, étant donné qu’ils seraient tous bénéficiaires d’une protection internationale, ils ne pourraient raisonnablement s’installer en Albanie, situation qui serait encore contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant ….
Ils estiment que dans ces circonstances, un refus de regroupement familial au motif de l’insuffisance ou de la nature de leurs ressources financières serait disproportionné, tout en soulignant que l’unité familiale serait un droit essentiel du réfugié et que la rupture forcée de leur vie familiale causée par les décisions déférées auraient pour eux et leur enfant commun des conséquences d’une exceptionnelle gravité, les demandeurs donnant encore à considérer qu’il se dégagerait de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, ci-après désignée par « la CourEDH », que les obligations positives que l’article 8 de la CEDH ferait peser sur les Etats contractants en matière de respect de la vie familiale devraient s’interpréter à la lumière de la Convention internationale des droits de l’Enfant du 20 novembre 1989, ci-après désignée par « la CIDE », et, notamment, de l’article 3 (1) de celle-ci, consacrant le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours.
Il soutient qu’étant donné que Madame … aurait obtenu le statut conféré par la protection subsidiaire en date du 16 février 2015 et que la demande de regroupement familial des époux … n’aurait été introduite qu’en date du 7 décembre 2021, soit au-delà du délai de 6 mois prévu par l’article 69 (3) de la loi du 29 août 2008, elle devrait remplir les conditions énoncées à l’article 69 (1) de la même loi, et notamment, d’une part, celle de disposer de ressources stables de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et ceux des membres de sa famille qui sont à sa charge, sans recourir au système d’aide sociale, conformément aux conditions et modalités prévues par le règlement grand-ducal modifié du 5 septembre 2008 définissant les critères de ressources et de logement prévus par la loi du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désigné 4 par « le règlement grand-ducal du 5 septembre 2008 », et, d’autre part, celle de disposer d’un logement approprié pour recevoir le ou les membres de sa famille.
Or, Madame … ne remplirait pas la première de ces deux conditions, étant donné qu’elle ne disposerait pas de revenus issus d’un emploi rémunéré, mais serait bénéficiaire d’une allocation complémentaire octroyée par le Fonds National de Solidarité, de sorte à recourir au système d’aide social.
Quant au moyen tiré de la violation de l’article 8 de la CEDH et dans l’hypothèse où le tribunal devait conclure à l’existence dans le chef des demandeurs d’une vie familiale, le représentant étatique fait valoir que ces derniers ne rapporteraient pas la preuve de circonstances « […] particulièrement exceptionnelles […] » qui pourraient justifier leur choix d’établir leur domicile au Luxembourg.
Il ajoute que si le tribunal devait retenir l’existence d’une ingérence dans la vie privée et familiale des demandeurs, cette ingérence serait prévue par la loi, poursuivrait des buts légitimes au sens de l’article 8 (2) de la CEDH et ne serait pas disproportionnée, alors que Monsieur … resterait en défaut de prouver qu’il ne pourrait poursuivre sa vie familiale dans un autre pays, et notamment en Belgique, où il bénéficierait du statut de réfugié et résiderait légalement.
Par ailleurs, le délégué du gouvernement soutient encore, en substance et de l’entendement du tribunal, que le ministre, en informant les demandeurs que les conditions pour l’obtention d’un titre de séjour prévues à l’article 38 de la loi du 29 août 2008 ne seraient pas remplies en l’espèce, aurait suggéré à Monsieur … la possibilité d’obtenir un titre de séjour en qualité de travailleur salarié ou encore une autorisation de séjour pour raisons privées « […] suite à une prise en charge par l’intermédiaire d’un membre de famille […] ».
S’agissant de la référence faite par les demandeurs au principe de l’unité familial, le représentant étatique fait valoir que dans le cadre de l’application de ce principe, le ministre serait investi d’un pouvoir discrétionnaire et qu’en l’espèce, l’autorité ministérielle n’aurait pas méconnu le principe de proportionnalité, alors que Madame … serait restée en défaut de prouver qu’au jour de la prise des décisions déférées, elle aurait pu accueillir son conjoint sans recourir au système d’aide sociale, et que sa situation financière aurait été susceptible de s’améliorer.
Appréciation du tribunal S’agissant, d’abord, de la légalité externe des décisions déférées, et plus particulièrement du moyen tiré d’un défaut, sinon d’une insuffisance de motivation, le tribunal relève que l’article 75 de la loi du 29 août 2008, sur le fondement duquel les décisions ministérielles déférées ont notamment été prises, renvoie, en son alinéa 2, aux règles procédurales contenues dans la section 2 du chapitre 4 de la loi du 29 août 2008 et par ce biais à l’article 109 de la même loi – non invoqué par les demandeurs – qui dispose que « (1) Les décisions de refus visées respectivement aux articles 25 et 27 et aux articles 100, 101 et 102 sont prises par le ministre et dûment motivées. La décision motivée par des raisons de santé publique est prise sur proposition du ministre ayant la Santé dans ses attributions. (2) Les motifs précis et complets d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique qui sont à la base d’une décision, sont portés à la connaissance de la personne concernée, à moins que 5 des motifs relevant de la sûreté de l’Etat ne s’y opposent. ».
En l’espèce, le tribunal constate que les décisions déférées sont motivées tant en fait qu’en droit, étant donné que dans sa décision du 29 décembre 2021, confirmée purement et simplement par celle du 11 janvier 2022, le ministre a indiqué, dispositions normatives à l’appui, les raisons qui l’ont amené à refuser de faire droit à la demande de regroupement familial lui soumise, à savoir la considération selon laquelle Madame … serait bénéficiaire d’une allocation complémentaire qui serait octroyée par le Fonds National de Solidarité, de sorte qu’elle recourrait au système d’aide sociale et que, dès lors, elle ne remplirait pas la condition de disposer de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et ceux des membres de famille qui sont à sa charge, sans recourir au système d’aide sociale, telle que prévue par l’article 69 (1) de la loi du 29 août 2008 et telle que précisée par l’article 6 (1) du règlement grand-ducal du 5 septembre 2008.
Cette motivation, qui a été complétée en cours d’instance contentieuse par le délégué du gouvernement, lequel a pris position de manière détaillée quant aux arguments des demandeurs, en ce compris leur moyen tiré de la violation de l’article 8 de la CEDH, est suffisamment précise pour permettre à ces derniers d’assurer la défense de leurs intérêts en connaissance de cause, de sorte qu’elle doit être considérée comme répondant aux exigences de l’article 109, précité, de la loi du 29 août 2008. Les contestations afférentes des époux … encourent, dès lors, le rejet, étant précisé, dans ce contexte, que la question de savoir si la motivation ainsi fournie par la partie étatique est de nature à justifier la prise des décisions déférée relève du fond du litige et sera abordée ci-après.
Quant à la légalité interne des décisions déférées, le tribunal relève qu’aux termes de l’article 69 de la loi du 29 août 2008 « (1) Le ressortissant de pays tiers qui est titulaire d’un titre de séjour d’une durée de validité d’au moins un an et qui a une perspective fondée d’obtenir un droit de séjour de longue durée, peut demander le regroupement familial des membres de sa famille définis à l’article 70, s’il remplit les conditions suivantes :
1. il rapporte la preuve qu’il dispose de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et ceux des membres de sa famille qui sont à sa charge, sans recourir au système d’aide sociale, conformément aux conditions et modalités prévues par règlement grand-ducal ;
2. il dispose d’un logement approprié pour recevoir le ou les membres de sa famille ;
3. il dispose de la couverture d’une assurance maladie pour lui-même et pour les membres de sa famille. […] (3) Le bénéficiaire d’une protection internationale peut demander le regroupement des membres de sa famille définis à l’article 70. Les conditions du paragraphe (1) qui précède, ne doivent être remplies que si la demande de regroupement familial est introduite après un délai de six mois suivant l’octroi d’une protection internationale ».
L’article 70 de la loi du 29 août 2008, qui définit les membres de la famille susceptibles de rejoindre un bénéficiaire d’une protection internationale dans le cadre du regroupement familial, dispose que : « (1) Sans préjudice des conditions fixées à l’article 69 dans le chef du regroupant, et sous condition qu’ils ne représentent pas un danger pour l’ordre public, la 6 sécurité publique ou la santé publique, l’entrée et le séjour est autorisé aux membres de famille ressortissants de pays tiers suivants :
a) le conjoint du regroupant ;
b) le partenaire avec lequel le ressortissant de pays tiers a contracté un partenariat enregistré conforme aux conditions de fond et de forme prévues par la loi modifiée du 9 juillet 2004 relative aux effets légaux de certains partenariats ;
c) les enfants célibataires de moins de dix-huit ans, du regroupant et/ou de son conjoint ou partenaire, tel que défini au point b) qui précède, à condition d’en avoir le droit de garde et la charge, et en cas de garde partagée, à la condition que l’autre titulaire du droit de garde ait donné son accord.
(2) Les personnes visées aux points a) et b) du paragraphe (1) qui précède, doivent être âgées de plus de dix-huit ans lors de la demande de regroupement familial.
(3) Le regroupement familial d’un conjoint n’est pas autorisé en cas de mariage polygame, si le regroupant a déjà un autre conjoint vivant avec lui au Grand-Duché de Luxembourg.
(4) Le ministre autorise l’entrée et le séjour aux fins du regroupement familial aux ascendants directs au premier degré du mineur non accompagné, bénéficiaire d’une protection internationale, sans que soient appliquées les conditions fixées au paragraphe (5), point a) du présent article.
(5) L’entrée et le séjour peuvent être autorisés par le ministre :
a) aux ascendants en ligne directe au premier degré du regroupant ou de son conjoint ou partenaire visé au paragraphe (1), point b) qui précède, lorsqu’ils sont à sa charge et qu’ils sont privés du soutien familial nécessaire dans leur pays d’origine ;
b) aux enfants majeurs célibataires du regroupant ou de son conjoint ou partenaire visé au paragraphe (1), point b) qui précède, lorsqu’ils sont objectivement dans l’incapacité de subvenir à leurs propres besoins en raison de leur état de santé ;
c) au tuteur légal ou tout autre membre de la famille du mineur non accompagné, bénéficiaire d’une protection internationale, lorsque celui-ci n’a pas d’ascendants directs ou que ceux-ci ne peuvent être retrouvés ».
Les articles 69 et 70 de la loi du 29 août 2008 règlent dès lors les conditions dans lesquelles un ressortissant de pays tiers, membre de la famille d’un ressortissant de pays tiers résidant légalement au Luxembourg, peut rejoindre celui-ci. L’article 69 concerne les conditions à remplir par le regroupant pour être admis à demander le regroupement familial, tandis que l’article 70 définit les conditions à remplir par les différentes catégories de personnes y visées pour être considérées comme membre de famille, susceptibles de faire l’objet d’un regroupement familial.
7 Il ressort encore de l’article 69 (3) de la loi du 29 août 2008 que lorsqu’un bénéficiaire d’une protection internationale introduit une demande de regroupement avec un membre de sa famille, défini à l’article 70 de la même loi – article qui vise au point a) de son paragraphe 1er le conjoint du regroupant –, dans un délai de six mois suivant l’octroi d’une protection internationale, il ne doit pas remplir les conditions du premier paragraphe de l’article 69, à savoir celles de rapporter la preuve qu’il dispose (i) de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et ceux des membres de sa famille qui sont à sa charge, sans recourir au système d’aide sociale, (ii) d’un logement approprié pour recevoir le membre de sa famille et (iii) de la couverture d’une assurance maladie pour lui-même et pour les membres de sa famille. Dans le cas contraire, il doit remplir cumulativement les conditions visées au premier paragraphe de l’article 69 précité.
Etant donné que Madame … a obtenu le statut conféré par la protection subsidiaire le 16 février 2015 et que la demande de regroupement familial des époux … a été introduite le 13 décembre 2021, soit bien au-delà du délai de 6 mois suivant l’octroi d’une protection internationale, tel que prévu par l’article 69 (3) de la loi du 29 août 2008, elle doit remplir les conditions cumulatives prévues par l’article 69 (1) de la même loi.
Dès lors, et dans la mesure où il est constant en cause que Madame … bénéficie d’une allocation complémentaire octroyée par le Fonds National de Solidarité, elle doit être considérée comme recourant au système d’aide social, de sorte qu’elle ne remplit pas la condition de disposer de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et ceux des membres de sa famille qui sont à sa charge, sans recourir au système d’aide sociale, telle que prévue à l’article 69 (1) 1. de la loi du 29 août 2008, ce que les demandeurs ne contestent, d’ailleurs, pas.
Il s’ensuit que c’est a priori à bon droit que le ministre a refusé de faire droit à la demande de regroupement familial des époux ….
S’agissant ensuite du moyen tiré de la violation de l’article 8 de la CEDH, le tribunal relève que celui-ci prévoit ce qui suit :
« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. ».
A cet égard, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, le principe de primauté du droit international, en vertu duquel un traité international, incorporé dans la législation interne par une loi approbative – telle que la loi du 29 août 1953 portant approbation de la CEDH – est une loi d’essence supérieure ayant une origine plus haute que la volonté d’un organe interne. Par 8 voie de conséquence, en cas de conflit entre les dispositions d’un traité international et celles d’une loi nationale, même postérieure, la loi internationale doit prévaloir sur la loi nationale.1 Partant, si les Etats ont le droit, en vertu d’un principe de droit international bien établi, de contrôler l’entrée, le séjour et l’éloignement des non-nationaux, ils doivent toutefois, dans l’exercice de ce droit, se conformer aux engagements découlant pour eux de traités internationaux auxquels ils sont parties, y compris la CEDH.2 Etant relevé que les Etats parties à la CEDH ont l’obligation, en vertu de son article 1er, de reconnaître les droits y consacrés à toute personne relevant de leurs juridictions, force est au tribunal de rappeler que l’étranger a un droit à la protection de sa vie privée et familiale en application de l’article 8 de la CEDH, d’essence supérieure aux dispositions légales et réglementaires faisant partie de l’ordre juridique luxembourgeois.3 Incidemment, il y a lieu de souligner que « l’importance fondamentale »4 de l’article 8 de la CEDH en matière de regroupement familial est par ailleurs consacrée en droit de l’Union européenne et notamment par la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial, transposée par la loi du 29 août 2008, et dont le préambule dispose, en son deuxième alinéa, que « Les mesures concernant le regroupement familial devraient être adoptées en conformité avec l’obligation de protection de la famille et de respect de la vie familiale qui est consacrée dans de nombreux instruments du droit international. La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes qui sont reconnus notamment par l’article 8 de la convention européenne pour la protection des droits humains et des libertés fondamentales et par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ».
Il suit de ce qui précède qu’au cas où la législation nationale n’assure pas une protection appropriée de la vie privée et familiale d’une personne, au sens de l’article 8 de la CEDH, cette disposition de droit international doit prévaloir sur les dispositions législatives éventuellement contraires. En ce sens également, une lacune de la loi nationale ne saurait valablement être invoquée pour justifier de déroger à une convention internationale.
Il y a, par ailleurs, lieu de rappeler à ce stade-ci des développements que la notion de vie familiale ne se résume pas uniquement à l’existence d’un lien de parenté, mais requiert un lien réel et suffisamment étroit entre les différents membres dans le sens d’une vie familiale effective, c’est-à-dire caractérisée par des relations réelles et suffisamment étroites parmi ses membres, et existantes, voire préexistantes à l’entrée sur le territoire national.5 1 Trib. adm., 25 juin 1997, nos 9799 et 9800 du rôle, confirmé par Cour adm., 11 décembre 1997, nos 9805C et 10191C, Pas. adm. 2023, V° Lois et règlements, n° 80 et les autres références y citées.
2 Voir par exemple en ce sens : CourEDH, 11 janvier 2007, Salah Sheekh c. Pays-bas, n° 1948/04, § 135, et trib.
adm., 24 février 1997, n° 9500 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Etrangers, n° 476 et les autres références y citées.
3 Trib. adm., 8 janvier 2004, n° 15226a du rôle, Pas. adm. 2023, V° Etrangers, n° 477 et les autres références y citées.
4 Voir « Proposition de directive du Conseil relative au droit au regroupement familial », COM/99/0638 final -
CNS 99/0258, 1er décembre 1999, point 3.5.
5 Cour adm., 12 octobre 2004, n° 18241C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Etrangers, n° 479 et les autres références y citées.
9 En outre, lorsqu’est en jeu l’intérêt d’un enfant, tel que c’est le cas en l’espèce, les autorités nationales doivent, dans leur examen de la proportionnalité aux fins de la CEDH, faire primer son intérêt supérieur.6 En effet, aux termes de l’article 3 de la CIDE : « 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.
2. Les Etats parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées.
3. Les Etats parties veillent à ce que le fonctionnement des institutions, services et établissements qui ont la charge des enfants et assurent leur protection soit conforme aux normes fixées par les autorités compétentes, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de leur personnel ainsi que l’existence d’un contrôle approprié. ».
L’article 9 (1) et (3) de la CIDE dispose encore que : « (1) Les Etats parties veillent à ce que l’enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l’intérêt supérieur de l’enfant. […] (3) Les Etats parties respectent le droit de l’enfant séparé de ses deux parents ou de l’un d’eux d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant. ». Suivant l’article 10 (1) de la même convention : « Conformément à l’obligation incombant aux Etats parties en vertu du paragraphe 1 de l’article 9, toute demande faite par un enfant ou ses parents en vue d’entrer dans un Etat partie ou de le quitter aux fins de réunification familiale est considérée par les Etats parties dans un esprit positif, avec humanité et diligence. Les Etats parties veillent en outre à ce que la présentation d’une telle demande n’entraîne pas de conséquences fâcheuses pour les auteurs de la demande et les membres de leur famille. ».
Il ressort des dispositions précitées que, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, l’autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Par ailleurs, l’enfant a le droit de ne pas être séparé de ses parents contre son gré, à moins que les autorités compétentes déterminent, conformément à la loi, que cette séparation est dans l’intérêt supérieur de l’enfant. L’article 9 dispose, par ailleurs, que chaque enfant séparé de sa famille a le droit de maintenir des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents sur une base régulière, sauf si cela est contraire à son intérêt supérieur. L’article 10 impose, quant à lui, aux Etats membres d’examiner une demande faite par un enfant ou ses parents en vue d’entrer dans un Etat partie ou de le quitter aux fins d’une réunification familiale « dans un esprit positif, avec humanité et diligence ».
6 CourEDH, 19 janvier 2012, Popov c. France, n° 39472/07 et 39474/07, § 139.
10 Une lecture combinée des articles 8 de la CEDH et 3, 9 et 10 de la CIDE permet partant de retenir que pour un parent et son enfant mineur, être ensemble représente un élément fondamental de la vie familiale au sens des dispositions précitées et des mesures internes qui les en empêchent constituent une ingérence dans le droit y protégé. Par ailleurs, l’intérêt supérieur de l’enfant dans les affaires de regroupement familial doit être prioritaire. Dès lors, les autorités nationales doivent attribuer à l’intérêt supérieur de l’enfant une importance prépondérante lors de l’évaluation de la proportionnalité de l’immixtion dans la vie familiale.
Le tribunal relève ensuite qu’il ressort de la jurisprudence de la CourEDH7 que dans le contexte des obligations positives comme dans celui des obligations négatives, l’Etat doit ménager un juste équilibre entre les intérêts concurrents de l’individu et de la communauté dans son ensemble. Il jouit à cet égard d’une certaine marge d’appréciation.
Il se dégage encore de la jurisprudence de la CourEDH8 que l’étendue des obligations pour l’Etat d’admettre sur son territoire des proches de personnes qui y résident varie en fonction de la situation particulière des personnes concernées et de l’intérêt général et que les facteurs à prendre en considération dans ce contexte sont les suivants : la mesure dans laquelle il y a effectivement entrave à la vie familiale, l’étendue des liens que les personnes concernées ont avec l’Etat contractant en cause, la question de savoir s’il existe ou non des obstacles insurmontables à ce que la famille vive dans le pays d’origine d’une ou de plusieurs des personnes concernées et celle de savoir s’il existe des éléments touchant au contrôle de l’immigration ou des considérations d’ordre public pesant en faveur d’une exclusion, ainsi que celle de savoir si la vie familiale en cause s’est développée à une époque où les personnes concernées savaient que la situation au regard des règles d’immigration de l’une d’elles était telle qu’il était clair immédiatement que le maintien de cette vie familiale au sein de l’Etat hôte revêtirait d’emblée un caractère précaire.
En l’espèce, le tribunal constate qu’il est constant que les demandeurs sont mariés depuis octobre 2021 et qu’ils ont un enfant commun, à savoir …, née le … à …. Par ailleurs, ils expliquent qu’à la suite de la naissance de l’enfant …, Madame … aurait pris en location un appartement où Monsieur … les rejoindrait aussi longtemps que la loi le lui permettrait.
Dans ces circonstances, et en l’absence de contestations circonstanciées de la part du délégué du gouvernement sur ce point, le tribunal retient que les demandeurs peuvent se prévaloir de relations réelles et suffisamment étroites pour pouvoir être qualifiées de vie privée et familiale effective, et ce nonobstant leur défaut de cohabitation, qui est la conséquence de l’absence, dans le chef du demandeur, d’un titre de séjour au Luxembourg, titre dont l’obtention fait justement l’objet du présent litige.
Etant donné que les décisions de refus de regroupement familial empêchent Monsieur … de rejoindre de manière durable son épouse et sa fille résidant au Luxembourg, au-delà de la durée maximale de trois mois sur une période maximale de six mois, telle que prévue par 7 CourEDH, 1er décembre 2005, Tuquabo-Tekle et autres c. Pays-Bas, n° 60665/00, § 42 ; CourEDH, 14 juin 2011, Osman c. Danemark, n° 38058/09, § 53.
8 CourEDH, 31 janvier 2006, Rodrigues da Silva et Hoogkamer c. Pays-Bas, no 50435/99, § 39 ; CourEDH, 10 juillet 2014, Tanda-Muzinga c. France, no 2260/10, § 66.
11 l’article 34 (2) de la loi du 29 août 2008, le tribunal conclut qu’il y a, en l’espèce, effectivement entrave à la vie familiale des intéressés.
Le tribunal relève ensuite que comme tant les époux … que leur fille commune … sont bénéficiaires d’un statut de protection internationale, un retour dans leur pays d’origine commun, l’Albanie, en vue d’y mener une vie familiale ne constitue pas une alternative raisonnablement envisageable.
Si le délégué du gouvernement suggère que les demandeurs pourraient s’installer en Belgique, où Monsieur … disposerait du statut de réfugié et résiderait légalement, le tribunal précise en premier lieu que la jurisprudence, précitée, de la CourEDH n’envisage que la possibilité éventuelle d’une installation dans l’un des pays d’origine respectifs des personnes concernées, et non pas dans un pays tiers où l’une de ces personnes est autorisée à séjourner, en tant que facteur à prendre en considération pour apprécier la proportionnalité d’un refus de regroupement familial.
En second lieu, le tribunal relève que la demanderesse a introduit sa demande de protection internationale au Luxembourg par l’intermédiaire de ses parents en date du 6 juin 2011, soit à l’âge de … ans, et qu’il n’est ni allégué ni a fortiori établi que depuis lors, elle aurait vécu ailleurs qu’au Luxembourg.
Ainsi, l’intéressée, âgée de … ans au moment de la prise des décisions déférées, vit au Luxembourg depuis son adolescence et y a passé toute sa vie d’adulte. Par ailleurs, sa fille y est née et y a passé les premières années de sa vie, étant encore souligné que les deux y disposent du statut conféré par la protection subsidiaire et, à ce titre, y jouissent de l’ensemble des droits y attachés.
Dans ces circonstances, le tribunal retient qu’il serait disproportionné d’exiger de la demanderesse de quitter le Luxembourg pour s’installer en Belgique – pays où certes réside son époux mais avec lequel elle n’a a priori aucun autre lien –, en vue d’y mener une vie familiale avec Monsieur … et leur fille commune, étant encore relevé qu’en tout état de cause, il n’est ni allégué ni a fortiori établi que la demanderesse disposerait d’un quelconque titre de séjour en Belgique qui lui permettrait effectivement de s’y installer.
Par ailleurs, la partie étatique n’a pas fait état de considérations d’ordre public ni d’éléments touchant au contrôle de l’immigration qui seraient de nature à faire pencher la balance en faveur d’un refus de regroupement familial, le fait que Madame … a recours au système d’aide social n’étant pas à lui seul un élément suffisant à cet égard.
Il est certes exact que la vie familiale des époux … s’est créée à une époque où ils savaient que la poursuite de cette vie familiale au Luxembourg revêtirait d’emblée un caractère précaire, alors que Monsieur … n’y a jamais disposé d’un droit de séjour pour une durée supérieure à trois mois.
Nonobstant ce constat, le tribunal conclut, compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent et, surtout, de l’intérêt supérieur de l’enfant … d’être ensemble avec ses deux parents, qu’en refusant de faire droit à la demande de regroupement familial des époux …, le ministre n’a pas ménagé un juste équilibre entre les intérêts des demandeurs 12 et de leur fille, d’une part, et ceux de l’Etat, d’autre part.
Il suit des considérations qui précèdent que les décisions déférées encourent l’annulation pour violation de l’article 8 de la CEDH, ensemble le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, tel que consacré, notamment, par l’article 3 de la CIDE.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;
au fond, le déclare justifié, partant annule les décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile des 29 décembre 2021 et 11 janvier 2022 et renvoie l’affaire au ministre actuellement compétent en prosécution de cause ;
condamne l’Etat aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 10 juin 2024 par :
Daniel Weber, vice-président, Michèle Stoffel, vice-président, Michel Thai, juge, en présence du greffier Luana Poiani.
s. Luana Poiani s. Daniel Weber Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 10 juin 2024 Le greffier du tribunal administratif 13